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Enquête

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Un
gendarme armé jusqu’aux dents
Aliaa Al-Korachi
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Aides
militaires. L’Etat hébreu est le principal bénéficiaire
des assistances militaires américaines, Washington voulant
assurer sa suprématie face à tous les pays arabes réunis.
Photo Al-Ahram
Mercredi 8 août 2007
Israël reste
toujours l’enfant gâté de Washington. C’est une réalité
que personne ne peut nier. L’Etat hébreu s’est taillé
la part du lion dans les assistances militaires que Washington
vient d’annoncer récemment : 30 milliards de dollars sur dix
ans, soit une augmentation de 25 %. On passe de 2,4 milliards à 3
milliards par an. C’est une assistance militaire de taille qui
vient ainsi d’être attribuée à Israël, alors que ce
pays est considéré comme le plus avancé de la région dans tous
les domaines d’armement. Rien d’étonnant si l’on songe. On
est témoin d’un soutien permanent américain à Israël dans
les forums internationaux, faisant rejeter les résolutions
condamnant Israël aux Nations-Unies. On observe aussi
l’attribution des plus grandes aides financières, le tout
justifié par des prétextes et arguments. Mais quand il s’agit
d’assistance militaire, le monde arabe ne peut que se
poser des questions : ces armes sont destinées à combattre les
Arabes, les Palestiniens notamment. La preuve en est ces hélicoptères
de combat Apache et Blackhawk et ces chars Merkava qui sont utilisés
quotidiennement pour tirer sur des civils palestiniens ou qui ont
servi contre les Libanais l’été dernier. Tous font partie de
l’arsenal fourni à Israël grâce à l’aide des Etats-Unis.
Aujourd’hui, les
Américains et les Israéliens prétendent que la situation dans
la région est encore plus trouble qu’avant. En conséquence,
les aides militaires doivent augmenter, elles aussi plus
qu’avant. Selon eux, cette augmentation se justifie du fait
qu’« Israël fait face à une menace sur son existence et doit
être capable de se défendre par lui-même ». Ce n’est qu’un
grand mythe. Le fait de considérer Israël comme un éternel
agressé n’est qu’une falsification de la réalité.
N’est-ce pas lui qui occupe les territoires palestiniens et
arabes ? Mais Washington ne trouve pas de honte à déclarer
solennellement à chaque fois qu’il attribue des aides
militaires à l’Etat hébreu son « engagement à assurer la
suprématie militaire et technologique d’Israël ».
C’est une phrase qui a été à maintes fois répétée par les
Administrations américaines différentes. Le premier ministre
israélien, Ehud Olmert, a d’ailleurs souligné que le président
George W. Bush lui avait donné des assurances concernant le
maintien « de l’avantage qualitatif » entre Israël et les
pays arabes de la région.
La diplomatie américaine
a toujours été fondée sur l’engagement américain d’assurer
le droit d’Israël à l’existence dans des frontières sûres
et reconnues et qu’un Israël fort est une condition sine qua
non pour l’instauration de la paix dans la région. Commençant
par Johnson, à la fin des années 1960 jusqu’à George Bush,
dont l’époque marque un record dans l’assistance militaire
pour Israël. Pour Mamdouh Attiya, expert militaire, « c’est
tout à fait curieux que parmi les fondements de la stratégie
d’un pays se trouve la sécurité d’un autre ». Une sécurité
assurée par tous les moyens. Selon Mohamad Abdel-Salam, analyste
militaire au Centre d’Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS)
d’Al-Ahram, Washington vise actuellement à reconstituer
l’arsenal militaire israélien mis à mal par la dernière
guerre du Liban. Conserver toujours l’arsenal israélien a
toujours été la politique américaine. En 1974, après la guerre
d’Octobre 1973, les Etats-Unis ont aussi augmenté leur aide
militaire d’un taux considérable, un record. Et l’on
n’oubliera jamais ce pont aérien ouvert durant la guerre
pour fournir des armes à Israël.
Au détriment de
la loi
Alors, pour assurer
la suprématie militaire d’Israël, celui-ci est devenu le
principal bénéficiaire des aides américaines dont les deux
tiers s’orientent vers le secteur militaire.
C’est une aide
inconditionnelle qui échappe même à la loi américaine. En
effet, il existe la loi sur le contrôle des exportations des
armes (AECA), qui cite que le gouvernement ne devrait pas donner
d’aide militaire à un pays qui viole des lois internationales
ou des droits de l’homme. Celles-ci sont transgressées en
permanence par Israël.
En 2001, un rapport
du département d’Etat sur les droits de l’homme indique : «
Les unités de sécurité israéliennes ont souvent employé la
force excessive contre les manifestants palestiniens, dont des
tirs à balles réelles au cours de la deuxième Intifada, tout
particulièrement d’hélicoptères Apache et Cobra, ainsi que de
chasseurs-bombardiers F-16 pour des opérations allant de l’exécution
sommaire de dirigeants palestiniens à la destruction de locaux
administratifs de l’Autorité palestinienne ». Le pire encore
dans cette affaire c’est qu’Israël a maintes fois utilisé
des armes expérimentales dans les territoires palestiniens .
Outre les aides
militaires, il y a plusieurs formes de coopération militaire
entre les deux pays. La facilité de l’accès à la technologie
américaine la plus sophistiquée et la moins partagée, les F-16
fournis en abondance par les Etats-Unis et pour lesquels Israël
est le premier client mondial. Le Jéricho 2 qui peut atteindre
tous les pays de la région, jusqu’à l’Iran. Des manœuvres
communes, des centres de recherches, des échanges de
renseignements et d’informations militaires sont d’autre
figures de cette coopération.
Bénéficiant
largement de l’assistance et de la coopération américaine,
l’industrie de défense israélienne se situe au 5e rang
mondial. Et là, les subventions ne manquent pas : par exemple,
625 millions de dollars pour développer et déployer le missile
antimissile Arrow, 1,3 milliard pour la mise au point de l’avion
Lavi, 200 millions pour construire le char d’assaut Merkava et
130 millions de dollars pour réaliser un système laser
antimissile. Ce qui pose la question de savoir quelle est
l’intention réelle des Etats-Unis derrière le versement de
tous ces milliards de dollars dans la technologie militaire
israélienne, laquelle se trouve en compétition directe avec
celle des Américains.
Pour Mamdouh Attiya,
l’objectif est vu sur trois échelles. « Le proche ou
l’urgent, c’est de sauvegarder la sécurité d’Israël. A
moyen terme c’est la prévention contre tout danger qui pourrait
venir du côté de l’Iran ». A plus long terme, c’est de
former un énorme stock d’armes. « Avec l’approche de leur
retrait de l’Iraq, les Etats-Unis risquent de perdre leur présence
directe dans la région. Alors à côté de quelques bases
militaires dans certains pays du Golfe, Israël devient un pilier
important dans la région, comme un entrepôt d’armes à servir
dans les cas d’urgence pour Washington », conclut Attiya.
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Publié avec l'aimable
autorisation de AL-AHRAM Hebdo

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