Entretien
Interview : René
Naba à La Nouvelle République
Mali - France - Algérie

Lundi 11 février
2013
1/ « L’impératif de
l’Algérie, dans cette phase de
géo-dislocation globale de la sphère
arabe, est de desserrer le nœud coulant
néo islamiste et forcer la porte du
BRICS »
2/ La France au Mali
joue son rôle de puissance et le Mali
son existence
Avec la précipitation
des événements au Mali, il apparaît que
la France joue son rang de puissance et
le Mali son existence dans ce premier
engagement militaire direct français, en
solitaire, sur un théâtre d’opération
depuis la fin de la Guerre d’Algérie.
Dans ce contexte,
l’Algérie, ayant connu par le passé le
fléau terroriste, se trouve à nouveau
confrontée à cette nébuleuse comme l’ont
montré les récents événements d’In
Amenas. Aussi, ne peut-elle pas se
considérer en marge des événements qui
ont secoué la Tunisie, la Libye et
actuellement le Mali. La région
Sahélienne étant devenue une poudrière
aux conséquences imprévisibles, dans
cette phase de géo-dislocation globale
de la sphère arabe, l’impératif de
l’Algérie est de desserrer le nœud
coulant néo islamiste et forcer la porte
du BRICS, le moteur de la nouvelle
diplomatie multilatérale.
Un mois après le
lancement de l’opération Serval, et pour
mieux élucider ces questions
géostratégiques, La Nouvelle République
a fait le point avec René Naba, un
expert qui n’est plus à présenter.
France-Mali
Question LNR: Quel
bilan tirez-vous tant pour la France que
pour le Mali, un mois après le lancement
de Serval?
Réponse RN: La France
joue son rang de puissance et le Mali
son existence dans cette expédition du
Mali, premier engagement militaire
direct français, en solitaire, sur un
théâtre d’opération depuis la fin de la
Guerre d’Algérie en 1962.
En première ligne dans
la guerre de prédation économique du
versant sud de la Méditerranée, -La
Libye et la Syrie, sans endettement
extérieur, disposent de réserves
énergétiques, – la France se retrouve de
plein fouet sur la ligne de front, en
confrontation directe avec ses frères
d’armes de Libye et de Syrie, qu’elle
cherche à terrasser. Qu’il est
douloureux le venin inoculé par la
morsure d’un serpent nourri en son sein.
L’expédition punitive
du Mali de janvier 2013 se présente dans
une configuration stratégique
sensiblement différente des précédentes
séquences (Suez, Bizerte, Kolwezi). Au
Mali, face à des hordes furtives, la
France est sous perfusion technologique
américaine, sous transfusion matérielle
et humaine européenne et africaine
(2.000 Tchadiens, 500 Nigériens), sous
injection financière arabe.
Serval traduit un
effondrement de la capacité de
projection de la puissance française. Et
cela quelle que soit l’issue des
combats. Un échec de la France poserait
la question de la légitimité de sa
présence au sein du Conseil de sécurité
en sa qualité de membre permanent doté
d’un droit de veto.
Un statut octroyé en
dépit de sa collaboration avec
l’Allemagne nazie sous Vichy, non pas
tant pour sa contribution à l’effort de
guerre allié, mais en raison de sa
possession à l’époque d’un consistant
empire colonial. Dissipé depuis,
l’empire est désormais réduit à sa
honteuse portion congrue de la
Françafrique. Un éventuel échec
réduirait le rôle de la France à celui
d’un satrape régional.
Sur cette thématique,
Cf. à ce propos
http://www.renenaba.com/la-france-et-la-reforme-du-droit-de-veto-au-conseil-de-securite/
La guerre du Mali est
la conséquence directe de la Guerre de
Libye. Nicolas Sarkozy et son compère
Bernard Henry Lévy doivent rendre compte
de ce gâchis humanitaire, en comparution
immédiate. De même qu’Alain Juppé et
Laurent Fabius, les deux super capés de
droite et de gauche, dont l’activisme en
Libye et en Syrie auprès des frères
d’armes des djihadistes d’Ansar Eddine,
s’explique par leur «complexe de la
pénombre».
Une pathologie qui se
traduit par une volonté de compenser
leur éclipse relative de la scène
publique du fait de leur condamnation
par la justice de leur pays, le
néo-atlantiste gaulliste pour avoir
«trahi la confiance du peuple souverain»
dans l’affaire dite des emplois fictifs
et le néoconservateur de gauche dans
l’affaire du «scandale du sang
contaminé».
