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Mercredi 10 février 2010
Palestine.
Le flou persiste sur une éventuelle saisine par la Cour Pénale
Internationale (CPI) du dossier des crimes de guerre commis par
Israël contre Gaza fin 2008. Ban Ki-moon a, en effet, émis des
doutes sur la crédibilité des enquêtes menées par Israël et l’Autorité palestinienne.
Plus d’un an après l’offensive israélienne
contre Gaza, la question des crimes qui ont eu lieu au cours de
ce conflit continue à faire des
remous. Et les résultats des enquêtes
menées de part et d’autre restent insuffisants. La guerre menée
par l’Etat hébreu contre la bande de Gaza fin 2008 a fait plus
de 1 400 morts côté palestinien, dont des centaines de civils.
C’est probablement la seule information sûre à l’heure qu’il
est. Du moins pour les Nations-Unies, qui accusent les deux
parties, à savoir Israël et l’Autorité palestinienne, de ne pas
avoir mené avec justesse leurs enquêtes concernant ce conflit.
Ce week-end, le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon,
a ainsi mis en doute la crédibilité
des enquêtes diligentées par Israël et l’Autorité palestinienne
sur les accusations de crimes de guerre durant le conflit de
2008-2009 dans la bande de Gaza.
Dans un message adressé à l’Assemblée
générale de l’Onu, Ban reconnaît que les deux camps examinent le
comportement des soldats israéliens d’un côté et des activistes
palestiniens de l’autre, comme le demandait une résolution votée
en novembre dernier par l’Assemblée. Mais quant à savoir si ces
enquêtes sont bien « indépendantes, crédibles
et conformes aux normes
internationales », il a choisi de réserver son jugement. « Aucun
jugement ne peut être établi sur l’application de la résolution
par les parties concernées », écrit le diplomate sud-coréen dans
cette lettre, qui accompagne des documents remis par Israël
et l’Autorité palestinienne sur leurs
enquêtes respectives.
Accusé d’avoir eu recours à une force
excessive et de ne pas avoir
distingué les combattants des civils, Israël répond que les
activistes se sont servis des populations comme de boucliers
humains. Une réponse qui cache mal les forces disproportionnées
utilisées par les deux parties, et dont témoigne le nombre de
victimes des deux parties : 1 400
côté palestinien contre 13 seulement côté israélien.
Sans parler de l’usage par Israël des bombes
à phosphore contre les civils, des engins explosifs interdits
internationalement.
Blocage de l’administration américaine
La réaction palestinienne aux allégations
israéliennes ne s’est pas fait attendre. Le ministre de la
Justice du gouvernement Hamas, Mohamad Faraj Al-Ghoul, a affirmé
que les « allégations » selon lesquelles les groupes armés
palestiniens avaient tué ou blessé des civils israéliens dans ce
conflit, avaient « besoin d’être soutenues par des preuves ».
De plus, le Hamas veut que l’Onu transfère
le dossier de l’offensive israélienne sur la bande de Gaza à
l’hiver 2008-2009 à la CPI. C’est ce
qu’a déclaré samedi à l’AFP Mohamad Faraj Al-Ghoul.
Il a cependant dit s’attendre à un
blocage de l’administration américaine dans ce processus.
Le 27 janvier, le Hamas avait absous les
groupes armés palestiniens, dont son bras armé, de tout crime de
guerre durant le conflit à Gaza, en
indiquant avoir mené ses propres enquêtes conformément aux
recommandations du rapport Goldstone, commissionné par l’Onu. Le
rapport Goldstone recommande la saisine de la CPI si Israël et
les Palestiniens, accusés de « crimes de guerre » voire de «
crimes contre l’humanité » durant la guerre, n’annonçaient pas
d’ici fin janvier leur intention de mener des enquêtes «
crédibles » sur la manière dont le conflit a été conduit.
Dans un rapport officiel remis fin janvier à
l’Onu, Israël s’est efforcé de réfuter les accusations de la
commission Goldstone et a refusé jusqu’à présent la création
d’une commission d’enquête réclamée par l’Onu.
Aussi bien l’Etat juif que le Parti
islamiste du Hamas, qui contrôle la bande de Gaza, ont rejeté
toute accusation de crimes de guerre. Le Hamas a indiqué
avoir remis à l’Onu une réponse rejetant toutes les accusations
portées contre ses combattants.
Ce document ne figure pourtant pas dans le
dossier envoyé par Ban Ki-moon à l’Assemblée générale.
Quant à Israël, il
avait initialement refusé de coopérer avec le juriste
sud-africain Richard Goldstone, auteur du rapport sur le conflit
que l’Etat juif a bien sûr jugé erroné. Mais Israël a fini par
décider de fournir des informations au secrétaire général de
l’Onu. Et Tel-Aviv, qui ne voit que ce
qu’il veut voir, s’est félicité cette semaine de la déclaration
du secrétaire général, estimant qu’elle tenait compte d’un
rapport communiqué par Israël. Dans ce
rapport, Israël affirme avoir ouvert des enquêtes sur 150
incidents séparés, dont 36 font l’objet d’une enquête
criminelle. Deux officiers supérieurs ont reçu un blâme et une
seule condamnation a été prononcée, selon
l’armée : contre un soldat qui avait volé une carte de
crédit. C’est dire à quel point l’enquête
israélienne est loin d’être juste.
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AL-AHRAM Hebdo
Publié
le 10 février 2010 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
