Les 7 du Québec
Les conditions de la révolution
prolétarienne (2)
Robert Bibeau
Robert
Bibeau
Mercredi 24 juin 2015
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http://www.les7duquebec.com/7-au-front/les-conditions-de-la-revolution-proletarienne-1/
La seconde condition de la révolution prolétarienne
15. La
contradiction fondamentale du mode de
production capitaliste étant pleinement
développée comme nous l'avons examiné
précédemment la classe capitaliste
internationale ne trouvera plus d'autres
moyens pour survivre que de se lancer
dans de multiples guerres pour le
partage des zones d'influence, pour le
partage des secteurs de ressources, des
zones d'exploitation de la main-d'oeuvre
et pour le partage des marchés, afin,
espérera chacune des alliances
impérialistes concurrentes, de relancer
le processus de reproduction élargie de
son capital en panade. Ces guerres de
rapines se mèneront d'abord aux
marges des zones d'influence de
chacune des alliances,
dans les Balkans, dans le
Caucase, en Ukraine, au Moyen-Orient et
en Afrique pour une des alliances; au
Nicaragua, au Venezuela, en Colombie, en
Équateur, en Bolivie, au Brésil, en
Afrique, au Népal, au Vietnam, au
Myanmar et en Corée du Nord pour l'autre
alliance. Le monde vit sous cette
conjoncture de guerres locales plus ou
moins larvées, plus ou moins contrôlées
depuis la fin de la Seconde Guerre
mondiale (nous avons observé au moins
100 guerres locales entre 1945 et 2015).
Puis, les conditions de reproduction et
de valorisation du capital se
détériorant encore davantage,
puisque ces guerres ne feront
rien pour relancer la valorisation du
capital, les différentes alliances
impérialistes en viendront à s'affronter
directement, ce sera la Troisième Grande
Guerre mondiale qui forgera
la seconde condition objective pour le
déclenchement de l'insurrection
prolétarienne.
La révolution empêchera la guerre ou la guerre entraînera la révolution
16. Au cours du
siècle passé, les communistes ont espéré
que la révolution prolétarienne pourrait
empêcher le déclenchement d'une guerre
mondiale et ils ont été déçus à deux
reprises. C'est difficile à admettre,
mais seule la détresse provoquée par une
guerre internationale meurtrière -
apocalyptique - , l'appauvrissement de
la classe ouvrière et des masses
paysannes en pays sous-développés - la
destruction d'une grande quantité de
moyens de production (de capitaux), la
dislocation anarchique des rapports de
production capitalistes, convaincra le
prolétariat, si souvent trompé, si
souvent trahi, si souvent bafoué, si
profondément aliéné à se présenter sur
la scène de l'histoire pour imposer son
alternative ultime à la déprédation
capitaliste.
17. Les
organisations de la gauche bourgeoise et
prolétarienne n'ont
aucune prise sur le processus
insurrectionnel prolétarien spontané.
La responsabilité de la gauche
communiste révolutionnaire refusant
la bolchevisation de ses organisations,
le sectarisme et le dogmatisme qui
l'accompagne, et respectant le droit de
fraction au sein des organisations ;
sera de bien comprendre le processus
insurrectionnel spontané et désordonné,
d'en apprécié correctement le
développement, et au moment opportun, de
proposer une direction révolutionnaire
via des mots d'ordre appropriés.
Surtout, aucun mot d'ordre réformiste
comme le feront des dizaines et des
dizaines d'organisations de la gauche
bourgeoise opportuniste excitées à
l'idée de se partager l'assiette au
beurre du pouvoir bourgeois "rénové"
(sic).
Lénine a dû se
résigner à proposer des mots d'ordre
réformistes comme le slogan "Pain,
paix et terre", car le gros des
forces révolutionnaires bolcheviques
était composé de moujiks, de petits
bourgeois d'officiers et de salariés de
l'État. Le prolétariat russe,
minoritaire, manquait d'expérience et de
maturité révolutionnaire.
Ce compromis sera non seulement
inapproprié dans les conditions de la
prochaine insurrection prolétarienne,
mais il serait un crime et une trahison
contre la révolution. La prochaine
insurrection prolétarienne mondiale ne
se fera pas dans les conditions d'un
mode de production en transition entre
le féodalisme paysan et le capitalisme
ouvrier ascendant. La prochaine
insurrection prolétarienne spontanée se
fera dans les conditions extrêmes de
l'impérialisme décadent et agonisant,
mais encore cruel.
Guerre mondiale, puis insurrection prolétarienne internationale
18. La guerre mondiale est donc la seconde condition de la crise qui
provoquera les soulèvements sociaux, qui
enclencheront à leur tour l'insurrection
prolétarienne mondiale, qui, nous
l'espérons, pourra provoquer l'avènement
de la révolution prolétarienne
communiste. Voilà l'ordre de mise en
place de la révolution mondiale
et
voilà la troisième condition d'une
insurrection prolétarienne réussie se
transformant de révoltes localisées en
révolution prolétarienne communiste à
l'échelle planétaire. La société
socialiste de transition entre le mode
de production capitaliste et le mode de
production communiste ne peut absolument
pas se construire dans un seul ou dans
quelques pays isolés comme l'a démontré
l'échec du pseudo "camp socialiste".
