8 février 2007
Communiqué de presse
La mort de dix-huit civils, tués ce mercredi 8
novembre par des tirs d¹artillerie israéliens dans la localité
palestinienne de Beit Hanoun, est un acte extrêmement grave, a déclaré
Amnesty International. L¹organisation a demandé l¹ouverture sans
délai d¹une enquête indépendante et insisté pour que les
responsables présumés de cette violence soient amenés à rendre
des comptes. L¹organisation a ajouté que les enquêtes israéliennes
précédentes, telle que celle menée après la mort de plusieurs
membres d¹une famille palestinienne sur une plage de la bande de
Gaza en juin 2006, avaient gravement manqué de rigueur et n¹avaient
pas été menées conformément aux normes internationales pour ce
genre d¹enquêtes qui doivent être indépendantes, impartiales et
approfondies.
La plupart des personnes
tuées étaient chez elles et dormaient lorsqu¹elles ont été
touchées par des obus de l¹artillerie israélienne. Huit enfants
font partie des victimes. Selon les informations recueillies par un
délégué d¹Amnesty International qui s¹est rendu sur place peu
après l¹attaque, quinze des victimes sont mortes lors d¹un
premier bombardement et trois autres ont été tuées par un second
tir d¹obus, alors qu¹elles se précipitaient pour venir en aide
aux morts et aux blessés.
« Cet acte terrible
intervient alors que le nombre de Palestiniens tués depuis que les
forces militaires israéliennes ont lancé leur dernière opération
militaire sur la bande de Gaza le 2 novembre est à nouveau en
augmentation, a déclaré Malcolm Smart, directeur du programme
Moyen Orient et Afrique du Nord à Amnesty International. Les
actions israéliennes au cours de toute cette opération ont été
caractérisées par ce qu¹on ne peut qu¹appeler une absence
absolue de respect pour la vie des civils palestiniens, dont plus d¹une
vingtaine avaient déjà été tués avant la tragédie de ce matin.
»
Avant les morts de ce
mercredi 8 novembre, plus de 53 Palestiniens avaient été tués en
tout au cours du siège de Beit Hanoun dans le nord de la bande de
Gaza par l¹armée israélienne ; un plus grand nombre encore
avaient été blessés. Deux ambulanciers faisaient partie des
civils tués. Nommée Nuages d¹automne par l¹armée israélienne,
l¹opération avait débuté le 2 novembre et s¹est poursuivie
jusqu¹au 7 novembre lorsque les forces israéliennes se sont redéployées
en dehors de la ville. Les autorités israéliennes ont déclaré
avoir monté cette opération dans le but d¹empêcher des groupes
palestiniens armés de lancer des roquettes Qassem artisanales sur
les villes et villages israéliens proches de la bande de Gaza. La
plupart des morts ont été tués à Beit Hanoun, en état de siège
pendant six jours, mais d¹autres ont été tués par les frappes
militaires israéliennes dans la zone environnante.
Amnesty International
condamne toutes les attaques de civils non armés et appelle les
autorités israéliennes à mener des enquêtes indépendantes
chaque fois que des civils palestiniens ont été tués ou blessés
par les forces israéliennes et à traduire en justice les auteurs
présumes d¹atteintes aux droits humains.
Alors que les forces israéliennes
entamaient le siège de Beit Hanoun, un haut responsable de l¹armée,
le lieutenant colonel Yarom a déclaré que les soldats avaient pour
instruction d¹éviter les pertes civiles. Quatre jours après le début
de l¹opération, au vu du nombre croissant de morts et de blessés
parmi les civils palestiniens, Ehud Olmert, Premier ministre israélien,
a déclaré : « Les Palestiniens qui ont été blessés étaient
pour la plupart armés mais, à notre grand regret, ils utilisent
des gens innocents comme boucliers humains, ce qui se traduit par
des victimes parmi la population civile également. » Les
informations recueillies par les délégués d¹Amnesty
International actuellement présents dans la bande de Gaza
contredisent ces propos toutefois et indiquent qu¹au moins la moitié
des personnes tuées, parmi lesquelles figurent au moins deux femmes
et sept enfants, étaient des passants non armés et non impliqués
dans les confrontations. Le même schéma apparaît pour les
victimes blessées lors des raids aériens et des pilonnages d¹artillerie
israéliens.
Parmi les personnes tuées
ou blessées lors des attaques israéliennes figurent :
Ramzi al Ashrafi, seize
ans, tué le matin du 6 novembre ; sept autres enfants ont été
blessés en même temps que lui lorsqu¹un obus israélien a explosé
à proximité du bus qui les emmenait à l¹école, sur une route très
fréquentée entre Beit Lahia et Jabalya, au nord de la ville de
Gaza. Najwa Khleif, une enseignante d¹une vingtaine d¹années qui
se trouvait également dans le bus a subi de graves blessures à la
tête. Les médecins qui
l¹ont prise en charge en soins intensifs à l¹hôpital principal
de Gaza ont déclaré à Amnesty International que son état était
jugé critique. Le bus a été touché, semble-t-il, à la suite d¹un
tir manqué des forces israéliennes
contre un véhicule censé appartenir à un groupe palestinien armé.
Toutefois, l¹attaque a été déclenchée à un carrefour où la
circulation est très dense le matin à l¹heure de pointe, à un
moment où l¹on peut s¹attendre à ce que les rues soient remplies
d¹adultes et d¹enfants se rendant à leur travail et à l¹école.
Le tir qui a causé la mort de Ramzi al Ashraf et blessé un certain
nombre d¹enfants à l¹intérieur du bus s¹est produit près d¹un
jardin d¹enfants, heureusement sans faire d¹autres victimes.
