Les 7 du Québec
Plus de riches, de plus en plus
riches... et après ?
Robert Bibeau
Robert
Bibeau
Mercredi 23 septembre 2015
http://www.les7duquebec.com/...
Avant-propos
Amorçons cette
analyse sur la concentration de la
richesse – du patrimoine – du capital en
général – par la relation de la dernière
compilation mondiale des milliardaires
de la planète. Le magazine Forbes
a raison de faire cette compilation à
l’échelle internationale, car l’économie
capitaliste est aujourd’hui globalisée
et mondialisée et la désignation de
l’origine nationale de ces milliardaires
actionnaires de vastes entreprises
multinationales a de moins en moins
d’intérêt. Nous savons que ces
1 826 milliardaires, cumulant 7 050
milliards de dollars de capitaux
proviennent de cent (100) pays
différents. Mais le plus significatifs
est qu’ils sont reliés entre eux (leurs
capitaux sont reliés entre eux) via des
conseils d’administration cooptés, des
échanges d’actions, des contrats
d’approvisionnement, des ententes de
non-concurrence et de partage des
marchés. Ils ne forment qu’une seule et
vaste oligarchie mondiale (une classe
sociale en soi et pour soi) complice,
mais aussi concurrente, pour le partage
des marchés, des espaces de ressources
et des secteurs de spoliation de la
plus-value prolétarienne. Voilà une
résultante évidente du stade
impérialiste du mode de production
capitaliste.
**********
» Le monde compte
un nombre record de milliardaires, de
plus en plus riches. Le plus fortuné de
tous étant l’Américain Bill Gates,
selon le classement 2015 du magazine
Forbes, publié le 2 mars 2015
(1). Liliane Bettencourt est
la première Française en décrochant la
10e place. Voici les principaux
enseignements de ce classement » (2)…
Des Français
bien placés
« Âgée de 92 ans,
l’héritière de L’Oréal, Liliane
Bettencourt gagne une place avec
40,1 milliards de dollars, grâce à un
gain 5,6 milliards par rapport à 2014.
Toujours chez les Français,
Bernard Arnault, propriétaire du
groupe de luxe LVMH, est 13e, avec 37,2
milliards de dollars (33,5 en 2014),
suivi de Patrick Drahi,
président de la multinationale des
télécommunications Altice (57e, 16
milliards), de Serge Dassault
(62e, 15,3 milliards) et François
Pinault (65e, 14,9 milliards). »
« En comparaison,
la bonne tenue du secteur de la
technologie et l’augmentation du dollar
par rapport à l’euro ont renforcé
la position des Américains dans le
classement 2015 : ils sont 536 à
y figurer, suivis de la Chine (213),
de l’Allemagne (103), de l’Inde (90) et
de la Russie (88). L’Europe compte
482 milliardaires (prendre note que
le capital de ces milliardaires n’est
souvent pas localisé ni valorisé dans le
pays inscrit sur leur passeport, d’où
l’inanité de les classer par
nationalité).
Toujours plus de
riches
En un an, la
fortune de Bill Gates, co-fondateur
de Microsoft à augmenter de
3,2 milliards pour s’établir à 79,2
milliards de dollars. Le Mexicain
Carlos Slim, magnat des
télécommunications, numéro 2 du
classement, a vu sa fortune passer de 72
à 77,1 milliards de dollars, et celle de
l’homme d’affaires américain
Warren Buffett a bondi de 14,5
milliards de dollars en un an, pour
atteindre 72,7 milliards, ce qui lui
permet de décrocher la troisième place.
Il relègue à la quatrième place
l’Espagnol Amacio Ortega,
fondateur de la marque de vêtements
Zara (64,5 milliards, +0,5
milliard de plus qu’en 2014). Le
5e reste Larry Ellison, le
fondateur d’Oracle, avec 54,3 milliards
de dollars. »
**********
« Au total, la
liste de Forbes compte
cette année un nombre record de
1 826 milliardaires, contre 1 645
l’an dernier, dont 46 ont moins de 40
ans. Les 17 premiers ont tous vu leur
fortune augmenter depuis l’an dernier.
Et la richesse cumulée par ces
ultra-riches atteint désormais 7 050
milliards de dollars, contre 6 400 en
2014.
La plupart de ces
milliardaires (1 191) précise Forbes,
ont construit leur fortune. Seulement
230 en ont hérité, et si 405 en ont au
moins partiellement hérité, ils
travaillent à la faire fructifier. Il
faut aussi noter que 138 riches de l’an
dernier (2014) ont vu leur fortune
diminuer et sont donc sortis de la liste
en 2015 (…) » Enfin, la distribution
géographique de ces capitalistes est de
plus en plus diversifiée, effet de
l’intégration impérialiste mondiale de
l’économie internationale. On retrouve
un ou des milliardaires dans une
centaine de pays répartis sur tous les
continents.
