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Amérique latine
Cuba:
pourquoi cet acharnement irrationnel ?
Danielle Mitterand
Danielle Mitterand Oui
nous sommes heureux avec mon équipe et de nombreux amis de la
Fondation France Libertés de revenir à Cuba. Heureux de revoir
nos partenaires et surtout curieux de voir comment le peuple
cubain est en train de passer visiblement, sans heurts, le cap de
la transition. Mémoires pour l'avenir
26 novembre 2007
Mon cher Alfredo Guevara (Ancien ministre de la Culture) qui nous
accueille à l’aéroport me le dit tout de suite « Tu es arrivée
dans un moment exceptionnel, Danielle. Ici tout le monde discute,
des cercles de réflexion politique sur ce que nous voulons faire
après Fidel se mettent en place partout. Mais ce qu’il y a de
formidable c’est que tous ceux qui veulent des changements et
des améliorations veulent sauvegarder l’essentiel de notre
socialisme ».
Nous sommes allés voir des coopératives de paysans dans la
province de Cienfuegos. Nous financerons une partie de l’effort
de rénovation de leur circuit d’adduction d’eau et
d’assainissement avec le PNUD et de nombreuses villes françaises
et syndicats regroupés au sein de «Cuba Coopération ».
Nous avons vu des centres touristiques source possible de revenus
pour le futur.
Je me suis aussi entretenue avec le Président du Parlement, les
responsables des régions, des Ministres, le vice président du
Conseil d’Etat. Ils m’ont exposé, sans langue de bois, leurs
difficultés, leurs erreurs, et leur projet.
J’espérais pouvoir saluer un ami gravement malade qui a représenté
une grande expérience de libération d’un peuple non seulement
pour Cuba mais pour toute l’Amérique latine. Si aujourd’hui
certains pays du continent se libèrent du brutal impérialisme américain
(combiens de morts, de torturés de disparus combien de
souffrances, au Guatemala au Chili en Argentine au Nicaragua, au
Paraguay, au Panama pour servir les intérêts financiers de la
United Fruit Co, de la Anaconda Copper, de la Union Carbide ou du
complexe militaro industriel américain), oui si donc
aujourd’hui certains se libèrent de cette tutelle et de la
doctrine de Monroe, ils le doivent en partie à la résistance de
ce petit peuple têtu, et de cet homme, que la proximité d’un
ennemi acharné, a enfermé dans une politique sécuritaire qui ne
favorise pas la démocratie.
Mais une crainte me préoccupe. Pourront-ils continuer à rester
ce qu’ils sont ? Pauvres certes, selon les calculs de l’économie
convenue, mais éduqués, avec un système de santé et une
relative équité sociale que le monde peut leur envier. Il suffit
d’aller en Colombie, le grand allié des USA, pour voir la différence
entre un vrai gouvernement et la dictature sanglante des bandes
armées.
Je pense aux « Maquiladoras » de la frontière Mexique-USA qui
sont également de véritables zones de non droits pour les
travailleurs comme pour les femmes dont des centaines ont disparus
dans des circonstances que la police mexicaine se garde bien d’élucider.
Je pense au Nicaragua ou la pauvreté a fait des progrès hélas
parallèles au retour du libéralisme.
Bref je suis à la fois optimiste sur les capacités
exceptionnelles du peuple cubain à affronter l’avenir mais
inquiète sur ce que d’autres peuvent essayer de faire de cet
avenir.
Le Cuba qui doit continuer avec l’aide de la coopération
internationale : celui où tout le monde a reçu une éducation, où
la santé publique couvre tous les besoins aussi bien ceux des
plus modestes, ou un ouragan comme Katrina n’a tué personne et
ne mettra personne à la rue dans l’indifférence du
gouvernement. Celui ou les enfants victimes de Tchernobyl pourront
continuer à être soignés gratuitement, celui qui exportera ses
médecins et ses intellectuels et pas ses ouvriers sans travail,
celui qui restera soit disant pauvre car il saura que la
croissance industrielle sans frein est une illusion funeste pour
l’environnement et l’avenir de la planète. Celui où on peut
marcher dans les rues sans crainte de se faire enlever contre rançon.
Celui où dans les banlieues de La Havane les jeunes ne brulent
pas des centaines de voitures. Celui ou les enfants vont à l’école
.
Et son gouvernement qui a fait ce qu’il a pu, n’a certainement
pas de leçons à recevoir de ceux qui passent tous les jours à
Paris devant des hommes et des femmes couchés sur des cartons
recroquevillés dans des embrasures de portes sans même leur
jeter un regard .
Oui, il y a des violations majeures à Cuba. Elles sont à
Guantanamo, enclave américaine.
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