Site d'information sur la Palestine et le Moyen-Orient

 

Palestine - Solidarité

 

Retour :  Accueil  Sommaire Élections  -   Originaux  Analyses  Ressources  -  Abonnement Newsletter


WSWS

Élections présidentielles en France : la panique s’empare du Parti socialiste

Peter Schwarz


Photo Bayrou.fr

Paris, le 15 mars 2007

Lundi soir, 12 mars, Ségolène Royal, la candidate présidentielle du Parti socialiste (PS) a dialogué au Gymnase Japy dans le 11e arrondissement de Paris avec des personnalités culturelles et scientifiques qui soutiennent sa candidature.

D’une voix monotone, Royal a lu un document rédigé à l’avance. L’on avait l’impression que chaque mot avait été soigneusement choisi en fonction de son auditoire. Rien de ce qu’elle a dit n’a donné l’impression qu’elle croyait ou ressentait vraiment ce qu’elle racontait.

Il ne faudrait pas abuser de la phrase « le style, c’est l’homme » ou en l’occurrence la femme, et à plus forte raison en politique. Il existe des politiciens sérieux qui sont de mauvais orateurs et vice versa. Mais, dans le cas de Royal, il y a un lien évident entre sa prestation monotone et le contenu de sa politique.

Elle avait commencé sa campagne électorale en voulant être la candidate de la « gauche moderne » à la manière de Tony Blair en se débarrassant des conceptions social-réformistes du passé et en cherchant à se positionner même à la droite de son rival principal, Nicolas Sarkozy, le candidat de l’UMP (Union pour un mouvement populaire), le parti gaulliste au pouvoir. Lorsque cette stratégie rencontra de l’opposition et que Royal chuta dans les sondages, elle changea de cours en s’efforçant de cultiver une image socialement plus avenante et qui démarque plus clairement la gauche et la droite.

Lors de la réunion de lundi, elle a annoncé qu’elle représentait un modèle social différent de celui de Sarkozy et poursuivit en parlant de l’incompatibilité entre le libéralisme économique et la politique sociale. Enfin, elle appela en renfort les « éléphants » du Parti socialiste, précisément les politiciens influents de longue date desquels elle avait tenté de se distancer précédemment.

Les méandres tracés par Royal l’ont exposée comme opportuniste sans scrupules qui dit ce que bon lui semble et qui fait ce que, en coulisses, les forces puissantes et influentes lui soufflent de faire.

La montée de Francois Bayrou

Dans des conditions où de nombreux électeurs sont férocement opposés à Nicolas Sarkozy, François Bayrou, un homme dont personne ne pensait qu’il pourrait profiter du déclin de Royal, un provocateur droitier et dirigeant de l’Union pour la démocratie française (UDF), un parti libéral bourgeois, grimpa rapidement dans les sondages pour talonner à présent les deux principaux candidats, Sarkozy et Royal.

Selon les derniers sondages,Bayrou remporterait 23,5 pour cent au premier tour des élections présidentielles, Royal 25,5 pour cent et Sarkozy 27 pour cent. Compte tenu de la marge d’erreur que l’on impute aux sondages d’opinion, il est tout à fait possible que Bayrou se retrouve au second tour avec de réelles chances de l’emporter, à la condition toutefois que de nombreux électeurs du candidat arrivant en troisième position, Royal ou Sarkozy, votent pour lui.

L’UDF, qui fut créée en 1978 par le président de l’époque, Valéry Giscard d’Estaing, fait partie par tradition du camp bourgeois conservateur. De 1993 à 1997, Bayrou a été ministre de l’Education nationale des gouvernements d’Edouard Balladur et d’Alain Juppé. Lorsque Jacques Chirac rassembla en 2002 toutes les forces conservatrices dans un seul parti, l’UMP de nos jours, Bayrou et une section de son parti ne s’y enrôlèrent pas et gardèrent l’UDF comme une organisation indépendante.

