Centre Palestinien
d'Information
Interview exclusive
Madame Al-Halaïqa : Le droit au retour ne tombe jamais
dans la nullité
Photo CPI
22 mai
2008
Al-Khalil - CPI
Nous vivons la soixantième commémoration de
la Nakba, la catastrophe de 1948. En cette occasion,
l'envoyé de notre Centre Palestinien d'Information (CPI) a
rencontré madame Samira Al-Halaïqa. Elle est député dans le
Conseil Législatif Palestinien. Elle représente le groupe « Le
changement et la réforme » qui représente à son tour le
mouvement de la résistance islamique Hamas. Madame Al-Halaïqa
nous donne cette interview pour parler de la scène palestinienne
actuelle et de l'occupation israélienne. En voilà la traduction
:
La Nakba, soixante après
CPI :
Soixante ans après la Nakba, comment voyez-vous la cause
palestinienne ?
Al-Halaïqa :
De 1992 à nos jours, la question palestinienne a vu plusieurs
rebondissements. Ces rebondissements ont failli faire un grand
mal aux principes palestiniens. A titre d'exemple, on a accepté
de négocier la question de la ville d'Al-Quds, celle des
réfugiés et celle de la résistance. On ose pratiquer des
pourparlers directs avec l'Entité Sioniste. Il en sort des
projets destinés à liquider la question palestinienne. Il y a eu
l'accord d'Oslo. Et dernièrement, la feuille de route. Et
aujourd'hui, soixante ans après la Nakba, la communauté
internationale tourne le dos au peuple palestinien et à ses
droits. Elle se met en conflit avec ses réalisations. La
politique internationale se range aux côtés de l'occupation. En
dépit de tout cela, le peuple palestinien décide de résister et
de combattre l'occupation, de travailler pour retourner dans sa
patrie, de ne pas céder ses principes, surtout de ne pas
céder aux plans internationaux visant à radier la Palestine de
la carte du Monde.
CPI :
A votre avis, l'Entité Sioniste a enfin obtenu la sécurité,
après soixante ans de guerres sans fin ?
Al-Halaïqa :
Soixante ans d'occupation et l'Entité Sioniste ne connaît aucune
sorte de sécurité sociale. Elle n'arrête pas de pousser vers
l'escalade ses agressions contre le peuple palestinien. Cette
escalade pousse pour sa part vers le haut le nombre de
solidaires avec la résistance palestinienne et avec les droits
du peuple palestinien, notamment parmi les Arabes et les
Musulmans. Tout un chacun constate que l'Entité Sioniste ne
pratique, depuis soixante ans, que la politique d'agression,
d'assassinat, d'invasion, de guerre. Pour faciliter la tâche,
cette Entité essaie de semer, partout dans les pays arabes,
l'anarchie et les problèmes. C'est pour cette raison que le
sentiment d'animosité ne cesse de s'agrandir. Le sentiment
d'insécurité chez les Israéliens ne cesse par conséquent de
reculer. Pendant soixante ans de sa vie, l'Entité pratique
toujours une politique de guerre offensive. Cependant, les deux
dernières décennies, elle n'a eu aucune victoire notable dans la
région. Au Liban, toutes ses guerres ont été vouées à l'échec
par la résistance. Elle a échoué dans ses guerres contre la
résistance palestinienne. Sa campagne destinée à faire une
percée pour entrer dans des pays arabes a aussi connu un
flagrant échec.
CPI :
Justement, en parlant des Arabes, l'Entité sioniste a-t-elle pu
pratiquer une vraie ouverture au Moyen-Orient ?
Al-Halaïqa :
L'Entité sioniste a essayé de trouver des collaborateurs dans
les systèmes arabes actuels, en s'ingérant dans leurs affaires
internes. Elle a même essayé d'y couper des politiques à ses
mesures. Heureusement, elle a buté contre un front populaire
refusant toute normalisation avec un pays agressif et occupant
en défiant les pactes signés entre les dirigeants de ces pays
arabes et l'usurpateur sioniste.
La visite de Bush
CPI :
Sous quel angle regardez-vous la visite de Bush en Palestine
occupée pour fêter la catastrophe du peuple palestinien ?
Al-Halaïqa :
Durant ses deux mandats, ce n'est qu'en cette année (2008) que
Bush explicite sa vraie politique quant à l'Etat d'occupation.
Il est venu pour prier dans leur temple. Il exprime son amour
éternel à cette Entité usurpatrice. Bush et Israël ne font alors
qu'un. C'est maintenant que la politique de Bush en Iraq, en
Palestine, au Soudan, en Afghanistan, devient claire. Ces propos
exprimés en Israël n'ont rien fait que plus de mal à ceux qui
avaient cru que l'administration américaine pourra aider les
Palestiniens à résoudre leurs problèmes. La politique de Bush
alignée au profit de l'occupation représente une vraie gifle à
ceux qui croient en lui.
CPI :
Récemment, le gouvernement de l'occupation
a publié des décisions destinées à regrouper les familles
palestiniennes. Quel regard portez-vous à ces décisions ?
