La torture dans les prisons israéliennes
- Des tortionnaires en blouses blanches : les fonctionnaires de santé
et la torture dans les prisons israéliennes - par
Issam Younis
(traduit
de l'arabe par Ahmed Manaï)
L'auteur est juriste, chercheur au Centre Palestinien des droits
de l'homme (PCHR) à Gaza, ancien chercheur à l'organisation Al
Haq à Ramallah, auteur de nombreuses études sur la torture et
les violations des droits de l'homme sous l'occupation israélienne.
Ce texte est extrait de l'ouvrage Violences et torture dans le
monde arabe, coordonné par Haytham Manna, L'Harmattan, Paris
2000- ISBN : 2-7384-8807-2
Etudier la généralisation de la torture et
de son institutionnalisation dans les prisons israéliennes et en
particulier la participation active ou passive des fonctionnaires
de la santé est, disons-le d'emblée, une mission peu aisée.
Cette mission est d'autant plus complexe que la torture se
pratique n'importe où, derrière des portes closes et dans le
secret le plus total. Ce qui empêche d'obtenir rapidement et avec
certitude des informations crédibles. La recherche et la
connaissance du degré d'implication des fonctionnaires de la santé
dans la torture est, elle aussi, une opération difficile et
complexe.
En effet, les victimes sont elles-mêmes la source d'information.
Or, les conditions scientifiques de collecte et de compilation des
informations imposent de soumettre les témoignages de ces
victimes à un examen rigoureux. Quand une victime témoigne de ce
qu'elle a subi lors de sa détention, il arrive qu'elle n'accorde
aucune importance au rôle qu'aurait joué le fonctionnaire de
santé aux diverses phases précédant, ou surtout accompagnant,
la torture. Il lui arrive de considérer au contraire, que ce que
fait le fonctionnaire de santé est partie intégrante de l'acte
de torture. Il en résulte que ce rôle est parfois évoqué
incidemment et non pas d'une manière fondamentale. En tout cas,
l'absence d'une évocation formelle du rôle des fonctionnaires de
la santé dans la torture ne signifie guère qu'ils n'y sont pas
impliqués(1).
D'autre part la victime ignore si les personnes qui l'ont examinée
et soignée appartiennent réellement au corps des fonctionnaires
de la santé. Il est rare en effet que la victime soit elle-même
médecin ou infirmier, pour juger avec certitude de la qualité du
soignant et de son implication ou non dans la torture. Ainsi, pour
ce qui est des "compétences médicales de ceux que les détenus
prennent pour des médecins, il paraît d'une façon générale
indispensable de ne pas se contenter des témoignages individuels
et isolés, mais de recourir à des procédés de preuves
tangibles" (2). Toutes les informations données par les
victimes ne sont pas forcément authentiques et elles ne couvrent
pas toujours la totalité des faits. Il y a de nombreuses raisons
à cela, dont la crainte d'actions de représailles et de
vengeance de la part des individus ou des services impliqués.
D'autre part, il semble qu'il est difficile pour un certain nombre
de victimes de se rappeler de ce qu'ils ont vécu sous la torture.
En témoignant, il se pourrait qu'elles ne souhaitent pas évoquer
certaines pratiques subies et tout particulièrement celles qui
sont trop dégradantes et humiliantes. Aussi elles choisissent
souvent de les occulter.
L'ampleur du phénomène
Les résultats des nombreuses enquêtes effectuées par des
organisations locales et internationales des droits de l'homme,
ont révélé, preuves à l'appui, l'implication de fonctionnaires
israéliens de la santé, dans la torture des détenus
palestiniens. Cela constitua un choc grave pour certains, mais
pour d'autres, ce fut tout simplement la confirmation d'une triste
réalité : la généralisation de la torture dans les prisons
israéliennes. C'est son institutionnalisation et son
officialisation par le gouvernement israélien qui permet aux
fonctionnaires de la santé et à d'autres de s'y impliquer.
Aussi convient-il d'analyser cette situation, et notamment la part
prise par les fonctionnaires de la santé dans la torture au cours
des interrogatoires menés par les instructeurs israéliens du
Service israélien de la sécurité générale (Schabak). La
torture a été pratiquée et continue de l'être, à une très
grande échelle, par toutes les branches des services de sécurité
israéliens, dans les prisons et les nombreux camps de détention
disséminés sur les territoires occupés et en Israël. Depuis
1967, ce sont des dizaines de milliers de Palestiniens qui ont été
torturés et soumis à des pratiques dégradantes, surtout de la
part du Schabak.
Avec le début de l'Intifada à la fin de 1987, l'usage de la
torture à l'encontre des Palestiniens a été généralisé par
tous les services de police israéliens. De nombreux détenus sont
morts au cours de leur interrogatoire. Les autorités israéliennes
ont usé de nombreux procédés de torture, comprenant par exemple
"des coups sur toutes les parties du corps et principalement
les parties sensibles, telles les organes génitaux, la mise de
sacs de détritus sur la tête, la privation de nourriture et de
sommeil durant l'isolement cellulaire, l'enchaînement des détenus
dans des positions pénibles, la détention dans des geôles exiguës
et obscures appelées "les tombes". Quand elles sont
froides, celles-ci sont dénommées "les frigos" "
(3).
La légalisation de la torture comme politique officielle : la
Commission Landau
Le gouvernement israélien a créé le 31 mai 1987 une
Commission présidée par le juge Mosché Landau, à l'époque président
de la Haute cour israélienne, pour enquêter sur les conditions
dans lesquelles se déroulent les interrogatoires menés par les
agents des services israéliens de sécurité. Cette Commission a
pris naissance quand fut publiquement connu que la torture était
pratiquée à une très large échelle par les agents du Schabak
pour extorquer des aveux aux détenus palestiniens. Cela a éclaté
au grand jour dans les deux affaires célèbres de Azzet Nafissou
et du Bus N° 300 (4).
Le gouvernement israélien avait publié en novembre de la même
année, le rapport de la Commission et ses recommandations, mais
non pas sa partie secrète fixant les moyens et les pratiques de
torture autorisés aux instructeurs. Cette partie n'a jamais été
divulguée jusqu'à ce jour. Le rapport a révélé que les
instructeurs du service de sécurité générale avaient utilisé
la force physique pour extorquer les aveux des détenus
palestiniens. Ils prirent donc soin, depuis 1987 et d'une manière
organisée, de livrer de faux témoignages sur l'usage de la force
physique à l'encontre des détenus. Cette attitude est motivée,
selon ce rapport, par "la nécessité de ne pas évoquer les
procédés utilisés" (5). Bien qu'elle ait reconnu les
faits, la Commission a recommandé de ne pas prononcer d'acte
d'accusation à l'encontre d'anciens agents instructeurs du
service israélien de sécurité générale ou d'autres
fonctionnaires de ce service impliqués dans des affaires de
torture. Malgré les preuves, la Commission a justifié cette
pratique par le fait que "le service de sécurité s'était
trouvé devant le dilemme posé par la nécessité d'obtenir des
informations sur des suspects, d'une part, et les entraves légales
qui interdisent les moyens d'y parvenir, d'autre part" (6).
Concernant les actes de sabotage, le rapport a recommandé
"que, en principe, la pression reste psychologique et non
violente, qu'on procède à de longs interrogatoires et qu'on use
de la ruse, voire de la tromperie. Si cela se révèle inopérant,
l'usage de pressions physiques "modérées" devient inévitable"
(7). Mais alors que la Commission recommandait l'usage de
"pressions physiques modérées", elle évite de définir
ce qu'elle entend par "actes de sabotage" et même par
«pressions physiques modérées» et garde secrète la partie du
rapport énumérant les procédés légaux d'interrogatoire (8).
La Haute cour israélienne
Pour créer un consensus politique complet sur la question, la
Haute cour de justice, qui est la plus haute juridiction israélienne,
a donné la caution légale nécessaire à l'usage de la torture.
Bien qu'en principe la justice soit indépendante, elle cesse de
l'être dès qu'il s'agit d'une affaire se rapportant aux
territoires palestiniens occupés. Le 14 janvier 1996, pour la
première fois, la Haute cour israélienne a légalisé l'usage de
la violence physique dans les interrogatoires de détenus
palestiniens. Cela ressort clairement de la réponse faite par la
cour à l'avocat d u détenu palestinien Abdel Halim Al Balbissi.
Un des procédés les plus utilisés par les tortionnaires,
consiste à secouer violemment la tête du détenu. Ce qui a entraîné
la mort de nombreux détenus palestiniens. Dernier en date,
Abdessamed Harizet qui a sombré dans le coma vingt quatre heures
après son arrestation et est décédé deux jours plus tard. Le médecin
légiste a conclu à une hémorragie cérébrale ayant entraîné
la mort consécutive aux secousses violentes et brusques de la tête.
Cette décision a donné les mains libres aux enquêteurs israéliens.
La Haute cour a réitéré une seconde fois sa position en
publiant deux décisions, les 15 et 17 novembre 1997, par
lesquelles «elle autorise les enquêteurs du service de sécurité
israélien, non seulement d'user de pressions physiques modérés,
comme cela avait été prévu par la Commission Landau, mais de
faire usage de fortes pressions physiques. Comme si le premier
procédé, qui avait entraîné déjà la mort de nombreux détenus,
n'était pas lui-même suffisant. Ce qui dénote une connivence
entre la cour et le service israélien de sécurité générale et
donne une idée des dimensions du problème et de la grave crise
morale traversée par la société israélienne.
Dans sa plus récente décision, datée du 12 janvier 1998, la
cour a une nouvelle fois autorisé les instructeurs à faire usage
de la torture à l'encontre des détenus palestiniens. Composée
de neuf membres et contrairement à l'accoutumée, elle avait jugé
recevable la demande d'ordonner l'arrêt de la torture du détenu
Abderrahmane Ghénimet. La décision a été prise à une majorité
de cinq membres sur neuf.
