Nouvelles d'Irak
Le Golan ne
sera jamais israélien
Gilles Munier
Gilles Munier
Lundi 3 janvier 2011
Article de Gilles Munier (Afrique Asie - janvier 2011)
En mai dernier, Dmitri Medvedev a remis à Bachar al-Assad,
un message de Shimon Pérès affirmant «qu’Israël était prêt à
lui céder le Golan en contrepartie de la fin de l’alliance
stratégique entre la Syrie et l’Iran » (1). Dans le même
temps, Benjamin Netanyahou et son ministre des Affaires
étrangères, Avigdor Lieberman, peaufinaient une loi, déposée en
2008, interdisant toute rétrocession de territoires occupés sans
l’accord des deux-tiers des députés ou l’organisation préalable
d’un referendum général. Dans un pays dominé par l’extrême
droite raciste, hostile à la restitution du Golan et de
Jérusalem-Est, la nouvelle loi rend pratiquement impossible la
signature d’un traité de paix avec les Arabes.
Guerre de l’eau
Interrogé en 2009 sur l’importance du Golan pour
Israël Uzi Arad, conseiller pour la sécurité de Netanyahou,
agent du Mossad à Paris en 1987, a répondu: «pour des
raisons stratégiques, militaires et agricoles. Les besoins en
eau, en vin et… pour la vue » (2). On sait que les visées
d’Israël sur le sud du Liban et le Golan ne datent pas d’hier.
Dès 1919, Chaïm Weizman, président de l’Organisation
sioniste mondiale et futur président d’Israël, écrivait à
Llyod George, Premier ministre britannique, que l’avenir du
« Foyer national juif » dépendait de son alimentation en
eau provenant des sources du Jourdain, du Mont Hermon et du
fleuve Litani (3). Le général Moshe Dayan, ministre de
la Défense « conquérant » du Golan en 1967, a raconté
au journaliste israélien Rami Tal que plus de 80% des tirs
syriens sur les kibboutz, dénoncés par Israël, répondaient à des
provocations israéliennes (4). La soi-disant menace que
faisait peser Damas sur le nord d’Israël n’était qu’un prétexte
pour s’approprier un jour les terres fertiles des paysans
syriens.
Loi scélérate
Le Golan a été annexé en 1981. Depuis, sa colonisation
s’est intensifiée. Plus de 100 000 paysans syriens, druzes pour
la plupart, ont été expulsés de leurs terres. Ceux qui restent –
environ 18 000 personnes – refusent la nationalité
israélienne et manifestent régulièrement leur attachement à la
Syrie. Des résolutions de l’ONU exigent la restitution des
territoires occupés en juin 1967 (5), mais la
communauté internationale est incapable de sanctionner Israël
qui ne les respecte pas. La Syrie s’est plaint du détournement
des eaux du Golan, du pompage de la nappe phréatique, du
percement de tunnels pour entreposer des déchets nucléaires…
sans résultat. Elle a négocié la paix avec Israël à chaque fois
que l’occasion s’est présentée. La dernière, en 2008, en
Turquie, a débouché encore une fois sur une impasse. Comme l’a
avoué Yéhuda Harel, représentant des 19 000 colons israéliens du
Golan, ce genre de discussion relevait du spectacle (6)…
La houtzpah israélienne – mot yiddish
signifiant arrogance – est sans limite. L’impunité dont
Israël jouit, aussi. La loi scélérate votée le 22 novembre
dernier par la Knesset, imposant un referendum avant tout
retrait de territoires occupés, en particulier du Golan et de
Jérusalem-Est, conduit mécaniquement à la guerre.
Notes :
(1)
Assad: Peres Offered Us 'Golan for Iran and Resistance Movements
(interview du Président Bachar al-Assad au quotidien libanais
al-Safir,
cité par Al-Manar TV,
le 18/5/10)
(2)
No Golan heights pullout dor Syria peace: Netanyahu aid , par Matti Friedman(The
Huffington Post – 10/7/09).
Uzi
Arad a été interdit d’entrée aux Etats-Unis pour son implication
dans un scandale d’espionnage lié à l’AIPEC.
(3)
Cité dans « Eaux
et territoires: tensions, coopérations et géopolitique de
l'eau »,
par Frédéric Lasserre et Luc Descroix
(Presse de l’Université du Québec, 2005)
(4)
General's Words Shed a New Light on the Golan,
par Serge Schmeman (New York
Times- 11/5/97)
(5)
Israël refuse toujours d’appliquer les résolutions 242
(22/11/67)
et 338 (22/10/73)
du Conseil de sécurité de l’ONU, ainsi que la résolution 497
(17/12/81)
qui considère comme
nulle, non avenue et sans aucun effet juridique sur le plan
international, la décision d'Israël d'imposer ses lois et son
autorité judiciaire et administrative sur le Golan occupé.
