Entretien
Houria Bouteldja : “Je combats mon
intégration”
Mercredi 5 juillet 2017
Ciblée par une virulente campagne
médiatique (Le Monde, Le Figaro,
Libération, Marianne, Valeurs Actuelles,
etc.) l’accusant de « racisme »,
«d’homophobie » et «d’antiféminisme»,
Houria Bouteldja n’a pu répondre à ses
détracteurs. Et pour cause : aucun média
ne l’a sollicitée. Ecueil journalistique
corrigé. La porte-parole du Parti des
Indigènes de la République (PIR) a
accepté de répondre à nos questions.
Sans dérobade ni complaisance.
Entretien.
Par Olivier Mukuna
Plus de dix
jours de polémique avec la sortie quasi
quotidienne d’un article accusatoire
contre vous et le PIR : pourquoi aucun
média français ne vous donne-t-il la
parole ?
Houria
Bouteldja : C’est précisément
le nœud du problème. On parle de nous
mais sans nous. Chacun a son mot à dire,
chacun a toute latitude pour déformer ce
qu’on dit, mais il serait effectivement
très dangereux de nous donner la parole
parce qu’on risquerait de rectifier
(rire)... En fait, il s’agit surtout de
créer une Houria Bouteldja et une
organisation politique imaginaire. Créer
des « monstres » infréquentables en lieu
et place de ce qui existe vraiment.
Quelle est
la production médiatique qui vous a la
plus insupporté ?
H.B :
Probablement, la première, celle du
Monde, signée par Jean Birnbaum (1).
Tout d’abord parce que le quotidien
jouit d’une autorité et d’un grand
prestige. Ensuite, parce que cette
production se veut objective. Elle se
distingue des autres, de droite et
d’extrême-droite, qui sont pour la
plupart outrancières et beaucoup moins
crédibles. Le Monde, lui, a le crédit de
la respectabilité. Cet article de
Birnbaum évoque une gauche divisée. A
partir de ce postulat, d’un point de vue
déontologique et journalistique, il
fallait donc donner la parole aux
représentants des deux gauches. Or, tout
au long de son papier, il ne parle que
d’une seule gauche, celle qui nous est
hostile, et pas de la gauche plus
favorable aux thèses décoloniales.
Plus d'un
an après la sortie de son premier et
brillant essai, qui tutoie les
fulgurances de Césaire
et Fanon, il reste "difficile" pour
beaucoup de débattre avec
Houria
Bouteldja.
Parallèlement à la défense de la députée
Danièle Obono (FI), Libération a publié
un article jugeant les accusations de
racisme et d’homophobie portées contre
vous « moins intéressantes » que celle
de votre supposé «antiféminisme » (2)
...
H.B :
Disons que, dans la grande presse,
Danièle Obono est plus facilement
défendable que moi car elle milite dans
une organisation « respectable ». Il y a
néanmoins eu Olivier Tonneau - membre de
la France Insoumise (FI), blogueur sur
Mediapart et que je ne connais pas - qui
a été très correct avec le PIR (3). Pour
revenir à Libération, ils n’ont jamais
été anti-PIR : c’est pire, ils nous
ignorent. Sur les 12 dernières années,
depuis qu’on existe, il n’y a jamais eu
un seul article journalistique
concernant le PIR dans Libération. Juste
la recension incendiaire de mon livre
(4) et la publication de rares tribunes
prenant notre défense, comme celle
d’Océane Rose Marie (5). Du coup, avec
cet article que vous évoquez, je
constate chez Libération une évolution
presque positive (rire)... Quant à cet
«antiféminisme », il s’agit d’une
lecture erronée et tendancieuse de ce
que je dis ; ce qui permet à Libé d’être
moins vulgairement outrancier que les
autres tout en choisissant son camp.
Mais bon, c’est déjà plus honnête
puisqu’on reste dans le débat d’idées.
Vous n’avez
pas de condamnation judiciaire, votre
livre paru l’année dernière connaît un
essor international, vous êtes invitée à
vous exprimer dans plusieurs universités
à travers le monde : ce qui ressemble à
un procès en sorcellerie ne dérange donc
aucun média ?
