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France-Irak
Actualité
Pourquoi les Arabes ne veulent pas
des Américains en Syrie ?
Robert F. Kennedy. Jr
Vendredi 4 mars 2016
Robert
F. Kennedy. Jr (revue de presse :
Politico - extraits - 23/2/16)*
Robert
F. Kennedy. Jr est le fils de Robert
Kennedy
assasiné le 5 juin 1968
au cours de la campagne présidentielle.
Neveu du président John Fitzgerald
Kennedy, il a évidemment eu accès aux
archives de la famille. Pour lui, la
« guerre contre la terreur » n’est
rien d’autre qu’une « guerre pour le
pétrole ». Extraits:
…(…)…
En partie, parce que mon père a été
assassiné par un Arabe, j’ai fait
l’effort de comprendre l’impact de la
politique US au Moyen-Orient et,
notamment, les éléments qui motivent les
réponses sanglantes du monde islamique
contre notre pays. Si nous portons notre
attention sur la montée de l’Etat
islamique et essayons de trouver
l’origine de la sauvagerie qui compte
beaucoup d’innocents à son actif à Paris
et San Bernadino, nous pouvons aussi
vouloir regarder au-delà des
explications courantes sur la religion
et l’idéologie et examiner les arguments
plus rationnels fournis par l’histoire
et le pétrole, et comment ces derniers
nous montrent du doigt, renvoyant le
blâme à nos pieds.
Le catalogue honteux
des interventions violentes US en Syrie
– peu connu du peuple américain au
contraire du peuple syrien – est
devenu un terrain fertile pour le
djihadisme islamique violent qui,
maintenant, complique toute réponse
effective de notre gouvernement pour
contrecarrer l’EI… (…)… Comme
le notait le New York Time,
dans sa première page du 8 décembre
2015, les dirigeants politiques de l’EI
et les stratèges militaires s’efforcent
de provoquer une intervention militaire
US, sachant d’expérience que cela
augmenterait le nombre de volontaires
dans leurs rangs, étoufferait les voix
modérées et unifierait le monde musulman
contre l’Amérique.
En comprendre la
dynamique nécessite que nous nous
attardions sur l’histoire, d’un point de
vue syrien, et particulièrement sur les
racines du conflit présent. Bien avant
l’occupation de l’Irak en 2003, qui a
engendré le soulèvement sunnite,
précurseur de l’Etat islamique, la CIA a
nourri le djihadisme violent, en en
faisant une arme de la guerre froide, ce
qui empoisonna les relations US/Syrie.
Cela n’est pas
advenu sans controverse. En juillet
1957, à la suite de l’échec d’un coup
d’Etat en Syrie par la CIA, mon oncle le
sénateur John F. Kennedy, a déclenché la
colère de la Maison-Blanche, des
dirigeants des deux partis politiques,
de nos alliés européens avec un discours
mémorable soutenant le droit à
l’autodétermination du monde arabe et la
fin de l’ingérence impérialiste de
l’Amérique dans ces pays...(…)…
La
déstabilisation de la Syrie par la CIA :
une vieille histoire
En 1957, mon
grand-père, l’Ambassadeur Joseph P.
Kennedy, siégea au sein d’un comité
secret chargé d’enquêter sur les mauvais
coups de la CIA au Moyen-Orient…(…)… la
CIA commença à intervenir en Syrie en
1949 …(…)… le président démocratiquement
élu, Chukri al-Quwatli hésitait à donner
son accord au projet US d’oléoduc
Trans-Arabian Pipeline destiné à
relier les champs pétrolifères d’Arabie
saoudite au Liban, via la Syrie. Dans
son livre « Legacy of Ashes » (1),
l’historien de la CIA, Tim Weiner
raconte que la CIA… remplaça al-Quwatli
par un dictateur de son choix, un ancien
escroc, Husni al-Zaïm ….
