Egypte
Rupture de contrat
Ahmed
Fettehah
Mercredi 25 avril 2012
Gaz naturel.
Avançant un problème de retard de
paiements, l’Egypte a interrompu ses
exportations vers Israël. Le
gouvernement sioniste parle de «
violations des accords de paix ».
Seul le Conseil suprême des forces
armées a le pouvoir de prendre une telle
mesure. L’Egypte a unilatéralement mis
fin au contrat d’exportation de gaz qui
la lie à Israël. La nouvelle a été
dévoilée par Ampal-American Israël
Corporation, une entreprise partenaire
d’East Mediterranean Gas Co. (EMG).
Cette dernière est en charge de
l’exportation du gaz égyptien.
Ampal, qui détient
12,5 % d’EMG, a affirmé dans un
communiqué de presse que le gouvernement
de M. Ganzouri avait demandé à ce que «
l’autorité publique du pétrole et la
Holding égyptienne du gaz (deux
entreprises publiques, ndlr) fassent
savoir à EMG qu’elles mettent fin au
contrat d’approvisionnement et d’achat
entre les deux parties ».
Selon le même
communiqué, EMG considère cette
tentative de rupture de contrat «
infidèle et de mauvaise intention », et
que « EMG, Ampal et ses autres
partenaires sont en train d’étudier leur
réaction juridique et vont solliciter
les gouvernements impliqués ».
Selon le côté
égyptien, Israël a accumulé des arriérés
de paiement de 100 millions de dollars
ces derniers mois. Mohamad Choaib,
directeur exécutif de la Holding du gaz
égyptien, précise à l’Hebdo que « la
décision a une motivation économique.
Nous avons annulé l’accord d’exportation
parce qu’ils n’ont pas respecté le
calendrier des paiements lors des
derniers mois ». Il affirme que «
l’Egypte a prévenu ses partenaires à
maintes reprises, mais en vain ». La
ministre égyptienne de la Coopération
internationale, Fayza Aboul-Naga, a
déclaré que les accords avec Israël
peuvent être revus si une hausse des
prix du gaz, conformément au prix
international, est prise en
considération par le côté israélien.
Quant au ministre de l’Electricité,
Hassan Younès, il a souligné que la
quantité de gaz non exportée vers Israël
sera utilisée pour combler la pénurie
sur le marché local.
Réactions
contradictoires
Les réactions du côté
israélien sont contradictoires. Yuval
Steinitz, ministre des Finances, a
exprimé son inquiétude face à cette
mesure « surprise ». Dans un entretien à
Radio Israël, il affirme que la décision
peut avoir de sérieuses conséquences
politiques et économiques liées à
l’accord de paix de Camp David.
Le ministre israélien
des Affaires étrangères, Avigdor
Lieberman, est allé plus loin, proposant
de renforcer la présence militaire
israélienne aux frontières avec
l’Egypte. Lieberman aurait affirmé au
quotidien israélien Maariv que « le cas
égyptien est devenu plus alarmant que le
cas iranien ».
Le premier ministre,
Benyamin Netanyahu, s’est contenté de
rappeler que l’accord était toujours en
vigueur et que le différend n’était que
d’ordre juridique. Son porte-parole a
affirmé sur Twitter : « Nous ne
considérons pas cette coupure de gaz
comme une motivation politique ». Il
qualifie la crise de « dispute
commerciale entre une entreprise
israélienne et une autre égyptienne ».
L’Egypte se garde
elle aussi de donner à cette décision
toute motivation politique. Elle a par
ailleurs ouvert la porte à une
résolution prochaine du différend à
travers les propos de Hani Dahi,
président de l’autorité publique du
pétrole. Ce dernier a affirmé que
l’Egypte était prête à discuter toute
proposition de règlement concernant les
arriérés de paiements. « Nous avons
effectué plusieurs consultations
juridiques avant de prendre la décision
», a-t-il assuré lors d’une intervention
télévisée sur Al-Jazeera.
D’après Dahi, une
rupture de contrat est envisageable si
l’une des deux parties ne respecte pas
ses engagements. « Nous avons pris
toutes nos précautions légales pour que
l’Egypte ne doive pas indemniser Israël
en cas de rupture de contrat », dit-il.
En d’autres termes, il cherche à éviter
qu’Israël puisse invoquer une rupture
abusive de contrat.
L’accord
d’exportation a toujours été fortement
critiqué en Egypte. Moubarak et
plusieurs de ses collaborateurs font
actuellement face à des accusations de
corruption liées à ce contrat. Parmi eux
se trouvent Hussein Salem, un associé
d’EMG, ainsi que l’ex-ministre du
Pétrole, Sameh Fahmi.
En 2010, un verdict
du tribunal administratif avait interdit
au gouvernement d’exporter du gaz à
Israël, appelant à réviser le contrat.
Depuis, l’Egypte s’est engagée à
négocier des prix plus élevés, mais n’a
jamais interrompu ses exportations vers
Israël.
Les opposants à
l’accord, qui fournit à Israël plus de
20 % de ses besoins en gaz, ont accusé
le gouvernement de financer Israël dans
sa guerre contre les Palestiniens.
Depuis la révolution de janvier 2011, le
gazoduc transportant le gaz vers Israël
a été 14 fois l’objet d’explosions. Le
gouvernement n’a toujours pas arrêté les
auteurs de ces sabotages à répétition.
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reproduction et de diffusion réservés. ©
AL-AHRAM Hebdo
Publié le 30 avril
2012 avec l'aimable autorisation de
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