Facebook, Snapchat, Uber : machines à
cash
« À 30 ans, le
fondateur de Facebook,
Mark Zuckerberg, entre dans
le top 20, désormais 16e avec 33,4
milliards de dollars (contre 28,5 l’an
dernier). Le plus jeune de la liste est
le Californien Evan Spiegel,
24 ans, PDG de Snapchat,
l’application de messagerie éphémère
qu’il a créés en 2011 avec Bobby
Murphy, 25 ans. Tous les deux
occupent la 1250e place du classement,
avec une fortune estimée à 1,5 milliard
de dollars. Parmi les moins de 40 ans
figurent aussi les deux fondateurs
d’Uber, l’application lancée en 2009 qui
permet d’appeler une voiture avec
chauffeur : Travis Kalanick,
38 ans, et Garrett Camp,
36 ans, sont ex aequo à la 283e place
(5,3 milliards). Le PDG d’Uber
Ryan Graves, 31 ans, est 1324e
(1,4 milliard). »
**********
D’où provient la
richesse accumulée par ces milliardaires
sur papier ?
Il faut d’abord
souligner que sous le mode de production
capitaliste (MPC) seule la production de
marchandises (produits ayant une valeur
d’usage) génère de la valeur d’échange.
Échanger des actifs à la bourse ne
constitue aucunement une activité
productive génératrice de plus-value et
ne peut donc aucunement valoriser le
capital et générer des profits. D’où
vient donc le renchérissement des
actions de Mark Zuckerberg
Président de Facebook ? Ce
renchérissement de cinq milliards de
dollars en un an provient pour partie
de l’échange spéculatif d’actions entre
traders et pour partie de la mise en
marché d’actions que des fonds de
pension et des compagnies d’assurance,
dont les ressources proviennent des
salariés, ont effectuées. Aucune valeur
nouvelle n’ayant été créée, alors que la
« valeur » au livre des actions de
Facebook a augmenté, ceci
signifie que le jour de la liquidation
de l’entreprise chaque actionnaire
direct ou indirect se retrouvera avec
quelques sous par action, comme il en
fut pour les compagnies Nortel,
Enron et pour d’autres.
Dans le cycle de
reproduction du capital la valeur argent
sert de talisman visant à permettre
le cheminement de la valeur (sa
transformation momentanée) d’une forme
concrète (marchandise) en une forme
abstraite (écrits comptables, ou argent
sonnant, ou plus souvent, argent virtuel
ou crédit), puis, à nouveau sous une
forme concrète (moyens de production) et
ce, sur un marché globalisé et
mondialisé de plus en plus volatil et
compliqué à gérer où marchandises
concrètes s’entremêlent avec ses
représentants (la marchandise argent
sous toutes ses formes comme nous venons
de le souligner). Donc, sur quelle
production de marchandises (de valeur et
de plus-value en définitive) se fonde la
fortune de la plupart de ces 1 826
milliardaires ? L’examen de la liste
Forbes permet de constater
que la plupart de ces richissimes on
fait fortune dans les services
tertiaires, les télécommunications,
l’informatique et les technologies, la
publicité ou la commercialisation –
transport et livraison – des
marchandises.
Concentration de
« richesses » qui manifeste la phase
impérialiste du capitalisme
Tout ceci atteste
qu’au cours de la phase impérialiste du
développement du mode de production
capitaliste (MPC) le capital financier
parvient à s’accaparer d’une grande
partie de la plus-value générée au cours
du processus de
production-transformation-commercialisation
des marchandises qu’ils contribuent à
valoriser (3). Puis, quand ce circuit se
tarit et que la plus-value ne parvient
plus à se réaliser et que la composition
organique du capital poursuit sa montée,
réduisant d’autant la profitabilité
globale du capital social, le capital
financier n’a d’autre choix que de
forcer la poursuite du cycle de
circulation du capital (pour ne pas
paralyser et s’effondrer) par le moyen
de l’impression de monnaie de pacotille
et l’expansion du crédit – c’est-à-dire,
engager aujourd’hui de la « valeur » qui
ne sera pas produite demain, jusqu’à
l’éclatement de la bulle spéculative de
ces actifs toxiques globaux et mondiaux
(dettes boursière, bancaire, personnelle
et gouvernementale). Voilà le
processus économique qui définit le
stade impérialiste spécifique au mode de
production capitaliste. Spécifique
dans son développement et ses
caractéristiques, mais non pas dans ses
manifestations d’expansion et
d’agression (4).
La puissance
capitaliste états-unienne étant la plus
achevée – la plus avancée dans ce
processus « impérialiste » – (qu’elle
soit ou non la plus puissante n’a ici
aucune importance) – c’est donc la
puissance américaine qui montre les
stigmates de dégénérescence
impérialistes les plus prononcées.
Ainsi, Les États-Unis comptent 536
milliardaires spéculatifs – et le plus
fort taux de concentration
monopolistique du capital, alors que
l’Europe, la première grande puissance
économique mondiale, et la plus ancienne
– mais la deuxième plus achevée – des
économies impérialistes mondialisées –
en compte 482. La Chine, nouvellement
entrée dans le circuit de dégénérescence
impérialiste globalisée et mondialisée
en compte 213, mais sa croissance est
fulgurante. Dans quelques années la
Chine aura rejoint ses deux grands
concurrents et partenaires dans le
peloton de tête des puissances
internationales à moins que la Grande
Dépression, puis la guerre mondiale
n’aient brisé ses visées expansionnistes
inévitables.
