Lecture
Manifeste du Parti ouvrier (2)
Robert Bibeau
Mercredi 18 juin 2014
Nous poursuivons la publication d’une série de neuf
(9) articles portant spécifiquement sur
quatre questions fondamentales pour le
mouvement ouvrier mondial :
1) Le problème du sectarisme cette maladie qui
sévit depuis des décennies dans le
mouvement ouvrier. Le premier article
est paru ici.
2) Ensuite, nous aborderons la question
de l’unité des forces ouvrières.
3) Nous présenterons les trois instances
de la lutte de classe.
4) Nous présenterons cinq leçons
apprises de la Révolution d’Octobre
LE SECTARISME MALADIE SÉNILE DU GAUCHISME (la
suite-2)
Le sectarisme c’est…
Le sectarisme, c’est s’émouvoir de l’opinion d’un
ouvrier parce qu’elle diffère du
consensus imposé à l’assemblée. Le
sectarisme, c’est brimer le droit de
parole dissidente au nom de l’unicité de
la pensée soporifique et de la ligne
politique unique. Le sectarisme, c’est
refuser de participer à une assemblée, à
un colloque, à un débat, à un forum,
sous prétexte que des représentants
anarchistes, révisionnistes,
sociaux-démocrates, opportunistes,
réformistes, altermondialistes et
écosocialistes prendront la parole pour
fabriquer du consentement stérilisant.
Depuis dix ans nombre d’organisations de la gauche
bourgeoise et leurs militants ont refusé
de discuter avec nous, de débattre avec
nous. Ces grands «démocrates» (sic) nous
ont interdits à leurs colloques et leurs
forums populaires. Ils nous ont rayés de
leurs listes de diffusion et de leurs
médias sociaux. Ils ont refusé de
recevoir notre littérature militante et
nos analyses politiques de principe,
manifestant ainsi leur sectarisme et
exprimant leur étroitesse d’esprit et
leur allergie envers une confrontation
idéologique de principe. Les
sectaires psalmodient «Vive la
démocratie» et ils lancent les mêmes
querelles et ils appliquent la même
censure que les médias et les
organisations bourgeoises.
Le sectarisme est unilatéral et chimérique
Le sectarisme se caractérise par la mesquinerie qui
porte les associations sectaires à
analyser les événements historiques et
les luttes de classe d’un point de vue
unilatéral et chimérique. Une secte se
demandera toujours jusqu’à quel point
tel ou tel combat lui aura permis de
progresser et de recruter de nouveaux
affidés, alors que les marxistes se
demanderont plutôt jusqu’à quel point
cette bataille a aidé la classe à
progresser dans sa conscience vers
l’émancipation.
Le
sectarisme c’est juger un camarade
ou un groupe par association en se
basant sur des rumeurs, des «on dit que»
et autres flagorneries. Le
sectarisme c’est suivre aveuglément un chef de bande et citer Marx,
Engels, Lénine et d’autres classiques et
se donner raison par comparaison.
Ce que tu écris et comment tu agis
parlent si fort camarade que je
n’entends plus ce que tu dis.
Le sectarisme c’est renoncer à défendre une
position politique prolétarienne sous
prétexte de préserver l’unité de la
secte. Un exemple : L’«embourgeoisement»
(gentrification) du tissu urbain est
inacceptable pour les ouvriers et pour
les pauvres chassés de leurs foyers.
Mais pas question de démontrer comment
ce phénomène se répand et s’épand dans
un quartier et dans une ville s’il faut
mettre en cause le gouvernement, l’État
et le système capitaliste décadent, ce
qui bien entendu risquerait de froisser
leurs agents qui subventionnent
généreusement l’organisation sectaire.
Le
sectarisme c’est soutenir un point
de vue erroné par solidarité
communaliste avec un ami ou un membre de
sa fratrie.
Le
sectarisme est une tactique
politique petite-bourgeoise qui origine
de la faiblesse théorique des gourous
des sectes éclectiques. Le sectarisme
surgit quand un parangon désire
maintenir son emprise sans partage sur
ses catéchumènes. Il les éloigne ainsi
des influences prolétariennes
«malsaines» (sic). Le sectarisme a
complètement contaminé tous les cercles
de la gauche depuis que l’Opposition de
Gauche a été chassée de la IIIe
Internationale.