Le Centre palestinien des droits de l'homme publia à cette
occasion une déclaration dans laquelle il précisa que
"l'autorisation de la torture comme politique officielle israélienne
et sa légalisation par la haute cour, ne constituaient pas des
faits nouveaux. Ce qui est nouveau, par contre, c'est que la cour
ait siégé avec neuf membres, ce qui révèle ainsi la gravité
des faits qu'elle avait à examiner. En tout cas (...) pour ce qui
est de la torture des Palestiniens (...) c'est une affaire qui ne
mérite même pas de discussion : cela allait de soi, selon les
normes légales et juridiques en vigueur dans l'Etat d'Israël".
L'implication du fonctionnaire médical dans la torture et les
mauvais traitements
Compte tenu de la généralisation de la torture dans les prisons
israéliennes et aussi de sa légalisation comme politique
officielle avalisée par la Haute cour, il n'est guère étonnant
que les fonctionnaires médicaux israéliens y soient impliqués.
C'est ce qui ressort des nombreuses informations disponibles réunies
par les organisations internationales des droits de l'homme. La
participation de fonctionnaires médicaux israéliens à la
torture des détenus palestiniens revêt plusieurs aspects, comme
l'examen avant l'interrogatoire des capacités du détenu à résister
à la torture ou le chantage aux soins dont il a besoin. Cette
participation consiste aussi à éliminer des rapports médicaux
des détenus les mentions prouvant que l'intéressé a été
victime de torture.
L'évaluation des capacités physiques du détenu avant
l'interrogatoire
Dans tous les centres israéliens de détention, qu'ils dépendent
de l'armée ou des services pénitentiaires, tous les détenus
sont soumis dès leur arrivée et avant tout interrogatoire, à un
examen médical. Cet examen est effectué par un médecin ou un
infirmier de service dans le centre. Il est certain que ces médecins
et autres fonctionnaires de la santé jouent un rôle éminemment
dangereux et en parfaite contradiction avec la déontologie médicale
la plus élémentaire. En effet, ils se retrouvent directement
impliqués dans les interrogatoires quand ils procèdent à l'évaluation
des capacités du détenu à résister à la torture (9).
Il leur est demandé de remplir un questionnaire sur l'état de
santé des détenus et leur capacité à supporter la détention
dans l'isolement, le maintien prolongé en position debout (le
fantôme), la mise de cagoules sur la tête. Ces procédés ont été
révélés dans un article du journal israélien Davar daté du 16
mai 93, sous le titre «Exemples des exploits de la médecine».
Ce questionnaire doit être rempli et signé par le médecin qui
examine le détenu (10). A la suite de la publication de
l'article, l'ordre des médecins israéliens a envoyé un télégramme
au Premier ministre dans lequel il déclare que "les
questions A, B et C du dit questionnaire et les réponses
attendues des médecins constituent une participation active de
ces derniers à la torture" (11).
D'autre part, les organisations palestiniennes des droits de
l'homme ont recueilli sous serment, des centaines de témoignages
de détenus palestiniens qui ont tous affirmé l'implication du
personnel médical dans les actes de torture dans les prisons.
Dans un de ces témoignages, un ancien détenu au camp Al-Fariâ,
proche de Naplouse, déclare : "Nous étions dix-sept détenus...
Quand je suis entré à l'infirmerie, j'ai vu une personne portant
un uniforme militaire qui m'a demandé de me déshabiller. J'ai
obtempéré aussitôt. Puis il m'a dit de me retourner alors que
lui-même se trouvait derrière une table à trois mètres de moi.
Il observa mon dos très rapidement et me demanda de me rhabiller
et de sortir. Tout cela s'est passé en quelques secondes et je
n'exagère nullement en disant que l'examen des dix-sept détenus
n'a pas demandé plus de quinze secondes" (12).
Des centaines de cas analogues nous permettent d'affirmer que le
personnel médical présent dans les centres de détention, et
portant souvent l'uniforme militaire, procède à l'examen des détenus
avant leur interrogatoire et dès leur entrée au camp. Cet examen
médical n'a pas pour objet de servir les intérêts du détenu,
il se fait d'une façon routinière et superficielle. Son objectif
principal est la réponse au questionnaire sur les capacités de résistance
physique du détenu. Or, en fait, les détenus, quel que soit leur
état de santé, subissent l'interrogatoire des services israéliens
comme il ressort des déclarations du témoin qui ajoute :
"l'un des dix-sept détenus a informé le médecin qu'il
avait le typhus. Le médecin n'accorda aucune importance à sa déclaration,
ne lui apporta aucune assistance et ne lui donna aucun soin. Nous
avons tous été conduits les mains attachées et les yeux bandés".
Rôle du personnel médical lors de l'interrogatoire
La participation du personnel médical des prisons et camps israéliens
à la torture des détenus palestiniens n'est pas uniquement
passive. Elle ne consiste pas seulement à fermer les yeux sur ce
qui se passe et à ne point divulguer d'informations. Les médecins
et autres fonctionnaires médicaux des camps et prisons se sont
souvent impliqués activement dans les interrogatoires. Ils n'hésitent
pas, pour inciter les prisonniers à avouer, à exagérer la
gravité de leurs maladies ou à les faire douter de leur capacité
à résister à la torture. Un détenu a témoigné en déclarant
qu'"un médecin est venu vers sept heures soigner le groupe
de détenus où je me trouvais. Quand il m'examina, il me demanda
pourquoi j'étais là ? Je lui répondis que je l'ignorais. Il me
dit alors qu'il vaudrait mieux pour moi de tout raconter parce que
j'allais souffrir de maux d'estomac terribles et que les symptômes
en étaient déjà apparents" (14).
Un autre détenu a déclaré : "Quelques jours après mon
examen, l'infirmier me demande si j'ai été interrogé. A ma réponse
affirmative, il s'étonna que je sois encore en vie, ajoutant
qu'il nourrissait des craintes pour moi, parce que
l'interrogatoire risquait d'être difficile et qu'il valait mieux
pour moi et dans mon état, que j'avoue tout" (15).
Le personnel médical israélien des prisons et camps n'est pas
seulement au courant de la pratique régulière de la torture sur
les détenus palestiniens. Il est même de connivence puisque
jamais l'un d'eux ne s'est opposé à ces pratiques ou ne les a dénoncées.
En fait, l'implication de ce personnel va encore plus loin,
puisque ses membres participent directement à l'extorsion des
aveux.
Le rôle du personnel médical après la torture
Les agents médicaux des prisons et camps israéliens collaborent
à la rétention de la vérité et cachent les preuves de la
torture subie par les détenus. Ainsi, la Commission israélienne
de lutte contre la torture cite le cas de H.A.H, qui a été
interrogée au camp Al-Maskoubia à Jérusalem en octobre 1990 et
qui a été malade au cours de l'interrogatoire. Le médecin qui a
été appelé à son chevet, ayant constaté une hypotension, lui
donna à boire dix verres d'eau. Une fois la tension redevenue
normale, il le renvoya à l'interrogatoire (16).
Un autre détenu déclare dans son témoignage:
"l'instructeur me frappa la tête plusieurs fois contre le
mur puis me frappa sur le genou. Cela me fit terriblement mal et
me causa une déchirure, d'autant que j'étais déjà blessé par
balles. Je fus conduit par la suite dans une clinique où un médecin
soigna ma blessure. Je fus ramené enfin à ma geôle où je
demeurais quelques jours à l'issue desquels je fus ramené à
l'interrogatoire" (17).
Les agents médicaux israéliens déterminent aussi si l'état de
santé du détenu autorise ou non la poursuite des tortures. Mais
le plus dur qu'un détenu puisse affronter, c'est d'être privé
de soins, pour les besoins de l'enquête, alors qu'il en a le plus
grand besoin. Le cas du détenu palestinien Amin Amin, est éloquent.
Etudiant à l'université de Bir Zeit à l'époque des faits, il a
été arrêté le 01 août 1988. Ayant subi de terribles tortures
lors de son interrogatoire par les services de renseignements israéliens
au camp militaire Addahira, proche de Al Khalil (Hébron), il
perdit connaissance. Quand son état de santé s'aggrava sérieusement,
il fut conduit au médecin du camp qui recommanda son transfert
urgent à l'hôpital. Mais les instructeurs le ramenèrent à sa
geôle pour y demeurer encore cinq jours (18).
Ce qui est arrivé à Amin Amin prouve incontestablement que les
agents médicaux présents dans les prisons et les camps israéliens
sont au courant de la pratique de la torture dans les centres
d'interrogatoire. Ils sont même au service de l'instruction et
des instructeurs. Le médecin traitant, dans le cas d'Amin Amin,
n'a pas pris soin d'assister son patient jusqu'au bout et de
veiller tout simplement à ce qu'il soit transféré à l'hôpital
comme il l'avait recommandé.
Un article publié par un journal israélien avait donné des détails
sur la manière dont les détenus palestiniens sont traités et le
rôle des médecins. Le journal Haaretz du 3 mai 1991 a publié un
article sous la signature de Ariel Shafit, dans lequel celui-ci a
rappelé son expérience personnelle de soldat de réserve, ayant
accompli son service actif dans le camp d'internement "Plage
de Gaza" (appelé par les Palestiniens Camp Ansar H). Il y déclare:
"Quand tu le réveilles à minuit [le médecin du camp] pour
s'occuper de quelqu'un qui vient d'être arrêté, un jeune homme
ensanglanté, aux mains enchaînées, les pieds nus, en état de
choc, et qui vous dit avoir immédiatement été battu sur le dos,
le ventre et la poitrine, le médecin se tourne vers le jeune pour
lui crier méchamment : "Si au moins tu pouvais crever".