Ont-elles une quelconque influence sur le droit au retour ?
Al-Halaïqa :
Nous sommes avec le droit de tout Palestinien à retourner à sa
patrie, par tous les moyens. Nous espérons que ces décisions
n'aient pas d'effets négatifs sur le droit au retour des
réfugiés. Or, ce droit ne supporte aucune sorte de concession.
Le retour reste le retour, pas moins. Une compensation
financière ne pourra le remplacer. Nous espérons que ce droit ne
soit pas être soumis à un quelconque référendum. Et mêmes ces
décisions ont été détournées en interdisant aux familles
concernées d'entrer en Palestine.
Le
changement et la réforme
CPI :
Le groupe « Le changement et la réforme » était sorti victorieux
des élections législatives. Deux ans après, qu'est-ce que cette
victoire a donné pour la scène palestinienne ?
Al-Halaïqa :
Les députés élus démocratiquement, ceux du
groupe « Le changement et la réforme » en particulier, sont
souvent empêchés de mener à bien leur rôle. Un bon nombre de
membres du Hamas sont enfermés dans les prisons sionistes. En
dépit de tous ces agissements, les occupants n'ont pu obtenir
aucune reconnaissance de leur occupation, et ils n'ont pu faire
adhérer plus de gens à leurs accords qui font du tort à la cause
palestinienne. Tout au contraire, le groupe reste défenseur de
la résistance. Il le considère comme un droit légitime du peuple
palestinien. Et il n'a fait aucune concession sur les principes
intouchables du peuple. Le groupe, par le seul fait de son
existence sur la carte politique, a fait barrage à beaucoup de
projets destinés à mettre la cause palestinienne en réel danger.
L'avenir
CPI :
Quel regard portez-vous sur l'avenir de la cause palestinienne,
surtout après les nouvelles tendances envers le projet islamique
international ?
Al-Halaïqa :
Pendant ces quatre dernières années, les Etats-Unis et l'Entité
ont essayé de redessiner la région du Moyen-Orient de façon
inutile, seulement pour leurs intérêts. En vain. Cette politique
n'a fait qu'attirer des ennuis aux Américains et aux Israéliens.
Prenons la guerre menée par l'Entité sioniste contre le Liban et
celle menée plus tard par les Américains contre l'Iraq. Elles
sont totalement vouées à l'échec. Et la guerre sioniste menée
contre le peuple palestinien n'a fait que laisser la main libre
au Hamas sur la bande de Gaza. Il faut aussi citer que
l'administration américaine et l'Entité sioniste changent leurs
politiques envers les pays arabes, de temps à autre. De temps à
autre, elles attisent le feu à l'intérieur du Liban, de la
Palestine et d'autre pays. Mais enfin de compte, c'est la
résistance des peuples qui se renforce.
CPI :
Pendant les soixante ans suivant la Nakba, cette nomination de
Nakba, la catastrophe, a-t-elle changé de sens ?
Al-Halaïqa :
A mon avis, rien n'a changé. Le peuple palestinien vit la Nakba,
la catastrophe, quotidiennement. Pire, avant, il y avait une
attention internationale pour protéger le peuple palestinien et
ses intérêts contre l'occupation. Il y avait une sorte de
solidarité avec sa soif de liberté. Aujourd'hui, ces mêmes pays
adoptent des lois et adoptent des législations au profit de
l'occupant ! Au profit de la politique d'assassinats et de
déportation. Toujours sous prétexte de protéger la sécurité de
l'Etat de l'occupation. Hier, la politique de cet occupant était
de chasser tout Palestinien de sa terre et sa patrie.
Aujourd'hui, sa politique consiste à tuer les Palestiniens et à
les liquider définitivement. Avant, les crimes contre le peuple
palestinien se tramaient dans les coulisses. Aujourd'hui, la
Nakba est pratiquée contre lui publiquement !
« Les grands meurent, les petits
oublient »
CPI :
Ben Gourion, premier ministre de l'Entité sioniste, avait lancé
cette phrase : « Les grands meurent, les petits oublient ».
Croyez-vous que ce mauvais présage soit toujours valable,
surtout qu'il y a actuellement un accord général sur le respect
du droit au retour ?
Al-Halaïqa :
Autant le temps passe, autant les générations palestiniennes et
arabes s'attachent encore plus fortement à leur droit au retour.
L'occupation agressant sans cesse leur terre le leur fait
rappeler, sans cesse. Et les crimes quotidiens de l'occupant les
poussent à plus de résistance. Et la résistance massive du
peuple palestinien reflète son attachement au droit au retour.
Et la mobilisation populaire massive pour commémorer la Nakba
n'était qu'un coup donné à ce mauvais présage.
Enfin, chaque génération palestinienne hérite
de la clef de sa maison volée, une tente de réfugiés et un tas
de souffrances. Comment voulez-vous qu'elle oublie ?! Cela est
le cas des petits. Et pour ce qui est des grands, ils ne sont
pas morts. Ils sont pris racine dans la terre, pour toujours
pousser comme des plantes résistantes contre les occupants.
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