Opinion
Le capitalisme
recouvre sa normalité originelle
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Dimanche 12 mai 2013
En 2002
dans un discours, Georges W Bush, le
fils, apprend au monde que «les grandes
luttes du XXe siècle entre la liberté et
le totalitarisme se sont terminées par
une victoire décisive des forces de la
liberté et par la définition d'un modèle
unique et durable pour assurer les
succès nationaux : la liberté, la
démocratie et la libre entreprise». Il a
aussi prédit que la «paix» sera propagée
«en encourageant la formation de
sociétés libres et ouvertes sur tous les
continents». Pour ça, on aurait dû
deviner ce qu'il voulait dire depuis la
tragédie yougoslave, y compris à quelle
«paix» il faisait allusion. Son père, en
1991, avait préparé la chose. Il avait
annoncé que «les Etats-Unis sont appelés
à conduire le monde hors des ténèbres et
du chaos vers la promesse de jours
meilleurs». Ce n'était pas encore
évident pour tous les entendements, sauf
pour les milliards d'êtres humains
périphériques qui ont goûté à la chose,
juste après la «chute du mur de Berlin»
et l'intrusion triomphale du Fonds
monétaire international (FMI) et de la
Banque mondiale, accompagnés d'une
flopée d'«experts», venus opérer les
«ajustements structurels» des économies
«socialistes» ou «dirigées». Dans son
discours, Bush junior avait aussi dit
qu'au «XXIe siècle, seuls les pays
résolus à protéger les droits de l'homme
fondamentaux et à garantir la liberté
politique et économique seront capables
de mobiliser le plein potentiel de leurs
populations et d'assurer leur prospérité
future…» Ce message s'adressait à ceux
qui allaient connaître la
«démocratisation» larguée par les avions
de l'OTAN ou par ce qui est en cours en
Syrie, la «révolution» à la sauce qataro-wahhabite.
Cependant, les pays du Sud n'étaient pas
les seuls à être appelés à «garantir la
liberté politique et économique». Un
cataclysme s'est abattu sur l'Europe. Le
développement économique et social ne
prémunissait pas contre la chose.
L'entreprise, là aussi, a besoin de plus
de liberté. La disparition du «bloc
soviétique» et l'affaiblissement des
formations politiques se réclamant du
communisme ne pouvaient rien signifier,
sans une révision de toutes les données
sociales dues à plus d'un siècle de
confrontation entre le capitalisme et le
mouvement ouvrier. Elle est en cours,
sans que rien ne semble pouvoir
l'arrêter. Ce fut d'abord les services
publics, par touches successives, qui
sont «dégraissés», jusqu'aux aides aux
nécessiteux. Ensuite, c'est le code du
travail qui est soumis à des
«réajustements». En France, par exemple,
il y a de «nouveaux droits pour les
salariés». C'est-à-dire qu'un l'Accord
national interprofessionnel (ANI)
redéfinit le code du travail, où les
contrats de travail à durée indéterminée
(CDI) ne sont plus de mise, et instaure
«plus de souplesse de gestion des
effectifs par les employeurs». Les
licenciements sont désormais autorisés
par la loi. L'ANI n'est pas encore mis
en vigueur, que ce sont les jours de
repos qui sont pointés du doigt, parce
qu'ils se sont mis comme par
extraordinaire à plomber la
«croissance». Si rien ne se passe de
probant en termes de réaction populaire,
ils ne seront plus qu'un bon vieux
souvenir dans un délai plus ou moins
court. Un retour au XIXe siècle, époque
bénie, de laquelle devait rêver Valéry
Giscard d'Estaing quand il disait : «Un
pays qui ne travaille pas, qui passe son
temps à aller d'une vacance à une autre,
d'un jour férié à un pont et ainsi de
suite, ne peut pas avoir des résultats
formidables.» Il est en voie d'être
satisfait. Le grand nombre, en même
temps qu'il perd sa sérénité et ses
certitudes, découvre ce que signifie le
capitalisme dans sa plénitude.
Article publié sur
Les Débats
Copyright ©
2001-2011- MAHMOUDI INFO Sarl - Tous
droits réservés.
Reçu de l'auteur pour publication
Le sommaire d'Ahmed Halfaoui
Les dernières mises à jour
|