Puis, se tournant vers celui qui l'a réveillé, il lui crie :
"Si seulement ils crevaient tous". Il s'agit d'un médecin
juif, portant l'uniforme de l'armée israélienne" (19).
Le phénomène dépasse le cadre des prisons et des camps
d'internement, pour gangrener les hôpitaux. C'est là que médecins
et autres agents médicaux collaborent avec les enquêteurs pour
«retaper» les victimes de la torture et les préparer à de
nouveaux interrogatoires, effacer les preuves de la torture dans
leurs rapports ou tout simplement taire la vérité sur leur véritable
état de santé.
C'est là une vérité attestée par des dizaines de témoignages
d'anciens détenus auprès des organisations des droits de
l'homme. Citons à titre d'exemple le cas de Nader Kamsia. Détenu
depuis neuf jours, ce dernier a été présenté au juge
d'instruction pour une prolongation de sa détention. C'est alors
qu'il se plaignit d'avoir été battu sur ses testicules. Citons
à ce propos le rapport du juge : "A ma demande, le chef
instructeur m'a présenté un rapport de l'hôpital Soroka,
attestant que le susnommé a eu les testicules blessés à la
suite d'un coup qu'il a reçu" (20). Nader a été hospitalisé
le 11 mai 93. Il est à noter que le rapport émanant du service
d'urgence de l'hôpital Soroka "n'a apparemment pas été
signé mais (...) le nom du médecin apparaissait sur le
rapport". Le 17 mai 93, un deuxième rapport du même médecin,
affirme que Nader a été soigné à l'hôpital le 11 mai au
service d'urgence, mai s pour d'autres motifs : "Après avoir
reçu un coup dans la zone du scrotum ; le patient a déclaré être
tombé d'une échelle deux jours avant son admission au service
d'urgence de l'hôpital. Le rapport médical a révélé un hématome
localisé (A localised Haematoma) dans la région du scrotum,
correspondant à un traumatisme local, survenu deux à cinq jours
avant son admission au service d'urgence" (21). Le rapport a
été établi rétroactivement sans examen complémentaire et ne
correspond pas aux extraits cités par le juge, comme le signale
le docteur Maraton, qui ajoute : "II nous semble que ce
rapport a été falsifié dans le but de tr uquer la vérité. Le
médecin n'a pas signalé la déchirure du scrotum qui, à l'en
croire, n'a pas été causée par un coup donné lors de
l'interrogatoire mais serait imputable à une chute ?" (22).
Passons au cas de Châouane Jabbarine. Celui-ci a été arrêté
le 10 octobre 1989. Il a été hospitalisé à la suite de
tortures que lui avaient fait subir les garde-frontières israéliens.
Selon le conseiller juridique de l'administration civile israélienne,
Jabbarine a été admis à l'hôpital Hadassa-Aïn Karm où il a
été soigné. Le 12 octobre 1989, on a demandé à l'hôpital des
informations sur son état de santé. C'est alors que l'on a
appris qu'il n'y avait aucun dossier au nom de Châouane Jabbarine,
son hospitalisation n'avait pas eu lieu (23).
Amin Youssef Amin, cité plus haut, affirme qu "il a été
hospitalisé sous un pseudonyme et qu'il en avait informé le médecin.
Ce dernier lui avait rétorqué que cela lui importait peu et
qu'il se contentait de soigner" (24). Jabbarine et Amin ont
bel et bien été torturés. Cela explique la disparition de toute
trace d'hospitalisation du premier et l'admission du second sous
un pseudonyme (ce qui est aussi une forme de négation de son
hospitalisation). Mais, de plus, la disparition de leurs dossiers
médicaux respectifs les prive aussi de tout recours et de toute
surveillance médicale ultérieure.
Les détenus palestiniens, malades ou torturés, qui sont
hospitalisés, ne sont pas non plus épargnés par les mauvais
traitements et les tortures lors de leur hospitalisation. Citons
le cas de Mme Intissar Alquak, détenue au pavillon des femmes à
la prison israélienne Hacharoun et admise pendant trois jours à
l'hôpital Mâar à Kafr Saba pour accoucher, et qui affirme avoir
été "durant son hospitalisation, enchaînée au lit par les
mains et les pieds. Je n'ai été détachée, les pieds seulement,
que lors de l'accouchement" (25).
Les décès de détenus
Depuis le début de l'Intifada en 1987, des dizaines de détenus
sont décédés lors des interrogatoires dans les prisons israéliennes,
ou plus tard, des suites de la torture. Selon la loi israélienne,
l'autopsie à l'institut Abou Kebir de médecine légale à Tel
Aviv devrait suivre tout décès suspect. Il est à noter qu'avant
1989, les familles du défunt n'étaient pas autorisées à faire
pratiquer l'autopsie par un médecin légiste indépendant (26).
En fait, la participation du médecin légiste désigné par la
famille se réduit à l'autopsie elle-même, mais il n'est pas
autorisé à visiter le centre de détention et le lieu du décès
qui peuvent grandement aider à déterminer les causes du décès
(27).
Etant donné, d'autre part, l'extrême pauvreté de Gaza et de la
Cisjordanie en médecins légistes, celui qui représente la
famille est le plus souvent un étranger, invité et pris en
charge par les organisations palestiniennes des droits de l'homme.
Cela signifie que son séjour est très court, deux à trois jours
au plus, et qu'il ne peut participer qu'à l'autopsie du cadavre,
avec interdiction de prendre des échantillons de tissus ou
autres, afin de les faire analyser dans des laboratoires indépendants.
Aussi, les résultats disponibles sont ceux produits par le seul
centre habilité à le faire en Israël et qui est une institution
officielle.
Les rapports d'autopsie concernant les personnes mortes dans les
centres d'interrogatoire indiquent tous que la mort est naturelle
ou consécutive à un suicide. En admettant qu'il y ait
effectivement suicide, l'on doit se demander pourquoi un jeune
entre vingt et trente ans, se suiciderait quelques jours seulement
après son arrestation, d'autant qu'il n'a jamais donné
auparavant de signes d'instabilité psychologique ? La réponse,
toute simple, est qu'il ne pense vraiment à se suicider qu'à
cause de violentes tortures physiques et psychologiques qu'il n'a
pu supporter.
Un cas illustre bien les compromissions de la médecine légale
israélienne. Ibrahim Almatour a été arrêté le 8 juillet 1988
par les soldats de l'armée israélienne et détenu à la prison
Addahiria. Le 21 octobre 1988, Ibrahim Almatour a été trouvé
mort dans sa geôle. Son corps a été transporté à l'Institut
israélien de médecine légale à Tel Aviv pour y être autopsié.
Le rapport du médecin légiste de l'hôpital, signé par le
docteur B. Levy, attribue la mort à une forte pression exercée
sur le cou, ce qui pourrait être dû à un suicide... Il y a
correspondance entre le diagnostic du médecin légiste et la
version de l'armée quant aux causes du décès. Curieusement, le
légiste mandaté par la famille, le docteur Dierrik Bonder,
donna, dans son rapport de juillet 1989, une autre explication des
causes ayant entraîné la mort. On se souvient que le premier
rapport d'autopsie n'avait pas mentionné les conditions ayant
entouré le décès de Ibrahim Almatour, ce qui dénote une négligence
manifeste. Le deuxième rapport accorde à ces conditions une
importance primordiale et les considère comme essentielles pour
connaître les causes du décès. Le docteur Bonder conclut dans
son rapport que "la cause de la mort est l'étranglement et
ce, suite à une très forte pression sur le cou. A mon avis, écrit-il,
la cause probable de la mort n'est pas la pendaison. Je considère
qu'au cours des trois jours qui ont précédé la mort, le défunt
a dû subir des traitements avilissants, indignes et inhumains et
je pense que le défunt a mis fin à ses jours pour leur échapper.
Si tel fut le cas, je considère qu'il s'agit d'un décès par
suicide aggravé (aggravated suicide)"(28). Négliger les
conditions entourant le décès, c'est vouloir cacher la cause véritable
du décès et dissimuler que la victime a enduré les pires
tortures (29).
Robert H.Kirschner signale que l'institut de médecine légale d'Abou
Kebir en Israël se trouve sous la responsabilité du ministère
de la santé. Il est ainsi en apparence indépendant de la police
et de l'armée. Malgré cela, l'institut fonctionne comme un
univers clos. C'est pour cela que le diagnostic repose sur la
seule autopsie et c'est aussi pour cela que les résultats de
l'autopsie sont présentés à la police et non à la famille. Ce
qui conduit à classer le décès de nombreux Palestiniens en détention
sous la rubrique "mort naturelle". L'enquête sur les
conditions de la mort révèle clairement que les décès naturels
par crise cardiaque, asthme ou ulcère, résultent des conditions
de l'interrogatoire. Les décès résultant de tels procédés
doivent être désignés pour ce qu'ils sont: des meurtres (30).
Les normes internationales en vigueur
Que l'on se situe sur le plan des considérations éthiques qui régissent
le comportement du personnel médical, ou des droits de l'homme
reconnus par les conventions internationales et la juridiction
internationale humanitaire, la torture et les mauvais traitements
sont catégoriquement interdits et ne sont justifiables sous aucun
prétexte. Dans le chapitre suivant, nous étudierons
l'interdiction faite au personnel médical par les conventions
internationale de participer à la torture. Nous examinerons aussi
les obligations des agents médicaux et celles des Etats.
