Bachar Ja'fari à la conférence
d'Astana :
l'Occident a fait du terrorisme une arme
politique
Bachar
al-Jaafari - Photo : SANA
Mardi 24 janvier 2017
La conférence
d’Astana pour la paix en Syrie,
organisée sous l’égide de la Russie, de
l’Iran et de la Turquie, a commencé
lundi 23 février à Astana, capitale du
Kazakhstan promue capitale
internationale de la diplomatie, avec
une présence occidentale purement
ornementale en la personne de
l’ambassadeur américain, invité à
l’initiative de la Russie en guise de
main tendue à la nouvelle administration
US. Celle-ci a maintes fois affirmé
faire de la lutte contre Daech, création
d’Obama et Clinton selon l’aveu de
Trump, une priorité absolue, et renoncer
à la politique de déstabilisation et
d’ingérence désastreuse de son
prédécesseur. L’intervention de Bachar
Ja’fari, représentant de la Syrie à
l’ONU et à Astana, nouvelle capitale
diplomatique mondiale, est intégralement
transcrite ci-dessous.
Contrairement à
la déclaration de la délégation
syrienne, sobre, conciliante et mesurée
au point de ne désigner nommément aucune
entité ennemie sinon Daech et al-Nosra,
et considérant « L’Armée de l’Islam »
comme un interlocuteur légitime (bien
qu’elle soit également terroriste, elle
ne fut nullement caractérisée comme
telle, une issue lui étant proposée
conformément à la politique de
réconciliation nationale du gouvernement
syrien),
la délégation de « l’opposition syrienne
armée » n’a omis aucune hostilité :
propos sectaires, clivants et
belliqueux, accusations grandiloquentes
et épithètes flétrissantes à destination
exclusive du régime syrien et de ses
alliés, amalgamés au terrorisme,
prétention à représenter le peuple
syrien dans son ensemble et refus de
reconnaître la légitimité de la
délégation officielle syrienne, négation
de toute ingérence étrangère hormis la
Russie l’Iran et le Hezbollah, exigence
de l’extension du cessez-le-feu à toute
la Syrie et à toutes les factions
combattantes (y compris Daech et àl-Nosra)
et du départ de Bachar al-Assad comme
des préliminaires indispensables,
accusation de violations du
cessez-le-feu par les forces syriennes
et alliées – jusqu’à Wadi Barada, d'où
les terroristes ont empoisonné les
sources d’eau potable de 4 millions de
résidents de Damas et de ses environs
(ce qui de fait cautionne cet acte) et
d'où le gouvernement veut les déloger,
dénonciation d’un expansionnisme iranien
dans tout le Moyen-Orient, etc. On
comprend plus aisément la réaction de
Bachar Ja’fari, dénonçant un amateurisme
voire une tentative de sabotage de la
conférence orchestrée de l’extérieur.
La conférence se
clôturera mardi 24 janvier. Son succès –
elle vise à consolider le cessez-le feu
pour toutes les factions combattantes,
hormis Daech et al-Nosra, exclues de
facto – dépendra des négociations en
coulisses entre les sponsors régionaux
et internationaux du djihadisme et les
alliés de la Syrie. Mais quoi qu’il
arrive, sur le terrain, l’avancée du
régime face aux groupes terroristes se
poursuivra, de même que le processus de
reconstruction qui est déjà en cours.
Bachar Ja’fari :
Cher ami le Ministre des Affaires
Etrangères de la République amie du
Kazakhstan, Kheirat Abd-al-Rahmanov, je
te remercie vivement de ta déclaration
d'ouverture que nous avons écoutée très
attentivement.
Et permets-moi
d'adresser également des salutations
particulières au Président de la
République amie du Kazakhstan,
Noursoultan Nazarbaïev, pour nous avoir
accueillis dans votre belle capitale
d'Astana.
Honorables
assistants,
Je commence cette
déclaration d'ouverture en adressant mes
plus vifs remerciements au Président, au
gouvernement et au peuple de la
République amie du Kazakhstan pour votre
accueil dans votre beau pays qui est lié
à la nation syrienne par les empreintes
de l'histoire et leurs accomplissements
que le temps n'efface pas, et dont
l'espace témoigne. Voici le tombeau du
Grand Baybars et le mausolée d'al-Farabi,
et bien d'autres encore qui reposent en
terre syrienne, (grâce auxquels) les
distances géographiques ont été réduites
et des ponts d'amitié ont été bâtis
entre deux peuples et deux pays.
Messieurs,
Votre belle
capitale d'Astana accueille cette
réunion syro-syrienne, conformément à la
diplomatie kazakhe de médiation et
d'ouverture, et fruit des efforts
communs de plusieurs partis, surtout les
amis, la Fédération de Russie et la
République Islamique d'Iran, dans le but
d'implémenter la décision de faire
cesser les hostilités dans toutes les
contrées de notre pays bien-aimé, la
Syrie - à l'exception des régions dans
lesquelles se trouve les groupes de
Daech et du Front al-Nosra et les autres
organisations armées qui ont refusé de
se joindre à l'accord de cessez-le-feu
et de participer à cette rencontre.
