Al-Ahram Hebdo
Pourquoi les
Palestiniens n'accepteraient-ils pas l'occupation ?
Mohamed Salmawy
Photo Al-Ahram
Mercredi 12 août 2009
J’ai lu récemment un article dans notre presse portant
un titre d’une extrême sagesse : « Et si les Palestiniens
avaient approuvé la résolution de partage ? Et si Abdel-Nasser
avait approuvé l’offre de paix israélienne ? Et si l’Autorité et
le gouvernement palestiniens n’avaient pas été formés ?! ».
Ce titre porte d’abord une contradiction entre d’une part, le
souhait que la résolution du partage de la Palestine, adoptée
par l’Onu, ait été approuvée et d’autre part, le désir que
l’Autorité et le gouvernement palestiniens n’auraient pas été
formés. Car l’approbation de la résolution de partage aurait,
pour les tenants de cet avis, éviter la guerre arabo-israélienne
de 1948 et toutes les autres guerres qui l’ont suivie pour
libérer la terre occupée, alors que la non-formation de
l’Autorité et du gouvernement palestiniens se traduirait par la
poursuite de la guerre de libération.
Le titre exprime ensuite et avec brio cette «
sagesse » à rebours que l’on retrouve chez d’aucuns, surtout
après que l’événement fut révolu et devenu de l’histoire. Ainsi
voyons-nous certains « sages » sortir à chaque fois que la
situation se complique pour dire : si les Arabes avaient reconnu
Israël dès le départ, ils auraient sûrement évité toutes ces
guerres. Et de souhaiter que Gamal Abdel-Nasser ait mis de côté
les espoirs nationaux des peuples arabes qu’il incarnait et pour
lesquels il a milité et qu’il ait conclu une paix avec Israël,
au lieu d’œuvrer pour libérer les territoires arabes ...
Cette même logique ou « sagesse » dirait : et
si Sadate avait accepté, au même titre, l’occupation du Sinaï et
n’avait pas déclenché la guerre d’Octobre 1973 qui l’a libéré ?
Accepter le fait accompli qu’impose Israël et qu’incarne cette
maxime disant « et si nous avions choisi la résolution du
partage, ou si Abdel-Nasser avait approuvé la paix », est
totalement en contradiction avec l’approbation de la guerre
d’Octobre qui a refusé ce statu quo et qui est venue pour le
changer.
En dépit de tout cela, nous disons qu’il
s’agit là de propos « sages » qui placent leur auteur au-dessus
du sentiment national arabe qui a refusé de renoncer à sa terre,
à son foyer et à ses fermes au profit de colons étrangers venus
de l’extérieur vers un pays dans lequel ils n’ont pas été nés et
qu’ils n’ont jamais connu auparavant.
D’aucuns avanceraient que cette maxime « sage
» est injuste car elle traite les idéaux et les principes avec
la logique du fait accompli. Elle ne reconnaît pas que refuser
de renoncer à la patrie ou à une partie de la terre est une
question de principe. D’autant plus que nous n’avons jamais
entendu qu’elle a été imposée à un quelconque Etat qui a dû
renoncer à la moitié de sa terre au profit d’un autre Etat qui
va y établir son territoire. Mais cette maxime a pour point de
départ que notre force à cette époque ne nous permettait pas
d’objecter et donc nous aurions dû nous soumettre à tout ce qui
nous était dicté.
D’autres mettent en doute la « sagesse »
cachée derrière cette maxime en avançant qu’elle juge
l’événement selon les circonstances d’aujourd’hui et non pas
selon celles qui régnaient au moment où l’incident a eu lieu en
1947. C’est-à-dire à l’heure où la résolution du partage a été
adoptée. A l’époque, les Arabes avaient un contrôle total de
leurs terres en Palestine. Ce constat ne les incitait guère à
renoncer de plein gré à toute leur patrie ou à la moitié de
leurs terres aux immigrants étrangers envers lesquels l’Occident
avait un sentiment de culpabilité. L’Occident a voulu les
compenser aux dépens de ceux qui n’étaient pas du tout coupables
à leur égard. Si les dirigeants arabes avaient fait cette
concession injuste et sans précédent dans l’Histoire, ils se
seraient transformés de leaders vaincus en traîtres qui
devraient être taxés de haute trahison par les générations
ultérieures.
Accepter cette logique « sage », qui appelait
les Arabes aux temps des crises d’accepter sans discussion tout
ce qui leur avait été imposé depuis le partage de la Palestine
jusqu’à la paix, et tout ce qui leur est imposé à tout moment,
équivaudrait à demander aux Palestiniens aujourd’hui d’approuver
l’occupation de leurs territoires en Cisjordanie et à Gaza, le
blocus que leur imposent les forces de l’occupation israélienne,
ainsi que l’effusion du sang des enfants, la destruction des
écoles et des hôpitaux afin de rectifier les précédentes erreurs
des Arabes qui ont refusé de renoncer à leurs terres au profit
des immigrés venus de l’étranger.
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Publié
le 12 août 2009 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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