Opinion
Menace terroriste sur Cuba en
provenance...
des Etats-Unis
Salim Lamrani
© Salim
Lamrani
Mardi 13 mai 2014
Opera Mundi
http://operamundi.uol.com.br/...
Washington refuse toujours d’agir pour
empêcher les groupuscules de l’extrême
droite cubaine de Floride de planifier
des attentats contre l’île.
Le 6 mai
2014, les autorités cubaines ont annoncé
l’arrestation de quatre personnes
résidant à Miami, soupçonnées de
préparer des attentats terroristes dans
l’île. José Ortega Amador, Obdulio
Rodríguez González, Raibel Pacheco
Santos et Félix Monzón Alvarez ont
effectué le voyage depuis la Floride et
« ont reconnu qu’ils avaient l’intention
d’attaquer des installations militaires
dans le but de promouvoir des actions
violentes[1] ».
Le
gouvernement de La Havane a accusé trois
autres résidents de Miami, aux lourds
antécédents criminels, d’être les
auteurs intellectuels du projet
terroriste : « [Les quatre détenus] ont
également déclaré que ces plans ont été
organisés sous la direction des
terroristes Santiago Alvarez Fernández
Magriña, Osvaldo Mitat et Manuel
Alzugaray, qui résident à Miami et qui
maintiennent des liens étroits avec le
terroriste notoire Luis Posada Carriles[2] ».
Depuis
1959, Cuba a été victime d’une intense
campagne de terrorisme orchestrée depuis
les Etats-Unis par la CIA et les exilés
cubains. Au total, près de 7 000
attentats ont été perpétrés contre l’île
depuis le triomphe de la Révolution. Ils
ont coûté la vie à 3 478 personnes et
ont infligé des séquelles permanentes à
2 099 autres[3].
Au début
des années 1990, suite à l’effondrement
de l’Union soviétique et l’ouverture de
Cuba au tourisme, il y a eu une
recrudescence des attentats terroristes
contre les infrastructures hôtelières de
La Havane, perpétrés par l’extrême
droite cubaine de Miami, afin de
dissuader les touristes de se rendre
dans l’île et saboter ainsi un secteur
vital pour la moribonde économie
cubaine. Les actes violents ont fait des
dizaines de victimes et ont coûté la vie
à un touriste italien, Fabio di Celmo[4].
Les auteurs
de ces actes terroristes se trouvent
toujours à Miami où ils jouissent d’une
totale impunité. Luis Posada Carriles en
est la parfaite illustration. Ancien
policier sous la dictature de Batista,
il est devenu agent de la CIA après 1959
et a participé à l’invasion de la Baie
des Cochons. Il est responsable de plus
d’une centaine d’assassinats, dont
l’attentat du 6 octobre 1976 contre
l’avion civil de Cubana de Aviación
qui a coûté la vie à 73 personnes dont
toute l’équipe d’escrime junior cubaine
qui venait de remporter les jeux
panaméricains[5].
La culpabilité de
Posada Carriles ne fait aucun doute : il
a ouvertement revendiqué sa trajectoire
terroriste dans son autobiographie
intitulée Los caminos del guerrero
et a publiquement reconnu être l’auteur
intellectuel des attentats de 1997
contre l’industrie touristique cubaine
lors d’une interview au New York
Times le 12 juillet 1998. Par
ailleurs, les archives du FBI et de la
CIA, respectivement déclassifiées en
2005 et 2006, démontrent son implication
dans le terrorisme contre Cuba[6].
Posada
Carriles n’a jamais été mis en examen
pour ses crimes. Au contraire,
Washington l’a toujours protégé en
refusant de le juger pour ses actes ou
de l’extrader à Cuba ou au Venezuela (où
il a également commis des crimes). Cette
réalité met à mal les déclarations de la
Maison-Blanche à propos de la lutte
contre le terrorisme.
