Palestine
La déportation : une arme coloniale
sioniste
Rim al-Khatib
Mohammad
Allan
Mardi 18 août 2015
Alors que Mohammad Allan, détenu
administratif depuis plus d’un an,
poursuit la grève de la faim entamée
il y a deux deux mois, les autorités
de l’occupation sioniste ont de plus
en plus de mal à gérer son dossier :
la division entre « politiques » et
« sécuritaires », entre libéraux et
fascistes, au sein de l’entité
coloniale est de nouveau sur le
tapis. Les nombreuses manifestations
de solidarité avec le prisonnier, en
Palestine et notamment près de la
prison de Ascalan organisées par les
Palestiniens de 48, suscitent la
panique dans la rue « israélienne »,
panique largement reprise par les
journaux sionistes. Mohammad Allan
est devenu le symbole de la lutte
des prisonniers palestiniens en
lutte pour leur liberté.
Les prisons sionistes sont en
ébullition. Des dizaines de
prisonniers palestiniens ont suivi
le mouvement de grève, en solidarité
avec Mohammad Allan, et Shirine
Issawi vient de le rejoindre. Les
conseils représentatifs des
prisonniers, de plusieurs mouvements
de la résistance, discutent les
moyens de développer la lutte. Les
autorités de l’occupation savent
d’ores et déjà qu’ils doivent le
libérer, car son martyre, qui peut
intervenir à tout moment, risque
d’embraser non seulement les
prisons, mais toute la Palestine, et
notamment dans la partie occupée en
48.
La dernière proposition de
l’appareil colonial est de déporter
Mohammad Allan, s’il arrêtait son
mouvement de grève. « Déporter » !
Le mot est lâché. Le rêve des
sionistes, depuis qu’ils ont envahi
le pays, au début du siècle dernier.
Rien que depuis l’Intifada al-Aqsa,
en 2000, l’occupation sioniste a
déporté des centaines de
Palestiniens : les valeureux
combattants de l’Eglise de la
Nativité à Bethlehem (des Brigades
al-Aqsa, du mouvemen Fateh) ont été
déportés vers la bande de Gaza, des
pays arabes ou étrangers, en
application d’un accord dont
personne n’ose dévoiler les termes.
Alors que la presse parlait de 10
ans de déportation, la date prévue
pour leur retour est largement
dépassée, certains d’entre eux sont
morts en exil, d’autres attendent la
rencontre de leurs familles et leur
retour au pays. Mais ni l’Autorité
palestinienne, ni les sionistes, ni
le mouvement Fateh, n’ouvrent leur
dossier.
Déportés également, ce sont des
prisonniers qui furent libérés suite
à l’accord d’échange en octobre 2011
contre le soldat Shalit. Si certains
furent déportés dans la bande de
Gaza, d’autres le furent vers la
Turquie, le Qatar et la Syrie
principalement. Déportés également,
des prisonniers qui ont mené la
grève de la faim et qui ont
« accepté » leur déportation
en échange de leur libération, comme
Hana’ Shalabi. Déportés également,
des citoyens palestiniens d’al-Quds,
qui luttent pour rester dans leur
ville, mais la fureur de la
colonisation et du nettoyage
ethnique bat son plein, et dans
l’ordre sioniste, il n’y a pas de
place dans al-Quds pour les députés
de la ville, membres du Hamas, alors
qu’ils y sont nés et appartiennent à
des familles enracinés dans la
ville, comme il n’y pas de place
pour les Maqdissis, ciblés par les
lois coloniales faites sur mesure
pour leur déportation.
La déportation ou l’expulsion des
Palestiniens hors de Palestine est
le but ultime des sionistes. Cela
n’a pas changé depuis le premier
congrès sioniste à la fin du XIXème
siècle. Après l’expulsion massive
exécutée en 1947-48 de plus de
700.000 Palestiniens, lors de la
création de l’entité coloniale en
1948, expulsion facilitée par les
dizaines de massacres commis dans
les villes et les villages de
Palestine, les sionistes ont
poursuivi leur objectif : vider la
Palestine de ses habitants
autochtones et s’installer à leur
place. Les autorités de l’occupation
ont poursuivi la
déportation-expulsion des
Palestiniens depuis cette date, à
petites doses, pour ne pas susciter
des remous dans le monde et
l’opinion internationale. Ils ont
failli commettre une expulsion
massive en 1956, lors de la guerre
tripartite, en exécutant le massacre
de Kfar Qassem, en octobre,
assassinant de sang-froid des
dizaines de paysans palestiniens,
des familles entières qui
retournaient à leur village après
une journée de travail dans les
champs. Ils espéraient que le
massacre de Kfar Qassem susciterait
un départ « volontaire » des
Palestiniens de la région du
« Triangle », au centre du pays, une
des trois régions encore peuplée de
Palestiniens. Mais les Palestiniens
ont compris et affirment jusqu’à
présent : être massacré plutôt que
d’être expulsé et vivre en exil,
loin de
sa terre et de son peuple.
C’est également le mot d’ordre des
Palestiniens dans leur ensemble. Les
massacres se sont poursuivis, parce
que les Palestiniens résistent et
veulent continuer à vivre dans leur
pays : les multiples massacres
commis par les sionistes dans la
bande de Gaza au cours des dernières
années, les tueries sauvages
commises en Cisjordanie, les
massacres commis dans les camps de
réfugiés au Liban (camp de Bourj al-Shamali
en 1982), et leur destruction (camp
de Nabatyeh) relèvent d’un génocide
perpétré sur la longue durée, plutôt
qu’un « sociocide » cher aux
chercheurs et académiciens
occidentaux et « israéliens », qui
réservent le terme de « génocide »
aux juifs, et aux juifs seulement.
Pour l’appareil colonial sioniste et
les colons qui ont envahi la
Palestine, l’expulsion-déportation
des Palestiniens ferait l’affaire,
mais ces derniers résistent. Non
seulement ils ont résisté mais ils
ont poursuivi leur lutte à partir
des camps de réfugiés : des
massacres organisés et ciblés les
rejetteraient loin du pays et
aboliraient l’objectif du retour
qu’ils se sont fixés.
Aujourd’hui, croyant pouvoir stopper
la lutte héroïque de Mohammad Allan,
c’est à nouveau sa déportation
qu’ils proposent. Mais apparemment,
ils ne savent pas à qui ils ont
affaire. Mohammad Allan ne craint
pas le martyre. Sa famille, son
mouvement (Mouvement du Jihad
islamique en Palestine) et son
peuple ont lancé le défi : la
liberté ou le martyre, c’est la
devise de la lutte palestinienne.
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