Les normes éthiques
Les terribles massacres commis au cours de la deuxième guerre
mondiale furent à l'origine de la législation internationale sur
les droits de l'homme. Ils approfondirent aussi la conviction que
seul le respect des droits de l'homme pouvait éviter que de tels
massacres ne se rééditent. Le procès de Nuremberg avait confirmé
la participation organisée et préméditée des médecins nazis
dans ces terribles massacres. Les victimes, rescapées des expériences
médicales des médecins nazis, avaient déclaré que ces derniers
avaient, entre autres, fait "mettre les détenus dans des
conteneurs sous haute pression et leur avaient injecté des germes
vivants du typhus" (31).
Les révélations sur l'implication des médecins nazis dans la
torture a fortement incité les associations professionnelles médicales
à déclarer que toute participation du personnel médical à une
quelconque forme de torture est en contradiction avec l'éthique
de la profession, et par conséquent formellement interdite quels
que soient les circonstances et les motifs. Le but de la médecine
est de chercher toujours à préserver et sauver la vie et ce, par
l'assistance aux malades et le respect de leur intégrité. Il
n'est nullement de détruire la vie du patient L'association médicale
mondiale (WMA), créée en 1947, fut la première organisation à
s'attaquer aux règles morales régissant les professions médicales.
Un pas important a été fait avec l'adoption du Serment de Genève,
introduisant une modification importante par rapport au Serment
d'Hippocrate.
Le Serment de Genève insiste sur la nécessité de distinguer
entre le devoir du médecin et l'appartenance religieuse,
nationale, politique ou sociale de son patient. De nombreuses
professions paramédicales ont pris l'initiative, au plan régional
et national, d'adopter et de développer les normes éthiques en
vigueur au niveau international. Elles ont défini les rapports
entre les professionnels, d'une part, et les détenus et autres
personnes privées de liberté, d'autre part. Nous passerons en
revue les plus importantes de ces normes.
L'Association médicale mondiale a publié en 1949, un code
international de l'éthique médicale. On y lit notamment :
"Le médecin est tenu de respecter les droits du patient, des
collègues et des autres professionnels de la médecine. Il doit
aussi garder secret les confidences du patient ". En 1956,
l'organisation a rédigé des règles applicables aux conflits armés
qui fixent les orientations relatives aux normes éthiques médicales
en temps de conflit armé. Le code insiste aussi sur le rôle du
personnel médical qui est de préserver la santé et de
sauvegarder la vie, ainsi que sur celui du médecin : qui doit,
fournir l'assistance attendu de lui, avec équité et sans considération
aucune de race, d'ethnie, de nationalité, de religion, d'opinion,
et ce même si l'état d'urgence a été décrété Une telle
assistance doit se poursuivre tant que le besoin se fait sentir et
tant qu'elle est possible" (33).
La Déclaration de Tokyo
La Déclaration de Tokyo est considérée, au niveau
international, comme le document fondamental relatif à l'éthique
de la profession médicale. Elle a été adoptée par
l'Association médicale mondiale au cours de son vingt-neuvième
congrès qui s'est tenu au mois d'octobre 1975 à Tokyo. La déclaration
comporte six principes directeurs au sujet de la torture des
prisonniers et des détenus (34).
Premièrement, il est interdit au médecin de prêter son concours
à des actes de torture ou à d'autres formes de traitement
inhumain et cruel, et aussi de couvrir ces actes (...) et ce, quel
que soit le crime de la victime, que celle-ci soit suspecte, accusée
ou confondue et quelles que soient ses convictions et les raisons
de son action, en toutes circonstances, y compris dans les
situations de conflit armé ou de guerre civile.
La Déclaration interdit au médecin d'utiliser son savoir pour
faciliter l'usage de la torture et pour vaincre la résistance de
la victime. Elle interdit aussi la présence du médecin dans tout
lieu où se pratique la torture et où existe le risque qu'elle
soit pratiquée. La Déclaration insiste, en plus, sur la nécessité
pour les médecins de soigner les douleurs et les souffrances.
Aucun motif, d'ordre politique, individuel ou collectif, ne doit
l'en empêcher. La déclaration interdit d'autre part aux médecins
d'alimenter de force les prisonniers qui font une grève de la
faim. Le sixième principe précise que l'Association médicale
mondiale apportera un soutien total aux médecins et à leurs
familles qui auraient été menacés à la suite de leur refus de
couvrir l'usage de la torture.
Principes d'éthique médicale de l'ONU
L'Assemblée générale de l'Organisation des nations unies a
adopté en 1982, à l'issue d'un long débat, les principes de l'éthique
médicale relatifs au rôle du personnel médical, et notamment
les médecins, dans la protection des prisonniers et des détenus
contre la torture et autres traitements ou sanctions cruelles ou
inhumaines (35).
Ces principes constituent la pierre angulaire "de la
responsabilité morale internationale" (36). La Déclaration
de Tokyo de 1975 a fait franchir un pas fondamental dans l'élaboration
de principes moraux de la profession médicale. L'interdiction de
participer à des actes de torture concerne non seulement les médecins
mais aussi l'ensemble du personnel médical et paramédical, spécialistes
de la médecine naturelle et infirmiers compris (37). Les
prisonniers, par ailleurs, ont droit aux mêmes soins que les
individus libres.
L'examen de l'état de santé du malade et le diagnostic, ne
doivent, en aucun cas, aider à juger de la possibilité ou de
l'impossibilité de lui faire subir torture et mauvais
traitements. Aussi "l'examen doit servir à protéger et
soigner le malade. Cela n'a pas besoin d'être expliqué
davantage. Il est inadmissible moralement, qu'il y ait un autre
mode de diagnostic médical que celui qui vise à protéger et
soigner le malade" (38).
Il est, d'autre part, considéré comme une atteinte flagrante à
l'éthique médicale d'aider par son savoir médical et la
connaissance du cas d'un patient à l'interrogatoire "d'une
façon qui peut porter atteinte à la santé physique ou mentale
des détenus ou prisonniers et être en contradiction avec les règles
internationales en vigueur en la matière". De même, juger
ou inciter à juger de la capacité du détenu ou du prisonnier à
subir quelque forme que ce soit de mauvais traitements ou de
sanctions risquant de porter préjudice à sa santé physique ou
mentale est en contradiction avec les conventions internationales
en vigueur.
Le devoir du fonctionnaire de santé est "non seulement d'évaluer
si l'interrogatoire aurait éventuellement des conséquences négatives,
mais aussi s'il est conforme aux accords internationaux"
(39). De plus, les fonctionnaires de la santé ne sont pas autorisés
à évaluer l'état de santé physique ou psychologique dans un
but lié à l'interrogatoire, que ce soit avant, pendant ou après
ce dernier, ni de l'évaluer dans le but d'appliquer une sanction
de peine capitale (40).
Le cinquième principe de l'éthique médicale stipule que toute
mesure de limitation des mouvements d'un prisonnier ou d'un détenu
doit être décidée en fonction des impératifs de santé
physique ou mentale et aussi de sa sécurité, et qu'elle doit
reposer sur des critères strictement médicaux.
Le sixième principe est d'une très grande importance puisqu'il
stipule que l'on ne peut se délier des obligations contenues dans
le texte relatif à l'éthique médicale de 1982, quelles que
soient les circonstances et les justifications, y compris la
proclamation de l'état d'exception.
Autres principes
En 1977, l'Association mondiale de psychiatrie, a adopté la Déclaration
de Hawaii qui fixe des règles morales particulières au
comportement des psychiatres. Dans son article 5, cette déclaration
stipule qu'il "ne faut appliquer aucune mesure ni ne donner
aucun soin contre le gré du patient".
L'article 7 interdit au psychiatre d'utiliser "ses compétences
professionnelles pour porter atteinte à la dignité de l'homme ou
à ses droits individuels et collectifs. Il ne doit laisser aucune
place aux sentiments personnels subjectifs ni aux préjugés quand
il s'agit de dispenser des soins" (41).
Les autres professions médicales ont adopté des normes
similaires interdisant aux leurs toute forme de participation à
la torture ou autres mauvais traitements. Il en est ainsi du
Conseil international des infirmiers (INC) qui a adopté en 1975,
une déclaration sur "la position des infirmiers par rapport
aux détenus et prisonniers" et qui interdit formellement aux
infirmiers de «s'impliquer dans la torture ou dans toute
recherche clinique appliquée aux patients contre leur volonté».
La déclaration stipule d'autre part que «la fonction première
de l'infirmier est de prendre soin de son malade quelles que
soient les considérations de sécurité ou d'intérêt national».
Le chapitre le plus important de cette déclaration est celui qui
engage les infirmiers à informer les institutions nationales ou
internationales et à prendre toutes dispositions nécessaires dès
qu'ils apprennent que des détenus ou prisonniers subissent des
mauvais traitements physiques ou psychologiques. Le Conseil
international des infirmiers a adopté en 1983, une déclaration
sur «le rôle des infirmiers dans la protection des droits de
l'homme» qui stipule que «le patient détenu, a le droit de
refuser la nourriture et les soins Le devoir de l'infirmier est de
s'informer du consentement des patients préalablement à tout
examen les concernant» (42).Le Conseil a eu d'autre part une
position tranchée sur l'implication des infirmiers dans la
torture, leur interdisant de l'encourager, de s'y compromettre ou
d'y participer ainsi que dans toute forme préméditée et organisée
de traitement humiliant et con traire à la dignité, que celui-ci
soit le fait d'un individu ou d'un groupe, agissant à titre
personnel ou sur ordre d'une quelconque autorité, pour faire
avouer des faits ou pour tout autre motif (43).
