Opinion
La Côte d'Ivoire
démocratique
Ahmed Halfaoui

Alassane Ouattara
Lundi 15 août 2011
Comme on le
sait, la Côte d'ivoire fait désormais
partie des nations certifiées
démocratiques, donc normalisée, et
appréciée comme telle par la
«communauté internationale». Peu importe
qu'elle soit transformée en
butin de guerre, par des chefaillons qui
se la sont partagé. A ce titre, la
visite la semaine dernière du
nouveau Président ivoirien, Alassane
Ouattara, aux Etats-Unis a fait l'objet
de commentaires particulièrement
positifs. On y fait part
«d'une rencontre avec Barak Obama» et
«les deux hommes auront un entretien en
tête à tête, suivi d'un entretien de
groupe». Il n'en a rien été. Le
président étasunien avait d'autres chats
à fouetter que de faire la causette à un
Africain qu'il a lui-même aidé à
installer à la tête de son pays. S'il
l'avait fait, le nouveau promu aurait
réussi le deuxième exploit du genre pour
un ivoirien, après feu Houphouët Boigny.
Ouattara a quand même vu Barak Obama.
Celui-ci a fait le geste de recevoir en
gros quatre présidents africains, le
béninois Boni Yayi, le guinéen Alpha
Condé, le nigérien Mahamadou Issoufou et
l'ivoirien. La rencontre a eu lieu dans
une petite pièce de la Maison-Blanche,
presque entre deux portes. A ce
propos et comme il fallait bien dire
quelque chose, le Potus a servi ce
discours : «Cette rencontre est
l`occasion de souligner le soutien de
l`Administration des USA à des
démocraties en développement, de mettre
en valeur nos partenariats avec ces
pays, et de discuter de l`élaboration
d`institutions démocratiques fortes, du
développement économique et d`autres
sujets régionaux». Nous pouvons admirer,
ici, le sens de la formule, quand il
faut qualifier des pouvoirs qu'il
faut promouvoir. Notre chouchou des
grandes démocraties devait aussi
rencontrer la communauté ivoirienne aux
USA, au Four season hôtel, Pennsylvania
avenue. Mal lui en prit, c'est une foule
peu amène qui l'attendait pour lui
rappeler les crimes de ses amis au pays.
Il a bien sûr préféré renoncer.
Comme son service protocole semble trop
peu nourri des réalités, mais plutôt
intoxiqué par les soutiens
officiels, il ne savait pas qu'il
fallait éviter le Sénat. Une volée de
bois de vert du sénateur Jim Inhofe l'y
attendait. L'explication serait, selon
la critique ordinaire, dans le fait que
les États-Unis «ne veulent pas se faire
complices des dérives totalitaires» du
régime de Ouattara. En vérité c'est à
Ponce Pilate qu'il faut se référer. Ce
serait plus proche de la réalité. Car la
certification du régime ivoirien s'est
faite en connaissance de cause. Il
serait naïf de croire qu'était ignorée
la nature des forces rebelles à Laurent
Gbagbo. Amnesty
International rapporte qu'un
demi-million d'Ivoiriens déplacés sont
toujours empêchés de rentrer chez eux
«en raison du climat de peur» qui règne
sur le pays. À Duékoué, des centaines de
civils ont été tués à la fin du mois de
mars 2011 et le bilan n'est pas encore
clos. En juin dernier, l'ONU s'est
déclarée particulièrement préoccupée par
la violence des forces armées du
président Alassane Ouattara dans le sud
du pays et a déploré l'usage
d'armes lourdes pour le maintien de
l'ordre. Tout ça n'étant pas très joli,
il serait démocratiquement mal venu de
ne pas faire semblant de rappeler à
l'ordre celui qu'on a défendu bec et
ongles au nom de la démocratie.
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Publié le 15 août 2011 avec l'aimable
autorisation de l'auteur.
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