Même l’Opposition de gauche, par réaction grégaire, est tombée dans ce
travers.
Partout où notre classe sue et peine, argumente et
débat, cherche sa voie et s’interroge
sereine, les ouvriers marxistes
révolutionnaires seront présents et
interviendront chaque fois que
nécessaire. Ainsi, en
Bretagne, des régionalistes bretons
se sont amenés aux manifestations de
notre classe avec leur drapeau
nationaliste. À nous, ouvriers
marxistes, de proposer notre drapeau
internationaliste et nos slogans
anticapitalistes. Au
Québec, quand les étudiants ont
hissé le carré rouge de la résistance
sur le front économique de la lutte des
classes, des nationalistes chauvins sont
apparus, avec leur fanion Fleur de lys
royaliste et ont perturbé les
échauffourées, ce qui n’a pas fait fuir
les marxistes révolutionnaires qui au
contraire sont demeurés au cœur de la
lutte avec nos frères, les étudiants
progressistes.
Pourquoi les ouvriers révolutionnaires
abandonneraient-ils le soutien à
l’organisation et éventuellement la
direction (au
moment de l’insurrection et pas avant)
du mouvement de révolte prolétarien et
populaire aux différents contingents
bourgeois nationalistes et aux
crétinistes parlementaires? Le
sectarisme serait ici de capituler,
de quitter le champ de bataille et
d’abandonner notre classe à l’ennemi
irrédentiste.
Le nécessaire travail militant dans les assemblées
populaires
Défendre le point de vue ouvrier marxiste et
promouvoir la lutte de classe sur le
front économique, politique et
idéologique dans les organisations de
masse, les syndicats et les forums
populaires et de quartier ne signifie
nullement adhérer aux idées
petites-bourgeoises conspiratrices
propagées dans l’une ou l’autre de ces
assemblées. C’est plutôt refuser
d’abandonner notre classe à la
propagande bourgeoise.
Ce n’est pas au contingent de rejoindre son adjudant, mais au sergent de
rejoindre son régiment.
Il faut être conscient qu’en société bourgeoise, la
classe capitaliste possède l’hégémonie
en tout et sur tout, c’est la classe
dominante, ce qui est lourd de
conséquences. Un partisan marxiste
risque de se retrouver isolé, ostracisé
et démuni s’il s’exclut lui-même des
réunions syndicales ou de quartiers et
des événements politiques organisés par
la gauche bourgeoise où inévitablement
des idées erronées, puériles,
contres-révolutionnaires, réformistes,
opportunistes, économistes,
anarcho-syndicalistes ou électoralistes
seront propagées. Le 1er mai, organiser
une manifestation séparée de celle
appelée par les centrales syndicales et
par les partis de la gauche bourgeoise
est un exemple de comportement sectaire.
C’est parmi notre classe que nous devons
être présents et pas isolés avec
quelques lumpens prolétaires libertaires
dans un cul-de-sac pour être incarcérés
par les policiers.
Comment les camarades marxistes apprendront-ils à
renforcer leurs liens avec notre classe
? Comment apprendront-ils à contrer les
arguties de la petite bourgeoisie ?
Comment apprendront-ils à polémiquer,
argumenter, démontrer, étayer, prouver
la vérité à propos de ces choses
masquées par les agents de la bourgeoise
infiltrés dans nos rangs?
La lutte de classe sur le front de la pensée, de la
propagande, de la théorie et de
l’idéologie est une composante
essentielle de la lutte de classe du
prolétariat. La participation à cette
lutte nous incombe à nous ouvriers
marxistes au même titre que le combat
sur le front économique et politique de
la lutte des classes. Cette lutte
idéologique doit être menée dans toutes
les assemblées et dans toutes les
organisations, sur les médias sociaux,
dans les manifestations ouvrières, les
assemblées et forums populaires. Le
gauchiste qui refuse de polémiquer,
d’argumenter, d’étudier et de débattre
avec des militants sur les grands
événements de notre temps est un
sectaire qui doit être dénoncé pour tel.