Au plan régional aussi, de multiples recommandations et normes éthiques
ont été adoptées par de nombreux corps de métier et ce, pour généraliser
au plan international l'adoption de cette éthique. On peut citer
à ce niveau l'importante déclaration de Madrid qui a appelé à
combler le vide constaté au niveau de la régularité des
rapports. Cette déclaration appelle en effet à "instituer
un fichier international pour les rapports sur les délits moraux
à l'intérieur de la profession et aussi pour diffuser les
informations sur l'existence de la torture". La déclaration
appelle aussi à soutenir au plan international les médecins qui
refusent de s'impliquer dans la torture (44).
Il faut signaler que du point de vue strictement légal, celle éthique
médicale et les obligations morales qu'elle comporte n'engagent
nullement les médecins ou les organismes médicaux sur le plan légal.
Elles ont simplement un caractère indicatif (45). Malgré leur
caractère facultatif, il faut que ces normes soient largement
respectées, notamment celles qui sont relatives à la torture et
qui ne sauraient être considérées indépendamment des
engagements juridiques contenus dans la législation
internationale des droits de l'homme. Les organismes médicaux
nationaux doivent avoir aussi pour mission de faire le suivi de
leur application.
Le fondement éthique de ces normes a été formulé par Jonsen et
L. Sagon de la manière suivante :
1) "II est exigé de celui qui exerce la médecine de ne
point occasionner de préjudice qui ne soit compensé par un bien
être au malade" (47). Ainsi, toute participation du médecin
à une opération de torture contredit ce principe moral qui préside
à l'intervention médicale. La souffrance et le préjudice qui en
résultent ne procurent en effet aucun bénéfice au patient.
2) "On peut justifier l'intervention médicale non seulement
par l'intérêt du malade, mais aussi par les dispositions du
patient et son désir de la subir" (48). Si le patient n'est
pas atteint d'une maladie mentale, c'est à lui de décider de
l'opportunité ou non de l'intervention et d'accepter ses conséquences.
La torture viole ce principe fondamental parce qu'elle est dans le
seul intérêt du tortionnaire et que l'accord de la victime n'est
pas requis.
3) "L'éthique médicale impose que les soins médicaux
soient donnés à ceux qui ont en besoin sans considération de
situation sociale, de ressources financières ou de convictions
politiques" (49). La participation des médecins dans la
torture des victimes pour des objectifs politiques est en
contradiction avec ce principe.
Les normes éthiques n'ont pas de force légale directe. Elles
constituent juste des lignes directrices régissant le
comportement des fonctionnaires médicaux et leurs rapports aux détenus.
Ces normes ont été élaborées et adoptées par de nombreux
corps de métier de la santé et constituent aujourd'hui une éthique
professionnelle reconnue par tous. C'est une référence pour les
fonctionnaires médicaux. Elle vise aussi à renforcer la
transparence dans la profession et s'adresse principalement aux
hommes de devoir, c'est-à-dire aux fonctionnaires médicaux, pour
les inviter à ne pas s'impliquer dans des actes contraires à la
morale. Elles ne comportent pas de protection du droit du patient
en tant que bénéficiaire du service.
Ces normes organisent le comportement des fonctionnaires de la
santé et ont malgré tout une valeur relative. Les actes
criminels comportent toujours des violations morales. Ainsi les
violations graves des normes éthiques médicales peuvent
constituer matière à pénalisation. Remarquons cependant que
cela n'est pas toujours le cas pour toutes les violations éthiques.
L'implication dans la torture des fonctionnaires de la santé,
engage en principe la responsabilité individuelle, celle de l'Etat
ou du corps médical concerné. Celui qui pratique la torture étant
en principe le médecin ou l'infirmier, c'est donc leur
responsabilité qui est engagée.
Le tribunal de Nuremberg qui avait jugé des criminels de guerre
avait révélé la participation de médecins nazis dans la
torture. Ces pratiques n'engagent alors pas seulement l'Etat mais
aussi les individus, et la responsabilité pénale individuelle
des médecins était donc engagée (51).
Comme le souligne Nigel Roodly : "Le refus d'exécuter des
ordres est contradictoire et complexe pour les agents de police et
les militaires, mais il l'est moins pour les médecins. Ceux-ci
n'appartiennent pas en fait à une profession hiérarchisée et
chaque médecin est théoriquement indépendant. Même les médecins
rattachés à des institutions médicales n'en sont pas aussi dépendants
que le sont les officiers de police et de l'armée de leurs
institutions respectives" (52). La Déclaration de Tokyo
reconnaît les menaces et les dangers qui pèsent sur les
fonctionnaires médicaux au cas où ils refuseraient de participer
à la torture. C'est pour cela que les associations médicales
nationales se doivent de soutenir totalement ces médecins et
leurs familles (53).
Les Principes d'éthique médicale des Nations unies ainsi que la
Déclaration de Tokyo, ne comportent aucune sanction à l'encontre
des fonctionnaires médicaux qui violent leurs recommandations.
Ils n'ont pas prévu non plus des mécanismes de contrôle pour
garantir leur respect. En fait, et parce que les normes éthiques
sont tout juste des recommandations générales, le soin a été
laissé aux corps médicaux nationaux de décider des mesures à
prendre en matière de contrôle, de suivi de l'exécution et de
sanctions.
Le Conseil international des infirmiers s'est, pour sa part,
clairement prononcé là-dessus. Sa déclaration comporte «une
obligation à prendre les mesures adéquates, y compris l'envoi de
rapports aux organismes internationaux ou nationaux»... En fait,
l'absence d'un mécanisme efficace de contrôle et d'échelle de
sanction, sont de nature à ébranler la valeur légale de ces
principes. Mais la valeur éthique et professionnelle demeure de
la plus haute importance.
4) La consécration de telles normes ne peut se faire et donner
lieu à une application, sans être liée aux conventions
internationales des droits de l'homme. Ces normes éthiques
internationales comportent des engagements spécifiques aux
fonctionnaires médicaux en tant qu'individus, alors que les
conventions des droits de l'homme engagent la responsabilité des
Etats au sein desquels ces fonctionnaires médicaux exercent leur
profession. :
La législation internationale des droits de l'homme
II est dans notre intention non pas d'analyser ici les conventions
internationales relatives aux droits de l'homme, mais de retenir
les interdictions de la torture qu'elles comportent.
Sans mentionner spécifiquement les médecins, tous l es textes
des droits de l'homme dans la législation internationale
interdisent en fait l'usage de la torture en toute circonstance et
quelles que soient les justifications et les explications.
Dans la Déclaration universelle des droits de l'Homme (DUDH),
l'article 5 stipule que "nul ne sera soumis à la torture, ni
à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants"
(54). La DUDH occupe une place privilégiée parmi ces textes, étant
donné l'unanimité qui s'est faite autour d'elle. Il convient de
rappeler que cette déclaration inspire nombre de constitutions
nationales et de conventions internationales. Bien qu'elle ne soit
pas une convention internationale et qu'elle n'ait pas d'autorité
légale contraignante, elle est devenue pour les experts, les
juristes et les organisations des droits de l'homme, une partie
intégrante du droit international à caractère contraignant
(55).
L'article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques interdit la torture et autres mauvais traitements. Il
abonde dans ce sens en précisant que "nul ne sera soumis à
la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Il interdit de soumettre une personne sans son libre consentement
à une expérience médicale et scientifique". Tous les pays
signataires de cette déclaration sont tenus de respecter
l'interdiction totale et immédiate de la torture et ne peuvent se
libérer de leur engagement même en état d'exception. L'article
10 stipule pour sa part que "toute personne privée de sa
liberté est traitée avec humanité et avec le respect de la
dignité inhérente à la personne humaine" (56).
L'Assemblée générale des nations unies a adopté en 1984 une
Convention interdisant la torture (57). L'adoption d'un texte séparé
sur l'interdiction de la torture vise, d'une part, à appuyer sa
prohibition et à intensifier la lutte, mais aussi, à présenter
une définition contraignante de la torture, rarement évoquée
ailleurs (58). Cette convention est la seule, au niveau
international, qui consacre l'interdiction de la torture.
Définition de la torture
Selon l'article I de la Convention, le terme "torture" désigne
"tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës,
physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une
personne à fin notamment d'obtenir d'elle ou d'une tierce
personne des renseignements ou des aveux, de la punir d'un acte
qu'elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée
d'avoir commis, de l'intimider ou de faire pression sur une tierce
personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de
discrimination quelle qu'elle soit, lorsque de telles douleurs ou
souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique
ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son
instigation ou avec son consentement exprès ou tacite".
Cette définition n'est pas, à notre sens, exhaustive. Elle ne
fait pas la distinction entre torture et mauvais traitements.
L'article 16 traite spécialement des mauvais traitements, en les
interdisant dans un Etat de droit, mais ne les définit pas et ne
les distingue pas de la torture (60).
Les engagements des Etats
Selon la Déclaration de Tokyo, les médecins et accessoirement
les organismes médicaux, nationaux ou internationaux, sont
responsables de l'exécution des engagements découlant des règles
éthiques. La Déclaration»a été ainsi rédigée: "Tout médecin
-est tenu...", alors que la Convention des nations- unies sur
ta torture engage la responsabilité des Etats. C'est à ces
derniers qu'elle s'adresse et non pas aux individus ou aux
organismes. C'est l'Etat signataire qui assure la responsabilité
légale de l'interdiction de la torture et des mauvais
traitements. L'interdiction faite au médecin de participer à la
torture et aux mauvais traitements engage sa responsabilité
personnelle ainsi que celle de l'Etat.