L’intervention
précipitée de la France au Mali vise à
créer de nouvelles conditions face à la
nouvelle administration Obama dont les
postes -clés, le Département d’Etat
(John Kerry) et la Défense (Chuck Hagel)-
ont été confiés à des hommes de
dialogue, contrairement à Hillary
Clinton.
La réunion du
groupement de l’opposition syrienne
atlantiste le 28 janvier à Paris, le
jour même où l’opposition démocratique
syrienne se réunissait à Genève, relève
de cette même politique du fait accompli
en ce qu’elle est destinée à barrer la
voie à toutes les initiatives
diplomatiques qui se situeraient hors du
champ français.
Le télescopage de la
réunion de l’opposition off-shore
syrienne avec celle du colloque de
Genève à l’initiative de l’Institut
scandinave des Droits de l’homme
constitue, en tout état de cause, une
mauvaise manière faite à la démocratie
en ce que la France apporte la
démonstration qu’elle ne tolère que les
opinions conforment à ses vues.
Sous le rationalisme
cartésien couve dans ce grand corps
malade une distorsion mentale. Combattre
la succession au sein des Républiques
arabes et propulser l’héritier d’un
autocrate au Gabon (Ali Bongo) en
truquant les élections ou Tendre la
sébile aux Arabes et faire le Matamore à
propos de leur Mandela, le libanais
Georges Ibrahim Abdallah, le doyen des
prisonniers politiques en France, au
prétexte d’une matrimonialité seconde du
responsable de l’ordre public, relève
d’un dérèglement moral en ce qu’elle
signe la confusion de la sphère publique
et privée dans la gestion des affaires
publiques.
L’exemple le plus
patent en est Manuel Valls. Le ministre
de l’intérieur et des cultes se
considère désormais «éternellement lié»
depuis son mariage en seconde noces avec
une musicienne française de confession
juive, non avec la France dont il est le
citoyen, mais à Israël, non le pays,
mais le lieu de référence religieuse de
son épouse, indice pathétique du
dévoiement de la pensée.
Sur cette thématique,
Cf. à ce propos
http://www.renenaba.com/vers-la-fin-dun-partenariat-clanique-a-relent-affairiste/
Question: François
Hollande, Nicolas Sarkozy et Manuel
Valls. Que pensez-vous justement de la
politique de François Hollande par
rapport à celle de Nicholas Sarkozy,
n’y-a-t-il pas là une certaine
continuité ?
Réponse : Le
comportement de Nicolas Sarkozy relevait
de l’ordre primaire obsessionnel et
compulsif. François Hollande a
l’apparence de la bonne courtoisie. Une
différence à la marge. Sur la forme, non
sur le fond en ce que l’alternance a
substitué un néo-conservatisme de droite
par un néo-conservatisme socialiste. Un
néo-conservatisme hard en un néo
conservatisme Soft.
Le cas le plus flagrant
est le cas Manuel Valls. Nous y revenons
en ce qu’il est le cas symptomatique de
l’équipe socialiste. Ministre de
l’intérieur et des cultes, il est en
charge de l’ordre public et de la
concorde nationale. Quelles que soient
les aléas de sa vie affective, elle ne
doit pas déterminer sa vie publique. Un
bon ministre de l’intérieur est celui
qui est invariablement lié, de manière
éternelle, aux intérêts fondamentaux de
son propre pays. Une action en suspicion
légitime devrait être exercée à son
encontre en qu’il ne se comporte pas en
arbitre soucieux de privilégier les
intérêts supérieur de la nation
française.
Entre Nicolas Sarkozy
et l’ancien Maire d’Evry, qui projetait
de transplanter des White au sein de sa
population Blakos, la différence est
inexistante. Valls est un
néo-conservateur rentré. A la manière
d’un acte manqué.
Somalie – Mali
Avec l’échec de
l’Occident dans sa lutte contre la
piraterie somalienne, d’une part, quel
pronostic pourrait-on avancer sur
l’intervention française au Mali ? Et
d’autre part, avec cet engagement de la
France au Mali, ne pensez-vous pas que
cela va mettre en péril les intérêts
français partout dans le monde ?
Réponse: L’opération de
Somalie est un ratage monumental,
d’autant plus incompréhensible et
injustifié qu’une armada de 37 bateaux
de guerres occidentaux opèrent dans le
Golfe d’Aden pour lutter contre la
piraterie maritime aux larges des côtes
de Somalie. Ce grave échec a d’ailleurs
stimulé les contestataires à l’ordre
français en Afrique et accentué les
risques.
