31 août 2006
Index AI : MDE 02/021/2006 (Public) Bulletin n° : 226 ÉFAI 31 août
2006
Amnesty International a appelé Israël, ce jeudi 31 août, à
fournir sans délai les cartes des régions du Liban dans lesquelles
des bombes à sous-munitions ont été utilisées au cours du récent
conflit, afin de faciliter leur enlèvement et d'empêcher de
nouvelles victimes civiles.
L'organisation a rendu publics les témoignages de victimes de
bombes à sous-munitions qui n'avaient pas explosé au moment de
leur impact et appelé Israël à coopérer à une enquête
impartiale et approfondie sur l'utilisation de ce type de munitions
au cours du récent conflit.
Ces appels interviennent après la publication d'un rapport des
Nations unies qui a révélé que 90 p. cent des frappes israéliennes
utilisant des bombes à sous-munitions se sont produites au cours
des dernières soixante-douze heures du conflit, alors qu'un
cessez-le-feu était en vue. Le Centre de coordination de l'action
contre les mines des Nations unies a identifié à ce jour plus de
400 points contaminés par plusieurs centaines de milliers de
petites bombes contenues dans ce type de munitions.
Les délégués d'Amnesty International au Liban ont trouvé
d'innombrables bombes à sous-munitions non encore explosées dans
les villages et même parfois dans les maisons.
« L'utilisation de bombes à sous-munitions au cour de zones habitées
viole clairement l'interdiction de toute attaque menée sans
discrimination et constitue donc une grave violation du droit
international humanitaire, a déclaré Kate Gilmore, secrétaire générale
adjointe exécutive d'Amnesty International. Il est scandaleux qu'en
dépit des demandes officielles des Nations unies, Israël n'ait
toujours pas fourni de cartes pour les régions visées par des
bombes à sous-munitions. Cette situation met en danger la vie de
civils libanais, d'enfants en particulier. »
Les bombes à sous-munitions libèrent en l'air plusieurs centaines
de petites bombes sur une large zone. Ces bombes n'explosent pas nécessairement
lors de leur impact, faisant ainsi planer une menace durable pour la
population civile.
« Les bombes à sous-munitions sont de fait des mines
antipersonnel. Leur utilisation par l'armée israélienne au Liban a
déjà fait de nombreuses victimes parmi les centaines de milliers
d'hommes, de femmes et d'enfants qui cherchaient à regagner leur
domicile. Les États-Unis d'Amérique, principal fournisseur d'armes
à Israël, ainsi que les autres pays ne devraient plus fournir ce
type d'armes et devraient décréter un moratoire international sur
leur utilisation », a déclaré Kate Gilmore.
Une mission d'Amnesty International actuellement au Liban a parlé
avec certaines des victimes de bombes à sous-munitions parmi les
centaines de milliers de civils qui tentent actuellement de regagner
leur domicile dans le sud du Liban.
Abbas Yusef Shibli, six ans, a décrit aux délégués d'Amnesty
International ce qui s'est passé quand il a tenté de ramasser une
bombe à sous-munitions qui n'avait pas explosé dans le village de
Blida, le 26 août. De son lit d'hôpital, Abbas a expliqué qu'il
était en train de jouer avec trois camarades; il avait voulu
ramasser un objet qui ressemblait à une « bouteille de parfum » .
Abbas a été victime d'une rupture du colon et de la vésicule
biliaire, il a un poumon perforé, le nerf médian a été touché,
il a déjà subi deux transfusions sanguines. Ses trois camarades
ont aussi été blessés, mais ont quitté l'hôpital au bout de
deux jours.
Dans la chambre voisine, Mahmoud Yaqoub, trente-huit ans, berger,
est allongé, une jambe dans le plâtre après avoir marché sur une
bombe à sous-munitions. Mahmoud dit avoir perdu quatre de ses 21 chèvres
au cours des attaques israéliennes parce que les bêtes ne
pouvaient accéder à l'eau. Il ne pouvait que rarement les faire
sortir durant les combats ; maintenant que le
cessez-le-feu est en vigueur, des bombes à sous-munitions se
trouvent sur toutes les collines qui leur servent normalement de pâturage.
Dans un autre hôpital, les délégués d'Amnesty International se
sont rendus au chevet de Hassan Hussein Hamadi, treize ans, dans le
coma après avoir subi une intervention chirurgicale. Selon sa
famille, Hassan Hussein et ses cinq frères et sœurs jouaient dans
la cour de leur maison dans le village de Deir al Qanun, au sud de
Tyr. Hassan Hussein aurait ramassé une petite bombe à
sous-munitions qui aurait explosé. L'explosion lui a arraché
quatre doigts de la main droite, sauf le petit doigt et il souffre
de lésions importantes à l'épaule et à l'abdomen.
Hussein Qaduh, dix-neuf ans, étudiant en comptabilité à
l'Institut technique islamique de Beyrouth a été gravement blessé
par l'explosion d'une bombe à sous-munitions le 28 août, dans le
village de Soultaniye, au sud du Liban, alors qu'il suivait une allée
près du terrain de football, dans le village.
Lorsque les délégués d'Amnesty International se sont rendus sur
place le lendemain, ils ont constaté que l'endroit était parsemé
de bombes à sous-munitions non explosées, certaines à quelques
centimètres de l'allée sur laquelle on voyait encore des traces de
sang. Hussein, victime d'une hémorragie au niveau des intestins et
du foie, a subi une importante intervention chirurgicale. L'hémorragie
a pu être stoppée mais des saignements persistent au niveau du
cerveau. Son pronostic vital est extrêmement réservé.
Amnesty International a répété que l'utilisation par Israël de
bombes à sous-munitions soulignait la nécessité, pour les Nations
unies, de mener sans délai une enquête approfondie sur toutes les
violations du droit international humanitaire, commises à la fois
par Israël et par le Hezbollah au cours de ce conflit.
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