Opinion
Les Africains ne
savent pas
Ahmed
Halfaoui

© Ahmed
Halfaoui
Mardi 25 octobre
2011
Les
Africains n'ont pas de bonnes
chaînes-TV, de bons journaux, et ne
savent pas trop où aller sur Internet,
quand ils y ont accès. Leurs chaînes
sont archaïques, croient toujours que la
bonne vieille langue de bois est encore
efficace et que leurs programmes
soporifiques sont regardés. Les journaux
ne sont pas beaucoup lus et pour ceux
qui les lisent ils n'offrent le plus
souvent que le ton des dépêches
d'agences. Alors, les Africains
regardent les télévisions de là-bas, qui
offrent plein de choses confortables
pour les yeux. Des matchs de haut
niveau, des films récents et bien faits
et…des informations aux belles images,
rapides, digérées, commentées et
illustrées. Donc ils ne peuvent pas
savoir ce qui risque de les atteindre,
en bien ou en mal. Pour deux raisons. La
première est que la langue de bois ne
les nourrit pas de la réalité et que
l'information de là-bas est faite pour
qu'ils ne sachent rien de ce qui puisse
leur faire du mal. La seconde est qu'ils
n'ont aucun moyen de pallier la chose,
s'il leur arrive de penser à le faire,
malgré tout. Par conséquent, ils ne
sauront pas ce qu'a dit François Copé,
s'il leur arrive de savoir qui c'est,
sur la nouvelle politique africaine de
la France. Sinon ils auraient risqué de
réagir. Le monsieur Copé a dit que
«Cette nouvelle politique (…) c'est
celle que le président français Nicolas
Sarkozy a menée durant la crise
ivoirienne, comme d'ailleurs, dans un
registre très différent, il a pu le
faire en Libye». En passant, on peut lui
reconnaître qu'il sait qu'en Libye cela
passe plus difficilement qu'en Côte
d'Ivoire. Il y a une raison
fondamentale, voire vitale, que les
Africains sachent sur ce qui se passe.
Le monsieur parle d'eux. Il dit qu'il y
a «… en Côte d'Ivoire comme en Libye une
mission d'abord au service des peuples
concernés…» Les Africains doivent être
informés de ça et être les premiers à
savoir qu'il y a une «mission» en
leur direction. Eh bien, ils ne le
sauront pas, jusqu'à ce que la terre se
dérobe sous leurs pieds et que des flots
de haines séparent en ennemis mortels,
les enfants d'un même pays. Des «bons»
d'un côté, des «méchants» de l'autre.
Ces catégories, ils pourront les
identifier grâce à ces mêmes
télévisions, à la belle cosmétique, où
défileront des «opposants» et des
«spécialistes» de leur pays et qui
leur expliqueront ce qu'il faut faire et
de quel bord il faut être. Des dizaines
de milliers de morts plus tard, sur un
pays en ruine, la Banque Mondiale, le
Fonds monétaire International et
d'autres institutions du même acabit
viendront, comme en Libye, travailler
avec «les nouvelles autorités à un plan
de relance économique», un plan qui
impliquera les «experts» des «grandes
démocraties», toujours soucieuses du
bien-être des Africains et des peuples
qui leur ressemblent. D'ailleurs, pour
preuve, la visite en Algérie du
secrétaire d'Etat-adjoint américain pour
les Affaires du Proche-Orient et
l'Afrique du Nord, qui a pour but avoué
de savoir auprès de Bouteflika «quelle
était la meilleure façon d'aider (la
Libye) à avoir une bonne transition». Et
là, c'est encore assez gentil de
solliciter un Africain. Car d'habitude
ils décident tous seuls de ce qu'il y a
à faire. Les Africains ne savent pas ce
qui se passe autour de leur avenir et
cela durera tant qu'ils ne seront pas
informés.
Article publié sur
Les Débats
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