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Manifeste du Parti ouvrier (9)

Robert Bibeau

Mercredi 5 août 2014

Nous terminons la publication d’une série de neuf (9) articles portant sur quatre questions fondamentales pour la gauche internationale : Les premiers textes sont ici »» http://www.les7duquebec.com/author/robertbibeau/

Chapitre  4 : APPRENDRE DE LA RÉVOLUTION D’OCTOBRE (suite et fin)

La quatrième leçon – l’impossible contournement historique

La quatrième leçon historique concerne l’impossibilité absolue de contourner l’histoire et le nécessaire développement complet du mode et des rapports de production capitalistes avant d’aboutir un jour aux conditions matérielles objectives nécessaires à l’édification du mode de production et des rapports de production socialistes, menant au communisme. 

Le Parti bolchévique et les soviets se trouvèrent piégés à la direction d’une société semi-féodale, constituée d’une immense majorité de paysans analphabètes, agraires, ruraux, préindustriels et précapitalistes (25 millions de paysans pauvres). Des moujiks et des koulaks avides de devenir propriétaires terriens de leurs lopins et de vendre leurs surplus agricoles sur le marché «libre» formaient une masse paysanne absolument incapable de faire émerger un nouveau mode de production et de nouveaux rapports de production socialistes.

Il est aujourd’hui aisé de constater qu’aucune société ne peut faire l’économie d’une étape historique dans son développement économique, politique, idéologique et sociale. La société soviétique – l’État soviétique – l’économie soviétique devait d’abord développée les forces productives, les moyens de production et les rapports de production capitalistes jusqu’à leur pleine capacité et leur ultime épanouissement – jusqu’au moment de leur implosion impérialiste qu’ils ont aujourd’hui atteinte dans l’ancienne URSS, dans l’ancienne Russie, dans l’ancien «camp socialiste» comme dans le reste du monde entier. En 1917, la Russie agraire, arriérée, semi-féodale, soumise au  servage d’une portion de sa population, ne pouvait faire émerger une société hyper industrialisée, prolétarienne et socialiste. Le moujik et le koulak sont de mauvais vecteurs de la révolution collectiviste socialiste. Le socialisme n’est pas une société misérabiliste de partage de la pauvreté, mais une société de gestion et de répartition de l’abondance.

Cette illusion de la possible construction du socialisme dans un seul ou dans quelques pays arriérés passant de la semi-féodalité paysanne analphabète et agraire au socialisme, sans transition, en route vers le communisme, sans passer par le capitalisme bourgeois jusqu’à sa phase impérialiste décadente se reproduira plus tard, après 1917, dans la Chine de Mao, le Cuba de Castro, le Vietnam de Ho, la Corée du Nord de Kim, l’Albanie de Henver, La Yougoslavie de Tito, et même récemment dans le Népal maoïste. Partout, ce furent des échecs retentissants. Selon la théorie marxiste du matérialisme historique et dialectique, ces échecs ne s’expliquent pas par la trahison des clercs et de quelques «chefs» renégats bourgeois dissimulés dans la hiérarchie des partis communistes au pouvoir et dans les appareils monopolistes de l’État de ces différents pays. Le fait que la Révolution bolchévique se soit retrouvée isolée après la défaite des soulèvements hongrois, autrichien et allemand (1919-1923) fut de nature à isoler et à entraver la réalisation du socialisme en Russie, mais ces facteurs extérieur ne suffisent pas à expliquer la dégénérescence de la Révolution bolchévique. La cause la plus fondamentale de l’échec est interne à la société russe.

La Nouvelle économie Politique (NEP) de Lénine n’était rien d’autre que l’aveu de l’impossibilité de transformer une société arriérée, semi-féodale, à la paysannerie illettrée, majoritairement rurale et agraire, au prolétariat faible et inexpérimenté (7 millions d’individus environ), aux forces productives sous-développées, aux moyens de production déliquescents, aux rapports de production à peine sortie de la féodalité, en une société socialiste épanouie, en marche vers le communisme. Comme d’autres après eux, le Parti bolchevik et Staline se retrouvèrent à la tête d’un mode de production à compléter avant d’amorcer la construction du socialisme, un nouveau mode de production que nous avons encore peine à imaginer en ce 97e anniversaire de la Révolution prolétarienne d’Octobre. Nul n’aurait pu ériger le socialisme sur la terre des soviets paysans et agraires, pas plus que la révolution des artisans de la Commune de Paris ne pouvait aboutir ailleurs que l’a où elle s'est  terminée.

