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Sharon peut faire la paix

Pascal Boniface par Patrick Perotto / L’Est républicain / 26 décembre 2005



A part la mort, qu'est-ce que qui peut empêcher Sharon de remporter les législatives israéliennes en mars prochain ?

A part la mort, seules des inquiétudes sur son état de santé et sur son âge pourraient l'empêcher de gagner, du fait de la petite alerte récente. Pour le coup, Sharon a réussi son opération politique dans la mesure où il a créé un parti sur son nom avec des gens qui vont voter pour lui et des candidats qui seront élus avec lui. Il a également signé le laminage politique du Likoud. Amir Peretz, le nouveau leader du Parti travailliste et très probablement son adversaire le plus sérieux, peut être considéré comme encore trop nouveau ou les élections viennent un peu trop vite pour lui, pour qu'il l'emporte contre Sharon, sauf si les électeurs font un choix générationnel.

Sur quelles bases Amir Peretz peut-il inquiéter Sharon ?

Il va au moins réussir à mettre fin à l'agonie du Parti travailliste, dont on ne voyait plus tellement l'identité. Ce parti s'était allié plusieurs fois à Sharon sur des bases qui n'apparaissaient pas toujours extrêmement claires aux électeurs. Peretz, qui a dirigé un syndicat, peut non seulement ramener une partie de l'électorat sépharade - il l'est lui-même - qui se porte traditionnellement sur le Likoud, mais également un électorat de pauvres et d'électeurs inquiets de la situation économique. Toutefois, ce point jouera moins du fait de la rupture entre Netanyahu, incarnation de l'ultralibéralisme, et Sharon, Cette rupture prive Amir Peretez, un ancien leader syndical d'une partie de l'espace qu'il espérait conquérir.

Sharon peut-il faire la paix, et si oui, quelle paix ?

Peut-il faire la paix, oui. Veut-il faire la paix, la question reste ouverte et tout dépend ce que l'on appelle la paix. Ce qui a été fait à Gaza, en août dernier, est un geste dont on ne peut nier l'importance, une première historique. Mais il ne peut être assimilé à une paix véritable, puisque pendant qu'Israël se retirait de Gaza la colonisation se poursuivait en Cisjordanie. Si la paix c'est ce que prévoit la " Feuille de route ", document reconnu par tous les partenaires et soutenu par les Etats-Unis, la Russie, l'Europe et les Nations Unies, elle passe par la création d'un Etat palestinien. Ce texte, qui est en agonie, prévoyait la création de cet Etat fin 2005. Manifestement, le calendrier ne sera pas respecté. Si les principes sont respectés par un report, c'est un moindre mal.

Pour la communauté internationale et pour les Palestiniens, une paix véritable passe par la création d'un Etat palestinien à côté d'Israël, qui reconnaisse bien sûr le droit d'Israël de vivre et qui soit grosso modo sur les frontières de 1967 avant la Guerre des Six-jours avec des rectifications territoriales, mutuellement agréées et compensées, pour tenir compte de certaines colonies. Israël ne doit rien imposer aux autres, et évidemment, Jérusalem doit être reconnue comme capitale des deux Etats. La crainte existe de la création d'un Etat palestinien sur une partie seulement de la Cisjordanie et sans Jérusalem. Dans ce cas-là, les Palestiniens ne pourraient pas l'accepter. La question la plus importante reste celle de Jérusalem. Il ne s'agit pas seulement d'une question palestinienne ni même arabe, mais bien d'une question musulmane. Pendant très longtemps, on a parlé d'un conflit israélo-arabe puis israélo-palestinien. S'il n'y a aucune concession israélienne sur Jérusalem, on en reviendrait à quelque chose de plus grave, un conflit israélo-musulman.

Que peuvent faire concrètement les Palestiniens, notamment Mahmoud Abbas, le président de l'Autorité palestinienne ?

Les Palestiniens se trouvent dans une situation un peu désespérante de par des marges de manœuvres restreintes. Tout dépendra du résultat des législatives palestiniennes le 25 janvier. Soit le Hamas les gagne - dans un système démocratique rien n'est exclu - et l'on pourra dire adieu pour longtemps à l'ouverture des négociations, soit Abbas l'emporte parce qu'il réussit à montrer que son action se traduit par des conséquences positives concrètes dans la vie des Palestiniens. Une reprise des attentats ruinerait les chances de paix.

L'Europe est-elle hors-jeu dans la résolution du conflit ?

Elle n'est pas tout à fait hors-jeu. Elle a joué un rôle non négligeable dans l'ouverture du terminal de Rafah entre Gaza et l'Egypte. Elle a d'énormes moyens pour agir : elle est le premier partenaire commercial d'Israël ; elle est le premier fournisseur d'aides en Palestine. En outre, tous les pays européens partagent la même analyse. Mais l'Europe a peur d'elle-même, de saisir ses responsabilités pour des raisons historiques. Elle paraît inhibée sur ce sujet et elle compense une faible action politique en augmentant ses aides palestiniennes et ses accords commerciaux israéliens. Comme si cet aspect économico-financier servait de compensation et à se faire pardonner une sorte d'inaction politique.

Bush aujourd'hui est-il trop pris par l'Irak pour se mêler du conflit ?

Faire avancer les choses sur le conflit israélo-palestinien viendrait améliorer son image dans le monde arabe, dans le monde musulman et rendrait moins compliqué la gestion du dossier irakien. Là aussi, c'est une question de volonté et pour l'instant il n'a pas montré de volonté de se saisir réellement du problème. A noter tout de même un acte positif : Condoleeza Rice sur place a prolongé son séjour de 24h pour obtenir un accord sur Rafah de la part des Israéliens. Pour la première fois depuis Clinton, les Etats-Unis ont fait pression et ont obtenu un résultat positif.

Les accords de Genève peuvent-ils ressurgir un jour ?

Le plan d'évacuation de Gaza par Sharon a été lancé pour torpiller ce plan. Son contenu reste néanmoins d'actualité, parce qu'il est compatible avec la feuille de route. Il en est même très proche. Un jour ou l'autre, la paix se fera sur la base des accords de Genève. Le tout est de savoir comment les mettre en œuvre. Mais ces accords dans leur finalité me paraissent toujours d'actualité.

 


 Source : IRIS
 http://www.iris-france.org/pagefr.php3?fichier=fr/Archives/Interviews/2005-12-26a


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