Quelles conséquences
sur le plan interne français?
Le Mali va mettre en
veilleuse les grands problèmes
lancinants de la société française.
Reléguer au second plan les questions
sociétales telles la réforme du statut
du mariage, le problème de la cohésion
sociale tel le vote des étrangers, les
douloureux problèmes de niveau de vie
tels l’usure du pouvoir d’achat, la
hausse du chômage, l’accroissement de la
misère et de la précarité ainsi que le
délitement de la société et
l’augmentation de l’insécurité, enfin,
dernier et non le moindre, le
vieillissement de la démocratie
française. En quarante ans, la France a
perdu, du fait de la concurrence
internationale et de l’inadéquation de
sa formation professionnelle, près de
neuf cents métiers et trois millions
d’emplois. Tant sur le plan interne
qu’international, elle est atteinte d’un
malaise vagal stratégique.
Le Mali a transformé
François Hollande décrié auparavant pour
sa mollesse en chef de guerre, lui
conférant une stature de chef de guerre
à l’effet de le remonter dans les
sondages. En ces heures douloureuses, il
est à espérer que le septentrion malien
ne soit pour le général Flanby ce que la
Cyrénaïque fut pour le Marechal Erwin
Rommel.
Le Mali: Faire le
procès des cinq planqués et se
débarrasser de sa mentalité d’assisté.
Question: Ne
pensez-vous pas que la Mali paye
aujourd’hui le prix fort de sa
déliquescence ? S’il en est ainsi, que
devrait-il faire pour redresser sa
situation ?
Mali: Le Mali doit
rendre justice à son Histoire, en
faisant, sans retard, sans ménagement,
le procès de l’institution militaire
qui, en un demi-siècle d’indépendance, a
sinistré le pays en phase de délitement
du fait de sa déroute militaire et sa
banqueroute économique.
De la déliquescence de
l’État à la régression nationale: Jamais
un pays n’aura connu pareille
décélération. Du fait d’une mafia
politico-militaire. En toute impunité.
En cinquante ans d’indépendance, le Mali
n’aura connu qu’un seul mandat de bonne
gouvernance, celui du premier président
du Mali indépendant, Modibo Keita
(1960-1968). Son renversement par un
coup d’État d’un lieutenant fantasque,
Moussa Traoré, va inaugurer une ère de
plus de quarante années de mensonges et
de corruption, dont le Mali ne connaitra
l’épilogue tragique qu’avec le régime
calamiteux de Amadou Toumani Touré (ATT)
et le coup d’État pathétique du
capitaine Ahmadou Haya Sanogo.
Sur cette thématique,
Cf. à ce propos
http://www.renenaba.com/mali-le-tonitruant-silence-du-planque-de-dakar
Cinq officiers
supérieurs, les fameux planqués de la
République, sont particulièrement visés
par ce propos:
-Le dictateur Moussa
Traoré, parricide du symbole de
l’indépendance malienne, deux fois
condamnés à mort, puis gracié, vivant
désormais une retraite pieuse mais très
confortable aux frais de l’État, à
Bamako, narguant de sa présence aux
cérémonies les proches de ses victimes.
-Le velléitaire
cumulard Ahmad Toumani Touré, le planqué
de Dakar, planqué avec son magot dans un
silence tonitruant.
-Le putschiste Ahmad
Haya Sanogo, planqué à l’ombre de ses 60
Humvee (High mobility multipurpose
wheeled vehicle), affectés à sa
protection, qui doivent être
impérativement réaffectés au champ de
bataille et non plus servir à sa parade,
de même que les 600 millions de francs
maliens ponctionnés mensuellement sur le
budget malien pour sa dépense
personnelle, reversés au budget de
guerre. Enfin les deux planqués de la
déroute militaire, les deux grands
vaincus de la bataille de 2012, le
colonel Gamou, responsable de la base de
Kidal jusqu’à sa chute en février 2012,
réfugié au Niger avec cinq-cents soldats
ainsi que le colonel Maydoun, son alter
ego de la base Gao.
Décréter la
mobilisation générale, rétablir le
service militaire obligatoire. Mener sa
propre guerre de libération nationale, à
l’exemple de son voisin et ami
l’Algérie, qui a vaincu le colonialisme
avant de vaincre le terrorisme. En un
mot se débarrasser de sa mentalité
d’assisté… Tel doit être le mot d’ordre
du Mali pour reconquérir sa dignité
avant sa souveraineté.
L’Algérie
Question : Comment
voyez-vous la position de l’Algérie par
rapport à tout ce remue-ménage
politico-militaire qui se déroule à ses
frontières ?
