Interview
« Les pays européens doivent juger et
condamner tous leurs nationaux ayant
participé aux crimes de guerre à Gaza »
Hajj Abu ‘Imad Rifâ’î
Mardi 5 août 2014
Interview de Hajj Abu ‘Imad Rifâ’î,
représentant au Liban du mouvement du
Jihad islamique en Palestine sur la
chaîne al-Manar, le 4/8/2014
Au moment où la
délégation palestinienne préparait les
futures négociations pour un
cessez-le-feu et la levée totale du
blocus, Hajj Abu ‘Imad Rifâ’î répondait
aux questions de la chaîne al-Manar,
expliquant que «l’acquis le plus
important remporté par la résistance est
précisément cette délégation unie au
Caire qui a instauré un climat positif,à
cause de la position unique
palestinienne attendue depuis longtemps.
L’unité de la délégation fut également
un acquis positif envers l’Egypte
puisque le document palestinien
(cessation de l’agression et fin du
blocus, libération des prisonniers
arrêtés depuis juin 2014 et les
prisonniers détenus avant 1993,
ouverture des terminaux) a été accepté
par l’Egypte. Il est vrai que le peuple
palestinien a beaucoup souffert du
blocus.
Dans l’attente
d’une position unifiée sur la « trêve
humanitaire » de 72 heures, le
représentant du mouvement du Jihad
islamique a expliqué qu’il n’y avait
aucune garantie, puisqu’il n’est pas
possible de croire la parole des
Israéliens, mais que la résistance
saurait répondre s’il le faut.
Selon lui, la
position égyptienne a changé à cause de
trois facteurs, le premier étant que les
Palestiniens ont présenté un document
unifié et que l’Egypte n’avait pas en
face de lui le Hamas seulement, l’Egypte
a donc accepté ce document et l’a même
adopté. Ensuite la résistance a réussi à
empêcher l’ennemi d’accomplir ses
objectifs, il s’est au contraire noyé
dans les sables de Gaza, et puis les
massacres inhumains perpétrés par l’Etat
occupant ne peuvent laisser indifférent
tout régime et tout peuple, d’autant
plus que l’opinion internationale et des
pays comme ceux de l’Amérique Latine ont
fermement dénoncé les pratiques
criminelles de l’entité occupante. Même
les intellectuels égyptiens qui, au
début, avaient critiqué la résistance,
se sont tus devant l’ampleur des
massacres commis et ont compris que
c’est le peuple palestinien qui était
visé et non seulement une partie de la
résistance.
Il a considéré que
l’occupant essaie d’améliorer ses
conditions pour les négociations, en
réclamant le désarmement de la
résistance, mais il n’est absolument pas
question de désarmer la résistance, la
Palestine est un pays occupé et la
résistance est légitime. L’ennemi essaie
de récupérer par la voie politique ce
qu’il a perdu dans le terrain militaire,
il n’a pu accomplir ses objectifs. Il
essaie, par ses conditions, de faire
pression sur l’Egypte et les
Palestiniens. Mais ses conditions sont
refusées tout net par la résistance. Les
Israéliens ont perdu, ils vivent une
crise et ont déjà commencé à faire leurs
bilans et leurs comptes : des voix
militaires disent que les soldats ont
été envoyés à Gaza sans équipements
adéquats, et qu’ils ne connaissaient
rien aux tunnels, et ces tunnels sont
apparus comme étant l’objectif après la
défaite aérienne, où l’avion n’a pu
arrêter les tirs des fusées de la
résistance. L’ennemi s’est trouvé dans
l’impasse, il ne pouvait rester et ne
pouvait avancer, il a eu d’énormes
pertes. Tout ce qu’il a réussi à faire,
c’est massacrer plus de 1800 personnes,
dont de nombreux enfants , blessé plus
de 9000 personnes, démoli totalement ou
partiellement 45.000 habitations,
détruit partiellement ou totalement 10
hôpitaux, et déplacé un demi-million de
Palestiniens. C’est son bilan.
Si l’ennemi pense à
un retrait unilatéral, cela est dû à la
résistance, mais nous n’accepterons pas
que le blocus soit maintenu. Il pose des
conditions, mais cela ne signifie
aucunement que c’est acquis. La
résistance est toujours présente, elle a
le droit de s’armer, et nous avons le
droit de résister. Personne ne peut
discuter la question des armes de la
résistance.
Le représentant du
mouvement du Jihad islamique pense que
le temps des négociations ne sera pas
long, d’autant plus que l’ambiance
internationale fait pression en faveur
des droits des Palestiniens et que
l’opinion est en train de changer car
« Israël » a commis des crimes et des
massacres, il a bombardé des écoles de
l’UNRWA, et cela a fait pencher
l’opinion internationale en faveur des
droits des Palestiniens.
Concernant le
climat régional, Abu ‘Imad Rifa’î a
souligné que l’ennemi sioniste a lancé
sa guerre en ayant contracté des
alliances régionales, mais le peuple
palestinien, par sa résistance, a fait
échec à cette alliance, qui pensait que
l’affaire serait réglée au bout de deux
semaines et que l’agression allait
diviser le peuple palestinien. Mais
celle-ci a, au contraire, unifié le
peuple palestinien et l’alliance
régionale a échoué.
