Palestine - Solidarité

   



UN TRAMWAY NOMME COUPABLE
Rapport du PARC

 

 

Le business, le libre-échangisme peuvent-ils tout justifier ? Le droit international doit-il être sacrifié sur l’autel de la concurrence ? Ce sont les questions que pose la participation de deux entreprises françaises dans l’exploitation du tramway de Jérusalem. La construction et l’exploitation de la première ligne de tramway de la ville qui desservira les colonies de Pisgat Ze’ev, de French Hill, les reliront au Mont Herzl via la route de Jaffa (dans le centre de la ville). La construction d’un tramway occasionne souvent des perturbations dans la vie des riverains, mais dans ce cas le problème est plus profond : symbolique, politique, il touche à la clé de voûte du règlement du conflit : Jérusalem, la ville trois fois sainte.

  • Jérusalem, la ville sainte au cœur du conflit

Avec la création d’Israël par une résolution de l’Assemblée Générale des Nations Unies en novembre 1947, la question du devenir de Jérusalem est posée. Le projet onusien prévoit que la totalité de Jérusalem et de ses environs (jusqu’à Bethléem) soit placée sous autorité internationale, pour permettre le libre accès des croyants de chaque religion à leurs lieux saints. Mais dans le projet sioniste, elle doit devenir la capitale de l’Etat juif. Les forces sionistes ont pris par la force l’Ouest de Jérusalem et vont occuper cette partie de la ville dont ils font la capitale symbolique de l’Etat. Lors de la guerre de 1948 contre les pays arabes, Israël s’empare de 85% de Jérusalem (la partie Ouest de la ville ainsi que les villages environnants). 4% de la ville ont été considérés comme un no man’s land, où se sont établis les bureaux des Nations Unies. Entre 64 000 et 80 000 Palestiniens ont été chassés des quartiers Ouest de Jérusalem, et la plupart des villages environnants ont été vidés de leur population ou totalement détruits. La zone Est (6km²) est placée sous contrôle jordanien, et l’Ouest (68km²) sous occupation Israélienne dans les accords de cessez-le-feu de 1949. En 1959, Israël décide unilatéralement que Jérusalem Ouest n’est plus un territoire occupé mais fait partie intégrante de l’état d’Israël et est déclarée capitale. La communauté internationale n’a jusqu’à présent jamais reconnu cette annexion. Après la guerre de 1967, Israël occupe la totalité de la bande de Gaza et de la Cisjordanie et redéfinit les frontières de Jérusalem qui comprennent à présent toute la partie Est ainsi que les villages environnants ce qui correspond dès lors à 108km² (soit 28% de la Cisjordanie). La résolution 2253 des Nations Unies demandait à Israël de revenir sur toutes les dispositions pouvant altérer le statut de Jérusalem. Ce qu’Israël n’a à ce jour pas fait.p;

  • Jérusalem annexée et colonisée

Comme on vient de le voir Jérusalem est une ville annexée de fait, et dont la réunification et le statut de capitale sont contraires au droit international et de ce fait non reconnus par la communauté internationale.

Outre cette annexion, Jérusalem est aussi en proie à une colonisation massive tant dans sa partie Est que dans les territoires environnants. Les colonies autour de Jérusalem forment un bloc de colonisation appelé Ma’ale Adumim qui comprend 33 000 colons et qui occupant plus de 22 000 dunums (soit 22km²) des terres palestiniennes de Abu Dis, Ezariya, Isawiya, At Tur et ’Anata. En août 2005, au même moment où le désengagement de Gaza était surmédiatisé, 3500 nouvelles constructions de maisons étaient annoncées dans le bloc de Ma’ale Adumim (source : Haaretz). D’autres colonies sont présentes dans la partie Est de Jérusalem et remettent en cause la continuité territoriale entre Jérusalem et les villages palestiniens environnants. C’est le cas pour la French Hill et Pisgat Ze’ev qui se situent dans le prolongement de Jérusalem-Est. A ce jour Jérusalem-Est – compte tenu des colonies qui lui sont juxtaposées, compte plus d’Israéliens que de Palestiniens alors que selon le droit international il s’agit d’un territoire palestinien.

  • Un tramway coupable

Cette colonisation est interdite par l’article 49 de la Quatrième Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en période de conflit qui dit que : « La Puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d'une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle. ». Cette illégalité a été consacrée par la résolution 465 du Conseil de sécurité en date du 1er mars 1980 qui demande à Israël de «… démanteler les colonies de peuplement existantes et, en particulier, de cesser d’urgence d’établir et planifier des colonies de peuplement dans les territoires arabes occupés depuis 1967, y compris Jérusalem». Dans sa décision sur l’illégalité du Mur israélien, la Cour Internationale de Justice de la Haye a rappelé à tous les Etats signataires leur obligation à faire appliquer les dispositions de cette Convention. Pourtant Israël continue son œuvre de colonisation et tente d’en assurer la pérennité sans réaction internationale réelle.