Le cadre de cette étude ne nous permet pas de détailler les
engagements de l'Etat. Le principal d'entre eux est contenu dans
l'article 4 qui fait de la torture, de toute tentative de
l'exercer ou de tout acte constituant une participation à la
torture, un délit sanctionné par les lois pénales du pays. Il
se peut, concernant les médecins et autres fonctionnaires de la
santé, que l'on prétende que certains d'entre eux
n'appartiennent pas à un corps officiel, laissant planer un doute
sur l'application de l'article 1 de la Convention. Or, celui-ci ne
concerne pas que les fonctionnaires de la santé, mais toute
personne : "Les mêmes dispositions sont applicables à toute
personne convaincue de tentative de participation à la torture,
ou de tout acte l'impliquant ou la compromettant dans la
torture".
Les articles 5 et 7 fondent une responsabilité pénale
internationale, ce qui est d'une grande importance dans une
convention qui consacre la lutte contre la torture. Cette
convention autorise les états signataires - chacun dans les
limites de sa compétence juridique et chaque fois que se
trouverait sur son territoire une personne suspecte d'avoir commis
un crime défini par l'article 4 - d'engager contre elle les
mesures nécessaires, quels que soient sa nationalité d'origine
et le pays où le crime a été commis.
L'article 10 stipule, quant à lui, que les Etats ont la
responsabilité de faire que l'enseignement et l'information sur
l'interdiction de la torture, figurent en bonne place dans les
programmes de formation des fonctionnaires chargés de
l'application des lois.
L'article 11, stipule que tout Etat partie exerce une surveillance
systématique sur les règles, instructions pratiques et méthodes
d'interrogatoire et sur les dispositions concernant la garde et le
traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées,
de quelque façon que ce soit sur tout territoire sous sa
juridiction, en vue d'éviter tout cas de torture.
La vingt quatrième des règles minima des Nations unies pour le
traitement des détenus stipule que "le médecin doit
examiner chaque détenu aussitôt que possible après son
admission et aussi souvent que cela soit nécessaire ultérieurement,
particulièrement en vue de déceler l'existence possible d'une
maladie physique ou mentale, et de prendre toutes les mesures nécessaires
(pour le soigner)". L'examen du "malade doit avoir pour
objet l'intérêt du malade et sa santé et non pas l'évaluation
de ses dispositions à subir l'interrogatoire" (61).
Tous les principes des Nations unies relatifs à la protection des
personnes incarcérées ou détenues, interdisent la torture et l
es mauvais traitements. Ils viennent renforcer la convention de
lutte contre la torture et autres formes de mauvais traitements.
Aussi, les médecins et autres fonctionnaires de la santé ne
peuvent trouver d'excuse à leur participation à la torture, que
ce soit d'une manière passive ou active.
Le premier de ces principes stipule "que les personnes amenées
à être détenues ou emprisonnées doivent être traitées avec
humanité et respectées dans leur dignité" (62). C'est ce
qui a été confirmé par la déclaration de Tokyo et par
l'ensemble des normes relatives à l'éthique médicale et au
comportement des fonctionnaires de santé.
En 1989, le Conseil économique et social des Nations unies a
adopté un ensemble "de principes condamnant les exécutions
extra- judiciaires et abusives" et recommandant de mener les
enquêtes sur ces morts.
Le principe 9 stipule qu'une enquête exhaustive, rapide et honnête
doit se faire, afin de "déterminer la cause du décès, le
moment où il s'est produit, la personne qui en est responsable et
le procédé qui y a conduit. L'enquête doit comporter une
autopsie, la collecte et l'analyse de toutes les preuves matérielles,
ainsi que les témoignages". Pour garantir à l'autopsie sa
neutralité et son efficacité, le principe 12 stipule que celui
qui fait l'autopsie doit pouvoir accéder à tous les éléments
de l'enquête, voir les lieux où s'est produite la mort ainsi que
l'endroit où a été découvert le cadavre.
L'autopsie, quant à elle, doit analyser, selon le principe 13, «toutes
les lésions que porte le corps et les preuves éventuelles de la
torture». Un rapport d'autopsie détaillé doit être fait et
publié, selon le principe 17, et comporter «les preuves de
torture éventuelle, les résultats de l'enquête, les
recommandations.». Le principe 18, qui traite des procédures
judiciaires, engage le pays où de tels actes ont été commis, à
en juger les responsables éventuels et à coopérer avec d'autres
pays en extradant les coupables.
Le principe 19 recommande de "n'accorder aucune immunité à
toute personne dont la compromission dans des actes de torture
serait avérée (...) et ce, en toutes circonstances, y compris l'état
de guerre, de siège ou d'exception".
La juridiction humanitaire internationale
Les lois de cette juridiction sont applicables uniquement en cas
de conflit armé. Les principales conventions en sont les quatre
Conventions de Genève (1949) et leurs deux annexes. Ces
conventions, qui visent à protéger les victimes de la guerre,
comportent de nombreuses interdictions de la torture. Certains de
ses articles sont consacrés aux fonctionnaires de la santé, à
leurs droits et devoirs en cas de conflit armé. L'article 3,
applicable dans les cas de conflits armés à caractère non
international, interdit la torture de s personnes protégées par
ces conventions, en l'occurrence celles qui ne sont pas parties
prenantes dans ces conflits. Il stipule : "sont et demeurent
prohibés, en tout temps, les actes suivants sont interdits en
tout lieu et circonstance : a) les atteintes portées à la vie et
à l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses
formes, les mutilations, les traitements cruels, tortures et
supplices; c) les atteintes à la dignité des personnes,
notamment les traitements humiliants et dégradants".
Les critères internationaux et leur mise en pratique
Après son enquête sur les procédés utilisés par les
instructeurs israéliens dans leurs interrogatoires, la Commission
Landau a recommandé dans son rapport l'usage de pressions
physiques et psychologiques modérées à l'encontre des présumés
terroristes. Elle conclut "que l'action efficace des agents
de sécurité pour neutraliser les actions terroristes, serait
impossible sans recours à la machine de l'interrogatoire qui
permet d'extorquer des informations vitales que seuls les
terroristes connaissent et que l'on ne peut obtenir par d'autres
moyens (66) ". Le professeur israélien Karmetzner commente
le rapport en ces termes : "Si quelqu'un veut interdire la
torture, il n'y a qu'un seul moyen pour y parvenir : c'est de
faire tout pour que le corps du suspect soit tabou" (67).
L'article 1 de la Convention des Nations unies sur la lutte contre
la torture, ratifiée par Israël, définit la torture par rapport
au but qui en est attendu. Ainsi, "la torture est tout acte
provoquant un mal et une grande souffrance, physique ou
psychologique, chez un individu en vue de lui soutirer, à lui ou
à une tierce personne, des informations..." La Commission
Landau a recommandé l'usage de pressions, psychologiques ou
physiques, comme moyen d'extorquer aux présumés terroristes, des
informations vitales. Ces pressions sont une forme de torture
(68), car il est difficile sinon impossible à l'instructeur
d'user de pressions modérées. Il va exercer les pressions jusqu'à
l'obtention d'aveux complets. On ne peut tracer une ligne de séparation
nette entre ce qui est considéré comme torture et ce qui est
pression physique. Comment peut-on considérer comme modérée une
pression qui oblige la victime à faire des aveux contre sa volonté.
En cela, le professeur Karmetzner a bien raison de déclarer :
"Toute pression physique ayant pour but d'obliger quelqu'un
à parler est une torture et au moins un traitement avilissant et
une atteinte à la dignité. Cela aussi est interdit" (69).
Ces procédés "modérés" d'interrogatoire sont demeurés
secrets. Ce qui a été révélé du rapport précise seulement
"l'emploi de menaces et l'usage des gifles" (70).
Amnesty International commente ce rapport en ces termes :
"Ces procédés doivent être pour le moins considérés
comme un traitement ou une punition humiliante et indigne et donc
catégoriquement interdits par le droit international. Les gifles
sur le visage sont un traitement humiliant. Quant aux coups qui
visent les oreilles et les pieds, ils peuvent causer de graves préjudices.
«Les menaces (en particulier les menaces de mort) peuvent représenter
une torture» (71).
Le rapport justifie l'usage de pressions physiques par la nécessité
de lutter contre le terrorisme. Mais cette nécessité ne peut guère
justifier cette tolérance à l'égard de la torture, interdite
formellement par le droit international et par la quatrième
Convention de Genève. Celle-ci l'interdit pour les civils et la
place au niveau d'un crime de guerre. Pour ce qui est du corps médical,
il est précisé que «la neutralité prend fin au moment où
commence la souffrance du détenu et quand le médecin décide de
la prolonger ou de l'ignorer» (72).
Le rapport sur l'état de santé du détenu, que le médecin est
tenu de rédiger à l'entrée de ce dernier au centre de détention,
est révélateur des procédés d'interrogatoire demeurés
secrets. Conformément aux recommandations de la Commission
Landau, la cagoule que l'on met sur la tête du détenu, son enchaînement,
son isolement et la position debout prolongée qu'on lui impose,
sont des procédés régulièrement utilisés. Ils constituent au
moins des mauvais traitements, sinon une torture. La responsabilité
du médecin est manifeste dans tous ces traitements illégitimes,
eu égard à l'éthique de la profession et à la législation
internationale.
L'article 2.4 de la Convention des nations unies contre la torture
stipule que «nul ne peut invoquer lés ordres reçus de supérieurs
hiérarchiques 'ou d'une autorité supérieure pour
justifier" la torture». Les fonctionnaires du corps médical
sont tenus de ne pas participer à la torture. Leur responsabilité
vis-à-vis de l'éthique de leur profession et en tant que
fonctionnaires les en empêche. Leur qualité de fonctionnaire
implique aussi bien évidemment la responsabilité de l'Etat israélien.
L'article 2.1 de la Convention contre la torture stipule que «tout
Etat signataire doit prendre les mesures législatives,
administratives et juridiques efficaces, ou toutes autres mesures
pour empêcher les actes de torture sur tout territoire relevant
de sa juridiction». Ce texte a surtout un caractère préventif.
