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Opinion

Intervention à l'occasion de comité scientifique annuel de la Fondation Internationale Oasis
Moncef Marzouki

Mardi 19 juin 2012

Mesdames et Messieurs, Chers amis,

Au nom de tous les tunisiens et en mon nom propre Je vous souhaite la bienvenue, et remercie d’avoir choisi Tunis pour cette rencontre de la fondation Oasis.

Son objectif est d’analyser non seulement les conditions des libertés dans la Tunisie d’après la révolution, mais de montrer en quoi les événements tunisiens ont bouleversé un certain nombre de paradigmes occidentaux sur la question du rapport entre religion et politique.

On ne peut qu’encourager les discussions de ce type, qui refusent d’adopter les paradigmes réducteurs de l’opposition entre islam et sécularisme. La révolution tunisienne s’est distinguée en ce qu’elle n’était ni une révolution religieuse, ni une révolution laïque, mais une révolution pour le dépassement de ces oppositions stériles, pour la dignité, pour les libertés.

Hier, son éminence le cardinal Scola, évoquant les défis de la compréhension mutuelle entre orient et occident, insistait sur la nécessité d’élargir les référents des uns et des autres, et non pas simplement de les juxtaposer.

C’est bien là l’enjeu central de la période de transition que nous traversons. Les défis que nous devons désormais relever ne concernent plus simplement la problématique du dialogue des religions ou des civilisations, de la protection paternaliste des minorités religieuses par un Etat autoritaire.

La problématique de la liberté religieuse ne doit pas être pensée séparément de la question de la citoyenneté et donc de la démocratie et de l’ensemble de ses valeurs et mécanismes, dont la liberté d’expression.

Les défis sont nombreux, les sources d’inquiétude réelles, mais il faut aussi nuancer la description pessimiste que les commentateurs occidentaux inquiets donnent du monde arabe.

Les débats sur l’équilibre entre liberté d’expression et liberté religieuse, sur la place des symboles religieux dans l’espace public, sur le sens du sacré, ne sont en rien spécifiques à la Tunisie ou à l’islam.

La cour suprême américaine débat de l’interprétation du premier amendement de la constitution depuis le 19ème siècle, et s’interroge toujours sur l’équilibre entre la clause d’établissement et la clause de libre exercice.

La cour européenne des droits de l’homme a débattu récemment de la question de savoir si les crucifix peuvent être accrochés dans les salles de classe italienne, et s’ils sont un symbole religieux ou culturel.

Les catholiques ont manifesté cette année en France contre une pièce de théâtre jugée blasphématoire. Les Américains ont protesté contre le caractère offensant de la construction d’un centre islamique près du site de Ground Zero…

Nulle part, la revendication du droit à la liberté d’expression totale n’existe sans être remise en cause par la référence à d’autres types de normes, morales, religieuses.

Cette problématique n’est en rien propre à la Tunisie. Il n’y a pas non plus de spécificité islamique.

Toutes les religions sont traversées aujourd’hui, comme hier, par des débats importants. Les questions de l’avortement, du droit des homosexuels sont centrales aux discussions actuelles du christianisme.

Mon propos n’est pas ici de confondre tous ces contextes, mais de rappeler que l’interrogation sur l’équilibre entre les diverses libertés, la liberté religieuse et la liberté d’expression, est propre à toutes les sociétés, occidentale et non occidentale. Toutes les religions doivent gérer des débats internes profonds. Enfin, l’argument de la liberté religieuse n’est pas toujours utilisé à des fins progressistes, mais parfois aussi pour maintenir le contrôle d’institutions religieuses sur les membres de leurs communautés.

Ces interrogations, ces débats, ne peuvent bien entendu s’éterniser et doivent aboutir à la mise en place de solutions juridiques et institutionnelles. Mais les controverses sont nécessaires, car les droits n’ont de sens que si le peuple se les approprie. C’est par les controverses que cette appropriation se fait. C’est du conflit politique –raisonné- que naît un consensus réel.

Tout le monde est invité à prendre part aux débats en cours, toutes les personnes, quelle que soit leur appartenance religieuse ou leur non appartenance religieuse. C’est seulement de cette façon que l’on pourra créer un nouveau monde commun. Cet engagement est non seulement un droit, mais une nécessité, car, comme le disait Mgr Scola hier, la tentation du repli n’a pas de sens : « il n’existe aucune île sur laquelle se retirer, ni aucune enceinte où se réfugier ».

Qu’est ce qui doit émerger de tout cela pour moi qui suis un citoyen de ce pays en mutation, et un responsable politique participant à la gestion de cette mutation ?

Pour moi face aux difficultés crées par les peurs, les incompréhensions et l’extrême tension nerveuse qui caractérise les périodes charnières, il faut maintenir un cap. S’il faut défendre la liberté de conscience, c’est parce qu’elle est le fondement d’un type d’appartenance moderne qu’est la citoyenneté. Aujourd’hui l’appartenance religieuse fonde l’appartenance à une communauté de foi, et non à l’appartenance à la communauté nationale.

On peut être citoyen tunisien, tout en étant musulman, chrétien, juif, athée. Le plus important est qu’on le soit sans difficulté, de façon non conflictuelle, naturelle, confortable oserais-je dire, en connivence et en synergie avec l’autre reconnu et accepté comme si différent et si semblable. Tel est notre objectif, tel est notre destin si nous voulons nous humaniser chaque jour un peu plus. Je vous remercie.

 

 

   

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Source : Le site de l'auteur
http://moncef-marzouki.net/...

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