H.B :
Je crois au contraire qu’il arrange tout
le monde... C’est beaucoup plus simple
de nous diaboliser que de se confronter
à ce qu’on dit. La confrontation leur
est très difficile et toute cette
polémique n’est qu’une fuite. L’un des
objectifs de cette offensive médiatique,
c’est de m’isoler, afin d’intimider
d’éventuels soutiens. Il faut terroriser
les sympathisants. Ils cherchent à faire
le désert autour de nous. Le sociologue
Laurent Bouvet (6), l’a même tweeté au
sujet de Danièle Obono (FI) : « Il faut
dénoncer à la fois les liens d’Obono
avec le Parti des Indigènes et les
attaques racistes qu’elle subit ».
Houria
Bouteldja.
L’intellectuel Jean Bricmont vous
reproche votre « idéologie postcoloniale
», définie par lui comme « un
sous-ensemble du postmodernisme » (notamment
théorisé par Foucault). Selon le
physicien belge, proche du linguiste
nord-américain Noam Chomsky, vous n’êtes
pas une «mauvaise française » mais au
contraire « très française ». Qu’en
pensez-vous ?
H.B :
D’abord, ni le PIR ni moi-même ne sommes
dans la pensée postcoloniale : nous
sommes dans la pensée décoloniale. Cette
pensée précise prend sa source dans
l’inachèvement des indépendances des
pays du Tiers-monde. Ces pays n’ont pas
été entièrement décolonisés du fait que
l’impérialisme et le colonialisme se
sont métamorphosés de manière très
sophistiquée. Excepté la Palestine et
certains endroits, l’ancienne forme de
colonialisme n’est plus prépondérante.
Aujourd’hui, la forme d’oppression
coloniale la plus répandue, c’est
l’impérialisme sous le masque de la
globalisation. Le PIR reprends donc
cette analyse qui postule que la
décolonisation n’est pas achevée. Et
pour décoloniser, il ne s’agit pas
simplement de libérer des territoires
géographiques, il faut libérer les
territoires politiques, l’Etat, le
pouvoir, les grandes instances, la
pensée politique ! Cette libération est
donc multidimensionnelle et s’attache à
la critique du pouvoir : ce que les
penseurs sud-américains nomment ‘la
colonialité du pouvoir’.
J’ajoute que le PIR
s’inscrit aussi dans cette filiation
décoloniale avec ‘le sud du Nord’. Pour
nous, au Nord, en France comme ailleurs
en Europe, il existe des ‘sud’ qui
doivent participer au combat décolonial
en étant les fers de lance de
l’anti-impérialisme à l’intérieur des
Etats occidentaux, des démocraties
libérales.
Ensuite, je n’ai
pas attendu Jean Bricmont pour savoir
que je suis très française. J’ai écrit
dans mon livre que je suis « blanchie »
! Oui, je suis française. Née et éduquée
dans une société donnée, je suis de la
culture de cette société. Je n’ai rien à
redire là-dessus et ne combats pas cela.
En revanche, je combats mon intégration.
Parce que celle-ci est une intégration à
l’intérieur d’un Etat-nation lui-même
impérialiste. J’ai ma part de
responsabilité et, à ce titre, je suis
effectivement une blanche. Mais à
l’intérieur de l’Etat-nation, dans mon
rapport aux blancs, je suis une indigène
parce que les races sociales structurent
les relations sociales.
A gauche
comme à droite du spectre politique, le
PIR est conspué ou diabolisé. Cela
signifie-t-il que votre parti a atteint
la 3ème étape de la célèbre phrase :
«D’abord, ils vous ignorent ; après, ils
se moquent ; ensuite, ils vous
combattent et enfin, vous gagnez » ?
H.B :
Ce qui est sûr, c’est qu’il y a une
crise d’identité chez ceux qui nous
attaquent. Ils sont les véritables
identitaires, en proie à une crise du
sens, qu’ils ignorent, et qu’ils
voudraient nous mettre sur le dos. Alors
que, de notre côté, nous ne nous
exprimons qu’en termes de concepts
politiques. Mais quel que soit le
concept qu’on utilise, ils
l’interprètent erronément. Par exemple,
lorsque nous parlons de « race sociale
», pour nous c’est une production de
l’histoire et non du racialisme ;
lorsque nous évoquons « les indigènes »,
ils nous accusent de « communautarisme »
sauf que je ne sais pas de quelle «
communauté » ils parlent puisque, par
définition, l’indigène est un statut. En
quoi un antillais et un descendant
d’Algériens seraient-ils de la même
communauté ? En revanche, tous deux
vivent la même condition, le même
statut. Bref, je ne vois pas en quoi le
PIR serait dans un « délire identitaire
», comme le martèlent nos adversaires ?
