Communiqué
La Licra,
prêtre officiel de la nouvelle laïcité ?
UJFP
Mercredi 4 février 2015
Nous apprenons que la LICRA (Ligue
Internationale Contre le Racisme et
l’Antisémitisme) vient d’obtenir la
signature du renouvellement de son
partenariat avec le Ministère de
l’Education nationale pour trois ans,
tant pour son intervention dans les
établissements que pour la formation des
formateurs.
Cette annonce intervient au moment où le
Ministère prévoit de donner une certaine
importance (malgré les limites de
crédits) à la promotion d’un nouvel
enseignement civique et moral, dont la
LICRA serait donc un partenaire
privilégié.
Dans le même mouvement, le livre que la
LICRA a édité en septembre 2014,
100 mots pour se comprendre contre le
racisme et l’antisémitisme (sous
la direction de Antoine Spire et Mano
Siri, éditions Le Bord de L’eau), est
publié sur le site « Eduscol » du
ministère comme outil pédagogique
privilégié.
L’Union Juive Française pour
la Paix considère que cette convention
et cette promotion de l’ouvrage cité
sont un très mauvais coup porté à la
laïcité, au « vivre ensemble » et à la
lutte contre le racisme dans notre pays.
Sans préjudice d’une analyse
ultérieure plus approfondie,
nous citerons simplement quelques
passages de l’ouvrage, qui certes n’en
constituent pas l’essentiel, mais
portent sur des sujets dont nous savons
qu’ils sont justement au cœur des
polémiques et des difficultés
rencontrées par les personnels de
l’éducation aujourd’hui, tout
particulièrement depuis les crimes
racistes qui ont endeuillé notre pays en
janvier. Sur plusieurs points, nous
sommes obligés de parler de l’œuvre de
pompiers pyromanes, et nous en voulons
pour preuve le choix de certains
rédacteurs, tel Robert Redeker, l’auteur
de la formule « islamisation des
esprits ».
Dans leur introduction les auteurs
savent à juste titre dire, après avoir
montré comment « de nouveau on assassine
des juifs uniquement parce qu’ils sont
nés juifs », que « les musulmans de ce
pays ne sont pas mieux traités ». Mais
le reste de l’ouvrage montrera un
traitement fort déséquilibré des notions
et des faits.
La présentation d’Israël (seul Etat
faisant l’objet d’une entrée) comme
« seule authentique démocratie du Moyen
Orient » ne peut être perçue que comme
une provocation pour tous ceux qui sont
horrifiés par les massacres répétés
opérés par cet Etat au mépris du droit
international depuis sa création, et
encore aujourd’hui en Cisjordanie et
bien sûr à Gaza. Israël est un Etat juif
et démocratique au sens où il est
démocratique pour les Juifs et oppose sa
judéité à tous les autres, pour
justifier les discriminations tant en
matière de logement et de travail que de
justice et de circulation, sans oublier
la non-reconnaissance de nombreux
villages palestiniens, dont ceux des
Bédouins du Néguev.
Or Israël est présenté comme ayant
« toujours eu deux langues officielles –
hébreu et arabe - (...) ». Cela n’est
plus vrai depuis des années, et tous
ceux qui sont allés sur place savent à
quel point tout est fait pour que
l’arabe soit éliminé du paysage. Ni la
Nakba, ni l’occupation et la
colonisation des territoires
palestiniens conquis en 1967 ne sont
évoquées.
De ce fait ne faudrait-il pas rappeler
que les 50% de non-juifs vivant entre
Mer Méditerranée et Jourdain sont privés
de tout ou partie de leurs droits
politiques et économiques ?
Cette présentation d’Israël se
contente de reprendre le roman national
proposé par le sionisme d’un « retour
sur la terre ancestrale », et bien sûr
ne questionne pas le sionisme comme
idéologie de la séparation. La nécessité
d’un Etat nation sur une base ethnique
n’est peut-être pas le meilleur exemple
pour promouvoir le « vivre ensemble »,
elle est même en contradiction avec la
conception républicaine de la
citoyenneté. Une telle présentation va
de pair avec celle de l’antisionisme
comme forme moderne de l’antisémitisme,
en s’abritant derrière une citation de
Léon Poliakov : « Cette agitation qui
dure depuis trois millénaires, qui fut
par exemple « anti mosaïque » dans
l’Antiquité, « antijudaïque » chez les
chrétiens et devint « antisioniste » au
vingtième siècle, connaîtra probablement
au vingt et unième siècle de nouveaux
prolongements (...) ».
Mano Siri et Antoine Spire enfoncent
le clou « En effet, Israël est le seul
Etat du monde dont certaines forces
politiques contestent encore la
légitimité, confondant la critique d’une
politique avec la négation de l’Etat.
Avec la deuxième Intifada en septembre
2000, et malgré la signature d’accords
de paix entre Israël et plusieurs de ses
voisins arabes (Egypte et Jordanie),
l’antisionisme recouvre à présent la
délégitimation de l’Etat d’Israël et
l’hostilité aux Juifs ».
Ici, Mano Siri et Antoine Spire
confondent la critique des conditions de
la création de l’Etat d’Israël et des
structures d’apartheid qu’il s’est
données, ses pratiques d’épuration
ethnique et son expansion par la
construction du Mur ou la colonisation,
et l’hostilité aux Juifs. Ce sont eux
qui, en participant à cette confusion,
comme d’ailleurs les autres soutiens
inconditionnels de l’Etat d’Israël comme
le CRIF, contribuent à l’antisémitisme.
C’est cette même définition de
l’antisionisme comme la forme moderne de
l’antisémitisme qui a conduit des
militants alsaciens sur le banc des
accusés pour avoir appelé au boycott des
produits israéliens tant que ce pays ne
respectera pas le droit international,
procès dans lequel la LICRA s’était
portée partie civile.
Ainsi, sur des questions clés, le
livre apparait non comme un outil
pédagogique ouvrant à débat, mais
l’affirmation d’une idéologie assénée
comme une vérité incontestable.
Choisir la LICRA comme
partenaire privilégié et son livre comme
référence est un acte délibéré
d’importation du conflit Israël
Palestine dans l’école sous prétexte
d’antiracisme. L’UJFP demande
solennellement que cette décision soit
reconsidérée.
Le bureau national de l’UJFP, le 4
février 2015
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