A présent, Bayrou se présente comme un homme se trouvant au-dessus de la mêlée des autres partis en étant capable de réconcilier la droite et la gauche. La semaine dernière, lors d’une conférence de presse il avait déclaré que son succès dans les sondages montre que « quelque chose est en train de monter » : « C’est un message du peuple français, qui dit : on va tourner la page. Ça suffit, vos querelles et vos guerres incessantes ! On veut des gens qui travaillent ensemble. »

Bayrou a eu l’oreille des électeurs qui sont fatigués des luttes entre les partis dont les disputes verbales sont inversement proportionnelles à leur manque de véritables différences politiques. En terme de contenu, très peu de chose distingue le programme de Royal de celui de Sarkozy.

Les résultats des sondages confèrent à Bayrou le même niveau de compétence qu’à Royal et Sarkozy, mais pour un grand nombre de personnes questionnées Bayrou passe pour être sensiblement « plus honnête ». 38 pour cent considèrent que Bayrou est le candidat le plus honnête, ses deux opposants le suivent avec 26 pour cent respectivement.

Les partis d’extrême gauche français ont contribué au succès momentané de Bayrou. Il y a cinq ans, plus de dix pour cent des électeurs avaient voté pour les candidats de l’extrême gauche en tant que réponse alternative. Mais, ces organisations ont échoué à fournir une réponse et n’ont offert aucun moyen de progresser. Lors du second tour des élections, il y a cinq ans, Olivier Besancenot, le candidat de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) appela à voter Chirac alors qu’Arlette Laguiller, la dirigeante de Lutte ouvrière (LO), déclarait que son parti était bien trop petit et insignifiant pour pouvoir influencer les développements politiques.

D’une certaine manière, les résultats des sondages de Bayrou demeurent extrêmement instables. Tout comme Sarkozy et Royal, il est un vétéran de la scène politique et n’a en essence rien de nouveau à offrir. Pour le moment, son avantage réside dans le fait qu’il est relativement peu connu et encore plus fade que Royal. C’est pourquoi il est en mesure de se présenter comme le candidat de la réconciliation politique, ce à quoi aspire un grand nombre d’électeurs issus de la classe moyenne et des couches académiques. Dans une société marquée par des antagonismes sociaux, de telles aspirations sont illusoires et, à un moment ou un autre, entreront en collision avec la réalité.

Le Parti socialiste en proie à la panique

Et pourtant, le succès de Bayrou dans les sondages a suffi à engendrer la panique au sein du Parti socialiste. Les électeurs socialistes traditionnels issus des milieux universitaires et de l’enseignement se rallient au candidat de l’UDF. A présent, le parti craint de ne pas atteindre le second tour, comme cela fut le cas en 2002. Le candidat de l’époque du PS, Lionel Jospin, avait subi une défaite contre le candidat du Front national, Jean-Marie Le Pen.

La réunion de lundi soir avait en grande partie pour but de regagner le terrain perdu parmi les intellectuels. Royal s’était minutieusement préparée. N’étaient admis qu’un millier d’invités et des représentants de la presse triés sur le volet. Il coûta à l’auteur de cet article beaucoup de patience et de persuasion pour convaincre les organisateurs de lui permettre d’entrer dans la salle.

Les chaises avaient été disposées en cercle autour du pupitre d’orateur: les blanches, tout à fait devant, réservées aux personnalités célèbres et influentes ; plus en arrière, les chaises marron pour les personnes moins connues. Les jeunes du parti occupaient les balcons et scandaient « Ségolène résidente » pour mettre l’ambiance.

La réaction fut cependant faible. Seules quelques célébrités du cinéma et de la télévision français firent leur apparition et, finalement, Royal prit place entre les actrices Jeanne Moreau et Emmanuelle Béart. Quelques acteurs moins connus et des personnalités de la télévision complétèrent le groupe et c’était déjà tout.