Le stalinisme ne fut pas la résultante de manigances d’agents tsaristes infiltrés dans le parti bolchevik, mais bien plutôt la réponse historique spécifique que forgea la société russe arriérée, sous-industrialisée, sous urbanisée, sous-développée, sous scolarisée,  pour passer rapidement, à pas de géant, de la semi-féodalité au capitalisme avancé, puis à l’impérialisme agressif – finalité historique du capitalisme monopoliste d’État, comme de toute autre forme de capitalisme. Il est anti marxiste de laisser penser que la classe des capitalistes d’État khrouchtchéviens se serait développée en secret dans les placards du Kremlin, et qu’ils auraient provoqué ou profité de la mort de Staline pour surgir tout à coup en classe bourgeoise hégémonique toute construite afin de s’emparer de la direction du Parti bolchevik toujours marxiste (sic). De toute façon, si cela avait été le cas, on est en droit de se demander comment il se fait que de simplement s’emparer de la direction du Bureau Politique aura suffi pour assurer aux comploteurs de la dernière heure l’hégémonie sur le parti, sur l’assemblée populaire et sur tout l’appareil d’État «socialiste» de «démocratie ouvrière». De quelle sorte de démocratie ouvrière parlait-on dans l’URSS stalinienne ?

Le stalinisme fut la forme particulière de capitalisme monopoliste d'État propre à la Russie et que l'État des soviets (trahis et soumis) imposa à tous les pays sous sa domination. Le capitalisme monopoliste d'État est un régime économique et politique transitoire et temporaire qui doit disparaitre dans sa forme originelle dès que le retard du mode de production et des rapports de production a été comblé. Le capitalisme monopoliste d'État stalinien constituait une entrave à l'appropriation privé des moyens de productions, d'échanges et de communication. Hors, le capitalisme, c’est par essence l'appropriation privé du capital pour sa valorisation, son accumulation et sa reproduction élargie. L'effondrement de l'Union Soviétique en 1989-1991 marque la fin de l'époque du capitalisme monopoliste d'État et le commencement de la période impérialiste classique de la Russie. La bourgeoisie soviétique qui devait se contenter de salaires élevés, de prébendes et d'avantages multiples, pu enfin accéder à la propriété privée des moyens de production, d'échanges et de communication. Les milliardaires surgirent de toute part et les ouvriers soviétiques connurent des années de misère sans nom. Le maoïsme fut une modalité quelque peu différente (légalement et politiquement) de capitalisme monopoliste d'État. Il ne fut pas nécessaire de détruire la structure de l'État impérialiste chinois pour permettre à la bourgeoisie bureaucratique chinoise de s'approprier privément – individuellement – les moyens de production et d'échanges en Chine. L'État maoïste reste en place sous la dictature de la bourgeoisie d'État et les milliardaires pullulent dans toute la Chine alors que des centaines de milliers d’ouvriers grèvent, manifestent et résistent à leur exploitation éhontée.

L’histoire de la lutte de classe lance ainsi des incursions, des essais, des sondes, que la classe révolutionnaire en devenir doit saisir, même si les conditions ne sont pas réunies, et dont la classe ouvrière doit tirer le savoir qui lui servira de leçons, demain – au moment approprié – pour remplir sa mission historique révolutionnaire (3).

Il est désormais évident que la société capitaliste-impérialiste grosse d’une révolution  mondiale devait laisser le temps à son accoucheur prolétarien international de se développer en son sein. Seul le prolétariat internationalisé, expérimenté, scolarisé, conscient, hégémonique, saura imaginer et faire émerger la nouvelle société socialiste des reins du capitalisme en phase impérialiste déchue, mais ayant atteint la pleine maturité de ses contradictions libératrices, comme la bourgeoisie à maturité a su faire émerger le capitalisme de la féodalité mûre et décadente, pleine de ses contradictions libératrices.