L'interdiction effective de la torture repose, en effet, sur des
mesures législatives, juridiques, administratives et autres. Le
gouvernement d'Israël n'a pas rempli ses engagements relatifs à
l'article 2.1 de la Convention interdisant aux fonctionnaires de
la santé de participer à la torture, dans les centres
d'interrogatoire. C'est donc l'Etat qui viole la Convention de
lutte contre la torture.
D'autre part et selon les termes mêmes de l'article 11 de la
Convention contre la torture, «chaque Etat doit révéler régulièrement
les conditions, procédés, recommandations et mesures régissant
l'interrogatoire des personnes exposées à la détention sous
toutes ses formes, dans les territoires relevant de sa compétence
juridique et ce en vue d'empêcher la torture». Israël n'a pas
respecté cette clause puisque les recommandations de la
Commission Landau ont donné à la torture et aux autres
traitements inhumains, valeur d'institution. L'adoption de ces
recommandations contrevient aux obligations internationales d'Israël
et a des effets directs sur le rôle des fonctionnaires médicaux.
Les raisons en sont les suivantes. Le rôle joué par les
fonctionnaires médicaux, et surtout les médecins, n'a pas été
pris en compte par la commission Landau, malgré les preuves réelles
de leur implication. L'occultation de certains procédés
d'interrogatoire par la Commission Landau a de graves conséquences.
L'avocat Avigdor Feeldman écrit à ce propos : «Les pressions
physiques modérées n'ont souvent pas le succès escompté et il
s'ensuit le décès du suspect. Dans ce cas, il faut faire appel
au médecin qui, tenu par le rapport Landau de garder le secret
sur les procédés d'interrogatoire, ne dira rien. Il pourra même
fabriquer de toutes pièces le rapport médical et ira jusqu'à le
falsifier en déclarant qu'il n'y a pas eu coups mais blessures au
cours d'une tentative d'évasion » (73).
En fait, c'e st ce qui arrive chaque fois que quelqu'un subit la
torture et qu'on le transporte chez le médecin. Celui-ci ne peut
lever le secret sur les méthodes d'interrogatoire qui constituent
une politique officielle à caractère secret. Ce faisant, le médecin
couvre le crime de torture. C'est un cercle vicieux : L'Etat
institutionnalise la torture, oblige les médecins à ne pas dévoiler
les méthodes pratiquées au cours de l'interrogatoire, ce qui
implique leur complicité dans les actes de torture. Evidemment,
l'Etat n'entame aucune poursuite contre eux.
Le rôle du Conseil de l'ordre des médecins israéliens
Les principes de l'Ethique médicale des Nations unies ainsi que
la Déclaration de Tokyo ont été ratifiés par le Conseil de
l'ordre des médecins israéliens. Rappelons tout de même que ces
deux documents ne prévoient aucun mécanisme de contrôle
national ou international, pour garantir une conformité du
comportement des médecins aux critères éthiques. L'absence d'un
tel mécanisme relativise l'interdiction de la torture. Et
l'incitation par les juridictions internationales à adresser des
rapports aux organismes nationaux ou internationaux spécialisés
se révèle purement formelle. L'OMS, consciente de ce qu'un tel
refus pourrait créer comme désagréments à ses auteurs, promet
son soutien à ces médecins et appelle les organismes de médecins
nationaux et internationaux à les soutenir. Il est, dans ces
conditions, pour le moins curieux que jamais un médecin israélien
n'ait opposé un tel refus. On ne peut dès lors que s'interroger
sur le rôle de l'ordre des médecins israéliens.
En juillet 1990, le Dr Rohamma Maraton, présidente de la Ligue
des médecins palestiniens israéliens pour les droits de l'homme,
a écrit au Dr Myriam Zenger, présidente l'ordre des médecins
israéliens, la lettre suivante : «Les fonctionnaires médicaux
se retrouvent souvent dans des lieux sensibles où s'exercent des
actes de violence et de torture. Aussi, nous invitons tous ces
fonctionnaires médicaux à s'opposer à tout acte de violence et
de torture qu'ils viendraient à surprendre et à nous adresser
des rapports dans ce sens» (74). Le D1" Zenger a promis dans
sa réponse d'enquêter «sur toute accusation de participation à
la torture lancée contre un médecin». Rien de tel ne s'est
jamais produit et aucune enquête de ce genre n'a été entreprise
(75). Le Dr Zenger a adressé aussi une lettre au Premier ministre
israélien au sujet «du formulaire que remplissent les médecins
à propos de l'état de santé des détenus», dans laquelle elle
déclarait que l'ordre des médecins israéliens ignorait tout du
formulaire dont elle avait pourtant reçu une copie envoyée par
la Ligue des médecins palestiniens et israéliens pour les droits
de l'homme. Elle ajoutait : "si un tel formulaire existe réellement,
nous n'en avons absolument pas connaissance... Les médecins ne
seraient de toute façon pas autorisés à répondre aux questions
(B, C et D) du formulaire, ni prêter leur concours aux autorités
pour de semblables pratiques" (76). Cette lettre montre bien
que l'Ordre des médecins israéliens ne fait pas convenablement
son travail de contrôle, en particulier auprès des médecins
exerçant dans les camps de détention et les prisons israéliennes
(77).
Affirmer, comme le Dr Zenger, que les médecins ne sont pas
autorisés à coopérer avec les autorités à propos du
questionnaire ne suffit pas. L'ordre des médecins devrait enquêter
très sérieusement sur les médecins des prisons et des camps
pour mettre fin à ces graves violations. «La juridiction
internationale et les principes éthiques unanimement reconnus
dans le monde peuvent constituer une arme redoutable dans une
action menée de leur propre initiative par le monde médical et
la société toute .entière» (78). Sanctionner les médecins
reconnus coupables de participation à la torture est d'une grande
importance si l'ordre des médecins a vraiment le souci d'empêcher
l'implication des médecins dans la torture. Car, en dernier
ressort, ce sont ceux qui (font silence sur ces pratiques qui
portent la principale responsabilité.
NOTES :
1-
Amnesty International, Involvement of Medical Personnel in 'Abuses
Against Detainees and Prisoners, AI Index: ACT 75/08/90, Nov.
1990, p.3.
2- British Medical Association, Medicine betrayed, Zed book,
London, 1992, p.2.
3- Amnesty International, Israel and the Occupied Territories:
Fears of Torture or ill-treatment, London, 1992, AI Index: MED
15/5/92.
4- Azzet Nafissou : officier circassien de l'armée israélienne.
Arrêté, jugé et condamné par un tribunal militaire à 18 ans
de prison pour espionnage en faveur de la Syrie. Il allégua à l'époque
que ses aveux lui furent extorqués sous la torture mais les
instructeurs du service de sécurité générale l'ont nié.
Quant à l'affaire du Bus n° 300, il s'agissait de quatre
Palestiniens originaires de Gaza qui se sont emparés en avril
1985 d'un bus israélien et ont ordonné au chauffeur de se
diriger vers la frontière égyptienne. En cours de route, un
commando israélien a attaqué le bus. Il fut publié sur le
moment que les auteurs de la prise d'otages avaient été tués
lors de l'attaque. Mais des photos prises lors de l'attaque
montrent que deux des quatre preneurs d'otages ont été arrêtés
vivants et tués par la suite.
Dioud Yatoum était sous-directeur de la Sécurité générale
israélienne et principal suspect dans l'affaire du Bus n° 300.
C'est lui qui a participé à l'action du commando et ordonné la
mise à mort des deux rescapés. Il a été démis de ses
fonctions mais, au lieu de passer en jugement, il fut nommé par
Natanyahou conseiller pour les affaires de terrorisme. Le Centre
palestinien des droits de l 'homme a demandé au nom des familles
des victimes la réouverture du dossier et réclamé l'inculpation
de Yatoum à la suite de la publication de ses aveux dans le
journal Y. Ahranout du 31 octobre 1996. Le ministère public israélien
a refusé la requête au motif que Yatoum, gracié par le Premier
ministre, ne peut être jugé dans une affaire définitivement
close. Le Centre palestinien a publié de nombreux communiqués à
ce sujet pour réclamer, vainement, la comparution de Yatoum en
justice.
Pour plus d'information : Al-Haq, A nation Under Siege, Al-Haq
annual Report on Human Rights Report in the Occupied Territories
of 1989, Ramallah, West Bank, 1990, p. 171.
5- The Report of the Commission of Inquiry of the methods of
Interrogation of the General Security Services Regarding Hostile
Activity (Known as Landau Commission) was Published by on 30
October 1987. The full English translated text is in the Library
of the Palestinian Center for Human Rights. Ch.4, Par. 26. See
also par. 20 and 36.
6- Al-Haq : A nation Under Siège, p. 171.
7- Rapport de la Commission Landau 4 et 7
8- Pour plus de détails sur le rapport de la Commission, cf.
Moderate physical pressure : Interrogation methods in Israël, The
Public Committee Against Torture in Israel, Jerusalem, 1990,
pp.14-19.
9- Amnesty International, "Israel and the occupied
Territories : Doctors: and Interrogation Practices, the case of
Nader Qumsieh", AI Index : MED 15 September 1993, p. 17.
10-Annexe I
11-Annexe n
12- Organisation Al-Haq : témoignage n° 15 53.
13- Organisation Al-Haq : témoignage de Youssef Manna, âgé de
18 ans, en date du 23 juin 1989.
14- Organisation Al-Haq : témoignage n° 461 en date 11 juin 1984
15- Organisation Al-Haq : témoignage n° 459 en date du 11 juin
1984.
