Opinion
Pourquoi l’otage français Hervé Gourdel
a été décapité trois jours à peine après
son enlèvement
S. Baker
Les terroristes ont décidé de
faire un coup d’éclat
en décapitant ce citoyen français. D. R.
Mercredi 24 septembre 2014
La décapitation de l’otage français
Hervé Gourdel a été opérée au moment où
le président François Hollande appelait,
de la tribune des Nations unies, le
monde à combattre le terrorisme partout.
Les ravisseurs avaient donné un
ultimatum de 24 heures à la France pour
qu’elle déclare son arrêt définitif de
toute attaque aérienne contre les
groupes djihadistes en Irak. Ces
preneurs d’otage, toujours recherchés
par les forces de l’ANP dans les massifs
montagneux de Kabylie, savaient qu’ils
ne pouvaient pas obtenir ce qu’ils
demandaient en un laps de temps très
court. Autrement dit, sa décapitation
semble avoir été programmée dès le
moment où il a été kidnappé. La raison
est que ces ravisseurs savaient qu’ils
ne pouvaient pas négocier avec les
autorités françaises la libération de
cet otage en contrepartie d’un paiement
de rançon. Car la prise d’otage n’a pas
eu lieu au Mali, au Niger ou dans un
autre pays du Sahel où la France a pris
l’habitude de négocier librement la
libération de ses ressortissants en
versant des rançons aux terroristes. Les
exemples de ces libérations par le biais
de rançons sont nombreux. Quatre
journalistes français ont été libérés en
avril dernier après près d’une année de
captivité en Syrie. La France aurait
payé une rançon de 18 millions de
dollars pour leur libération. Aussi,
quatre autres otages français détenus
par Aqmi à Arlit, au Niger, ont été
libérés de la même manière en octobre
2013, après trois ans de captivité.
S’ils ont été maintenus en vie durant
toute cette période, c’est parce que
leurs ravisseurs savaient que la France
est un «bon payeur». Selon une enquête
publiée par le New York Times
en juin dernier, la France est le
principal payeur de rançons. Elle le
fait directement ou par des
intermédiaires comme Areva ou certains
pays du Golfe. Paris, est-il précisé, a
versé 58,1 millions de dollars depuis
2008 pour libérer ses ressortissants
retenus par Al Qaida au Maghreb
islamique. Mais dans le cas d’Hervé
Gourdel, payer une rançon est quasi
impossible, car les autorités
algériennes sont connues pour leur refus
catégorique de négocier avec les
terroristes et encore moins de verser
une quelconque rançon. Les auteurs de ce
rapt savaient également qu’en maintenant
cet otage en vie, ils finiraient dans la
tombe, comme les preneurs d’otages du
site gazier de Tiguentourine, à In
Amenas, en janvier 2013. Ces terroristes
avaient donc décidé de faire un coup
d’éclat en décapitant ce citoyen
français. Une exécution qui a eu un
large écho médiatique. D’un autre côté,
ce crime odieux et abject vient
d’apporter du l’eau au moulin du
président français François Hollande qui
a justifié à l’ONU les raids aériens
menés en Irak et en Syrie, sans mandat
onusien. Il mettait en avant les
capacités de cette nouvelle organisation
terroriste internationale à mener des
attentats partout dans le monde.
Autrement dit, la décapitation d’Hervé
Gourdel tombait au bon moment pour
justifier l’offensive de l’Occident
contre ce «monstre» d’Etat Islamique,
dirigé par Abou Bakr Al-Baghdadi, un
ancien détenu de la CIA, relâché en
2009.
S. Baker
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