Aujourd’hui, le mode de production impérialiste, les rapports de production impérialiste sont totalement développés à leur pleine capacité et ils ont atteint leur limite absolue d’expansion. Le mode de production capitaliste ne peut plus contenir, générer et reproduire plus de forces productives et de moyens de production qu’il n’en contient déjà, plus de capital qu’il n’en contient déjà. C’est la raison pour laquelle le mode de production capitaliste déplace – délocalise – remplace – détruit ici et rebâti là-bas des moyens de production à la poursuite de nouvelles forces productives moins dispendieuses à exploiter et à exproprier pour accumuler. Mais ce faisant, le mode de production impérialiste abandonne – détruit – des forces productives dans les pays soi-disant «développés» pour en créer dans les pays sous-développés. Il a atteint le maximum des capacités de production qu’il peut engendrer. Si bien que lorsque ces déplacements – relocalisations – ne suffisent pas le système est amené à détruire de grandes quantités de moyens de production et de forces productives (ouvriers). Ce sont les guerres locales, régionales, mondiales qui se succèdent à répétition, sans interruption, depuis près d’un siècle.

C’est la raison pour laquelle nous affirmons qu’à l’occasion de la prochaine révolution prolétarienne toutes les conditions objectives économiques et politiques seront enfin réunies et développées à leur pleine maturité. Cependant, les conditions subjectives (politiques et idéologiques), à commencer par la maturité d’un Parti révolutionnaire ouvrier mondial et la conscience révolutionnaire de la classe ouvrière mondiale risquent, au vu de ce que nous pouvons observer aujourd’hui, d’être largement en de ça des nécessités de l’évolution-révolution, ce qui pourra expliquer que la prochaine ne soit pas encore la bonne. N’ayez crainte toutefois, l’histoire se reprendra. 

De la nécessité de renverser le syndicalisme capitaliste

La cinquième leçon de la révolution bolchevik tient à l’inadéquation de l’organisation syndicale pour organiser la lutte révolutionnaire de la classe ouvrière. Pire, l’organisation syndicale s’avère un frein et une force contre-révolutionnaire que le prolétariat devra renverser et détruire dans le cours même de son soulèvement au même titre que l’État bourgeois dont le syndicat est devenu une courroie de transmission, un organe de marchandage dans la vente normée et structurée de la force de travail des ouvriers. Les conseils ouvriers se sont avérés la nouvelle forme d’organisation apte à soutenir les visées révolutionnaires du mouvement ouvrier.

Un syndicat combatif, militant, gauchiste même, ne peut que devenir un organe supplétif de la classe des patrons dès qu’il s’installe dans ses bureaux, qu’il comptabilise ses cotisations, qu’il cristallise ses structures organisationnelles légales, enregistrées et acceptées par la machine d’État bourgeois. Dès qu’il peaufine ses règlements de fonctionnement dont dépend la bureaucratie syndicale pour sa survie. Les syndicats européens démonstratifs, agités, exubérants, infiltrés de pseudo communistes et de  collabos socialistes ont donné le change un certain temps et les gauchistes ont longtemps fait croire qu’on pouvait transformer un syndicat d’affaires, de collaboration de classe, en un syndicat de combat. C’est pourtant impossible. Un communiste qui devient permanent syndical de combat se transformera plus tard en syndicaliste d’affaires, négociateur bien payé de conventions collectives pour ouvriers sous-payés. Il ne peut en être autrement sous l’hégémonie de la classe capitaliste. Deux cents ans d’histoire du mouvement ouvrier mondial nous l’ont enseigné. C’est au moment de l’insurrection que la classe ouvrière réglera ses comptes avec les apparatchiks de l’industrie du syndicalisme. Il est aussi illusoire de croire à un syndicalisme de combat, à un syndicalisme de gauche, que de rêver à un capitalisme humaniste et progressiste, ou d’idéaliser un parlement bourgeois prolétarien.