La crise
systémique du capitalisme
Étant donné que ce
transfert de valeur – de capitaux – a
lieu dans la sphère tertiaire –
financière – commerciale – c’est dans
cette sphère que s’accumule le capital
sous sa forme argent (titre, actions,
obligations, produits boursiers dérivés,
monnaies (QE), etc.). C’est aussi
l’indication que c’est cette sphère
hyper-surévaluée et agitée qui
s’effondrera en premier quand le crédit
(l’argent fictif) qui lui sert de
support abstrait et de talisman
s’évaporera redonnant tous ses droits
au procès de production concret, assise
réelle de la valorisation du capital
dans le mode de production capitaliste
(MPC). Pensez donc la masse de capital
accumulé dans cette sphère largement
spéculative est passée de 6 400
milliards de dollars en 2014, à plus de
7 050 milliards de dollars en 2015 (ne
comprenant que la fortune des
milliardaires recensés par Forbes
auxquels il faudrait ajouter la fortune
des milliers de millionnaires du monde
entier). Cette concentration de
« valeur » bidon, de capital fictif a
lieu alors même que l’économie mondiale
périclite globalement. Comme nous
l’écrivions dans un récent article, ceci
explique pourquoi : » Le capital fuit
les États-Unis et l’or aussi » (5).
La raison de ce
transfert de capitaux ne serait-elle pas
que les cambistes, traders, banquiers,
financiers et milliardaires
« d’occasions » sentent venir le vent de
la chamade boursière-bancaire-fiduciaire
et ils courent se réfugiés sous d’autres
paradis fiscaux où la crise inexorable
ira les rejoindre soyez sans crainte.
Car le jour de la Grande Dépression il
n’y aura nulle part où dissimuler sa
fortune de pacotille, que cette dernière
soit libellée en dollar, en euro,
en yen, en yuan, en Franc ou en denier.
Si on peut dissimuler ses actifs papier
au fisc, on ne peut dissimuler ses
usines, ses infrastructures, ses
édifices et autres moyens de production
à la crise systémique du capitalisme
(6).
Que faire ?
La classe
prolétaire doit-elle s’inquiéter de ces
manipulations financières délétères ? Au
contraire! La classe des prolétaires n’a
aucun pouvoir sur les instances
économique, politique et idéologique du
mode de production capitaliste et elle
ne doit surtout pas en chercher, ce qui
serait de toute façon totalement
désespéré. Le mode de production
capitaliste n’est pas en crise par la
faute de l’incompétence des hommes
d’affaires qui le gouverne, mais à cause
des contradictions qui limite absolument
son développement. La classe
prolétarienne n’y peut rien et ne
saurait pas davantage faire fonctionner
ou réformer ce bateau ivre voguant
vers l’abysse. Au contraire, la classe
ouvrière doit ramer fort pour que
ce bateau fou échoue, se fracasse et
sombre corps et biens afin de construire
sur ces ruines un nouveau mode de
production.
Les gauchistes
atterrés, les petits-bourgeois
réformistes frustrés, les bobos
paupérisés protestent contre l’inégale
répartition de l’usufruit de ces
enchères boursières éventées et
s’esclandre contre les milliardaires
propriétaires de ce vent spéculatif
gonflé à « l’hélium argenté »; contre
ces riches qu’il faudrait taxer afin de
redonner ces royautés aux pauvres
affamés. Ces plumitifs se gourent
royalement. Quand la bulle financière
explosera comme elle le fait
régulièrement – mais cette fois plus
drastiquement qu’avant – la
conflagration étant toujours au diapason
de la mystification – alors, toute cette
richesse de pacotille s’évanouira et il
n’y aura plus grand-chose à taxer, que
les revenus des salariés spolier comme à
l’accoutumée.
C’est le mode de
production capitaliste tout entier qui
et en cavale, et l’unique solution est
de changer de mode de production pas de
réparer l’irréparable « citron » en
crevaison.
(1)
http://www.forbes.com/billionaires/list/
et
https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_milliardaires_du_monde
(2) Source de
l’article : http://www.francetvinfo.fr/monde/classement-forbes-bill-gates-toujours-le-plus-riche-liliane-bettencourt-premiere-francaise_838533.html
(3) À paraître.
L’impérialisme sous le capitalisme.
(4) À paraître.
L’impérialisme sous le capitalisme.
(5) Le capital fuit
les États-Unis et l’or aussi. (
Septembre 2015)
http://www.les7duquebec.com/7-au-front/le-capital-fuit-les-etats-unis-et-lor-aussi/
(6) Contestation
du dollar comme monnaie du commerce
international (septembre 2015)
Pour un
complément d’analyse économique sur le
sujet, lire également
http://www.publibook.com/librairie/livre.php?isbn=9782924312520
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