Qui tient l’Afrique
tient l’Europe, assurait Karl Marx.
L’Algérie occupe une
position centrale au Sahara. Frontalière
de sept pays (Maroc, Tunisie, Libye,
Mali, Mauritanie, Niger et RASD) elle se
doit de demeurer au centre du jeu
d’autant plus impérieusement que
l’Algérie est chez elle au Sahara et
dispose d’une frontière commune de 1.800
kms avec le Mali soit infiniment plus
que la totalité du métrage de la France
avec ses pays limitrophes (Allemagne,
Belgique, Espagne, Italie, Suisse).
La France au Mali est
davantage préoccupée par les gisements
d’Uranium du Niger que pour la
souveraineté nationale du Mali. La
géostratégie des minerais, de même que
la drogue, a horreur du vide. François
Hollande au Mali roule pour Areva et
tant pis si l’intégrité du Mali devrait
éventuellement en pâtir. Il s’en
accommodera pour peu que la tutelle
touareg en gestation dans le nord malien
accepte de jouer le jeu. Pour preuve,
François Hollande n’a pas manifesté le
même zèle pour voler au secours de
François Bozizé en ce que les intérêts
stratégiques français n’étaient pas
menacés en République Centre Africaine.
Mais le Mali revêt une
autre dimension transarabe. Il est à
coupler avec la Syrie. Ces deux pays
constituant les deux points de fixation
de la Russie et de l’Algérie dans la
bataille de l’énergie que se livrent en
sourdine le camp atlantiste et leurs
fournisseurs de gaz.
Alliées de la Syrie, la
Russie et l‘Algérie sont de surcroît les
deux principaux ravitailleurs en gaz de
l’Europe occidentale, laquelle veut
réduire sa dépendance de ces deux pays
situés hors de la sphère atlantiste.
La guerre de Syrie
s’explique dans ce contexte et vise un
triple objectif:
-Désarticuler le
maillon intermédiaire de l’axe de la
contestation à l’hégémonie
israélo-américaine dans la zone,
constitué de l’Iran la Syrie et le
Hezbollah Libanais.
-Affaiblir économiquement l’Iran, sous
embargo depuis trente ans, et la Russie.
-Fixer la Syrie et la Russie sur cet
abcès de fixation le temps de procéder
au déroutement du trafic gazier du
Détroit d’Ormuz vers la Méditerranée
orientale avec des terminaux en Syrie et
en Turquie. Pour les initiés, c’est la
fameuse bataille du projet transeuropéen
Nabucco contre le projet russe North and
South Stream.
L’écharde nord malienne
s’explique dans ce contexte. L’Algérie,
ultime survivant de l’ancien «front du
refus arabe», flanquée de surcroît
désormais de deux régimes
néo-islamistes, la Libye et la Tunisie,
est ainsi rivée au sol par le dossier du
séparatisme du Nord du Mali.
Le Mali, toutefois, ne
sera pas une promenade de santé. Les
sables mouvants sont insondables et les
voies des pistes caravanières sont
impénétrables. Serval est le
prolongement sur le théâtre africain de
la grande géo déstabilisation globale de
la sphère arabe, du Sahara…du Nord Mali,
au Sahara algérien à la Libye, à la
Syrie. L’assaut d’In Anemas relève de ce
schéma visant à entrainer l’Algérie dans
les sables mouvants du désert saharien.
Les atouts de l’Algérie
Question: Quels
seraient d’après vous les atouts de
l’Algérie dans ce nouvel échiquier?
L’Algérie a une
expertise reconnue dans le domaine de la
guérilla acquise durant sa guerre de
libération nationale, doublée d’une
expertise dans la lutte contre le
terrorisme acquise durant la décennie
noire 1990-2000), mais aussi et surtout,
mais cela les initiés en conviennent,
sous la houlette soviétique lors de la
guerre d’Afghanistan (1980-1990).
De ce fait, l’Algérie
n’est redevable à aucun état occidental
du moindre soutien logistique ou
financier dans sa guerre contre le
terrorisme. Elle a donc les coudées
franches. Mais cette guerre risque
d’être longue et couteuse, la génération
de la guerre d’indépendance au pouvoir
depuis cinquante ans, arrive, à plus ou
moins brève échéance, au terme de son
mandat. Il importe que la relève soit
assurée et la transition maitrisée.
C’est là une des failles du système,
qu‘elle doit remédier sans retard.