(6)
Reprise des discussions entre la Syrie et Israël - Le vote de la
Knesset risque de peser lourd
(AFP – 1/7/08)
Et dans AFI-Flash n°110
(janvier 2011)
Appendice 1 :
Golan : toute question portant
sur la poursuite de l’occupation est illégitime
(Gideon
Levy)
… (…)… La rouerie
israélienne se porte bien, elle aussi : on adopte des lois qui
prendront effet au jour de l'accord afin de mieux en éloigner la
venue. La morale israélienne n'est pas en reste ; la question
posée lors de ce référendum sera immorale par excellence ; et à
l'erreur s'ajoute la faute puisque nous seuls, Israéliens, fils
du peuple élu, déciderons du destin d'un autre peuple qui,
depuis deux générations, vit sous occupation. Et c'est cela que
nous osons nommer démocratie ! En fait, c'est la houtzpah
israélienne qui va pour le pire. La question qui sera posée au
peuple n'est pas morale. Elle revient à se prononcer sur la
poursuite de l'occupation - qui est pour / qui est contre
- comme s'il était légitime de poser une telle question. De même
qu'un accord entre bandes sur la répartition d'un butin ne
saurait être entériné par un tribunal, toute question portant
sur la poursuite de l'occupation est parfaitement illégitime.
Penser qu'il puisse nous appartenir à nous, Israéliens, de
décider si les habitants syriens du Golan, et les Palestiniens
de Cisjordanie comme ceux de la Bande de Gaza, jouiront du droit
à l'autodétermination et des libertés fondamentales est
grotesque. Cela montre à quel point les valeurs morales et le
sens de la justice se sont chez nous pervertis et dégradés.
Source:
Israel can't put occupation up for immoral referendum, par
Gideon Levy
(Haaretz 28/11/10 - extrait)
Traduction :Ilan
Rozenkier pour La Paix Maintenant
http://www.haaretz.com/print-edition/opinion/israel-can-t-put-occupation-up-for-immoral-referendum-1.327291#send-friend-popup%3Chttp://www.haaretz.com/print-edition/opinion/israel-can-t-put-occupation-up-for-immoral-referendum-1.327291#send-friend-popup%3EUn
Appendice 2 :
En décembre 1981,
un appel publié
dans le quotidien
Le Monde…
resté lettre morte
NON A L’ANNEXION DU GOLAN
PAR ISRAEL
A l’appel du
Comité pour la Paix au Proche-Orient (CPO), les
signataires condamnent la décision d’annexion du Golan syrien
par les autorités israéliennes. Ce nouvel acte contraire aux
résolutions des Nations unies sur les territoires arabes occupés
depuis 1967 est un prolongement de l’annexion de Jérusalem en
1980. Il démontre la volonté expansionniste du gouvernement
israélien et sa politique extrémiste dans la région.
Les
signataires demandent instamment au gouvernement français de
dénoncer sans ambiguïté la décision du régime israélien et d’en
tirer toutes les conséquences dans ses relations avec Tel Aviv.
Le Président de la République ne devrait pas cautionner
l’annexion du Golan en se rendant en Israël.
Les
signataires appellent le gouvernement français et tous les
gouvernements européens :
·
à agir pour l’application des résolutions des Nations unies
relatives au « retrait de tous les territoires arabes
occupés depuis 1967 », y compris Jérusalem et le Golan
syrien ;
·
à prendre des sanctions pour condamner les atteintes au droit
international et les agressions de l’Etat d’Israël contre ses
voisins arabes.
Signataires
(première liste) :
Michel Alloncle, sénateur
RPR – professeur Mohamed Arkoun (Paris III) – Denise Barrat,
écrivain – professeur Jacques Berque, du Collège de France –
général Georges Buis – Régis de Castelnau - Jean Charbonnel,
ancien ministre, maire de Brives – Philippe de Saint Robert,
écrivain – professeur Dresh – Georges Fisher, directeur de
recherche au CNRS – Roger Garaudy, écrivain – Daniel Goulet,
député RPR – Michel Grimard, co-président du CPO – Michel
Habib-Deloncle, ancien ministre, président de la Chambre de
commerce franco-arabe – professeur Jouve (Paris 1) – Roger Kempf,
écrivain – professeur Larivière, président de l’Association
médicale franco-palestinienne – père Michel Lelong, consulteur
du Vatican pour les religions non chrétiennes – Jean-Yves Le
Drian, député-maire de Lorient (PS) – Alain Mayoud, député UDF –
Serge Mathieu, sénateur – pasteur Mathiot – Elisabeth Mahiot –
professeur Miquel, du Collège de France – professeur Monteil –
Gilles Munier, secrétaire général exécutif de l’APEBA –
Monseigneur Nasrallah, exarque patriarcal d’Antioche – Raymond
Offroy, fondateur et président d’honneur de l’Association
parlementaire de coopération euro-arabe – M. Pince, président de
la Fondation pour l’Europe – Pierre Rondot – Charles Saint-Prot,
écrivain, co-président du CPO.
Nota - AFI-Flash :
Depuis 1981, tous les présidents français se sont rendu en
Israël. Le Comité pour la Paix au Proche-Orient (CPO) a
cessé ses activités à la fin des années 80. Plusieurs
signataires de cet appel sont aujourd’hui décédés.
© G. Munier/X.Jardez
Publié le 4 janvier 2011 avec l'aimable
autorisation de Gilles Munier
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