Discours
Hassan Nasrallah : Trump ne se soucie
que des intérêts américains et
israéliens
Samedi 19 mai 2018
Discours du
Secrétaire Général du Hezbollah, Sayed
Hassan Nasrallah, le 14 mai 2018, à
l’occasion de la commémoration du
deuxième anniversaire de la mort du
Commandant du Hezbollah Sayed Moustafa
Badreddine.
Traduction :
http://sayed7asan.blogspot.fr Transcription
:
[...] Après cette introduction consacrée
à notre très cher commandant [martyr
Sayed Moustafa Badreddine, tué au combat
en Syrie le 13 mai 2016], je vais parler
des dossiers dont, incidemment, il était
responsable.
Le premier point – je vais essayer
d’être aussi bref que possible [pour les
points que je veux aborder, à savoir 1/
le retrait américain de l’accord sur le
nucléaire iranien, 2/ l’affrontement
récent entre la Syrie et Israël et 3/
les événements récents en Palestine
occupée].
Le premier point est ce que fait
actuellement l’administration américaine
dans notre région, le plus important
étant l’annonce par Trump du retrait
(américain) de l’accord sur le nucléaire
(iranien) – je commence par ce point
parce que tout mon propos nous amènera à
(la question de) la Palestine, qui
constituera la partie essentielle de
cette deuxième partie de mon discours.
Je ne veux pas analyser ou évoquer
l’accord sur le nucléaire lui-même, ses
causes, les causes du retrait de Trump
ou ses implications et conséquences. Je
vais aller directement aux enseignements
et aux leçons à en tirer, car c’est ça
qui nous sera bénéfique, en tant que
peuple libanais, pour le peuple
palestinien en premier lieu, pour les
peuples de la région, pour les
gouvernements de la région et également
pour le monde entier. Il faut en tirer
les enseignements pour savoir, dans
notre parcours politique et notre vie en
général, comment cette administration
américaine, qui se considère comme la
première puissance mondiale, se
comporte, pour savoir ce qu’elle est
(véritablement). Et en vérité, cela
touche à la culture politique, à la
conscience politique (générale), plus
que cela ne concerne ce développement
politique (particulier).
Eh bien, aujourd’hui, l’administration
américaine démontre à nouveau, avec les
preuves que nous allons évoquer, que
c’est un Etat, un gouvernement – car il
ne s’agit pas seulement de la décision
de Trump, du Président Trump, c’est une
décision du gouvernement américain, de
l’institution dirigeante américaine.
Aujourd’hui, les Etats-Unis démontrent
une nouvelle fois que tout ce qui les
intéresse dans le monde, ce sont
premièrement leurs intérêts, et
deuxièmement les intérêts d’Israël.
Point, à la ligne. C’est-à-dire que pour
les gouvernements américains successifs,
les considérations humanitaires ou les
valeurs morales n’ont aucune place. Les
considérations humanitaires ou les
valeurs morales n’ont (jamais eu) aucune
place.
Aujourd’hui, les Palestiniens
manifestent pacifiquement à Gaza et en
Cisjordanie. A Gaza, il y a des dizaines
de martyrs jusqu’à présent, et plus de
1000 blessés jusqu’à présent. Durant les
dernières semaines, il y a eu des
dizaines de martyrs et des milliers de
blessés. Et pour l’administration
américaine, cela ne change absolument
rien, ça n’a aucune espèce d’importance
et aucune influence sur leurs actions.
Et si quelqu’un s’avise d’appeler à une
condamnation au Conseil de Sécurité, le
veto américain est prêt. Tout ce qu’on
peut considérer comme des considérations
humanitaires, des valeurs morales ou des
droits de l’homme est un propos vide, et
n’a aucune place dans les coulisses de
la prise de décision américaine.
Deuxièmement, les résolutions
internationales, le droit international,
les organisations internationales et la
communauté internationale – au Liban, on
nous demande toujours de « respecter les
résolutions internationales », «
d’appliquer les résolutions
internationales » [poussant au
désarmement du Hezbollah]. Demain, vous
verrez, il suffira de lire la
déclaration ministérielle pour lire les
mêmes exhortations : « appliquer les
résolutions internationales », «
respecter les résolutions
internationales ». Et quant aux
Etats-Unis, la première puissance
mondiale, ils ne respectent pas les
résolutions internationales, ni le droit
international, ni les institutions
internationales, ni même les résolutions
internationales à l’élaboration
desquelles ils ont participé, celles
qu’ils ont façonnées et qu’ils ont
agréées. Lorsque ensuite, elles ne
correspondent plus à leurs intérêts, ils
les délaissent et s’en affranchissent
(sans aucune gêne).
Troisièmement, tous les accords,
conventions et chartes n’ont aucune
valeur, ni morale, ni légale pour les
gouvernements américains successifs. Ils
concluent et annulent les accords à leur
guise. Ils (ne respectent) aucun accord,
aucun engagement, aucune charte. Et je
ne parle même pas des accords sur le
climat et des accords commerciaux. Je ne
parle que de ce qui vient de se passer
dans notre région. Cela signifie que
personne dans le monde ne peut avoir
confiance dans les engagements, accords
et promesses des Etats-Unis.
