Nouvelle vidéo de B’Tselem :
une ambiguïté létale
B’Tselem a présenté dans une nouvelle vidéo,
les témoignages de soldats se rapportant aux « Règles
d’ouverture de feu » (Open Fire Regulations : OFR).
Les témoignages montrent que les soldats reçoivent des ordres
ambigus sur le moment où ils doivent utiliser leurs armes ce qui
a causé, dans beaucoup de cas, des tirs superflus et des pertes
de vie.
Dans un des passages, un soldat parle de la
politique de l’armée à Hébron : « Les
Palestiniens ouvrent le feu... en réponse, l’armée prend une
position de contrôle et installe des mitrailleuses. Notre boulot,
en tant que mitrailleurs, est de riposter... les mitrailleuses ne
sont pas des armes très précises. Tu tires la première salve,
tu regardes ce que tu as touché et en se basant sur cela, tu
ajustes... il y a des cas où l’armée a ouvert le feu avec des
mitrailleuses et a touché le toit d’un hôpital avec une
grenade... »
« Tous ces ordres sont basés
sur une conception toute simple : il est inacceptable que les
Palestiniens tirent et que nous, l’armée, nous ne répliquions
pas... [Les soldats] se vengeraient. Aller à Abu Sneineih ou
Harat a-Sheikh et tirez à bout portant... et quand cela n’aide
pas, tirez sur les biens comme moyen de dissuasion ».
Dans le passé, l’OFR dans les Territoires occupés
n’a couvert que la mise en application de la loi. Mais, avec
l’éruption de l’Intifada fin septembre 2000, Israël a
instauré des changements significatifs dans les règles en les
rendant plus ambiguës. L’armée n’a plus fourni aux soldats
des copies des règles écrites et cela a grandement augmenté les
types de situation dans lesquelles les soldats avaient le droit
d’utiliser leurs armes. Selon les chiffres de B’Tselem, depuis
le début de l’Intifada, les forces de sécurité israéliennes
ont tué au moins 1 806 Palestiniens qui ne prenaient pas part aux
hostilités au moment où ils ont été tués. L’aspect imprécis
des ordres donnés aux soldats sur l’instant où ils pouvaient
ouvrir le feu est l’une des causes principales du nombre élevé
des victimes.
L’armée change les procédures
pour enquêter sur la mort de Palestiniens.
Le
chef d’état-major israélien, Dan Halutz, a récemment changé
les procédures d’enquêtes internes sur les cas où des soldats
ont tué des civils palestiniens qui ne prenaient pas part aux
hostilités. Après le début de l’Intifada fin septembre 2000,
le bureau du principal conseiller juridique a décidé d’arrêter
la procédure existante par laquelle une enquête de la police
militaire était automatiquement ouverte pour chaque cas où un
Palestinien avait été tué alors qu’il ne prenait pas part aux
hostilités. Depuis lors, les enquêtes de la police militaire
n’ont été ouvertes que dans des cas exceptionnels. En vue du
nombre minuscule d’enquêtes ouvertes comparé au nombre de
morts, B’Tselem et l’association pour les Droits civils en
Israël (ACRI) ont soumis une requête à la Haute Cour de Justice
afin que l’armée rétablisse la politique qu’elle avait
appliquée avant la deuxième Intifada. Dans une déclaration à
la Haute Cour, le bureau du procureur d’Etat a relaté que le
changement de procédure concernant les procédures internes
annoncées récemment par le chef d’état-major pouvait être
considéré comme « une amélioration significative »
de la situation existante, ce qui a justifié le rejet de la requête
soumise par B’Tselem et l’ACRI.
Selon la nouvelle procédure, le bureau du
principal conseiller juridique de l’armée (JAG) recevra un
rapport détaillé dans les 48 heures suivant chaque incident dans
lequel un civil a été tué alors qu’il ne prenait pas part aux
hostilités. En se basant sur les informations contenues dans le
rapport, le JAG décidera ou non d’ouvrir une enquête.
Malgré l’amélioration, les nouvelles procédures
ne rectifient pas les principales failles dans le processus de décision
d’ouvrir ou non une enquête. La responsabilité de recueillir
les informations transmises au JAG, informations qui sont la base
pour décider ou non l’ouverture d’une enquête de la police
militaire, est laissée aux soins des forces militaires impliquées
dans la mort de la victime. Cette situation provoque un conflit
d’intérêts clair étant donné que les personnes en charge de
rapporter les faits essentiels sur le cas risquent de porter eux-mêmes
la responsabilité criminelle pour les actes décrits dans le
rapport. De plus, la nouvelle procédure ne résout pas le problème
actuel existant qui est que la décision d’ouvrir une enquête
de la police militaire est prise longtemps après l’incident, et
que les preuves sur le terrain ont disparu. La requête déposée
par B’Tselem et l’ACRI, demandant que la police militaire
documente immédiatement la scène de l’incident dans lequel un
civil palestinien a été tué pour qu’une future enquête si
ordonnée, soit efficace, a également été rejetée.