Toute négociation d’une convention collective, toute lutte défensive sur le front économique de la lutte de classe, est par nature un compromis réformiste, une lutte de défensive de résistance. Du moment qu’un travailleur vend sa force de travail contre salaire, il consent qu’en vertu du droit bourgeois son surtravail lui soit confisqué et dès lors il accepte son sort d’esclave salarié spolié. Le fait que l’employé demande et négocie une augmentation de salaire pour son travail nécessaire, seul ou regroupé en syndicat, ne remet nullement en cause sa soumission à son patron qui l’achète contre rémunération. Il n’y a là rien de révolutionnaire. Spontanément, et sans l’idéologie et la théorie marxiste révolutionnaire, la lutte réformiste syndicale est le plus loin que puisse s’aventurer la lutte de la classe ouvrière «en soi». D’instinct, l’ouvrier reconnaît qu’il est plus avantageux de vendre collectivement sa force de travail en étant organisé en syndicat pour marchander plutôt que de se vendre à la criée, isolé. Si aussi peu que 10% des travailleurs américains sont aujourd’hui syndiqués, c’est que l’État policier étatsunien compense la désyndicalisation par des prestations sociales et des services sociaux pour une partie du manque à gagner des non-syndiqués. Sans compter qu’une partie des patrons étatsuniens ajustent les salaires en fonction de ce qui est consenti par les grandes entreprises syndiquées. Là-bas en Amérique, les syndicats ne se dissimulent pas, ils s’appellent des syndicats d’affaires et se maraudent mutuellement pour recueillir la «taxe-cotisation» syndicale en faisant valoir les services qu’ils vendent contre ces cotisations substantielles. Nombre de travailleurs ne voyant aucun intérêt à débourser cette taxe syndicale à l’industrie du syndicalisme, pour d’aussi piètres avantages, refusent de se syndiquer. En Amérique, certaines centrales syndicales ont mis sur pied des fonds de gestion de capitaux spéculatifs avec les cotisations de leurs membres et contribuent ainsi à ce que leurs amis spéculateurs et «banksters»  appellent la «relance» économique capitaliste à la bourse.

En 1917, Le Parti bolchevik, dirigeant de la lutte révolutionnaire de la classe ouvrière russe, encore faible, peu nombreuse et sans grande expérience de lutte syndicale, ne pouvait savoir ces choses à propos des syndicats professionnels et d’entreprises, ce que les camarades de l’opposition communiste de Gauche en Europe occidentale étaient en mesure de leur enseigner. Lisons ce qu’écrivait en 1920 le camarade Pannekoek de la gauche hollandaise : 

«De même que le parlementarisme exprime le pouvoir intellectuel des chefs sur les masses ouvrières, le mouvement syndical incarne leur do­mination matérielle. Les syndicats constituent, sous le capitalisme, les organisations naturelles pour l'unification du prolétariat, et à ce titre Marx, déjà de très bonne heure, a fait ressortir leur importance. Dans le capitalisme développé et plus encore à l'époque impérialiste, les syndi­cats sont devenus toujours davantage des associa­tions géantes, qui montrent la même tendance de développement qu'en d'autres temps, l'appareil d'État bourgeois lui-même. Dans ce dernier s'est formée une classe d'employés, une bureaucratie qui dispose de tous les moyens de gouvernement de l'organisation, l'argent, la presse, la nomina­tion des sous-ordres ; souvent les prérogatives des fonctionnaires s'étendent encore plus loin, de sor­te que, de serviteurs de la collectivité, ils devien­nent ses maîtres, et s'identifient eux-mêmes avec l'organisation. Les syndicats convergent aussi avec l'État et sa bureaucratie en ce que, malgré la dé­mocratie qui est censée y régner, les membres ne sont pas en situation de faire prévaloir leur volon­té contre le fonctionnarisme ; sur l'appareil artis­tement édifié des règlements et des statuts toute révolte se brise avant qu'elle puisse ébranler les hautes sphères.