Le projet de ligne de tramway reliant Jérusalem et les colonies de French Hill et Pisgat Ze’ev participe à ce projet. Il s’agit en effet, tout comme avec la construction du Mur, de mettre en place des infrastructures durables qui prennent comme fait accompli l’existence des colonies israéliennes en terre palestinienne. En outre en facilitant l’accès des colons à Jérusalem, ce tramway permettra un nouveau développement de ces zones d’habitations, notamment pour des personnes à revenu modéré qui n’ont pas de véhicule personnel.

modéré qui n’ont pas de véhicule personnel. Cette construction participe donc à l’action illégale de modification du territoire occupé par la puissance occupante, puisqu’il s’agit de bâtir de nouvelles infrastructures dans un territoire considéré par le droit international comme occupé. En outre, cette construction vise à fournir un service à la population occupante au détriment des palestiniens qui n’auront pas accès à ce service.

  • La complicité française

Ce que nous dénonçons ici n’est pas seulement la construction dans l’illégalité de ce tramway, puisque les violations du droit international par Israël ne sont pas une nouveauté. Nous dénonçons la complicité de la France dans cette affaire. Cette complicité est double : il s’agit à la fois de celle des entreprises Alstom et Connex, et de la complicité de l’Etat.

Ce que nous dénonçons ici n’est pas seulement la construction dans l’illégalité de ce tramway, puisque les violations du droit international par Israël ne sont pas une nouveauté. Nous dénonçons la complicité de la France dans cette affaire. Cette complicité est double : il s’agit à la fois de celle des entreprises Alstom et Connex, et de la complicité de l’Etat.

Au-delà de cette possible sanction juridique, ces sociétés s’exposent à la sanction de l’opinion publique. En effet, dans une période où les citoyens et les consommateurs demandent une plus grande responsabilité aux entreprises, Alstom et Connex se rendent coupable du soutien à un régime répressif violant les droits de l’homme, et le droit reconnu (par les résolutions des Nations Unies) d’un peuple à son autodétermination. Ces deux entreprises étant cotées en bourse, elles risquent donc de voir les fonds d’investissements (principalement les fonds éthiques et équitables, mais aussi les fonds de certaines communautés religieuses) boycotter leurs titres. Enfin elles s’exposent à un mouvement populaire de boycott de leurs infrastructures et de pression sur les gouvernements pour que les marchés publics leur soient refusés.

L’Etat Français semble vouloir se désinvestir de toute responsabilité dans cette affaire. Lors de la visite du Président de l’Autorité Palestinienne en France le 17 octobre dernier, le Président Jacques Chirac lui avait promis de se pencher sur le sujet, après que le ministre des affaires étrangère Nasser Al-Qidwa avait exprimé sa « vive préoccupation » face à ce sujet. Toutefois on s’empressait d’ajouter dans l’entourage du président que deux principes entraient en opposition : la libre concurrence, et le respect de la France des engagements internationaux, notamment quant au statut de Jérusalem (source : Le Monde). Ce paravent de la libre concurrence semblerait vouloir faire croire que l’Etat n’est nullement responsable des agissements des sociétés privées. Ce qui d’un point de vue strictement juridique est vrai.

Pourtant… Pourtant l’Etat a été très impliqué dans cette affaire. Lors du déplacement de l’ancien Ministre des Affaires Etrangères Michel Barnier en Israël en octobre 2004, celui-ci a fait des déclarations montrant l’implication du gouvernement dans la collaboration économique entre les deux pays rappelant tout d’abord que « La France, l'Union européenne sont, Monsieur le Ministre, votre premier partenaire économique et commercial. 33 % de vos exportations, 53 % de vos achats, concernent la communauté européenne, et nos liens politiques, culturels, scientifiques, humains sont très importants » puis affirmant qu’il souhaitait « amplifier notre [celui de la France] engagement économique ». Pour étayer son propos il rappelait que « Beaucoup d'entreprises dont [il avait] rencontré les responsables, Veolia, Alstom et d'autres, sont prêtes à cet engagement »¹. Et c’est avec fierté qu’il annonçait le lendemain lors d’une visite à l’université de Tel Aviv que « le groupe Alstom, qui installe la première ligne de tramway de Jérusalem » et que « Ces investissements traduisent la confiance que la France et ses entreprises ont dans la vitalité de votre société »². A cette époque le gouvernement Raffarin s’était empressé de se féliciter de l’obtention par Alstom du marché du tramway de Jérusalem, marché important pour le commerce extérieur français.