Cette édification devra se faire sous la
dictature du prolétariat dans un très
grand nombre de pays simultanément sinon
les capitalistes mèneront des guerres
d'agression
contre le ou les jeunes états
socialistes encore instables et
désorganisés. Mais comment une
insurrection prolétarienne spontanée et
mondialisée peut-elle se transformer en
révolution prolétarienne communiste
mondiale ?
19. Nous avons vu
précédemment que ce scénario
révolutionnaire a effectivement été
réalisé en 1917 dans le cadre de la
Révolution bolchevique qui frappa toutes
les Russies.
Pourtant, cette Révolution ne fut
pas une Révolution prolétarienne
communiste jusqu'au bout parce que
l'insurrection populaire qui là précédé
s'appuyait surtout sur la classe
paysanne en révolte. La Première
condition fondamentale d'une Révolution
communiste mondiale c'est qu'elle
origine d'une insurrection qui si elle
n'est pas
prolétarienne au départ - le
devienne rapidement par la suite - sans
quoi - l'insurrection populaire sera
récupérée par d'autres classes ou
segments de classes sociales non
révolutionnaires intéressées par la
défense de leurs intérêts privés. Le
Parti bolchevique a dû se substituer à
la classe prolétarienne et imposer sa
dictature de parti afin de mener à bien
le renversement de l'État féodal
tsariste, il marquait en cela
l'impossibilité de "volontairement"
imposer la révolution anticapitaliste
à une société pas encore
solidement implantée dans le
capitalisme. Une telle confusion ne doit
pas se reproduire.
20. Qui dit classe
prolétarienne pense mode de production
capitaliste monopoliste d'État largement
développé, productiviste, moderne,
mécanisé, numérisé, informatisé, à très
haute productivité, globalisé,
internationalisé et interdépendant
mondialement en un procès de
développement inégal (d'un pays à un
autre) et combiné (d'un secteur
économique à l'autre, d'une zone
industrielle à une autre). Bref, la
classe prolétarienne est la classe
sociale qui exprime par son
développement international le niveau de
développement du capitalisme à son stade
impérialiste décadent le plus avancé.
Marx a expliqué que sous le capitalisme
les deux classes sociales antagonistes -
prolétariat et bourgeoisie - étaient
intimement liées l'une à l'autre dans la
phase ascendante - durant la phase
d'apogée - et dans la phase déclinante -
impérialiste - du mode de production
capitaliste. Les idéologues marxistes
ont ajouté que seule la classe
prolétarienne développée, moderne,
formée, consciente et combative serait
la classe sociale totalement et
pleinement révolutionnaire jusqu'au
bout.
Les moujiks russes analphabètes,
les paysans illettrés des rizières de
Chine, du Vietnam, du Cambodge, les
paysans affamés des hauts plateaux du
Népal, les fellahs égyptiens paupérisés,
les éleveurs touaregs nomades du Sahel,
les agriculteurs indiens paupérisés, les
paysans sans-terre de Cuba ou
d'Amazonie, etc. ne peuvent en aucun cas
enclencher une insurrection
prolétarienne mondiale.
La quatrième condition pour une révolution prolétarienne communiste
21. Crise
systémique, guerre nucléaire
généralisée, insurrection prolétarienne
spontanée, entraîneront comme l'écrivait
Lénine
« L’impossibilité pour les
classes dominantes de maintenir leur
domination sous une forme inchangée […]
impliquant que la base (sociale) ne
veuille plus vivre comme auparavant et
que le sommet [bourgeoisie] ne le puisse
plus ». De plus « L’aggravation,
plus qu’à l’ordinaire, de la misère et
de la détresse des classes opprimées
entraîneront plus qu'à l'habitude
des soulèvements populaires en série.
D'où l’accentuation de l’activité
populaire des masses »
et éventuellement la révolution
prolétarienne consciente pour
l'édification du mode de production
communiste (10).
Chacun aura noté que Lénine indique "les
classes dominantes" et "des classes
opprimées", au pluriel, justement parce
que le parti bolchevique tentait de
mener une révolution prolétarienne dans
une société en transition entre l'ancien
mode de production féodal (noblesse
contre serfs) et le nouveau mode de
production capitaliste (bourgeoisie
contre prolétariat). La prochaine grande
vague d'insurrection prolétarienne ne se
fera pas sous ces conditions mitigées.