Avec 250 milliards de
dollars de réserve, l’Algérie est le 2
me arabe par l’importance de ses
devises, derrière l’Arabie saoudite.
Elle ne saurait se comporter en «état
rentier» se contentant de son statut de
«pays émergent», qui n’est rien d’autres
qu’un strapontin, autrement dit «un
piège à cons».
Par fidélité à son
histoire, l’Algérie, le pays le moins
dépendant du Monde arabe sur le plan
international, se doit de monter au
créneau par une meilleure répartition de
ses richesses, la relance de son
agriculture, le développement de son
infrastructure, la dynamisation de sa
bureaucratie, en même temps que la
démocratisation de son espace public, en
impulsant une citoyenneté active à sa
population, particulièrement sa jeunesse
trépidante, en développant un esprit
critique de sa presse, pour rejoindre
les BRICS (Brésil, Russie, Afrique du
sud, Inde), nouveau moteur de la
diplomatie multilatérale.
Au BRICS en tant que
représentante des pays arabes et
musulmans, pour y développer une
coopération Sud-Sud, en substitution à
une coopération verticale de
subordination et de prédation des
économies nationales des pays arabes. En
un mot, établir un rapport de qualité
entre les deux sphères de la
Méditerranée et entre les deux
hémisphères de la planète.
Questions : Dans cette
nouvelle approche de la lutte
anti-terroriste prônée par l’Occident,
quel devenir d’après-vous de l’Islamisme
politique ?
La guerre décennale
contre le terrorisme (2001-2011) a
laissé le monde occidental exsangue sur
le plan économique avec la crise
bancaire américaine, (une perte de
capitalisation bancaire de l’ordre de
25.000 milliards de dollars), la crise
systémique de l‘endettement européen,
les guerres d’Irak d’Afghanistan et
d’Irak, d’un coût global de 3 000
milliards de dollars). De quoi effacer
les dettes publiques de l’ensemble des
pays de la planète, de financer un
gigantesque plan de grands projets à
l’effet d’éradiquer les pandémies, la
pauvreté, l’analphabétisme, la
malnutrition dans le monde, d’offrir une
retraite décente à ses occupants, avec,
cerise sur le gâteau, la réhabilitation
de la Palestine, victime des turpitudes
occidentales.
Il était possible aux
pays arabes de faire une offre
gagnant-gagnant au Monde occidental:
renflouer son économie par injection
massive de pétrodollars en contrepartie
du règlement de leur question centrale:
La Palestine
La configuration se
prêtait d’autant plus que pour la
première fois dans l’histoire moderne
arabe, les Islamistes étaient parvenus
au pouvoir dans la quasi-totalité des
pays arabes, du golfe pétro monarchique
wahhabite rétrograde, aux gouvernements
néo islamistes des rives de la
Méditerranée (Egypte, Libye, Tunisie).
Mais, en accordant la
priorité à la destruction de pays
arabes, sous couvert de lutte pour la
démocratie, plutôt qu’à la libération de
la Palestine, les pétromonarchies, les
régimes les plus rétrogrades au Monde,
se sont révélées les commanditaires de
leur propre mercenariat en vue de leur
auto-asservissement alors que le néo
islamisme pro américain est, lui, apparu
comme le gestionnaire de l’ordre rentier
pétro monarchique, ainsi qu’en témoigne
le règlement de la dernière offensive
israélienne de Gaza
Depuis la fin de la 2me
Guerre mondiale (19439-1945), le Monde
arabe est passé par trois phases de
transformation révolutionnaire, trois
phases de lutte:
-Lutte contre le
colonialisme ou l’occupation étrangère,
avec l’indépendance de la quasi-totalité
des vingt pays membres de la ligue arabe
du Machreq et du Maghreb
-Lutte contre la
dictature interne ou l’occupation
interne avec la chute de Zine Eddine Ben
Ali (Tunisie), Hosni Moubarak (Egypte),
Mouammar Kadhafi (Libye) et
l’élimination des premiers ministres
d’Irak (Noury Said) et de Jordanie
(‘Wasfi Tall) et du président égyptien
Anouar el Sadate notamment.
Lutte enfin dans la
phase finale contre les trafiquants de
la religion, les nouveaux marchands de
temple de l’ère contemporaine, tant il
est vrai que l’Islam du XXI me siècle se
doit être une religion d’avenir et que
l’adhésion à une foi ne dispense de
disposer d’une solide morale.

Opération Serval
Entretien réalisé par
Chérif Abdedaïm,
La Nouvelle République du
11 février 2013
et sur
René Naba.com
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