Que dire également de la présence de l’ambassadeur de France en Israël, Gérard Araud, dans le bureau du premier ministre Ariel Sharon, pour superviser la signature du contrat de construction du Tramway de Jérusalem, remporté par le consortium français « City Pass » (Alstom et Connex.). Ce projet avait déjà reçu l'assentiment, lors de sa visite en Israël, du ministre de l'industrie Patrick Devedjian. C’est donc bien toute la diplomatie française qui s’est impliquée pour la réussite de ce projet à la fois prometteur du point de vue des relations commerciales, mais aussi bienvenue dans une période de rapprochement franco-israélien.

  • Notre appel

Nous demandons tout d’abord au gouvernement français de réaffirmer son respect du droit international qui ne reconnaît ni les colonies illégales israéliennes, ni l’annexion de Jérusalem-Est.

Nous lui demandons par la même occasion de mettre fin à son soutien à l’égard de ces deux entreprises qui se rendent coupables de complicité de violation du droit international.

Nous demandons aux citoyens de se lancer dans une campagne de boycott de ces entreprises qui soutiennent la colonisation des terres palestiniennes. Ce boycott peut prendre la forme d’un boycott des services de transport appartenant au groupe Connex (voir liste ci-dessous pour les pays francophones) ou la forme d’un boycott des titres boursiers de ces entreprises.

Nous appelons les citoyens à user de leur pouvoir de pétition en adressant leurs lettres de protestation, ou leur pétition :

  • Au Président de la République

Par mail : http://www.elysee.fr/ecrire/mail.htm

Ou par voie postale (votre courrier est alors dispensé d'affranchissement), à l'adresse suivante Monsieur le Président de la République

Palais de l'Elysée 55, rue du faubourg Saint-Honoré 75008 Paris

  • Au Premier Ministre français :

Par mail:

http://www.premier-ministre.gouv.fr/fr/p.cfm?ref=6959

  • au Ministère des Affaires Etrangères :

Parmail: http://www.france.diplomatie.fr/courrier/default.asp?code=actu

Faites signer des pétitions sur les marchés, autour de vous, contre cette nouvelle victoire de la loi du plus fort sur le droit du plus faible et envoyez les pétitions au Président de la République.

Diffusez cette information et cet appel contre Connex et Alstom dans votre communauté local et parmi les consommateurs utilisant leurs services.

Ecrivez et téléphonez à Connex pour demander leur retrait immédiat du projet. Préparez des boycotts locaux des entreprises et services si Connex refuse de retirer son soutien au projet (pour les numéros de téléphones et adresses voir www.connex.net ).

 

Belgique :

  1. Exploite les services de bus en partenariat avec l’établissement public de Lijn.

Canada :

  1. Connex dirige le réseau de transport de bus rapide YRT Viva dans la region de York.

  2. Connex possède GVS et exploite les services de transport de Montréal.

France :

  1. Tramways, et bus à Rouen, Saint-Etienne, Nancy et Bordeaux.

  2. Le réseau de bus de plus de 40 villes incluant Nice et Toulon (y compris Creabus).

  3. Détient 60% de l’entreprise de Fret à l’aéroport Charles De Gaulle.

Liban :

  1. Exploite la ligne majeure de bus au Liban appelée Connex Liban.

Suisse :

  1. Dirige les bus urbains de la ville de Genève, ainsi qu’une compagnie charter, à travers sa filiale Dupraz Bus Genève.

Connex détient également 50% d’Eurolines, une entreprise majeure de car en Europe.

 


 Source : PARC
 http://www.pal-arc.org/french/media/report9.html


Avertissement
Palestine - Solidarité a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Proche Orient.
L' auteur du site travaille à la plus grande objectivité et au respect des opinions de chacun, soucieux de corriger les erreurs qui lui seraient signalées.
Les opinions exprimées dans les articles n'engagent que la responsabilité de leur auteur et/ou de leur traducteur. En aucun cas Palestine - Solidarité ne saurait être tenue responsable des propos tenus dans les analyses, témoignages et messages postés par des tierces personnes.
D'autre part, beaucoup d'informations émanant de sources externes, ou faisant lien vers des sites dont elle n'a pas la gestion, Palestine - Solidarité n'assume aucunement la responsabilité quant à l'information contenue dans ces sites.

Retour  -  Ressources  -  Débat  -  Communiques  -  Accueil