Opinion
La fausse mort de
Marx
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Jeudi 22 novembre
2012
En
assistant au démantèlement des
bureaucraties staliniennes, les centres
capitalistes ont proclamé la «mort de
Marx». Marx serait mort parce que ses
prétendus disciples auraient eu tort. La
confirmation de la nouvelle leur est
venue par la débandade des partis dits
communistes, disciples de Moscou, qui
ont soit disparu, soit vu leurs
effectifs réduits à quelques
irréductibles, indécrottables militants.
S'ouvrait, alors, l'ère de la
«libre-entreprise» triomphante et des
«experts» du marché au verbe haut et à
l'autorité incontestée.
Le monde
sombrait dans le fatalisme et des foules
de plus en plus nombreuses se
réfugiaient dans les religions. On a vu
ainsi l'avènement des gourous de tous
bords, dont les déclamations portées par
les télévisions satellitaires étaient
devenus les nouveaux référents de gens
en mal de perspectives terrestres.
Evangélisme, islamisme et autres
«solutions» ont fait florès. «Marx est
mort», qui expliquait le monde et le
système qui en faisait un enfer, qui
représentait le cauchemar des vendeurs
d'illusions libérales. Seulement, Marx
pouvait-il mourir par le seul fait de
l'échec d'une révolution, qui avait fini
par dégénérer après avoir donné des
sueurs froides aux spoliateurs et aux
prédateurs ? C'était aller trop vite en
besogne. La preuve du contraire est
venue par la crise qui frappe le
«marché», ce «dieu» tout-puissant, dont
la «main invisible» serait créatrice de
prospérité et veillerait à l'harmonie
économique universelle. Une crise dont
Marx, le premier, a fourni les
instruments d'analyse et en a démontré
la nécessité, tant que le capitalisme,
en tant que mode de production sociale,
durera.
Du coup, de
plus en plus de gens se sont mis à le
lire ou à le relire ou à déconstruire
méthodiquement l'idéologie libérale. Les
«experts», eux, avaient disparu de la
scène, pour autant qu'ils aient pu
fournir des explications sur la
catastrophe qui s'abattait sur l'emploi
et sur la vie de milliards d'êtres
humains. Eux, qui ont tant chanté les
promesses d'un avenir fait de prospérité
et de développement sans entraves, sont
restés sans voix, impuissants devant la
machine qui jette dans la misère des
fournées de travailleurs et de victimes
de la spéculation de toutes sortes. Ceux
qui ne connaissent pas Marx font du
marxisme, en produisant une critique
plus ou moins radicale du système, dont
ils ne reconnaissent plus la «fiabilité»
et auquel ils n'accordent plus un
caractère naturel, en tentant pour le
moment de lui trouver une alternative
moins douloureuse pour l'humanité.
C'est ce
qui a pu faire que le mouvement «Occupy
Wall Street» ait pu cibler de façon
précise le centre du mal qui ronge le
monde ou que naisse un débat sur la
véritable nature de la démocratie,
accompagné d'une défiance vis-à-vis des
élections. Devant, se profile une
relecture du réel, plus riche, plus
avertie à la lumière du désastre qui a
détruit la planète. Une relecture que la
mort décrétée de Marx n'empêchera pas,
si nous considérons les bouleversements
en cours dans les bastions du
«développement» et de la «civilisation»
où la bataille dominants/dominés, la
lutte de classes, tant redoutée par les
possédants, a pris ses quartiers et ne
semble pas près de s'estomper.
Article publié sur
Les Débats
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