Alahed
De l’humour noir: l’Arabie saoudite
convoite la présidence du Conseil des
droits de l’Homme
Samer R. Zoughaib
Photo:
D.R.
Vendredi 22 mai 2015
Sans avoir
froid aux yeux, l’Arabie saoudite,
royaume moyenâgeux, où les droits de
l’Homme sont systématiquement bafoués,
brigue la présidence du Conseil des
droits de l'Homme des Nations unies, qui
sera vacant en décembre. C’est pire
qu’une mauvaise blague, c’est de
l’humour noir.
En décembre prochain, l'Allemand Joachim
Ruecker, qui préside le Conseil des
droits de l'Homme des Nations unies,
doit passer la main. Ce poste est
renouvelé chaque année depuis la
création de cet organe
intergouvernemental, en 2006 et selon la
règle de rotation, c'est un pays
asiatique qui doit l’occuper. Et sans la
moindre gêne, l'Arabie saoudite convoite
ce poste. Fayçal ben Hassan Trad, le
représentant du royaume à l'Onu, a déjà
commencé son lobbying auprès des 12
autres pays du groupe Asie-Pacifique
pour les convaincre de voter en faveur
de son pays.
Même si l’Arabie saoudite -l'un des huit
pays à ne pas avoir ratifié la
Déclaration universelle des droits de
l'Homme, de 1948- ne parvient pas à
occuper ce poste, le seul fait de
l’avoir envisagé est une insulte pour le
bon sens.
Déjà, dans les couloirs du Palais de
Verre à New York, ont parle de
«catastrophe» potentielle, qui ferait
tomber la commission «dans le
discrédit», comme l’affirme un diplomate
ayant requis l’anonymat.
La porte-parole d'Amnesty International
à Genève, Nadia Boehlem, qualifie
d’«impensable» une éventuelle élection
de l’Arabie saoudite. «Il est totalement
ironique de voir un pays qui bafoue
aussi allègrement les droits de l'Homme
convoiter la direction du Conseil»,
juge-t-elle.
Ce n’est pas seulement «impensable»,
mais carrément scandaleux. En effet, au
royaume des Saoud, la notion des droits
de l’Homme n’existe tout simplement pas.
La population est privée des droits
politiques les plus élémentaires dans ce
pays, qui ne possède pas de Constitution
et où aucune élection n’a jamais été
organisée. Les sujets du monarque sont
uniquement sommés de «prêter allégeance»
au nouveau roi, au prince héritier et au
vice-héritier, qu’ils n’ont pas choisi
mais qui leur ont été imposés par la
famille. Des portraits à l’effigie des
trois plus hauts personnages du royaume
sont installés dans les bâtiments
publics, et les sujets défilent, comme
des automates, pour saluer une main en
bois.
Le royaume des discriminations
L’Arabie saoudite est le royaume de la
discrimination dans toutes ses
dimensions. Discrimination religieuse
d’abord, puisqu’aucun culte, à part
celui de l’islam, n’est autorisé, et
aucune église n’existe dans le royaume.
Voilà une différence fondamentale avec
la République islamique d’Iran, où les
chrétiens et les juifs disposent de
leurs lieux de culte et peuvent
pratiquer leurs croyances en toute
liberté –ils ont même des députés au
Parlement-, au même titre que les
chiites, les sunnites et les membres des
autres
communautés.
L’Arabie saoudite est le royaume des
persécutions religieuses contre les
minorités musulmanes. Ainsi, le cheikh
Nemr Nemr, l’un des plus hauts
dignitaires religieux chiite du pays, a
vu sa peine de mort confirmée par le
tribunal pénal. Il est accusé
d’«agitations et d’incitation aux
troubles», pour la simple raison qu’il a
réclamé la libération des détenus
politiques.
Au royaume des Saoud, de soi-disant
ulémas peuvent prononcer de lourdes
peines pour des motifs qui ne sont pas
vérifiés. C’est le cas de Raïf Badawi,
ce blogueur condamné en novembre 2014 à
10 ans de prison, 1000 coups de fouet et
266000 dollars d'amende pour «insulte à
l’islam». «C'est la forme de punition la
plus terrible et médiévale, a commenté
Salil Shetty, responsable d’Amnesty
International. L'Arabie saoudite a aussi
effectué des décapitations publiques.
Nous critiquons (le groupe terroriste,
ndlr) «Etat islamique» mais là, c'est un
gouvernement qui a effectué plus de 60
décapitations en public au cours des
derniers mois», a-t-il ajouté. Et M.
Shetty de poursuivre: «On dirait que le
régime saoudien est insensible aux
droits de l'Homme et à la dignité
humaine, et malheureusement ils sont
aussi protégés par de nombreux pays
occidentaux, parce qu'ils ont du pétrole
et parce qu'ils sont vus comme des
alliés dans la lutte contre le
terrorisme. En fait, quand on viole les
droits de l'Homme comme le fait l'Arabie
saoudite, on nourrit le terrorisme, on
ne le combat pas».
Les femmes ne conduisent pas
L’Arabie saoudite est le royaume de la
discrimination des sexes. C’est le seul
pays au monde où les femmes ne sont pas
autorisées à conduire, sous de grossiers
prétextes religieux qui n’ont aucun
fondement.
L’Arabie saoudite est le pays du
wahhabisme, une doctrine extrémiste qui
a donné naissance à des mouvements
terroristes violents comme «Al-Qaïda» ou
«Daech». C’est
le pays où les prisonniers sont libérés,
à condition qu’ils aillent se battre en
Irak et en Syrie dans les rangs des
organisations terroristes contre les
fils des autres communautés, comme l’a
révélé une enquête du USA Today, en
septembre 2013.
L’Arabie saoudite est le pays qui
agresse ses voisins, sans raison
légitime sauf celle de les empêcher de
réaliser leurs aspirations à plus de
liberté et d’indépendance. C’est ce qui
s’est passé à Bahreïn, où l’armée
saoudienne a été envoyée pour écraser la
révolution pacifique du peuple bahreïni,
et au Yémen, où l’aviation des Saoud a
déjà tué, depuis le 26 mars, 1800
civils, dont de nombreux femmes et
enfants, selon l’Onu. Le pauvre Yémen,
soumis à un blocus médical et
alimentaire inhumain par un pays qui ose
convoiter la tête du Conseil des droits
de l’Homme des Nations unies.
Comme «Israël», l’Arabie saoudite se
croit au dessus des lois. C’est un pays
protégé par les Etats-Unis et qui
éprouve un tel mépris pour les lois
internationales qu’il n’hésite pas à
convoiter la présidence du Conseil des
droits de l’homme et, dans le même
temps, à recruter publiquement 8
bourreaux pour exécuter, par
décapitation, les condamnés à la peine
capitale.
Source: french.alahednews
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