Houria
Bouteldja et son éditeur Eric Hazan (La
Fabrique) lors de la conférence de
presse
de présentation de leur livre "Les
Blancs, les Juifs et nous".
Maintenant, oui, on
est en train de gagner du terrain, tant
sur le plan idéologique que politique.
Une partie de la gauche radicale débat à
partir de nos postulats, ce qui la
divise et la réforme. C’est très bien.
Par exemple, il y a des courants au sein
de la France Insoumise (FI) qui
représentent un peu les idées
décoloniales. Donc, même en marge, ce
courant décolonial existe jusqu’à
l’Assemblée Nationale. C’est aussi cela
que certains trouvent insupportable…
Il faut aussi
analyser la situation à partir de la
victoire d’Emmanuel Macron. Cette
victoire a écrasé tous les courants
ultra-islamophobes. Un an avant la
présidentielle, on s’attendait à une
campagne électorale islamophobe très
virulente, se basant sur l’exploitation
des attentats et du terrorisme. C’est le
contraire qui s’est produit. François
Fillon (LR) qui a démarré très
islamophobe, a été rattrapé par ses
casseroles et a raté son coup.
L’islamophobe Manuel Valls (ex-PS) a
perdu les primaires contre Benoît Hamon
(ex-PS) qui défendait une ligne beaucoup
plus soft. L’extrême-droite de Marine Le
Pen (FN) a été balayée par Macron (LREM)
au second tour. Bref, l’alibi
radicalement islamophobe a perdu ! Et
nos détracteurs actuels sont largement
ceux qui représentent cette ligne
ultra-islamophobe et perdante à la
présidentielle. Le Figaro, c’est le
soutien à Fillon et le sociologue
Bouvet, c’est la ligne de Valls et
Caroline Fourest. La propagation
manifeste de nos idées sont craintes par
ces gens-là dont les convictions
islamophobes accusent, pour le moment,
un net recul politique.
Quelle est
l’erreur de votre part ou la critique
fondée que vous seriez prête à
reconnaître ?
H.B :
Je dois vous dire que je n’en reconnais
aucune (rire)… Bon, on nous reproche
souvent de faire preuve de provocation.
Peut-être, mais il ne s’agit pas de
provocations gratuites. S’il y a
provocation, c’est dans le but de créer
une majorité décoloniale. Il s’agit de
mettre un coup de pied aux fesses à une
partie de la gauche radicale dont nous
disons, nous-mêmes, qu’elle est la fois
notre allié privilégié et notre
adversaire premier. Le PIR n’a donc pas
choisi la droite ni l’extrême-droite.
Nous sommes dans une perspective
constructive sauf que la gauche blanche
reste blanche. Et si celle-ci veut
gagner du terrain, il va bien falloir
qu’elle s’allie aux quartiers
populaires. Or, les habitants de ces
quartiers, on ne les convainc pas avec
du marxisme-léninisme ou du
républicanisme à la Mélenchon ! Les
quartiers populaires, les citoyens issus
de l’immigration, ont leur propre agenda
et des problématiques largement liées au
racisme d’Etat et à l’impérialisme. A un
moment donné, il va bien falloir que cet
agenda devienne celui de nos
partenaires.
Jean-Luc
Mélenchon et la France Insoumise (FI)
ont du mal à accepter vos priorités ?
H.B :
Oui, particulièrement celle du racisme
d’Etat… En réalité, ils sont dans un tel
confort idéologique que lorsque
quelqu’un développe une autre vérité, il
est tout de suite catalogué en
«provocateur». Nous ne sommes pas dans
la provocation : nous nous attaquons à
tous les angles morts de la pensée
progressiste. On ne laisse rien de côté
! Le rapport aux juifs, aux femmes, aux
homosexuels, aux quartiers populaires, à
la race, etc. On traite toutes ces
questions d’un point de vue décolonial.
Et on ne se laisse pas imposer des
grilles d’analyse qui ne s’adaptent pas
à notre condition spécifique.
D’aucuns,
dont Jean Bricmont, jugent que votre
démarche politique fait davantage monter
le racisme plutôt que le réduire…
H.B :
D’abord, pour moi, Bricmont n’est pas du
tout une référence. Ensuite, une telle
conclusion signifie qu’ils ne nous
laissent aucune possibilité. Soit nous
devons suivre la gauche, être la
cinquième roue du carrosse - alors que
la gauche a toujours trahi les citoyens
issus de l’immigration voire participe
de leur oppression avec son islamophobie
- et répondre à leurs sollicitations
pour battre la droite sans qu’aucune de
nos questions ne soit politiquement
prise en charge ; soit on ne fait rien
et on se fait écraser de toute manière.