A la suite d’une
série de coups dans une Syrie
déstabilisée, Al-Quawtli du Parti
National fut réélu en 1955. Bien que
partisan de la neutralité, dans cette
guerre froide, mais piqué au vif par sa
précédente éviction, il se rapprocha du
camp soviétique. Ce qui ne manqua pas de
déclencher les foudres de Dulles pour
qui « la Syrie était mûre pour un
coup » que fomenteront deux experts
en coup d’Etat : Kim Roosevelt et Rocky
Stone…(…)…
Rocky Stone arriva à
Damas, en avril 1953, avec 3 millions de
$ d’armes pour les militants islamistes
et pour corrompre les officiers et
politiciens. Son projet était
d’assassiner, avec l’aide des Frères
Musulmans, le chef des services secrets,
de l’Etat-major et le chef du parti
communiste et de fomenter des «
conspirations et des provocations armées
» en provenance d’Irak, de
Jordanie, et du Liban, pays déjà sous la
coupe US, et d’en faire accuser les
baasistes syriens ; l’objectif final
étant l’invasion de la Syrie… Mais
l’argent de la CIA échoua à corrompre
les militaires et… L’armée syrienne
répondit en prenant d’assaut l’ambassade
des Etats-Unis, faisant Stone
prisonnier. Après un interrogatoire
musclé, ce dernier avoua, à la
télévision, le rôle joué dans le coup en
Iran et la tentative de coup d’Etat
contre le gouvernement légitime de la
Syrie. Stone fut expulsé de Syrie ainsi
que deux autres membres de l’ambassade
US. C’est la première fois qu’un
diplomate US l’était dans un pays arabe.
La Syrie, par la
suite, purgea tous les politiciens
associés au coup et exécuta les
officiers coupables de trahison. En
représailles, la Maison-Blanche
d’Eisenhower envoya la 5ème Flotte en
Méditerranée … et pressa la Turquie
d’envahir la Syrie… ce qui ne se fit pas
suite aux protestations violentes de la
Ligue arabe…(…)…
La CIA n’en
poursuivit pas moins ses efforts secrets
pour renverser le gouvernement baasiste
démocratiquement élu. Elle créa avec
l’aide du MI6 britannique un «
Comité Syrie Libre » et chargea les
Frères Musulmans d’assassiner
trois fonctionnaires du gouvernement
syrien qui avaient dévoilé me «
complot américain ». Selon Matthew
Jones, auteur de The Preferred Plan:
the Anglo-American Working Group Report
on Covert Action in Syria, 1957 :
« La CIA a éloigné la Syrie des
Etats-Unis et l’a poussé dans des
alliances prolongées avec la Russie et
l’Egypte »…(…)…
Encore une
guerre pour un gazoduc
Alors que la presse
américaine complaisante copie la vision
des militaires US que le soutien à la
rébellion syrienne est de nature
humanitaire, les Arabes voient la crise
présente comme une guerre par
procuration pour les oléoducs et la
géopolitique…(…)…
La guerre n’a pas
commencé avec les manifestations
pacifiques, mais dès 2000 avec le projet
qatari de gazoduc de 10 milliards de
dollars et de 1500 km de long pour
profiter de l’embargo sur l’Iran et ,
grâce aux terminaux en Turquie,
économiser sur les coûts de
transformation et de transbordement…(…)…
Le gazoduc Turquie/Qatar confirmera la
domination des royaumes sunnites sur les
marchés du gaz et renforcera l’allié US
qu’est le Qatar avec ses deux immenses
bases US…(…)…
En 2009,
Bachar al-Assad annonça qu’il refusait
de signer l’accord sur le transit du
gazoduc à travers la Syrie, pour «
protéger les intérêts de notre allié la
Russie
». Il approuva par la suite le
projet russe de « gazoduc islamique
» qui ferait de l’Iran – et non le
Qatar - le principal fournisseur de
l’Europe et augmenterait
considérablement l'influence de Téhéran
au Moyen- Orient et dans le monde.
Israël était aussi déterminé à faire
dérailler le projet de gazoduc islamique
qui enrichirait l’Iran et la Syrie et
aussi en conséquence, le Hezbollah
et le Hamas. Et donc, le
soulèvement syrien pour renverser le
régime de Bachar al-Assad était dans les
tuyaux bien avant les événements de 2011
et selon WikiLeaks, la CIA
était déjà sur le terrain…(…)…
Pour John Kerry, les
Etats sunnites avaient offert aux
Etats-Unis de régler les coûts d’une
invasion de la Syrie « s’ils le
faisaient comme ils l’avaient fait
ailleurs… L’offre est sur la table
»…(…)…
L’idée de
fomenter une guerre civile entre
sunnites et chiites pour affaiblir les
régimes syrien et iranien afin d’assurer
le contrôle des ressources
pétrochimiques de la région n’était pas
une nouveauté dans le catalogue du
Pentagone. Un rapport de la Rand
Corporation
de 2008 envisageait le plan des actions
futures. Selon ce document, le contrôle
des richesses en gaz et pétrole du
sous-sol du Golfe Persique restera
toujours « une priorité stratégique
US » qui « se combinera
fortement avec celui d’une guerre
prolongée ». La Rand
recommandait des « actions
clandestines, des opérations
d’information, une guerre
non-conventionnelle » pour mettre
en place une stratégie de type «
diviser pour régner ».