(Cette rencontre)
aspire également à pouvoir semer la
confiance dans la possibilité d'une
action commune en tant que Syriens pour
faire face à la guerre terroriste
imposée à notre pays, la Syrie.
Messieurs,
Cette rencontre est
le fruit des efforts de Son Eminence le
Président Poutine, et après des années
d'une guerre imposée à la Syrie, et
qu'on veut caractériser de manière
simplificatrice comme la crise syrienne.
Cette rencontre est
et doit être syro-syrienne par
excellence pour discuter de la façon
d'en sortir avec une décision nationale
commune qui met fin à cette situation
anormale et dangereuse qui prévaut.
Toutefois, une
évaluation objective des dimensions de
cette guerre par les chercheurs, les
analystes, et les politiques met
clairement en évidence que c'est un déni
de la vérité et de la réalité que
commettent certains en insistant pour
considérer la guerre terroriste
internationale menée contre la Syrie
comme une crise intra-syrienne, ou en
prétendant qu'il s'agit d'une guerre
civile.
Les hordes
terroristes takfiries ont été acheminées
depuis les quatre coins du monde,
organisées, entraînées, armées et
financées, transportées à travers nos
frontières avec les pays voisins, et
poussées à verser le sang syrien et à
justifier leur terrorisme obscurantiste
en se prétendant « opposition syrienne
modérée » génétiquement modifiée, selon
un agenda préparé à l'avance.
Tout cela décrit
fidèlement (la vérité de) la scène et
confirme que bien des choses qui se sont
passées dans nos pays ont été fomentées
et téléguidées par des puissances
étrangères, pour des agendas visant à
l'ingérence dans nos affaires internes
et des projets diaboliques qui n'ont
aucune relation, ni de près ni de loin,
avec les aspirations et les espoirs du
peuple syrien.
Et la preuve de la
véracité de ce que nous disons,
Messieurs, se trouve dans ce qu'a
déclaré dernièrement le Secrétaire
d'Etat américain sortant John Kerry, à
savoir que l'expansion de Daech en Syrie
avant l'intervention de la Russie et son
assistance (directe) à Damas pour
combattre l'organisation allait
contraindre le gouvernement syrien à
négocier avec Washington. Et cela
confirme de manière explicite le fait
que l'administration américaine sortante
et ses alliés régionaux et mondiaux ont
instrumentalisé le terrorisme comme une
arme politique pour détruire des pays
indépendants et pour leur imposer son
hégémonie et réaliser ses objectifs.
Messieurs,
Le gouvernement de
la République Arabe Syrienne n'a épargné
aucun effort depuis le début de la
guerre terroriste internationale contre
notre pays, la Syrie, pour trouver une
issue politique (au conflit), et elle a
prouvé cette disposition à maintes
reprises, poussée dans cette voie par
son souci de mettre fin à l'épanchement
du sang syrien, de restaurer la sécurité
et la stabilité et d'accomplir la
volonté du peuple syrien.
Le gouvernement syrien a œuvré
efficacement, avec ses partenaires russe
et iranien, à libérer la ville d'Alep du
terrorisme, parvenant à un accord sur la
cessation des hostilités.
Ce qu'espère la
République Arabe Syrienne de cette
rencontre, est la confirmation prolongée
du cessez-le-feu pour une durée
déterminée, durant laquelle les
organisations signataires disposées à se
diriger vers la réconciliation nationale
et à participer au processus politique
seront séparées des organisations
terroristes Daech et al-Nosra et des
autres groupes qui leur sont liés, dans
l'espoir de combiner tous nos efforts
dans la lutte contre le terrorisme,
conformément aux demandes de notre
peuple.
Ce qu'il faut
absolument réaliser est la fermeture de
la frontière syro-turque pour faire
tarir les sources du terrorisme. Nous
aurons ainsi ouvert la voie à une
solution politique pour la guerre avec
la participation du spectre syrien le
plus large possible.
Nous sommes donc
tous appelés, Messieurs, à œuvrer
ensemble pour fortifier la nation contre
l'épidémie de trahison au profit de
forces extérieures qui n'apporte à tous
les Syriens que le malheur et
l'hostilité, et contre l'action en
faveur d'agendas subversifs,
destructeurs et terroristes.
Les Syriens sont
capables, par eux-mêmes, de surmonter
leurs différends et bâtir les ponts du
dialogue constructif qui permettra à la
nation de se redresser dans la majesté
et l'honneur. Car la paix, Messieurs,
avant de naître dans les conférences
(internationales), doit d'abord naître
dans nos consciences et nos cœurs. Et
plus ceux d'entre nous qui y croiront
grandiront en nombre, plus nous nous
rapprocherons de la voie de la
réconciliation et de la franchise
nationales.