Non. Nous, nous faisons le pari de nous
organiser, d’aller chercher nos alliés
et de créer de nouvelles alliances ! En
fait, ce que ces gens comme Bricmont
nous disent, c’est de rester des sujets
apolitiques, de rester passifs et
attendre que les choses se passent. Or,
la situation empire et ce n’est pas
parce que les Indigènes existent ou
revendiquent qu’il y a soudain une
flambée de discriminations. Celles-ci
existent avec ou sans le PIR. Notre
parti ne se contente pas d’y réagir mais
propose une nouvelle société. Frantz
Fanon disait vouloir créer « un homme
nouveau ». C’est ce que le PIR reprend
et ambitionne : nous voulons créer un
nouvel humain et ça se fera avec nous.
D’autres se
demandent comment vous supportez la
récurrence de ces accusations
médiatiques, qui ne datent pas de ces
derniers jours mais se répètent depuis
plus de 10 ans ?
H.B :
Si on nous accuse de tous les maux, on
nous aime également par ailleurs… On
oublie souvent que le PIR est très
apprécié en France. Par exemple, lors de
la campagne des Législatives ou lorsque
je faisais la promo de mon livre,
partout où je suis allée : les gens nous
adorent ou au moins nous respectent ! Au
sein des indigènes comme parmi les
blancs, on nous aime beaucoup. En fait,
il y a les élites qui ont accès aux
médias et puis les gens qui ne sont pas
médiatisés... Dans le milieu militant,
on travaille avec plein de gens
formidables avec lesquels on a tissé des
liens de confiance et d’estime
réciproques. J’ajoute que le PIR est
aussi extrêmement apprécié à l’étranger.
Ce qui nous a conduits à travailler aux
USA, avec Angela Davis, avec le réseau
décolonial, au Maghreb ou aux Antilles.
Lorsqu’il se passe des évènements en
France, des gens nous appellent
d’Australie pour recueillir notre avis !
C’est quand même autre chose… Cela ne
signifie pas que le PIR fait l’unanimité
chez les indigènes, car nous remuons des
choses et créons du débat en interne. Il
n’y a pas de processus d’adulation mais
des franges du champ politique et
intellectuel nous suivent et nous
respectent. Ce n’est pas si mal et ça
permet de relativiser les articles
ineptes de la presse française.
Franco
Lollia, porte-parole de la Brigade Anti-Négrophobie
(BAN)
aux côtés d'Houria
Bouteldja, porte-parole du PIR.
Quelle est
aujourd’hui l’attitude des intellectuels
français qui ont pris votre défense dans
Le Monde (7) ? L’éditorialiste Jack Dion
les a qualifiés de « soldats perdus »
(8) tandis que Le sociologue Laurent
Bouvet a jugé qu’ils avaient commis « un
crime contre la pensée »…
H.B :
Je n’ai pas eu de retours directs de
leur part. Cette initiative de soutien
leur est propre et je ne connais pas la
plupart d’entre eux. J’imagine
simplement qu’ils prennent la mesure de
ce que signifie me soutenir… Pour ce
faire, il faut un certain courage, une
constance, de la personnalité et surtout
savoir bien distinguer son véritable
ennemi (rire).
Que
dites-vous aux citoyens racisés qui
comprennent l’enjeu politico-médiatique
autour de votre personne, ont envie de
se solidariser mais ont peur de
connaître une diabolisation semblable à
la vôtre ?
H.B :
J’ai envie de leur dire que, dans les
années 30, il y avait aussi des
personnes, qui subissaient les mêmes
pressions, avaient peur pour leur
famille et leur situation. Beaucoup
étaient terrorisés et, même s’ils
voulaient défendre les juifs, ils ne
l’ont pas fait pour beaucoup… Chacun
doit prendre ses responsabilités. Celles
et ceux qui se taisent se rendent
co-responsables de ce qui adviendra.
Pour autant, je pense que les blancs ont
un peu plus de responsabilités que les
indigènes et doivent même aider les
indigènes à nous soutenir. Parce que,
d’une part, les indigènes se trouvent
dans une situation plus précaire que la
majorité des blancs et, d’autre part, il
reste difficile pour des indigènes «
installés » d’écrire et de signer une
tribune semblable à celle parue dans Le
Monde [dont les signataires sont tous
blancs, ndlr]. C’est encore le privilège
blanc que de pouvoir se permettre une
telle expression et prise de risque.
