La centrale
électrique de Gaza
détruite par les bombardements israéliens
est assurée par une agence états-unienne
par Farah Stockman
in The Boston Globe, 29 juin 2006
[Washington
– La centrale électrique palestinienne détruite mardi dernier
par l’aviation israélienne est assurée par une agence fédérale
états-unienne. Des responsables officiels états-uniens indiquent
s’attendre à ce que des financements américains soient utilisés
pour payer les réparations.]
La destruction de l’unique centrale électrique de la bande de
Gaza (d’une puissance de 140 mégawatts) menace de provoquer une
catastrophe humanitaire, cette usine ayant fourni jusqu’ici en
électricité les deux tiers de la population de Gaza (1,3
millions d’habitants) et permis de faire fonctionner les pompes
qui fournissent l’eau potable à cette population.
Mais
le financement des réparations de cette centrale (assurée à
hauteur de 48 millions de dollars) pourrait s’avérer problématique
pour les Etats-Unis, qui ont gelé les financements de tous les
projets d’infrastructure dans les territoires palestiniens après
la victoire du groupe activiste Hamas aux élections législatives
palestiniennes, au mois de janvier.
Des
responsables de l’administration américaine ont indiqué que
les restrictions imposées à toute coopération avec un
gouvernement dirigé par le Hamas pourraient, de plus, rendre
compliquées les réparations de la centrale électrique,
lesquelles pourraient demander des semaines, voire plusieurs mois,
en raison de l’escalade des violences à Gaza.
Le
bombardement de cette centrale électrique risque de devenir un
problème lancinant pour l’administration Bush, qui appelle à
la fin de l’escalade entre Israéliens et Palestiniens dans la
bande de Gaza.
Les
avions israéliens ont frappé l’usine deux jours après que des
activistes palestiniens eurent attaqué une unité de l’armée
israélienne, tuant deux soldats et prenant un troisième soldat
en otage. Les forces israéliennes ont répliqué hier en pénétrant
dans la bande de Gaza, pour la première fois depuis le retrait
israélien historique de ce territoire, il y a neuf mois de cela,
et en bombardant notamment l’usine électrique et trois ponts.
Le
chantier de construction de la centrale électrique avait nécessité
plus de cinq années de travaux, pour un coût d’environ 150
millions de dollars.
Cette
usine avait commencé à être planifiée en 1999, deux
investisseurs privés – la désormais défunte Enron Corp (Etats-Unis)
et un magnat de la construction d’origine palestinienne, Said
Khoury – ayant mis au point un projet devant permettre aux
territoires palestiniens de moins dépendre des approvisionnements
électriques en provenance d’Israël.
Le
projet avait été menacé par l’éruption de violence à Gaza,
en 2000, et à nouveau à l’occasion de la banqueroute d’Enron,
mais M. Khoury n’a jamais cessé de pousser à sa réalisation.
Son entreprise de BTP, filiale du groupe américain Morganti (basé
dans l’Etat du Connecticut), avait racheté les parts d’Enron
dans ce projet.
En
2002, l’usine entra en fonctionnement, devenant la première
station génératrice gérée par l’Autorité palestinienne de
l’Energie. En 2004, elle atteignit sa pleine capacité
commerciale, et ses propriétaires furent en mesure de souscrire
une assurance pour « risque politique », d’un
montant de 48 millions de dollars, auprès d’Overseas Private
Investment Corporation [il s’agit d’un équivalent de la
Coface, ndt], une agence gouvernementale états-unienne qui assure
aux entreprises américaines des financements à l’étranger
ainsi que la promotion d’intérêts américains sur des marchés
émergeants.
L’US
Investment Corporation – mise sur pied en 1971 grâce aux impôts
des contribuables américains – avait souscrit au projet de
construction de la centrale dès le début, organisant la première
rencontre entre les investisseurs intéressés, indique l’agence
de la presse économique, Bloomberg.
« Rares
sont les compagnies d’assurances commerciales à assurer ce
genre de projet contre les troubles politiques, mais l’US
Investment Corporation le fait, afin d’encourager le développement
sur des marchés émergeants », indique Lawrence Spinelli,
porte-parole de cette compagnie.
« L’assurance
souscrite par l’entreprise de BTP Morganti couvre les « sinistres
politiques », ce qui inclut notamment les « guerres ou
les actes de terrorisme », a déclaré M. Spinelli. Pour
voir ses dommages couverts, la compagnie assurée doit en faire la
déclaration, après quoi l’Investment Corporation devra déterminer
si celle-ci est couverte par la police souscrite », a-t-il
expliqué.
Les
fonds de réserve de cette compagnie d’assurance sont alimentés
par les primes et d’autres frais imputés à ses clients, mais
ces fonds, conservés par le Trésor des Etats-Unis, sont soumis
au contrôle du Congrès.
Cela
risque de poser problème à ceux qui désireraient voir cette
centrale électrique reconstruite rapidement.
Après
l’élection du Hamas, au mois de janvier, un certain nombre de
membres du Congrès ont déposé des projets de loi visant à
geler l’aide des Etats-Unis aux territoires palestiniens afin
d’éviter que toute assistance financière américaine ne bénéficie
au Hamas, considéré comme une organisation terroriste. En avril,
le Département d’Etat a annoncé qu’il allait suspendre tout
financement, y compris les financements déjà planifiés et budgétés,
à des infrastructures tant dans la bande de Gaza qu’en
Cisjordanie.
Mais
des personnes soutenant les Palestiniens disent que l’usine doit
être réparée, même si le gouvernement des Etats-Unis est
contraint de participer au financement des réparations.
« Si
vous supprimez les deux tiers de l’énergie électrique
disponible dans un endroit comme Gaza, et s’il s’agit, de
surcroît, des ressources en électricité qui permettent de faire
fonctionner les pompes assurant l’approvisionnement en eau
potable, alors vous risquez de vous retrouver très rapidement
confronté à une crise majeure », a ainsi déclaré Eb
Abington, ancien consultant auprès de l’Autorité
palestinienne.
© Copyright 2006 Globe
Newspaper Company.
Traduit
de l’anglais par Marcel Charbonnier, membre de Tlaxcala, le réseau
de traducteurs pour la diversité linguistique (www.tlaxcala.es).
Cette traduction est en Copyleft.
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