Michel Broué, mathématicien et fils de Pierre Broué, historien et biographe de Trotsky, prit la parole au nom de la « Science ». Il fulmina pendant un quart d’heure contre Sarkozy, puis durant un autre quart d’heure contre Bayrou. Enfin, pendant quelques secondes il fit l’éloge de Ségolène Royal, manifestement il ne trouva que très peu de choses positives à dire sur sa candidate favorite.

Dans une contribution plutôt embarrassante, le psychologue, Gérard Miller, loua le caractère féminin de la candidate qui, contrairement aux autres politiciens, n’était pas une « femme phallique ».

Royal plaça la promotion de l’éducation, de la culture et de la recherche au centre de son discours qui dura une heure. Elle ne fut pas avare en promesses, mais resta singulièrement vague quant aux détails. Elle ne mentionna ni chiffres ni les attaques dont l’éducation nationale fut la cible durant les années 1990 de la part d’un gouvernement mené par le PS et dans lequel elle avait été ministre.

L’ambiance changea au moment où Royal critiqua les propos nationalistes de son rival Sarkozy et qui avait récemment prôné la création d’un ministère de l’immigration et de l’identité nationale que Royal dénonça comme « amalgame insupportable » entre l’immigration et la menace de l’identité nationale.

Ensuite, elle commença par promouvoir sa propre version de nationalisme et d’identité nationale : « Avec moi, l’identité nationale ne disparaîtra pas dans la mondialisation ou dans le repli sur soi », promettait-elle en soulignant le rôle de la France comme un exemple pour le monde. Son seul désaccord avec Sarkozy était que l’identité nationale des citoyens ne devrait pas être définie en fonction du pays d’origine, mais « où ils veulent aller ensemble. »

Elle proclama que « La Nation ne distingue ni blancs, ni noirs, ni jaunes, ni catholiques, ni athées, ni juifs, ni musulmans. Tous nous sommes tous les citoyens de la République française à égalité de droits et de devoirs », dit-elle. Sur sa lancée, elle défendit une « immigration encadrée par des règles justes et respectées ». Les immigrés devront respecter les « lois et nous garantirons l’égalité de vos droits et de vos chances. »

L’ensemble de la rencontre exhalait un air de détachement et d’irréel. Les acclamations debout qu’elle reçut au début et à la fin avaient des allures de mise en scène et paraissaient artificielles. La réalité sociale, un chômage élevé, la pauvreté et les émeutes dans les banlieues, les suppressions d’emploi massives chez Airbus et chez d’autres grands groupes, ne firent pas leur entrée dans le meeting.

C’était une rencontre entre gens qui se sentent menacés par la réalité sociale et qui s’efforcent de fermer les yeux sur ce qui est en train de se passer. Voici les couches qui sont prêtes à soutenir Ségolène Royal. Parmi les vastes couches de la population, madame Royal est discréditée et bonne à être mise au rebut.

(Article original anglais paru le 15 mars 2007)

 

Copyright 1998 - 2007 - World Socialist Web Site- Tous droits réservés

Publié avec l'aimable autorisation du WSWS

 


Source : WSWS
http://www.wsws.org/...


Avertissement
Palestine - Solidarité a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Moyen-Orient.
L' auteur du site travaille à la plus grande objectivité et au respect des opinions de chacun, soucieux de corriger les erreurs qui lui seraient signalées.
Les opinions exprimées dans les articles n'engagent que la responsabilité de leur auteur et/ou de leur traducteur. En aucun cas Palestine - Solidarité ne saurait être tenue responsable des propos tenus dans les analyses, témoignages et messages postés par des tierces personnes.
D'autre part, beaucoup d'informations émanant de sources externes, ou faisant lien vers des sites dont elle n'a pas la gestion, Palestine - Solidarité n'assume aucunement la responsabilité quant à l'information contenue dans ces sites.
 
Pour contacter le webmaster, cliquez < ici >

Retour  -  Accueil Ressources  -  Analyses  -  Communiques  -  Originaux