Contre l’entrisme
Polémiquer, débattre scientifiquement,
rigoureusement, argumenter dans une
assemblée populaire de quartier, dans
une rencontre d’ouvriers, dans un
colloque de militants, dans un congrès
universitaire ou un forum populaire,
dans un regroupement de syndiqués et une
assemblée étudiante ne constitue pas de
l’entrisme sectaire, mais bien
plutôt un travail d’agitation et de
propagande légitime et nécessaire pour
un ouvrier marxiste révolutionnaire.
L’entrisme est une tactique petite-bourgeoise qui
consiste à infiltrer les organisations
populaires, populistes, de quartier,
syndicales, sociales, communautaires,
étudiantes afin d’en prendre la
direction.
Dans les années 1970-1980, au plus fort de la
précédente vague
opportuniste-réformiste, certaines
organisations de la gauche bourgeoise
ont tenté de s’emparer du contrôle
d’associations populaires, d’assistés
sociaux, de regroupements de sans-abris,
de comités de locataires et d’ONG
féministes. Un groupe trotskyste avait
pris le contrôle d’un grand syndicat
d’enseignants de la région de Montréal,
alors que deux groupes maoïstes se sont
concertés pour s’emparer de la direction
d’une section régionale d’une centrale
syndicale nationale. Seule une
mésentente
sectaire sur le partage des postes
de bureaucrates syndicaux à pourvoir a
empêché les deux
sectes de se hisser sur la chaise de
capitaine syndical régional.
Nous vivons sous la dictature de la bourgeoisie qui
possède la totale hégémonie sur les
organes de pouvoir politique et
économique. Quiconque tente de s’emparer
de la direction d’une association
populiste, d’une organisation féministe,
d’une mairie, d’un conseil municipal,
d’une association caritative, d’un club
de l’âge d’or, ou d’un club de bridge
doit présenter patte blanche et
manifester son ferme propos de s’amender
et de ne rien perturber du
fonctionnement normal de la société
bourgeoise et surtout
jurer fidélité à l’ordre établi.
Si les magouilleurs entristes-sectaires respectent
l’ordre établi et gèrent la succursale
qui leur a été temporairement confié,
comme le ferait un bureaucrate syndical
ou un administrateur d’ONG subventionné,
ou comme le ferait un président
d’association croupion, alors rien à
craindre, le parangon sectaire pourra
faire carrière bien payée dans cette
organisation. Il chaut peu à l’État
bourgeois que le petit potentat se
coiffe d’un béret de Che Guevara ou d’un
bonnet d’âne pourvu qu’il fasse le
travail comme l’entend l’État bourgeois.
Si d’aventure, le
chef de la clique entriste ne
respecte pas la loi bourgeoise et ne se
soumet pas aux préceptes capitalistes il
sera répudié, rejeté, écarté par la
direction régionale, provinciale,
nationale, fédérale ou internationale,
quand ce ne serait pas par la base
populiste elle-même, une fois revenue de
sa torpeur, suite à ce coup de force à
la tête de l’organisation moron. Les
chefs des grandes centrales syndicales
nationales québécoises, qui avaient
temporairement oublié ce précepte
fondateur de la légitimité bourgeoise,
ont échoué en prison le temps de leur
faire entendre raison… Ce qui ne fut pas
long!
Il faut comprendre que ce n’est qu’au moment de
l’insurrection ouvrière et populaire,
quand l’ordre bourgeois craquera de
toute part, que l’État bourgeois dépassé
et désarticulé volera en éclats, que la
population refusera d’être gouvernée par
ces impotents, que les ouvriers révoltés
chercheront une alternative au pourvoir
bourgeois, que l’hégémonie idéologique,
théorique, politique, et surtout que
l’immense pouvoir économique capitaliste
se sera effondré, dans une crise
anarchique sans précédent; ce n’est qu’à
ce moment que la conscience de classe en
soi et pour-soi du prolétariat, faisant
un bond prodigieux, aura atteint un
niveau suffisant pour concevoir et
vouloir tout le pouvoir pour les soviets
ouvriers, comme forme spécifique de la
dictature du prolétariat. Alors il sera
temps, et alors seulement, pour la
classe (et non pas pour les apparatchiks
d’un parti politique) de s’emparer de la
direction des organes du pouvoir
politique, militaire et économique
(surtout).
Les ouvriers marxistes seront-ils prêts à fournir
l’expertise pour suggérer les voies de
l’édification socialiste?