«Les
Etats-Unis et ses alliés locaux
pourraient utiliser les djihadistes
nationalistes pour lancer une guerre par
procuration » et « les
dirigeants US pourraient aussi choisir
de capitaliser sur un conflit
sunnite-chiite de longue durée en
soutenant les régimes conservateurs
sunnites contre les mouvements de prise
du pouvoir du monde musulman… soutenant
de toute évidence des gouvernements
sunnites autoritaires contre un Iran en
permanence hostile»…(…)…
Deux ans avant que
les coupeurs de gorge ne fassent leur
apparition sur la scène mondiale, une
étude de 7 pages de la Defense
Intelligence Agency (DIA) (Agence du
renseignement de la Défense) US,
obtenue du groupe d’extrême droite,
Judicial Watch, avertissait que, en
raison du soutien de la coalition
américano-sunnite pour les djihadistes
sunnites radicaux, « les salafistes,
les Frères Musulmans et Al-Qaïda en Irak
(AQI - maintenant EI) étaient devenus le
moteur de la rébellion en Syrie ».
Grâce aux fonds fournis par les
Etats-Unis et les Etats du Golfe, ces
groupes ont orienté les manifestations
pacifiques contre Bachar al Assad dans
une direction « carrément religieuse
(chiite contre sunnite)». Le
document note que le conflit est devenu
une guerre de religion soutenue par des
« pouvoirs religieux et politiques. Il
décrit le conflit syrien comme une
guerre totale pour le contrôle des
ressources de la région avec «
l’Occident, les pays du Golfe et la
Turquie soutenant l’opposition anti-Asssad,
tandis que la Russie, la Chine et l’Iran
sont aux côtés du régime». Les
auteurs du document de sept pages du
Pentagone semblent endosser l’avènement
d’un califat. « Si la situation se
développe, la possibilité existe que
dans l’est de la Syrie (Hasaka et Deir
ez-Zor), une principauté salafiste,
reconnue ou non reconnue, s’établisse et
c’est exactement ce que recherchent les
soutiens à l’opposition : isoler le
régime syrien. ». Le rapport du
Pentagone note qu’elle pourrait passer
la frontière irakienne vers Mossoul et
Ramadi et « déclarer un Etat
islamique au travers de sa fusion avec
les autres organisations terroristes
d’Irak et de Syrie »
C’est précisément ce
qui est arrivé. Les régions de Syrie
occupées par l'État islamique englobent
exactement le tracé du projet de
pipeline qatari…(…)…
En dépit de l’image
véhiculée, par la presse, d’un mouvement
de protestation modérée contre le tyran
Assad, les services secrets US savaient,
dès le départ, que leurs fondés de
pouvoir s’avéraient être des djihadistes
radicaux qui se tailleraient,
certainement, un nouveau califat sur les
vestiges sunnites de la Syrie et de
l’Irak grâce au soutien US/ Coalition
sunnite... comme l’assurait une étude
officielle US obtenue par une
organisation de droite, Judicial
Watch…(... )…
Mais, comme l’avoue
Tim Clemente, président du Joint
Terrorism Task Force du FBI de 2004
à 2008, « nous avons commis les
mêmes erreurs qu’en Afghanistan où nous
avons formé les moudjahidine. Dès que
les Russes furent partis, nos supposés
amis se sont mis à fracasser les
antiquités, réduire en esclavage les
femmes, couper les membres et nous tirer
dessus »…(…)…
Et ces «
erreurs » durent depuis plus de 30
ans car « avouons-le, la
« guerre
contre la terreur » n’est rien
d’autre qu’une « guerre pour le
pétrole ». ……
Robert
F. Kennedy Jr est un avocat spécialisé
dans le droit de l’environnement. Il est
le président de
Waterkeeper Alliance.
(1) La
Rand Corporation est un des
think tank américains les plus
influents.
Extraits -
Traduction et Synthèse: Xavière
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Intertitres
: AFI-Flash
Ouvrages
cités:
Le sommaire de Gilles Munier
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Syrie
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