Ala Mansour al Khdeir,
une fillette de onze ans, touchée en même temps qu¹un autre
enfant par des tirs israéliens en rentrant de leur école à Beit
Lahia le 4 novembre. Atteinte d¹une balle à la tête, son état
reste
préoccupant. Sa mère a déclaré à Amnesty International que la
fillette se trouvait près de chez elle à Sayafa, dans le
nord-ouest de la bande de Gaza, une zone visée par de nombreux tirs
israéliens récemment, lorsqu¹elle avait été blessée. L¹autre
enfant, un garçon, a aussi été gravement touché.
Ibtisam Masoud,
quarante-quatre ans, a été tuée et dix autres femmes, parmi
lesquelles Tahrir Shahin, trente-sept ans, mère de sept enfants,
ont été blessées lorsque des soldats israéliens ont fait feu sur
une manifestation de femmes le matin du 3 novembre, à l¹entrée de
Beit Hanoun. Tahrir Shahin, qui a été amputée de la jambe, a déclaré
à Amnesty International depuis son lit d¹hôpital, qu¹elle et les
autres femmes n¹étaient pas armées et se trouvaient à moins de
cent mètres des chars israéliens quand ils avaient ouvert le feu
sur elles : « Notre manifestation était pacifique, nous n¹étions
que des femmes, il n¹y avait aucun homme, aucun activiste, aucune
arme. Nous n¹étions que des femmes face aux chars. Nous ne
pensions pas que des soldats israéliens tireraient sur nous, mais
ils ont fait feu sans discrimination. »
Heba Rajab, vingt ans, bénévole
au Centre palestinien pour la démocratie et la résolution des
conflits et Souiad Abou Najem, quarante-trois ans, mère de huit
enfants, ont toutes deux été gravement blessées aux jambes et aux
mains. Elles ont déclaré avoir vu des soldats israéliens viser
les manifestantes du haut de leurs chars. La manifestation des
femmes répondait à un appel lancé par un député membre du parti
du Hamas qui avait demandé qu¹on lui apporte de l¹aide pour faire
cesser le siège établi par les forces israéliennes autour d¹une
mosquée dans laquelle des membres de groupes palestiniens armés
avaient soi-disant trouvé refuge.
Toutefois, les femmes ont été prises pour cible avant qu¹elles
aient pu s¹approcher de la mosquée.
Ahmad al Madhoun,
quarante-deux ans et Mustapha Habib, vingt-six ans, tous deux
ambulanciers bénévoles pour la Société du Croissant rouge
palestinien (SCRP), ainsi qu¹un troisième homme qui les aidait,
ont été tués lors d¹un raid aérien israélien le 3 novembre au
soir, alors qu¹ils étaient en train de procéder à l¹évacuation
du corps d¹un homme tué lors d¹un raid aérien précédent. Itad
Yousef Abou al Ful, le chauffeur de l¹ambulance qui était avec
eux, a expliqué à Amnesty International : « Ahmad et Mustapha étaient
à une vingtaine de mètres de l¹ambulance ; ils étaient sur le
point de charger sur une civière le corps d¹un homme décédé ;
je suis descendu de l¹ambulance et j¹étais en train de m¹avancer
vers eux lorsqu¹un missile a
frappé juste à l¹endroit où ils se trouvaient. Je suis retourné
à l¹ambulance et j¹ai demandé du secours. Je n¹arrive pas à
effacer de ma mémoire l¹image de mes deux collègues tués en
faisant leur devoir. »
L¹équipe médicale de secours se trouvait dans un terrain en plein
air près de Beit Lahia. Il faisait sombre mais l¹ambulance aurait
dû être clairement visible avec sa lumière clignotante sur le
toit. L¹autre victime avait appelé les ambulanciers pour évacuer
le corps de son ami, tué peu avant dans des circonstances non élucidées.
Les ambulances
palestiniennes sont fréquemment attaquées et des dizaines d¹entre
elles ont été touchées par des tirs israéliens au cours de ces
dernières années. Au cours du siège de Beit Hanoun, les
sauveteurs ont
été confrontés dans leur quotidien à des obstacles et des délais
de plus en plus nombreux en raison du couvre-feu pratiquement
continu imposé par les forces israéliennes. Les chars israéliens
contrôlaient l¹accès à l¹hôpital de Beit Hanoun et retardaient
l¹entrée et la sortie des ambulances au niveau de l¹hôpital et
de la ville.
Zahir Mustapha Shabat,
trente-deux ans, a été atteint d¹une balle et sérieusement touché
et son cousin, Mazen Shabat, a été tué par des soldats israéliens
dans la soirée du 4 novembre ; tous deux rentraient chez eux après
trois jours passés en détention aux mains de l¹armée israélienne.
Depuis son lit d¹hôpital, il a déclaré à Amnesty International,
peu après être sorti de l¹unité de soins intensifs : « Après
trois jours de détention, les soldats israéliens nous ont libérés
; ils nous ont remis un papier en nous disant de le montrer si nous
étions arrêtés par d¹autres soldats en rentrant chez nous, à un
kilomètre et demi ou peut-être deux kilomètres de l¹endroit où
nous avions été détenus. Ils nous ont dit qu¹ils s¹étaient mis
d¹accord avec les chars dans le secteur et que nous pouvions
rentrer chez nous en toute sécurité ; mais à 150 mètres environ
de la maison, des soldats sont sortis en courant de la maison d¹un
de mes cousins et ont tiré sur moi et sur mon cousin Mazen Shabat.
Mazen a été tué et j¹ai été sérieusement blessé à l¹abdomen
et au dos. »
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