La prochaine fois que l’ordre bourgeois
éclatera, la société capitaliste à son
stade impérialiste aura atteint le plein
développement de ses forces productives
et de l’évolution de ses rapports de
production, au point de ne pouvoir
survivre à son effondrement. Deux modes
de production opposés et contradictoires
ne peuvent ni ne doivent coexister.
L’avènement de l’un signifie
l’achèvement de l’autre. Où alors, ce
sera partie remise, et il faudra comme
la dernière fois (1917) attendre la
prochaine opportunité révolutionnaire.
Ce n’est pas pour s’emparer de quelques
postes de direction et pour jouer les
fonctionnaires de la gauche à la solde
du capital que doivent s’activer les
militants marxistes, mais pour se
préparer à soutenir la classe dans sa
conquête de tout le pouvoir politique et
économique.
Ce n’est pas la classe qui est au
service du parti, mais le Parti
révolutionnaire qui est au service de la
classe révolutionnaire (le
prolétariat).
Il n’est d’aucun intérêt de pratiquer l’«entrisme» dans les organismes bourgeois pour aller y vendre ses
services aux opportunistes et aux
réformistes gauchistes qui se soumettent
à l’idéologie dominante avec un petit
côté revendicateur, hargneux et
coléreux. Ils réclament plus de
réformes dans l’espoir de sauver le
capitalisme, ce qui est absolument
impossible. La bourgeoisie ne le peut
pas et son aile gauchiste en est tout
aussi incapable. Ce n’est pas pour
réparer les injustices du système
capitaliste que nous œuvrons à sa
destruction, mais simplement parce que
ce mode de production est rendu au bout
de son évolution. Il est devenu
inopérant. Il ploie sous ses
contradictions et ne parvient plus à
assurer sa reproduction élargie. Il est
paralysé, ne peut plus se développer et
il se traîne de crise en crise à la
recherche d’une chimérique solution à
ses contradictions insolubles.
Ainsi, à l’élection des députés à l’assemblée de
l’Union européenne, une secte de gauche
revendiquait une hausse généralisée du
SMIC, alors qu’une autre clique
réclamait l’augmentation des salaires,
tandis qu’une troisième secte exigeait
un emploi pour tous les travailleurs.
C’est devant les usines en grève que ces
revendications doivent être menées et
gagnées (si elles le peuvent). La
bourgeoisie vit de l’exploitation du
travail salarié.
Si elle pouvait mettre tous les salariés
au travail pour leur arracher de la
plus-value elle le ferait. Ces
sectes d’opportunistes croient qu’il
suffit d’exiger des hausses de salaire
pour les obtenir. De fait, ces sectes
gauchistes savent que ces revendications
électoralistes futiles ne visent qu’à
accaparer le vote de quelques
désespérés, pour s’enfuir ensuite avec
le poste de député. N’allez pas débattre
de tout cela avec ces sectaires, ils
refuseront de rendre compte de leur
trahison.
Toutes ces expériences ratées d’«entrisme» dans les organisations de masses et communautaires,
syndicales, d’ONG subventionnées et
d’associations populaires, doivent-elles
amener le militant marxiste
révolutionnaire à se retirer sur ses
terres pour construire sa ferme bio sur
une commune rurale, où à s’assembler en
micro cellule dans la cave de son condo
et fuir toute organisation, assemblée,
colloque, forum, association ou
manifestation gauchiste tel un esthète
monastique ?
Certainement pas! Partout où notre classe est niée,
diffamée, exploitée, rejetée, aliénée,
galvaudée, trompée, partout où elle
résiste farouchement, confusément,
chancelante, hésitante nous y serons.
Pas devant la parade –pas pour le
moment– mais parmi eux, en plein milieu,
écoutant, analysant et fournissant les
mots d’ordre unificateurs appropriés qui
font avancer le combat et fructifier la
conscience de classe. Menant le coup de
pierre et érigeant la barricade parmi
eux. Le sectarisme, maladie sénile du
gauchisme, c’est d’abandonner notre
classe aux charlatans de la misère et de
la guerre mortifère.
À SUIVRE…
VIENT DE PARAÎTRE
MANIFESTE DU PARTI OUVRIER
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