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Le Web de l'Humanité
DSK
confirme d'entrée son allégeance à Washington
Bruno Odent
M. Strauss Kahn, à Santiago-du-Chili, le 28
septembre 2007.
Image source: REUTERS/VICTOR RUIZ CABALLERO (publié sur
lemonde.fr)
Mercredi 3 octobre 2007 FMI
. L’ex-ministre socialiste a esquissé des réformes qui
commencent par… exclure toute réduction d’influence des États-Unis.
Dominique Strauss-Kahn a soigné, lundi, son retour sur la scène
médiatique française avant son entrée en fonction, au 1er
novembre prochain, à la direction générale du Fonds monétaire
international (FMI). Conférence de presse au siège parisien de
l’institution, puis intervention au journal de 20 heures de
France 2, l’ancien ministre socialiste des Finances n’a pas ménagé
ses effets, ni levé les ambiguïtés sur son éventuel retour
dans l’arène politique française pour la présidentielle de
2012.
S’exprimant en anglais devant un parterre de journalistes,
pourtant tous francophones, « pour respecter, dit-il, la règle
de la langue d’usage » du FMI, il a esquissé
quelques-unes des réformes qu’il entend promouvoir pour faire
face à la crise qui touche aujourd’hui l’organisation de
plein fouet. Des pays émergents comme la Chine, l’Inde ou le Brésil
protestent de leur sous-représentation, et les nations les plus
pauvres se défient des potions (libéralisation du commerce,
suppressions d’em- p- - lois publics, privatisations…) qui
leur ont été infligées comme conditionsd’accès à de
nouveaux crédits (voir notre édition du 1er octobre).
Une nécessaire révision du rôle des institutions financières,
pour faire face au défi moderne de l’éradication de la pauvreté
et du financement du développement durable, apparaît ainsi plus
urgente que jamais. Le moins qu’on puisse dire est qu’on en
reste à des années-lumière avec les propositions ébauchées
par DSK. Un seul exemple : celui de la question des
quotes-parts au sein du conseil d’administration du FMI. Les États-Unis
en détiennent aujourd’hui 16,8 %, ce qui leur accorde, de
fait, un droit de veto (puisqu’il faut une majorité de 85 %
du conseil pour prendre une décision). Pas question d’y
toucher. « Personne n’a en tête que le quota des États-Unis
diminuera », a souligné DSK.
Pour satisfaire les pays émergents qui revendiquent d’avoir
davantage voix au chapitre, il faudrait donc se tourner uniquement
vers « l’Europe ou la Russie », invitées à
diminuer leurs pro- pres quotas, « certains petits pays
européens étant mieux représentés que le Brésil »,
argumente l’ex-ministre des Finances. Pourquoi cet étonnant
arbitrage ? La réponse quelque peu agacée de DSK a le mérite
de la clarté : parce qu’« aucune réforme
d’envergure ne peut être conclue sans les États-Unis ».
Le balisage de l’approche du nouveau directeur général
apparaît aussi quand on l’interroge sur les obstacles
qu’aurait pu constituer son identité socialiste à sa
nomination. Un « free market socialist » (socialiste
adepte du libre-échange) comme moi, répond-il en substance, ne
pouvait qu’être l’homme de la situation. User de son pedigree
socialiste pour négocier avec les pays progressistes latino-américains
et tenter de les dissuader de faire sécession en créant une
Banque du sud, ou encore faire rentrer dans le rang la Chine afin
qu’elle cesse de jouer de la faiblesse de sa monnaie pour
s’intégrer au « jeu mondial », voilà ce qui figure
parmi les missions délicates que DSK a reconnu devoir affronter
après sa prise de fonction. Soit autant de « conciliations »
qui n’ont franchement pas de quoi déplaire, là encore, à la
Maison-Blanche.
© Journal l'Humanité
Publié le 4 octobre avec l'aimable autorisation de l'Humanité.
Crédit photo : REUTERS/VICTOR
RUIZ CABALLERO (publié sur lemonde.fr)
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