«C'est seulement par une longue persévérance à toute épreuve qu'une organisation parvient quel­quefois, après des années, à un succès relatif qui ressort généralement à un changement de person­nes. Dans ces dernières années, avant la guerre et après, on en est arrivé ainsi - en Angleterre, en Allemagne, en Amérique - à des révoltes de mili­tants faisant la grève pour leur propre compte, contre la volonté des chefs ou les résolutions de l'association elle-même. Que cela puisse arriver comme quelque chose de naturel, et être envisagé comme tel, manifeste que l'organisation, loin d'être la collectivité des membres, se présente comme un être qui lui est en quelque sorte étran­ger. Les ouvriers ne sont pas souverains dans leur association, mais elle les domine comme une force extérieure contre laquelle ils peuvent se ré­volter, bien que cette force soit cependant sortie d'eux-mêmes. Encore un point de commun avec l'État. Puis, lorsque la révolte s'apaise, l'ancienne direction se réinstalle et sait se maintenir malgré la haine et l'amertume impuissante dans les mas­ses, parce qu'elle s'appuie sur l'indifférence et le manque de clairvoyance, de volonté homogène et persévérante de ces masses et parce qu'elle re­pose sur la nécessité interne du syndicat comme seul moyen pour les ouvriers de trouver, dans l'unification, des forces contre le capital.

«En luttant contre le capital, contre les ten­dances du capital absolutistes et génératrices de misère, en limitant ces tendances et en rendant de ce fait l'existence possible à la classe ouvrière, le mouvement syndical s'est mis à remplir un rôle dans le capitalisme et il est devenu lui-même de cette manière un membre de la société capita­liste. Mais du moment où la révolution commence, en tant que le prolétariat, de membre de la société capitaliste, se mue en son destructeur, il rencon­tre devant lui le syndicat comme un obstacle.

«Ce que Marx et Lénine ont fait ressortir à propos de l'État : à savoir que son organisation, malgré ce qu'elle contient de démocratie formel­le, le rend impropre à servir d'instrument pour la révolution prolétarienne, vaut donc aussi pour les organisations syndicales. Leur puissance contre­-révolutionnaire ne peut être ni anéantie ni atté­nuée par un changement de personnes, par le rem­placement des chefs réactionnaires par des hom­mes de gauche ou des révolutionnaires.

«C'est la forme organisatoire elle-même qui rend les masses à peu près impuissantes et qui les empêche de faire du syndicat l'instrument de leur volonté. La révolution ne peut vaincre qu'en dé­truisant cet organisme, en bouleversant de fond en comble cette forme organisatoire afin qu'il en sorte quelque chose de tout à fait autre.» (1) Ce texte aurait pu être écrit par un communiste contemporain militant dans un syndicat d’affaires ou dans un syndicat soi-disant de combat.

Mais alors, que font les  communistes dans cette galère «syndicaliste réformiste» ? 

Nous communistes venons engranger de l’expérience de lutte par la lutte et à travers les luttes grévistes (syndiquées et non syndiquées). Nous venons clarifier les enjeux et stigmatisé les compromis, identifier les parties et leurs intérêts respectifs et faire comprendre à notre classe que ce jeu des négociations-marchandages de leurs conditions de survie n’aura jamais de cesse et que globalement la partie est au bout du compte perdue d’avance.

Les lois de l’économie capitaliste forceront les patrons à céder de moins en moins de salaires et à réclamer de plus en plus de surtravail non payé. Pire, tous les efforts réclamés à la classe ouvrière pour augmenter la productivité et rétablir la profitabilité de l’entreprise seront vains, car le système économique capitaliste ne peut se perpétuer, sinon, en détruisant d’immenses moyens de production et en éliminant immensément de forces productives (les guerres). Le syndicat d’affaires et le syndicat  soi-disant de combat, pour sa survie en tant qu’organisme parasitaire, ne peut que contribuer à cette rationalisation de l’emploi, du profit, des forces productives et de la productivité.

Nous allons parmi les salariés, syndiqués et non syndiqués, associés ou non en Front commun syndical (cette question n’est pas cruciale, l’unité ouvrière naîtra dans la lutte et par la lutte et non pas des résolutions des assemblées de bureaucrates), expliquer à notre classe qu’il lui faudra un jour se résigner à dépasser les luttes de classe «en soi», pour sauver son pouvoir d’achat et pour survivre, et elle devra entreprendre la lutte de classe «pour soi», pour la conquête du pouvoir d’État, l’expropriation sans compensation des moyens de production, d’échanges et de communication, l’établissement de la dictature du prolétariat via le pouvoir des soviets et pour l’édification du mode de production socialiste en marche vers le communisme. Au moment de l’insurrection, la question de la direction des syndicats d’affaires ou de combat (sic) et de collaboration de classe se réglera d’emblée. Nous communistes sommes la mémoire des luttes et l’état-major au service de notre classe et nous venons soutenir la lutte gréviste de notre classe.