Aujourd’hui, ils mènent le Président de
la Corée du Nord en bateau en lui disant
que s’il détruit son arme nucléaire, ils
permettront aux compagnies américaines
de venir investir en Corée du Nord. Si
les Nord-Coréens leur font confiance et
détruisent (leur arsenal), comme l’a
fait la Libye par exemple, les
Etats-Unis leur diront ensuite que pour
que les compagnies américaines puissent
venir, il faudra organiser tel type
d’élections, respecter tels critères au
niveau des droits de l’homme, etc., etc.
Et le processus de chantage continuera
(indéfiniment).
O Libanais, ô Palestiniens, ô peuples de
la région, on ne peut pas faire
confiance aux Etats-Unis… Après toutes
ces expériences, ce serait un acte
d’imbécillité que (de leur faire
confiance). La tradition (prophétique)
dit que le croyant ne tombe pas deux
fois dans le même piège. O mon frère, ce
n’est pas la deuxième fois mais la
centième fois et la millième fois que
ces Américains poignardent le monde dans
le dos. Cette administration et ces
dirigeants ne peuvent faire l’objet
d’aucune confiance pour leurs accords,
leurs engagements et leurs
promesses. Et cette (nouvelle)
expérience sous nos yeux le démontre
encore. Je ne parle pas d’histoire
(ancienne), ça se déroule (en direct)
sous nos yeux.
Et de même, l’expérience prouve que
l’administration américaine ne respecte
pas même ses alliés, pas même leurs
intérêts : elle ne s’en soucie
nullement. Pour l’accord sur le
nucléaire (iranien), les intérêts
économiques, politiques, et même
sécuritaires des Européens résident dans
le maintien de cet accord avec l’Iran.
Mais les Etats-Unis ne les ont même pas
consultés. De qui parle-t-on ? De leurs
alliés européens, et non de leurs
collabos dans le Tiers Monde. Leurs
alliés européens, de grands Etats, qui
ont le droit de veto au Conseil de
sécurité ! Mais les Etats-Unis ne les
ont consultés ni sur le fond, sur leurs
intérêts, ni sur la forme. Comment
prendraient-ils en compte les intérêts
de ceux qu’ils considèrent comme de
simples instruments, des subordonnés,
dont Trump dit que sans la présence
américaine, tel ou tel Etat ne
survivrait même pas 7 jours ?! L’intérêt
des pays arabes et des pays du Golfe, et
de certains pays du monde musulman,
est-il seulement présent dans les
calculs, dans l’esprit, dans le crâne
des Américains lorsqu’ils prennent leurs
décisions ? Il n’a aucune place.
Telle est donc la leçon fondamentale que
nous devons tirer aujourd’hui du retrait
de Trump de l’accord sur le nucléaire
iranien. Je ne veux pas évoquer ses
répercussions, ses conséquences, ses
causes, ce qui va advenir de ce dossier,
ce n’est pas le sujet de mon discours
aujourd’hui. Mais cet aspect est selon
nous très important pour quiconque dans
notre région et dans le monde, mais
surtout pour tous ceux dans notre région
qui lient leur destin, planifient leur
avenir, façonnent leur région ou
prennent leurs décisions (stratégiques)
en se fondant sur les Etats-Unis et en
comptant sur eux et sur leurs promesses
et leurs engagements, et ce sur
n’importe quel dossier, majeur ou
mineur.
Et par conséquent, puisque c’est
aujourd’hui le jour de la Palestine,
permettez-moi de tirer également une
conclusion sur ce point : lorsque Trump
a annoncé sa reconnaissance d’Al-Quds
(Jérusalem) comme capitale d’Israël,
l’Autorité [palestinienne], ou plutôt la
partie palestinienne chargée des
négociations, pour ne pas dire son nom
[Mahmoud Abbas], a déclaré qu’ils
n’accepterait pas de nouvelles
négociations ou de règlement du conflit
dans lesquels la partie intermédiaire
serait les Etats-Unis, car ce ne sont
pas un intermédiaire neutre. Que veux-tu
donc à la place ? Il a dit « Je veux le
P5 + 1 [5 membres du Conseil de Sécurité
+ Allemagne], comme pour l’accord sur le
nucléaire iranien. Tel est le processus
qui m’accorde des garanties et me permet
d’aboutir. » Nous lui déclarons
aujourd’hui, à l’occasion du retrait de
Trump de l’accord sur le nucléaire
iranien, qui a été conclu par le P5 + 1,
et sur lequel une décision unanime a été
prise au Conseil de Sécurité des Nations
Unies, que tout cela a été anéanti. Même
cette voie ne mène à rien et n’apporte
aucune garantie. (Malgré le) P5 + 1,
Trump n’a consulté ni l’Europe, ni la
Russie, ni la Chine, ni le Conseil de
Sécurité, ni la communauté
internationale, il s’est levé et il est
sorti (de cet accord). Si quelqu’un en
Palestine, qui qu’il soit, compte sur
une résolution à laquelle participent
les Etats-Unis, que ce soit en tant que
seul intermédiaire, en tant
qu’intermédiaire international ou comme
partie d’une formule P5 + 1, se berce
d’illusions, vit de manière déconnecté
de la réalité, dans des mirages qui ne
mèneront à aucun résultat. Cette
expérience vous prouve, ô Palestiniens,
que ce n’est pas la voie à suivre, en
aucun cas. Elle ne mène à rien. [...]
A suivre...
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