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Pourquoi les élections anticipées ?
Par le général Michel AOUN

À l’ombre de cette crise dans laquelle se débat le Liban, les récriminations se multiplient et la pensée logique est réduite à néant, alors que les instincts et les sentiments prennent le dessus sur l’esprit conscient quant à la précision des raisons, des composants, des résultats et des solutions.

Cela dit, tous ceux qui s’occupent de la question publique se trouvent dans l’obligation d’exprimer leur opinion par écrit, chose qui pourrait contrôler les faits et les pensées, et porter l’écrivain à être responsable et de la forme et du fond.
La crise que nous vivons est la conséquence de plusieurs facteurs, tantôt séparés, tantôt enchevêtrés, mais quoi qu’il en soit, elle est le produit de la mauvaise volonté, qui a pu, dans une étape quelconque, corrompre la réalité politique ; les produits qui en ont résulté ont également corrompu la relation entre les institutions constitutionnelles et les ont totalement paralysées. Ainsi avons-nous perdu les références constitutionnelles qui doivent notamment s’acquitter de leurs devoirs, comme stipulé dans notre système démocratique.
Il ne fait pas l’ombre d’un doute que les élections parlementaires constituent le point de départ essentiel pour former l’autorité gouvernementale, ce qui fait que tout lacune dans lesdites élections se répercutera sur le cours des événements ultérieurs. La lacune principale qui a porté atteinte à notre démocratie à l’issue du retrait des forces syriennes du Liban fut la loi électorale, à l’ombre de laquelle se sont tenues les élections qui ont fait réussir ceux qui ont perdu dans leurs communautés et ont fait perdre ce qui y ont réussi. Ainsi la bonne représentation fut-elle gâchée, et des équilibres de forces politiques se sont-elles formées sur base d’un déséquilibre essentiel. D’autres lacunes ont accompagné les élections, j’entends par là les transgressions qui sont à la base de l’invalidation des résultats ; toutefois, la dissolution du Conseil constitutionnel empêcha l’examen des sièges controversés. C’est ainsi que s’est établie une majorité illusoire qui serait certainement devenue une minorité si le Conseil constitutionnel avait pu examiner lesdits sièges.

Nul n’ignore que, dans les systèmes démocratiques, des élections se tiennent à l’issue de l’effondrement des grandes alliances politiques qui forment la majorité au pouvoir, c’est ce qui a eu lieu au sein de l’alliance quadripartite qui fut le produit des dernières élections parlementaires, et sur base de laquelle le gouvernement actuel fut formé.
C’est aussi commun, dans les systèmes démocratiques, d’avoir recours à un sondage du peuple à travers des élections qui se tiennent après que de grands événements eurent eu lieu dans le pays. Comment exclure une option similaire au Liban, alors que le pays était la proie d’une guerre qui était sur le point de le démembrer ? Elle alla de pair avec des positions politiques qui divergèrent et s’entrechoquèrent pour changer énormément les opinions, les orientations, les positions, voire les convictions des citoyens.
À tout ceci s’ajoutent des démonstrations populaires hors concours dans le pays, de l’aveu même des historiens et des observateurs, outre le premier sit-in de l’histoire de notre pays et qui a entamé son troisième mois.
Néanmoins, si on passe à la performance du gouvernement, il y a à raconter sans crainte de contestation : il promet monts et merveilles, mais tout est remis aux calendes grecques ; jusqu’à présent, il n’a tenu aucune de ses promesses, il a même parfois fait le contraire de ce qu’il a prêché, il a renié les clauses de la déclaration ministérielle, notamment pour ce qui est de la couverture politique préalable à la Résistance, et de l’activation du rôle du Conseil constitutionnel. La feuille économique préparée pour la conférence Paris III a été négligée par les conférenciers qui adoptèrent des alternatives et des principes plus sérieux et plus efficaces. Il y va de même pour la loi électorale promise qui constitue un devoir de réforme, mais qui est pour le gouvernement un marchandage pur. Le comble reste la politisation des administrations, transformées en outils électoraux qui attisent l’apanage confessionnel et politique au lieu d’être au service de tous les citoyens. Si on accepte et on passe outre tous les arguments mentionnés ci-dessus, et on se suffit de présenter au lecteur la destruction méthodologique des jalons du pouvoir, à savoir la Constitution libanaise dont le texte, l’esprit, les coutumes et les traditions furent violés par les pratiques du gouvernement, nous serions la proie des systèmes tribaux révolus, ou des systèmes mafieux modernes. Ainsi la majorité au pouvoir se transforme-t-elle en tribu de l’époque du paganisme, ou en un groupe de mafia des groupes de la ville de Chicago dans les années 30.
La Constitution a été violée à plusieurs reprises avant de nous permettre de brosser ce tableau de la situation du pouvoir.
Commençons par ordre chronologique à citer les violations de la Loi fondamentale et la façon de faire fi de cette charte qui comprend les textes principaux relatifs à l’exercice du pouvoir, et constitue le premier jalon et la référence à tout pouvoir qui a l’intention de préserver son caractère légal. Immédiatement, après la séance de confiance au Parlement, le gouvernement a fait dissoudre le Conseil constitutionnel, qu’il a promis de consolider, et a violé ainsi l’article 19 de la Constitution. Au tout début de la session parlementaire en octobre 2005, le gouvernement était censé présenter le budget pour l’année 2006, mais il ne l’a pas fait, a réitéré la même violation en 2006 et n’a pas présenté le budget pour l’année 2007. Ainsi fut violé l’article 83 de la Constitution.
À peine le président de la République a-t-il signé les décrets de la formation du gouvernement qui entama ses projets, que la révolte contre le chef de l’État commença de la part du gouvernement et des ministres ayant comploté avec quelques ambassadeurs qui ont boycotté le président et ont commencé à traiter directement avec le Premier ministre. Le Premier ministre s’est permis également de recevoir des courriers directs qui devaient être adressés au président de la République, comme, par exemple, l’invitation au sommet de la francophonie. Ainsi fut violé l’article 49 de la Constitution.
Le gouvernement ne s’est pas suffi de ce nombre de violations des articles constitutionnels, mais il les a également ignorés en essayant de ratifier le projet de tribunal à caractère international pour le Liban, violant l’article 52 de la Constitution selon lequel le président de la République négocie et ratifie les traités internationaux.
Enfin, le gouvernement a violé l’article 95 après la démission des ministres chiites, et a perdu son caractère légal, conformément au paragraphe J du préambule de la Constitution qui stipule qu’« aucune légitimité n’est reconnue à un pouvoir s’il n’est pas conforme au pacte d’entente nationale ». De même, la présence chrétienne au pouvoir manquait de représentativité, les chrétiens sont devenus de faux témoins sans efficacité aucune, emboîtant ainsi le pas à leurs pareils à l’époque de la tutelle.
Avec tout ce que nous avons mentionné dans cet article, les grands érudits et autres pontifes de la démocratie nous prodiguent les conseils d’œuvrer dans le cadre des institutions constitutionnelles, celles-là même que le gouvernement a vidées de tout leur contenu. Ainsi nous trouvions-nous obligés de rejeter ces conseils avec nos remerciements anticipés. Beyrouth, mère des lois, sait très bien expliquer les constitutions et les lois, et n’a pas besoin d’être guidée, mais de voir s’arrêter les interventions dans ses affaires, alors laissez-la en paix… Et permettez-nous au moins de traiter nos affaires un peu mieux que vous ne le faites.

(Rabieh, le 7/2/2007, traduit de l’arabe)

 


Source : Site officiel du Général Aoun
http://www.tayyar.org/tayyar/...


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