La révolution est la seule voie vers l’émancipation prolétarienne

La sixième leçon, irréfutable, qui découle de l’expérience d’Octobre 1917, est que pour s’émanciper de l’esclavage salarié, le prolétariat international ne possède qu’une seule solution, la révolution. Il n’y a pas de raccourcis possibles, pas plus qu’il n’existe de voies alternatives ou de compromis. Toute autre option est une fausse solution. Non seulement une autre méthode tactique finirait par affaiblir la lutte de la classe ouvrière, mais elle dévaloriserait aussi son contenu politique en mettant de l’avant des objectifs qui ne sont pas les siens, soit comme solution à des problèmes secondaires ou pire, comme objectif stratégique final filouté.

L’histoire du mouvement ouvrier nous a démontré trop souvent comment l’abandon de la voie révolutionnaire au profit d’alliances avec des sections de la bourgeoisie nationale réformiste a mené à des défaites sanglantes et tragiques qui ont pesé lourdement sur les tentatives suivantes pour ranimer la lutte de classe.

Le mouvement prolétaire, avec la présence nécessaire d’un parti révolutionnaire, doit avancer de concert vers l’objectif révolutionnaire. Tout autre choix ne sert qu’à préserver l’ordre existant en menant de défaite politico-économique en défaite économico-politique. Cela présuppose que le point de départ est la lutte contre sa propre bourgeoisie nationale, particulièrement si elle a atteint le statut de puissance impérialiste dominatrice. La lutte ouvrière doit s’acharner contre toutes manifestations de l’impérialisme, à l’échelle nationale et internationale. Cela veut aussi dire le rejet de toutes les formes de nationalisme économique et/ou politique, qu’elles soient laïques, religieuses ou intégristes (qui se présentent parfois sous les couleurs d’un pseudo anti-impérialisme invariablement opportuniste et toujours réformiste) et donc de considérer la révolution prolétarienne comme le seul instrument de lutte contre le capitalisme à son stade impérialiste de dégénérescence.

Alors qu’au temps de Lénine, les contradictions du mode de production et d’échanges des marchandises avaient pour la première fois créé les conditions d’une crise internationale sévère qui préfaça la Première Guerre mondiale, le capitalisme à son stade impérialiste avancé s’est développé de telle façon que l’exacerbation de ses contradictions a donné naissance ces derniers temps à des sociétés impérialistes véritablement monstrueuses où, malgré une plus grande capacité de production, un régime politique policier d’appauvrissement progressif des travailleurs, d’instabilité et d’insécurité permanente s’est imposé. 

Le «Front uni antifasciste» est un mythe. En ces heures où le prolétariat est si faible que l’on oublie son existence, la bourgeoisie n’a nullement besoin de faire renaître l’hydre fasciste pour briser les capacités de résistance de la classe ouvrière et pour l’embrigader pour la guerre. Le fascisme classique n’est pas à l’ordre du jour. Aujourd’hui, c’est l’État policier qui doit endiguer la classe et l’enrégimenter en faveur de la guerre «patriotique» pour la défense de la patrie menacée. Menacée par l’effondrement du capitalisme ont-ils oubliés de dire aux prolétaires en colère. En lieu et place les capitalistes, et leurs sous-fifres médiatiques, terrorisent les ouvriers et leurs foyers avec les terroristes dont ils sont eux-mêmes les commanditaires.