Encore plus important, la nouvelle procédure
laisse intacte la pratique générale visant à ne pas enquêter
sur les cas de mort de civils palestiniens non impliqués dans les
hostilités. La situation transmet un grave message aux soldats
qui est celui d’un mépris du droit humain le plus fondamental,
celui du droit à la vie.
Soupçons : les zones près
de la barrière de Gaza sont des « zones de danger mortel »
(Killing Zones)
Depuis que le désengagement de la Bande de Gaza a
pris fin en septembre 2005, les soldats israéliens ont tué neuf
civils palestiniens non armés dans le périmètre de la barrière
de Gaza. Cinq mineurs, dont un de 18 mois, sont parmi les
personnes tuées. Selon une recherche récente de B’Tselem,
l’armée n’a ni prévenu les Palestiniens qu’il fallait s’écarter
de la barrière ni donné aux Palestiniens une chance de se
rendre.
Les médias ont parlé de « killing zones ».
Il y a des allégations disant que dans certaines zones, les
soldats ont reçu l’ordre de tirer sur toute personne qui y pénètre
sans se soucier des circonstances. Les officiels de l’armée ont
nié qu’un tel ordre ait été donné. Mais les neufs cas dans
lesquels les Palestiniens ont été tués, soulèvent un doute qui
laisse croire que de larges zones de terre autour du périmètre
de la barrière de Gaza ont en effet été classifiées comme
« killing zones ».
B’Tselem a écrit au principal conseiller
juridique de l’armée en demandant qu’une enquête de la
police militaire soit diligentée sur ces neuf cas.
Israël s’est engagée de facto
à annexer la Vallée du Jourdain
Dans la bande est de la Cisjordanie, bande qui
inclut la Vallée du Jourdain et la section nord de la Mer Morte,
Israël a instauré un régime de restrictions dures sur les déplacements
des Palestiniens. Selon les recherches de B’Tselem, les
restrictions ne s’appliquent qu’aux Palestiniens :
l’armée interdit généralement l’entrée des Palestiniens
dans cette zone et seuls les Palestiniens inscrits comme habitants
un village dans cette zone peuvent y entrer.
Le fait de couper la bande est du reste de la
Cisjordanie viole gravement les droits humains de beaucoup de
Palestiniens. Cette politique a été mise en œuvre sans aucune décision
gouvernementale sur la question et sans en avoir informé le
public.
Le régime qu’Israël a instauré dans la bande
orientale donne l’impression que le motif derrière la politique
d’Israël n’est pas basé sur des nécessités de sécurité
militaire, mais qu’il est politique : l’annexion de facto
de la Vallée du Jourdain et de la section nord de la Mer Morte.
Cette annexion, semblable à l’annexion de facto des zones situées
derrière la Barrière de séparation, constitue une violation
flagrante au droit du peuple palestinien à l’auto-détermination.
Des soldats battent deux
Palestiniens à un check-point
Dans
la nuit du 9 février 2005, ‘Alaa al-Ma’iwi et ‘Alaa Hikawi,
habitants du camp de réfugiés de al-Fawwar situé au sud de Hébron,
rentraient chez eux en voiture. Au check-point de al-Fawwar, les
soldats ont prétendu que les deux avaient des armes et leur ont
demandé de leur remettre. Les soldats les ont sévèrement battus
et les ont menacés.
Dans son témoignage à B’Tselem, al-Ma’iwi a
raconté : « Le soldat a appuyé le canon de son M-16
sur mon visage et m’a poussé en me donnant un coup sous l’œil
droit. Cela m’a fait très mal et je me suis penché en frottant
la blessure pour calmer la douleur. L’autre soldat m’a dit de
lui donner ma carte d’identité...’Alaa lui a répondu qu’il
avait les clés et le soldat lui a dit de les jeter par terre.
J’ai ramassé les clés et suis allé à la voiture. ‘Alaa est
resté avec les soldats. Après m’être déplacé de 10 mètres,
j’ai entendu ‘Alaa crier de douleur’ ».
Plus tard dans son témoignage, il a déclaré :
« Il a pressé le canon de son arme contre mon penis et a
armé la gâchette. J’étais sûr qu’il allait tirer. J’ai
sauté en arrière, levé les mains et juré encore une fois que
je n’avais pas d’arme. Il m’a donné un coup de poing
violent sous l’œil. J’ai crié de douleur et dis que je
voulais voir le commandant. Le soldat m’a hurlé de me taire ».
Les soldats ont libéré les deux Palestiniens et,
une demi-heure plus tard, ils sont rentrés chez eux à pieds.
B’Tselem a écrit au principal conseiller juridique de l’armée
pour demander une enquête de la police militaire sur cet
incident.