D’ailleurs, pour l’instant, rares sont
les personnalités indigènes ayant une
visibilité médiatique à m’avoir
soutenue. Du côté des militants de
l’antiracisme politique, il y a eu
Sihame Assbague ou Omar Slaouti. Du côté
intellectuel, il y a eu Raphaël Confiant
et Maboula Soumahoro ou Mireille Fanon
Mendès-France. Rien de surprenant, ce
sont ceux qui déjà s’affichent et
prennent des risques. Mais il n’y a pas
eu une véritable levée de boucliers
d’indigènes.
Comment
l’expliquez-vous ? Par une certaine peur
ou le désir de se protéger ?
H.B :
Pas seulement. Il n’y a pas que la peur…
Il n’est pas interdit de penser que,
pour certains indigènes installés, nous
sommes des entraves, plus un problème
qu’autre chose. Parce que notre démarche
politique les oblige, quelque part, à
plus d’engagement, à se radicaliser
davantage et donc à prendre des risques.
C’est intéressant, car cela laisse
entrevoir nos futures contradictions, en
termes de classe notamment.
Selon une
des signataires de la tribune du Monde,
vous avez « une pensée qui travaille les
catégories existantes pour mieux s’en
échapper ». Dès lors, vous seriez « en
avance sur [votre] temps ». Vous êtes
d’accord ?
H.B :
D’une certaine manière, oui. Tout ce qui
travaille la société, tout ce que nous
disons aujourd’hui, demain, seront des
évidences. Ce qui ne signifie pas qu’on
va « gagner ». Gagner voudrait dire que
nous serions parvenus à faire advenir un
monde décolonisé. Or, je suis trop
pessimiste pour penser que cela arrivera
de notre vivant. Par contre, sortir de
notre marginalité, parvenir à créer des
alliances, pousser notre mouvement et
conquérir des espaces politiques, c’est
en cours. Assurément. En 2005, on était
déjà en avance. Lorsqu’à l’époque, nous
avons lancé notre « Appel des Indigènes
de la République » (9), une majorité le
trouvait trop provocateur ou
caricatural. Aujourd’hui, malgré la
virulence de ceux qui nous attaquent,
beaucoup le signeraient ou n’y trouvent
rien à y redire. Comme Olivier Tonneau
qui a repris et valorisé un extrait de
notre Appel dans son dernier article sur
Mediapart. Il a été très conséquent...
Enfin et surtout, je ne me considère pas
comme une innocente. Je pars du postulat
qu’en vivant dans les sociétés
occidentales, on profite du pillage. A
ce titre, on est responsable. On ne peut
pas pleurer sur l’Afrique et penser que
la solution c’est d’aller donner du riz
aux Africains. Il ne s’agit pas «
d’aider» mais de remettre en cause le
fonctionnement profond de nos sociétés.
Et ça, c’est le minimum.
(1)
http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/06/09/la-gauche-dechiree-par-le-racisme-antiraciste_5141086_3232.html
(2)
http://www.liberation.fr/france/2017/06/22/de-quel-droit-somme-t-on-daniele-obono-de-crier-vive-la-france_1578755
(3)
https://blogs.mediapart.fr/olivier-tonneau/blog/250617/tartuffe-et-banania-daniele-obono-face-la-republique-irreprochable
(4) « Les Blancs,
les Juifs et nous », Houria Bouteldja,
Editions La Fabrique, Paris, 2016.
http://www.lafabrique.fr/catalogue.php?idArt=952
(5)
http://www.liberation.fr/debats/2016/05/30/qui-a-peur-de-houria-bouteldja_1456167
(6)
http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2017/06/23/31003-20170623ARTFIG00122-bouvet-que-des-universitaires-defendent-houria-bouteldja-est-un-crime-contre-l-esprit.php
(7)
http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/06/19/vers-l-emancipation-contre-la-calomnie-en-soutien-a-houria-bouteldja-et-a-l-antiracisme-politique_5147623_3232.html
(8)
https://www.marianne.net/debattons/editos/touche-pas-ma-raciste-ces-intellectuels-qui-soutiennent-houria-bouteldja
(9)
http://indigenes-republique.fr/le-p-i-r/appel-des-indigenes-de-la-republique/
Les dernières mises à jour
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