22. L'expérience
lamentable des collusions sous forme de
fronts unis inter classes entre des
segments de la bourgeoisie dite
"démocratique - libérale" et la classe
prolétarienne (du Front Populaire à la
Seconde Guerre impérialiste, en passant
par la guerre d'Espagne républicaine
bourgeoise) nous a enseigné à rejeter ce
type de compromis opportuniste où la
classe prolétarienne se met au service
d'une section de la bourgeoise -
totalitaire "libérale" - afin de l'aider
à imposer son hégémonie aux autres
fragments de la bourgeoisie totalitaire
"non libérale" (sic) et à imposer sa
domination sur la classe ouvrière tout
entière, cette dernière ne servant que
de chair à canon dans ce marché de dupes
frontiste. Aucune union interclasses
antagoniste ne tient la route. Tous les
segments de la bourgeoisie sont pareils,
pendant les élections "démocratiques"
bourgeoises, comme devant leurs
banquiers en larmes, comme devant leurs
officiers pour réprimer.
23. La réciprocité de ces
prémisses est évidente : plus le
prolétariat agira résolument et avec
assurance, guidé par des mots d'ordre
pertinents et révolutionnaires (sans
compromis) et plus il aura la
possibilité d’entraîner sous sa
direction les couches intermédiaires,
plus la classe
dominante sera isolée, plus la
démoralisation s’accentuera chez elle.
Par contre, la désagrégation des
appareils de la gouvernance capitaliste
(dont l'État bourgeois est la pièce
maîtresse) est obligatoire, d'où la
nécessité pour les communistes de
rejeter tout recours, tout appel au
renforcement des lois et de la
gouvernance de l'État bourgeois, ou en
faveur de la dissolution de telle ou
telle alliance. Nous ne luttons pas pour
sortir tel ou tel pays de telle ou telle
alliance impérialiste. Nous luttons pour
écraser toutes les alliances
impérialistes.
C'est la raison pour laquelle les
communistes ne participent pas aux
ralliements pour demander à l'État
bourgeois de sortir de l'OTAN, de
renforcer l'État national bourgeois, de
sortir de l'Euro ou de l'ALENA, et nous
ne signons pas des pétitions pour
réclamer la clémence de l'État et le
renforcement des mesures de soi-disant
"sécurité". L'État bourgeois est la
source de toutes les insécurités et de
toutes les formes de terrorismes à
petite et à grande échelle.
Le parti prolétarien révolutionnaire communiste
24.
Si l’estimation objective d’une
situation révolutionnaire paraît sujette
à caution, l’intervention d’un ultime
vecteur, qui unifiera les différents
facteurs et matérialisera leur
interaction corrigera les dangers de
"volontarisme" révolutionnaire. Certains
marxistes le considèrent comme la
condition dernière dans le dénombrement,
mais non dans l’importance pour la
conquête du pouvoir par la classe
prolétarienne «
le parti révolutionnaire en tant
qu’avant-garde unie et trempée de la
classe », ou alors un regroupement
d'organisations communistes
révolutionnaires, aura la tâche de faire
en sorte que la classe prolétarienne
prenne pleinement conscience de sa
mission historique qui n'est pas de
corriger les injustices du capitalisme,
ni d'enrayer la destruction écologique
de la planète, mais de créer un nouveau
mode de production - communiste qui aura
comme conséquence de stopper la
destruction de la planète. Quant à
Lénine, il fait de cette
dernière condition le point de
différenciation entre la révolution
prolétarienne communiste et la crise
révolutionnaire insurrectionnelle sans
lendemain « La révolution
ne surgit pas de toute situation
révolutionnaire, mais seulement dans le
cas où, à tous les changements objectifs
énumérés,
vient s’ajouter un changement subjectif,
à savoir : la capacité, en ce qui
concerne la classe révolutionnaire, de
mener des actions de masse assez
vigoureuses pour briser complètement
l’ancien gouvernement, qui ne tombera
jamais, même à l’époque des crises, si
on ne le fait choir. » (10).
Sur le même sujet :
Bibeau, Robert. (2014). Manifeste
du Parti ouvrier. Publibook. Paris.
http://www.publibook.com/librairie/livre.php?isbn=9782924312520
(1) Plateforme du
Courant Communiste International (CCI)
adopté par le Premier congrès. (1975)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Courant_communiste_international
(2) K. Marx (1859)
Contribution à la critique de
l'économie politique.
(3) Daniel Bensaïd,
« Mémoire de maîtrise, La notion de
crise révolutionnaire chez Lénine »,
1968, à retrouver sur ce site :
http://danielbensaid.org/La-notion-de-crise-revolutionnaire
(4)
http://danielbensaid.org/La-notion-de-crise-revolutionnaire
(5) Nicos
Poulantzas, Pouvoir politique et
classes sociales, éditions Maspero,
p. 11.
(6)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Hyperinflation_de_la_R%C3%A9publique_de_Weimar
et
http://fr.wikipedia.org/wiki/Reichsmark
(7)
http://fr.wikipedia.org/wiki/Franc_fran%C3%A7ais#IVe_R.C3.A9publique
(8) Tom Thomas
(2011) Étatisme contre libéralisme ?
Éditions Jubarte. Paris. Page 1.
(9) Lénine,
Œuvres, tome I, éditions de Moscou,
p. 175.
et
http://danielbensaid.org/Une-introduction-revisitee
(10) Lénine,
Œuvres, tome I, éditions de Moscou,
p. 175.
et
http://danielbensaid.org/Une-introduction-revisitee
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