Messieurs,
Les forces et
courants politiques patriotiques syriens
sont unanimes, tant du côté du
gouvernement que de l'opposition, de
même que les résolutions du Conseil de
sécurité relatives à l'évolution de la
situation en Syrie, de même que les
réunions du dialogue intra-syrien et les
réunions consultatives, tous sont
unanimes pour respecter la souveraineté
de la République Arabe Syrienne, son
indépendance, l'intégrité de ses
territoires et l'unité de son territoire
et de son peuple, et le refus de
considérer toute concession sur ces
points, et le refus de toute forme
d'ingérence extérieure dans les affaires
internes syriennes, de manière directe
ou indirecte.
De sorte que ce
soient les Syriens seulement qui
déterminent l'avenir de leur pays par
les voies démocratiques, à travers les
urnes et la possession du droit exclusif
de choisir la forme de leur système
politique.
La Syrie que nous
aimons est celle de la diversité sous
toutes ses formes et manifestations, la
patrie en laquelle croient les Syriens,
avec les fondements et les bases de leur
Etat indépendant, démocratique et
séculier, qui repose sur le pluralisme
politique, la primauté du droit et
l'indépendance de la justice, l'égalité
en droits et en devoirs des citoyens, la
protection de l'unité nationale et des
libertés publiques, la garantie de la
diversité culturelle et sociale de
toutes les composantes de la société
syrienne, et le maintien de l'action des
institutions de l'Etat et de toutes ses
installations, d'oeuvrer à
l'amélioration de leurs performances et
à la protection de l'infrastructure et
des biens publics et privés.
En conclusion,
Messieurs, notre peuple sanctifie la vie
et honore la paix et la sécurité, et il
rejette le terrorisme, quelle que soit
son origine et quelles que soient ses
motivations. Aujourd'hui, parmi nous,
seul l'ignorant s'entête à comprendre la
situation qui nous brûle tous par une
lecture sectaire ou partisane qui
justifie le terrorisme et lui confère
une valeur idéologique, et qui constitue
une offense à notre rôle et à notre
histoire pour la civilisation et
l'humanité. Soyons donc tous à la
hauteur de la responsabilité qui pèse
sur nos épaules pour préserver le sang
des Syriens et réaliser les aspirations
du peuple syrien qui a le droit unique
et exclusif de déterminer lui-même son
avenir et de définir la forme de son
système politique, loin de toute
ingérence étrangère.
Je vous remercie,
Messieurs.
Réaction de
Bachar Ja’fari à la déclaration de
Mohammad Allouche, représentant
« L’Armée de l’Islam »
Merci, Monsieur le
Président. Merci de me donner l'occasion
de parler à nouveau. Je vous rassure
tous, je n'ai pas l'intention de faire
une seconde déclaration. Je souhaite
seulement faire quelques remarques, à la
lumière des déclarations que nous avons
entendues.
Monsieur le
Président, nous avons veillé, dans notre
déclaration d'ouverture, à être positifs
(constructifs) et ouverts d'esprit et de
cœur, à nous conformer à l'atmosphère
d'optimisme, et à respecter les
importants efforts consentis par la
Fédération de Russie et la République
Islamique d'Iran, ainsi que le
gouvernement ami du Kazakhstan pour
garantir le succès de cette conférence.
Et c'est pourquoi
nous avons comprimé nos blessures
saignantes et nous n'avons cité (aucun
ennemi) nommément, comme vous l'avez
remarqué.
Et je veux déclarer
que la délégation de la République Arabe
Syrienne est tenue à une lecture
politique précise de la direction et des
objectifs de cette conférence, et que
nous n'avons participé à aucun jeu
provocateur visant à l'échec de la
conférence d'Astana.
Malgré cela, il
apparaît que la délégation des groupes
terroristes armés, qui a lu une
déclaration que lui ont préparée ses
employeurs, n'a pas été à la hauteur de
ces efforts (consentis). Elle a présenté
une analyse fallacieuse de la situation,
et a ignoré toute sagesse et tout esprit
pacificateur.
Monsieur le
Président,
Nous avons compris
des garants russe et iranien, du
représentant des Nations Unies et de
l'Etat qui nous accueille que la
déclaration de la délégation des groupes
armés, qui a accepté l'accord de
cessation des hostilités, respecterait
les limites des négociations
diplomatiques, mais nous avons été
stupéfaits d'entendre une déclaration
provocatrice, non réaliste, sans aucun
lien avec cette conférence.
Une déclaration qui
ne respecte pas l'intelligence des
personnes présentes, emplie de
mensonges, et d'offenses contre les
symboles de la souveraineté nationale.
Une déclaration qui ne respecte ni les
fondements ni les orientations qui
organisent le cadre et l'atmosphère de
cette conférence d'Astana.
C'est une
déclaration irresponsable, qui n'est pas
animée de bonnes intentions.
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