16- Hanna Friedman, "Where Have ail doctors Gone?"
Challenge, Jerusalem, vol. III., n°6, p.12.
16- Hanna Friedman, "Where Have All the Doctors Gone?"
Challenge, Jerusalem, vol. III, no. 6, p. 12.
17- Organisation Al-Haq : témoignage n° 3181 en date 8/07/1992.
18- A Nation Under Siege, P. 214
19- Arie Shavit, "Twelve days on Gaza Beach" reprinted
from Ha'aretz, 3rd March 1991, translated and published by Al-Fajr
a weekly newspaper, published in East Jerusalem, 13 and 20 May
1991.
20- Ruchama Maraton, "Defaming Torture: Medical Community and
the Employing of Torture", News from within, 2nd July 1993,
p.8.
21- Le rapport d'A.I. déjà cité.
22- Ruchama Maraton, : "The white coat passes like a shadow:
the health profession and torture in Israel" in N. Gordon
& R. Maraton (ed.) Torture: Human Rights, Medical Ethics and
the Case of Israel, Zed Books, new Jersey, 1995, p. 34,
23- A Nation Under Siege, P 106
24-Ibid,P.107
25- The Association of Israeli - Palestinian Physicians for Human
Rights, Annual Report 1990, Tel-Aviv, p. 30.
26-
Le premier cas où une famille fût autorisée à déléguer un médecin
légiste pour assister à l'autopsie fut le cas de Ibrahim Al
Moutaouar, décédé en date du 21 octobre 98, au camp Addahiria
à El-Khalil.
27- La première fois où les autorités israéliennes autorisèrent
un médecin légiste désigné par la famille d'une victime à se
rendre sur le lieu du décès ce fut lors du décès de Khaled
Ecchikh à la prison centrale de Gaza le 20 décembre 1989.
28- A Nation Under Siège, P.230.
29- Le cas du défunt Ibrahim Al Moutaouar, fut le premier où le
rapport d'un médecin légiste a été publié par l'Institut de médecine
légale. Auparavant ces rapports étaient gardés secrets.
30- Robert H.Kirschner, "Medico Legal Death Investigation in
Israel" in R.Maraton and N.Gordon in R.Maraton and N.Gordon (ed.),
Torture : Human Rights, Medical Ethics and the Case of Israel (
AIPCHR), Zed Books, New Jersey, 1995, p..83.
31- Eric Sover, Breaking of Bodies and Minds, W.H. Freeman Company,
New York 1985, p.30. Pour une étude plus détaillée sur les
crimes commis par les médecins Nazis au cours de la 2ème guerre
mondiale, voir : G.Annas M.Grodin, The Nazi Doctors and the
Nuremberg Code : Human Rights in Human Experimentation, 1992,
Oxford University Press, Ch 4 and 5.
32- Geneva Oath, voir : Amnesty International, Ethical codes and
Declarations relevant to the Health Professions, AI Index : ACT
75/01/85, Second Edition : June 1985, p.2.
33- Source précédente, P. 5
34- Voir texte complet dans la source précédente, P 90. Le texte
de la Déclaration est publié en français dans : Commission médicale
de la section française d'A.I et Valérie Marange: Médecins
tortionnaires, médecins résistants, La Découverte, Paris, 1989,
P. 166-167.
35- L'Assemblée générale de l'ONU. a adopté en 1975 "La déclaration
de protection contre la torture..." et tout de suite après
la résolution N° 2453, dans laquelle elle lança un appel à
l'OMS pour accorder un intérêt supplémentaire à l'étude des
problèmes d'éthique médicale en rapport avec la protection des
personnes contre la torture et les mauvais traitements. L'OMS a
publié en janvier 1979, un rapport intitulé "Evolution des
critères éthiques médicaux". Dans une de ses annexes,
figurait un avant-projet de principes, préparé par Le Conseil
des organisations mondiales des sciences médicales (CIOMC). L'Assemblée
générale des N.U. a adopté au cours de sa 37ème session
"les principes éthiques de la profession médicale" et
ce par décision N°37/194, datée du 18 décembre 1982.
36- Danish Médical Bulletin, Copenhagen, Vol.43.N°4, August
1987,p . l95.
37- Rapport du rapporteur de l'ONU. pour la torture UN/ DOC.E /CN
4/1987/13, 9 January 1987, p.10, paragraph 28.
38- Amnesty International French Medical Commission and Valérie
Marange, Doctors and Torture, Bellow Publishing, London, 1989,
p.26.
39- Niger Rodly, The Treatment of prisoners under International
Law, Oxford University Press. New York 1987, p.296.
40- II n'est pas permis aux fonctionnaires médicaux de participer
sous quelque forme que ce soit, à une sanction corporelle ou
toute autre sanction pouvant avoir des effets contraires à la
bonne santé, physique ou mentale du prisonnier ou du détenu. En
plus, les fonctionnaires médicaux sont dans l'obligation
d'estimer si de telles sanctions son t conformes aux critères
internationaux. Source précédente, P.294-296.
41- L'Association mondiale de psychiatrie a adopté la déclaration
de Hawaï en 1977 au congrès international de la médecine
mentale de Honolulu. Pour connaître le texte de la déclaration,
voir Amnesty International, Ethical Codes.
42- Source citée, p. 12.
43-A été adopté par l'assemblée du Conseil international des
infirmiers à Séoul, en Mai 1989.
44- Déclaration de Madrid : adoptée par la commission permanente
des Médecins européens, lors de sa réunion à Madrid en date du
24 et 25 Novembre 1989.
45- Danish Medical Bulletin, Copenhagen, January 1990, Supplement
N° 1, p.45.
46- Breaking of Bodies and Minds, p. 13.
47-Source citée.p36.
48-Source précédente. P.36
49-Source précédente, p.3 6.
50- Danish Medical Bulletin : Source citée, p.194-195.
51-Rodly, op. cité, p.278,
52-Source précédente , p.298.
53- Les principes d'éthique médicale des Nations unies n'ont pas
comporté un article équivalent. Ceci s'explique par le fait que
la Déclaration de Tokyo a été le fait d'un organisme
professionnel et non d'une institution politique comme les Nations
unies.
54- L'assemblée générale des Nations Unies. a adopté la Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme par sa résolution 217(ii), le
10 Décembre 1948.
55-Pour plus de détails sur la valeur juridique de la DUDH, voir
par exemple : Humphrey J, The Universal Declaration of human
Rights : Its History, Impact and Judicial Character in Ramcharan
C(ed) Human Rights, Thirty Years after the Universal Declaration,
Nijhoff,1977.
56- L'Assemblée générale des N.U a adopté le traité
international sur les droits civiques et politiques. Résolution
2200 ACXXI, en date du 16 Décembre 1966.
57- La Convention des nations unies contre la torture a été
adoptée par l'Assemblé générale des N.U. par sa résolution
39/46 en date du 10 décembre 1984.
58- Pour les objectifs de la convention, voir notamment : Sighart
P. ; The international Law of Human Rights, Clarendon ; Press,
Oxford 1983, p.173. See also Rodly, p.173.
59- Pour plus de renseignements sur de tels manques, voir par
exemple : Tardu, ME, the UN Convention and other Cruel, Inhuman or
Degrading treatment or Punishment, 56 Nordic journal of
International Law. Botterud K, International Protection of
Fundamental Freedoms and Human Rights : The Convention Against
Torture and Other Cruel, Inhuman or Degrading Treatment or
Punishment, 8 ASILS International Law Journal, 1984.
60- La Commission Européenne des droits de l'Homme a été la
première à donner une définition de la torture dans le cas de
Greek case le 5 novembre 1969, lors de son interprétation de
l'article 3 de la Convention Européenne des droits de l'homme,
p.45.
61- L'ensemble de Règles minima pour le traitement des détenus,
ont été adoptées par la première réunion des Nations Unies
consacrée au crime, tenue à Genève en 1955. Elles ont été
adoptées par le Conseil Economique et Social des Nations Unies
par ses résolutions 663 (D-24), datée du 31 juillet 1975, et
2067 (D-62), en date du 13 mai 1977.
62- L'ensemble des Principes pour la protection de toutes les
personnes soumises à une forme quelconque de détention ou
d'emprisonnement, ont été adoptés par la résolution de
l'assemblée générale des N.U. 43/173, en date du 9 décembre
1988.
63- Le Comité International de la Croix Rouge : Convention de Genève,
en date du 12 août 1949, Gen ève 1989. Les annexes aux
conventions de Genève en date du 12 août 1949, Genève 1977.
64- Voir les articles 12 de la première Convention, les articles
17 et 87 de la troisième Convention et les articles 32, 118, 119
de la quatrième Convention.
65- Voir l es articles : 50 de la première Convention, SI delà
deuxième Convention, 13 de la troisième et 147 de la quatrième.
66- Rapport de la Commission Landau, 4et 6.
67- Moderate Physical Pressure, p. 18.
68- Pour que le mauvais traitement le soit vraiment, il n'a pas
besoin d'être prémédité. La convention des N.U. ne l'a pas
mentionné comme elle l'a fait pour la torture.
69- Source précédente, p. 18.
70-Commission Landau, 3 et 15.
71- Amnesty International, Israel and the Occupied Territories,
The Military justice System in the Occupied Territories. Detention,
Interrogation and Trial Procedures, AI Index : MED 15/34/91, July
1991, p.63.
72- Doctors and Torture, p.28. op. cité.
73- Moderate physical pressure, p.25.
74- Judith Green, "The Doctoring of Torture : Israel’s
Medical Profession turns a Blind Eye to Human Rights
Violations", Challenge, Jerusalem, V.ILN0 3, May-June 1991.
75- Source précédente, p. 12.
76- Voir annexe II.
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