Confronté à des taux de profits en déclin, le capitalisme international a accru ses attaques contre les salariés et contre la force de travail en général. Il l’a fait et continue à le faire sur tous les fronts, autant contre les salaires que contre les mesures sociales (les programmes sociaux assurant la reproduction de la force de travail). Le résultat en est un pouvoir d’achat diminué pour les ouvriers, des services de santé, d’éducation et de loisir réduits, le prolongement du temps de travail et la réduction des allocations de retraite (jusqu’à leur disparition éventuelle). Les plus âgés travaillent plus longtemps, les immigrants sont surexploités, tandis que les plus jeunes ont de la difficulté à trouver un emploi. Les emplois sont de plus en plus précaires, intermittents et mal payés : six mois de travail, six mois de chômage, avec toutes les conséquences sociales que cela entraîne, alors que la bourgeoisie raconte aux uns et aux autres qu’ils sont eux-mêmes la source de leurs peines, eux qui pourtant ne décident de rien et ne contrôlent rien.

Il n’y a pas qu’au Bangladesh et au Bénin que cela se passe, des cathédrales historiques du capitalisme comme l’Europe, le Canada et les États-Unis d’Amérique sont touchés. Dans les pays de la «périphérie» – mais pas seulement dans ces cas extrêmes – le pillage des ressources naturelles continue et s’intensifie tout comme l’expropriation forcée de millions de paysans pauvres, pour la plupart destinés à une vie misérable et qui luttent pour la simple survie, alors que les «chanceux» qui trouvent un emploi dans les usines des pays «émergents – ces nouvelles puissances impérialistes – que d’aucuns qualifient de «miracles économiques» revivent le drame des conditions de travail précapitalistes que les ouvriers d’Occident ont vécu au dix-neuvième siècle. Cela est aussi la base de la compétition qui fait rage au sein de la force de travail mondial, entraînant des réductions de salaire et pas uniquement pour les moins qualifiés. De plus, la planète entière est menacée par le cauchemar des catastrophes écologiques, un résultat direct du mode de production dont la seule raison d’être est la valorisation de l’argent pour la reproduction élargie du capital via la course à la plus-value et au profit maximal.

Dans le domaine strictement économique, le capital s’engage dans des manœuvres spéculatives de plus en plus risquées et illicites dans sa quête agonisante de surprofits, ce qu’il doit continuellement faire en tentant de survivre à ses propres contradictions insolubles. Et lorsque la bulle spéculative éclate, éliminant des milliards de dollars de capital fictif en quelques heures, il tente d’en faire payer les frais aux petits épargnants, aux salariés (régimes de retraite pillés, salaire en baisse, inflation en hausse) et à certaines sections de la bourgeoisie non monopoliste (ce qui crée des contradictions dans leurs rangs), tel un arnaqueur vendant ses produits financiers pour des investissements sécuritaires à haut rendement, alors qu’il ne s’agit que de la pire des camelotes déficitaires.

La spéculation et le parasitisme sont les caractéristiques de l’impérialisme étouffant et sclérosant. Plus ces contradictions s’exacerbent, plus il devient agressif. Il n’y a pas un seul marché, du commercial au financier, du monétaire au commerce des matières premières, qui ne soit pas troublé par la concurrence monopolistique violente entre grands monopoles multinationaux qui, très souvent, se transforme en actes de guerre et prend la forme du pillage armé. C’est l’unique motif des multiples guerres locales et régionales que l’on cherche à nous présenter comme des guerres tribales, interreligieuses, claniques, alors qu’elles sont fomentées par les alliances impérialistes concurrentes en se servant de la chair à canon des populations du tiers-monde (ce qui inclut la Palestine et Israël).

Le parasitisme économique, la spéculation, les crises économiques et financières, les récessions et les dépressions, plus d’exploitation et moins de sécurité pour ceux qui travaillent et l’anxiété pour ceux qui cherchent du travail, un état de guerre permanent et la création de couches toujours plus importantes de salariés précaires : voilà le présent et l’avenir qu’offre le capitalisme corporatif. Depuis Octobre 1917, les contradictions du capital se sont développées et aujourd’hui ces contradictions se sont énormément amplifiées et sont à maturités. C’est pourquoi l’expérience de la Révolution d’Octobre – malgré sa défaite subséquente – demeure le modèle dont devra s’inspirer la révolution prolétarienne moderne. 

(1)   http://www.marxists.org/francais/pannekoek/index.htm

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À LIRE EN COMPLÉMENT : http://www.publibook.com/librairie/livre.php?isbn=9782924312520

 

 

   

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