Opinion
Egypte : plutôt la
place des USA que celle des Frères
Ahmed Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Dimanche 25 août 2013
Quoi qu’il en soit c’est bien
l’exceptionnelle mobilisation populaire
qui a obligé l’armée au coup d’Etat. Les
frères musulmans ou « pro-Morsi », comme
les qualifient la presse atlantiste,
n’ont pas bougé. Pis encore pour eux,
ils n’ont même pas eu la capacité de
défendre leurs locaux, ceux de leur
parti, contre l’irrépressible déferlante
du mécontentement. Durant les semaines,
où se précisait la montée en flèche du
niveau de la revendication contre le
président en poste, rien n’est venu
montrer ne serait-ce qu’un simple
équilibre dans l’occupation de l’espace
public. A ce moment là ce sont surtout
les Etats-Unis qui s’agitaient et
faisaient le forcing auprès des leaders
de la contestation anti-Frères
musulmans, dont ils voulaient un retrait
de ses revendications et une acceptation
d’un dialogue, dont Mohamed Morsi
tracerait les contours et qui ferait
gagner du temps, du moins ferait baisser
la pression sur le pouvoir en place. Et
ce n’est pas faute d’avoir essayé que
John Kerry, le chef de la diplomatie
étatsuniennes et l’ambassadrice de la
Maison-Blanche au Caire ont échoué à
casser la dynamique en marche. Contre
leurs pires attentes ils ont retournés
l’opinion des Egyptiens contre leur pays
et exacerbé leur hostilité à son égard.
Aujourd’hui ce ne sont plus les
syndicalistes ou les anti-impérialistes
traditionnels qui sont de la partie,
c’est toute la société qui identifie la
politique de Washington à celle qui a
conduit l’Égypte à la catastrophique
situation économique et sociale qu’elle
est en train de vivre. Dans le même
temps que se sont révélées les
accointances entre les Frères musulmans
et les Etats-Unis. Fait qui a renforcé
l’animosité contre la Confrérie et sa
mise au ban de la société. Nous sommes
désormais loin de ce jour où le
président Barak Obama, sourire aux
lèvres, tenait son « discours aux
Arabes », à partir du Caire. C’était en
2009. Un discours truffés de boniments.
Le même Obama, surnommé « Osama », est
caricaturé en Oussama Ben Laden, le chef
d’Al Qaîda assassiné par les forces
spéciales que le Potus a envoyées au
Pakistan pour cette mission. La boucle
est bouclée. Le jeu trouble et cynique
est décrypté. L’Egypte entière participe
et il n’y fait plus bon, pas seulement
d’afficher une quelconque sympathie
vis-à-vis des yankees, mais de ne pas
rejoindre le camp de ceux qui les
fustigent et les somment de ne pas
s’ingérer dans les affaires égyptiennes.
Sans compter ceux qui demandent de
rejeter la fameuse « aide » accordée au
pays et à l’armée, depuis qu’Annouar
Assadate a signé les accords de camp
David et mis la souveraineté égyptienne
à la disposition de la géostratégie
étatsunienne. Se pose alors le plus
grave échec des Etats-Unis depuis leur
défaite au Vietnam et en Asie du
Sud-est. Ils assistent impuissant à
l’effondrement du système de pays mis en
place autour de l’Egypte en tant que
pièce maîtresse dans la région. Dès lors
quid de cette Ligue arabe ? Quid de tous
les plans de remodelage du Moyen-Orient
autour de la suprématie de l’entité
sioniste ? Quid de l’isolement de l’Iran
et de l’endiguement de l’avancée de la
Chine et de la Russie ? Autant de
questions et d’autres encore qui
alimentent les cauchemars d’un empire
qui a surestimé ses capacités à tout
soumettre à sa volonté, y compris les
peuples qui n’ont pas faits partie des
paramètres pris en compte par ses
stratèges.
Article publié sur
Les Débats
© 2013 Les Debats
Le sommaire d'Ahmed Halfaoui
Le dossier
Egypte
Les dernières mises à jour
|