Opinion
Leonarda et les
«réfugiés du printemps»
Ahmed Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Samedi 19 octobre 2013
La France
de François Hollande continue de
confirmer la continuité de la politique
de celle de Nicolas Sarkozy. Un ministre
de "gauche" a remplacé un ministre de "
droite " et la saga continue. La chasse
aux étrangers, la chasse aux Roms, ces
pestiférés de l'Europe, se poursuit
allègrement. Ils menaceraient les "
équilibres " du pays. Trop d'étrangers
déjà ! La coupe serait pleine et
déborderait même. Il faut être dans
l'air du temps, donner le change, ne pas
laisser le terrain à la LePen, la
Martine qui arrive au galop et qui
risque de rafler les emplois jusque-là
réservés. L'expulsion des trop pleins
déclarés doit satisfaire à la doxa qui
enfle, celle d'une jeune collégienne
devient une nécessité, elle est sortie
manu militari du territoire. Le ministre
de l'éducation nationale, Vincent
Peillon, nous explique doctement le
pourquoi. " Nous n'avons jamais été sur
une ligne différente. Il faut de la
fermeté, parce qu'il est tout à fait
naturel qu'un pays comme le nôtre,
généreux, puisse réguler ses flux… ",
C'est ce qu'il a dit. La France souffle
un peu d'être allégée de la présence de
Leonarda. Et il n'y aura pas les
habituels frileux des droits de l'Homme
pour s'offusquer ou même donner un avis
sur la question. Ils sont trop occupés à
prospecter des causes " utiles ",
ailleurs, comme en Chine, en Iran ou
chez les "dictatures". Ce seront donc
les camarades de la jeune fille qui vont
s'occuper de rappeler les bonnes
manières à ceux qui les gouvernent.
Surtout que le président, avant d'être
élu bien sûr, a pris le " ferme
engagement ", s'il est élu à la
présidence de la République, " à mettre
fin dès mai 2012 à la rétention des
enfants, et donc des familles avec
enfants ". La main sur le cœur, il s'est
épanché comme il a pu sur le sujet et il
a ajouté ce pathétique couplet : " La
protection de l'intérêt supérieur des
enfants doit primer. " Cela a dû pas mal
faire voter les pétris d'humanisme.
Aujourd'hui, ils disent " nous sommes
contre Sarkozy, mais maintenant c'est
pire ". C'est ce qui anime la fronde des
jeunes contre le parjure et contre
l'hypocrisie. Le même président, rêvant
de reconquista de l'empire, en Syrie, a
accueilli 3 000 Syriens et a annoncé en
accueillir 500 autres dans les mois à
venir. Nous ne savons pas si ces flux
sont prévus ou non dans la régulation
invoquée. Par contre, il paraît évident
que cette "régulation" renferme une
signification plus complexe qu'il n'y
paraît. L'arithmétique démographique ne
tenant plus, il faudra percer le deux
poids deux mesures entre la Rom et les
milliers de réfugiés bienheureux
syriens, qui ne compromettent pas comme
la fille les "équilibres" de la
population de l'Hexagone. Leurs demandes
seront d'ailleurs "examinées avec une
particulière bienveillance", a dit
François Hollande, ce qui aura pour
issue que l'Office français pour les
réfugiés et apatrides (Ofpra) réponde
"favorablement dans 95 % des cas". Alors
pourquoi Leonarda serait-elle un surplus
social et pas les Syriens ? Première
réponse, les Syriens sont " des réfugiés
du printemps ". La fille non. Cette
réponse suffit en fait. Le problème
obéit au double problématique,
colonialiste et ségrégationniste.
Projection à l'extérieur d'une économie
en mal d'expansion et containment à
l'intérieur des populations qui
constituent le maillon faible du front
social.
Article publié sur
Les Débats
© 2013 Les Débats
Le sommaire d'Ahmed Halfaoui
Les dernières mises à jour
|