La victoire de la
résistance à Gaza a empêché que l’ennemi
sioniste ait sa place dans la
configuration de la carte de la région.
L’alliance régionale qu’il avait
concoctée visait à sa participation dans
cette reconfiguration, mais la
résistance a arrêté ce processus. Si,
par malheur, la résistance avait échoué,
cette participation de l’ennemi aurait
été acquise. Mais la résistance a
protégé la région d’un tel désastre.
Concernant les
acquis de la résistance, ils sont
nombreux, selon le représentant du
mouvement du Jihad islamique :
1 - d’abord, elle a
réussi à empêcher l’ennemi d’utiliser et
d’approfondir la division palestinienne.
Au contraire, les Palestiniens sont à
présent unis pour leurs droits.
2 – la résistance a
fait échec au projet de faire participer
« Israël » à la reconfiguration de la
carte de la région.
3 – Elle a empêché
la liquidation de la résistance, ce qui
signifie qu’elle va empêcher d’imposer
de nouveaux reculs et concessions à
l’Autorité palestinienne.
4 – La résistance a
remis la question palestinienne
au-devant de la scène, elle a réussi à
la remettre en avant, à en faire la
boussole. Car il est important de noter
que la question palestinienne est la
seule question vivante qui peut unifier
la nation et le monde, autour de
l’injustice subie par le peuple
palestinien. De nombreux conflits
existent dans le monde, mais tout le
monde s’unifie sur la question, sacrée,
de la Palestine, musulmans et non
musulmans. La résistance a réussi à
changer l’opinion internationale, et a
modifié l’image de l’ennemi israélien
qui apparaît comme le tueur des enfants.
5 - Israël a perdu
son rôle et sa fonction dans la région.
Depuis 2000, Israël perd progressivement
sa fonction dans la région, en tant que
protecteur des intérêts américains et
impérialistes. Il n’a pu les défendre et
a subi des pertes. Et la résistance a
surtout empêché qu’il revienne de
nouveau sur la scène, après les reculs
enregistrés ces dernières années. La
résistance et le sang des enfants ont
empêché le retour d’Israël dans la
région.
Pour Abu ‘Imad
Rifa’î, La victoire de Gaza aura des
répercussions positives et négatives
pour certains. La résistance a réussi à
échapper aux alignements de la région,
en maintenant la boussole à l’extérieur
des axes présents. Il affirme que la
résistance a craint, au début, que le
conflit entre les axes ne se répercute
sur la question de la Palestine, et la
Palestine aurait été la victime de ces
conflits, car « nous pensons que la
Palestine doit être au-dessus des axes
et alignements, elle doit faire
l’unanimité. La plupart des
organisations palestiniennes ont réalisé
la justesse d’une telle position, nous
sommes parvenus à maintenir cette
dimension et empêché que les axes se
reflètent à l’intérieur du mouvement de
la résistance. Nous nous sommes adressés
à tous les Arabes pour qu’ils mettent
fin à l’agression, et concernant le
document égyptien, nous avons dès le
départ jugé qu’il fallait le modifier.
Finalement, cela a été accepté ».
Les répercussions
de la défaite israélienne vont se
manifester à deux niveaux, l’immédiat et
le stratégique. L’immédiat, c’est la
crise au sein de l’entité, les
accusations portées contre les uns et
les autres pour leur faire porter la
responsabilité de la défaite. Des
commissions commencent à s’organiser
pour juger les responsables. Sur le plan
stratégique, le soutien occidental à
l’entité sioniste ne sera plus aussi
absolu. Les Etats-Unis ont certes aidé
l’agression, mais comparativement, moins
qu’avant. Il y a et il y aura
recul, « Israël » est en train de perdre
sa fonction dans la région, et cela va
se faire ressentir. La résistance a
remporté une victoire militaire, qui
sera suivie d’une victoire politique.
Mais cette victoire n’est pas uniquement
la victoire des Palestiniens, mais celle
de toute la nation.
Avant de terminer,
Abu ‘Imad Rifa’î a voulu consacrer une
partie de ses paroles au sujet de ces
soldats enrôlés par l’armée sioniste,
soldats considérés citoyens dans les
pays occidentaux, Etats-Unis, et Europe,
dont la France. Des milliers de citoyens
occidentaux ont participé à cette
guerre, en tant que soldats et
officiers. Comme jadis le soldat Shalit,
qui porte la nationalité française, des
milliers de soldats de l’armée
d’occupation viennent des pays
occidentaux. C’est pourquoi il considère
que les Etats européens et américain
doivent juger et condamner ces citoyens,
qui ont participé à des crimes de guerre
à Gaza. Tout comme les pays européens
jugent et condamnent des citoyens
musulmans qui rejoignent les groupes
armés dans la région, il faut juger et
condamner ceux qui partent en « Israël »
et participent aux guerres menées par
l’entité sioniste.
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