En 1997,
Cuba a proposé aux Etats-Unis une
collaboration discrète dans la lutte
contre le terrorisme. L’écrivain
colombien Gabriel García Márquez, qui
entretenait des relations amicales à la
fois avec Fidel Castro et Bill Clinton,
avait servi de messager. Le gouvernement
de l’île a ainsi invité deux
fonctionnaires du FBI à La Havane pour
leur remettre un dossier concernant les
agissements criminels de certaines
organisations basées en Floride. En
effet, les services de renseignements
cubains avaient envoyé plusieurs de
leurs agents en Floride. Mais au lieu de
neutraliser les responsables des actes
terroristes, le gouvernement des
Etats-Unis a décidé de procéder à
l’arrestation de cinq agents cubains en
1998 et de les condamner à des peines de
prison extrêmement lourdes, allant de 15
ans de réclusion à deux peines de prison
à vie, au cours d’un procès dénoncé par
de nombreuses organisations
internationales. Trois d’entre eux,
Gerardo Hernández, Antonio Guerrero et
Ramón Labañino, se trouvent toujours
derrière les barreaux.
Dans le
même temps, pour justifier sa politique
hostile de sanctions économiques
anachroniques et cruelles qui affectent
toutes les catégories de la population
cubaine et empêcher toute normalisation
des relations bilatérales, Washington
n’hésite pas à classer Cuba dans la
liste des pays promoteurs du terrorisme
international, au prétexte que des
membres de l’organisation séparatiste
basque ETA et de la guérilla colombienne
des FARC se trouvent à Cuba… à la
demande expresse des gouvernements
espagnol et colombien. D’ailleurs,
Washington le reconnait explicitement
dans son rapport : « Le gouvernement de
Cuba a soutenu et accueilli des
négociations entre les FARC et le
gouvernement de Colombie avec l’objectif
d’arriver à un accord de paix entre les
deux parties ». Les Etats-Unis
reconnaissent qu’ « il n’y a pas
d’information selon laquelle le
gouvernement cubain ait fourni des armes
ou un entrainement paramilitaire à des
groupes terroristes » et admettent que
les « membres de l’ETA résidant à Cuba
s’y sont installés avec la coopération
du gouvernement espagnol[7] ».
Washington
justifie également l’inclusion de Cuba
dans la liste des pays terroristes en
raison de la présence dans l’île de
réfugiés politiques recherchés par la
justice étasunienne depuis les années
1970 et 1980. Or, aucune de ces
personnes n’a été jamais été accusée de
terrorisme[8].
Les 33 pays de la
Communauté des Etats latino-américains
et caribéens (CELAC) ont unanimement
rejeté l’inclusion de Cuba dans la liste
des pays terroristes, infligeant ainsi
un sérieux camouflet à Washington. Dans
une déclaration rendue publique le 7 mai
2014, la CELAC exprime « sa totale
opposition à l’établissement de listes
unilatérales qui accusent prétendument
les Etats de ‘soutenir et parrainer le
terrorisme’, et exhorte le gouvernement
des Etats-Unis d’Amérique à mettre fin à
cette pratique » qui suscite « la
réprobation » de « la communauté
internationale et de l’opinion publique
aux Etats-Unis[9] ».
Depuis plus
d’un demi-siècle, Cuba subit la violence
terroriste orchestrée depuis les
Etats-Unis, d’abord par la CIA et
désormais par l’extrême droite cubaine.
L’impunité accordée à aux groupuscules
violents et la condamnation à des peines
de prison extrêmement sévères des agents
cubains qui avaient réussi à déjouer pas
moins de 170 attentats contre l’île
illustre le double standard dont les
Etats-Unis font preuve dans la lutte
contre le terrorisme et jette un ombre
sur la crédibilité de Washington dans ce
combat.
Docteur ès Etudes
Ibériques et Latino-américaines de
l’Université Paris IV-Sorbonne, Salim
Lamrani est Maître de conférences à
l’Université de La Réunion, et
journaliste, spécialiste des relations
entre Cuba et les Etats-Unis.
Son nouvel ouvrage
s’intitule Cuba. Les médias face au
défi de l’impartialité (Paris,
Editions Estrella, 2013) et comporte une
préface d’Eduardo Galeano.
http://www.amazon.fr/Cuba-m%C3%A9dias-face-d%C3%A9fi-limpartialit%C3%A9/dp/2953128433/ref=sr_1_1?s=books&ie=UTF8&qid=1376731937&sr=1-1
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