MADANIYA
Nucléaire-Monde arabe (3/4).
Doter l’Islam sunnite de l’arme atomique
René Naba
Jeudi 15 octobre 2020
De longue date,
l’Arabie saoudite a caressé le rêve
d’accéder au rang de «puissance du
seuil», à l’instar de son grand rival,
la République Islamique iranienne,
finançant clandestinement le programme
nucléaire pakistanais avec pour objectif
sous-jacent de doter l’Islam sunnite de
l’arme atomique, face à l’Inde
majoritairement hindouiste et à l’Iran
chiite. Deux autres
puissances limitrophes font planer des
menaces sur «la Terre de la prophétie»:
-
l’URSS, que le «Gardien des Lieux
saints de l’Islam», combattra
vigoureusement aux quatre coins de
la planète, de l’Afghanistan au
Nicaragua, en passant par l’Afrique
via le Safari club et le djihadisme
islamiste.
-
Israël, mais cette menace là valait
argument propagatoire pour la
consommation intérieure en quelque
sorte, en raison du fait que
l’Arabie saoudite était au sein du
monde arabo musulman l’allié
privilégié des États-Unis, le
protecteur de l’État hébreu, d’une
part, et que la dynastie wahhabite,
d’autre part, avait dès la décennie
1980 – c’est à dire dès l’avènement
de la République Islamique
iranienne- amorcé un processus
souterrain de rapprochement avec
Israël, un état considéré alors
comme l’ennemi officiel des Arabes
et l’usurpateur de la Palestine.
Pour aller plus
loin sur ce sujet, cf à ce propos
Mais le fait que
les deux puissances atomiques du Monde
musulman soient, le premier, le
Pakistan, un état sunnite non arabe, le
second, pire, l’Iran, un état non arabe
et non sunnite, faisait ombrage au
leadership spirituel du chef de file du
Monde musulman.
Il sera vécu comme
une humiliation à l’orgueil national
saoudien, d’autant plus vive que le
Monde arabe constitue le cœur historique
de l’Islam et que la langue arabe, la
langue de prière et de propagation de
l’Islam.
Envisagé par le
Prince Sultan Ben Abdel Aziz, inamovible
ministre de la défense pendant près d’un
demi siècle, en poste de 1963 à 2011, et
père du prince Bandar Ben Sultan,
l’ancien commandant en chef occulte de
la Légion Islamique des groupements
terroristes, ce rêve sera poursuivi par
le Roi Abdallah qui édifiera une «cité
atomique» portant son nom, ainsi que son
successeur le Roi Salmane.
Le Roi Abdallah a
d’ailleurs passé une grande partie de
ces quinze dernières années à envisager
sérieusement la construction de
réacteurs nucléaires. En 2011, il a
annoncé un ambitieux projet concernant
la construction de seize réacteurs qui
génèreraient 18 gigawatts d’électricité
en vingt ans, plus qu’un quart des
besoins prévisionnels en énergie du
royaume.
Le relai du Roi
Salmane
Le double véto
essuyé par l’Arabie saoudite tant de la
part des États Unis que d’Israël n’a pas
découragé son successeur Salmane de
reprendre à son compte le projet
nucléaire saoudien, fort, soutenait-il,
de son partenariat avec Donald Trump,
artisan du «Muslim Ban», et surtout de
la complicité de son fils, le prince
héritier Mohamad Ben Salmane avec le
gendre présidentiel américain Jared
Kushner, maitre d’œuvre de la
«transaction du siècle», le bradage de
la Palestine avec la caution des
pétromonarchies du Golfe.
Mais le
comportement compulsif de ce prince
fougueux (affaire Jamal Khashoggi) a
sérieusement compliqué la tâche du
royaume et dressé des obstacles
complémentaires sur son chemin,
réduisant considérablement la
possibilité d’obtenir le feu vert
américain.
Le 19 Février 2019,
soit cinq mois après l’assassinat du
journaliste saoudien au consulat
saoudien à Istanbul et quatre mois après
la reconquête de la chambre des
représentants par les démocrates, le
«comité de surveillance et de réforme de
la chambre des représentants des
États-Unis» alertait l’opinion sur les
manœuvres de coulisses de
l’administration Trump en vue d’opérer
un transfert de la technologie nucléaire
sensible américaine au Royaume saoudien.
Le rapport se fondait sur des
témoignages confidentiels parvenus au
comité, faisant office en la matière de
lanceurs d’alerte.
Le Plan Marshall
nucléaire pour le Moyen Orient
Selon ce rapport,
l’administration républicaine a
participé à plusieurs activités secrètes
notamment la constitution d’un groupe de
conseillers occultes autour de Donald
Trump, constitué principalement de
généraux à la retraite, en vue de mettre
sur pied un consortium de firmes
américaines chargé de l’édification de
centrales nucléaires en Arabie saoudite.
Derek Harvey,
responsable du Moyen Orient et de
l’Afrique du Nord au sein du Conseil
National de Sécurité (Février-Juillet
2017), précise que Donald Trump a donné
son feu vert au lancement d’un plan
Marshall nucléaire» pour le Moyen
Orient, «dans la première semaine de son
mandat».
Ce plan, mis au point par le général
Michael Flynn, éphémère président du
Conseil National de Sécurité, devait
déboucher sur l’installation d’une
dizaine de centres IP3 au Moyen orient,
c’est à dire des centres de productions
d’énergie nucléaire de type IP3, dont
l’un est en cours d’installation en
Arabie saoudite.
A l’intention du locuteur arabophone,
pour aller plus loin sur ce sujet, cf ce
lien
« Les interactions
de l’administration Trump avec l’Arabie
saoudite ont été faites dans le secret,
ce qui soulève d’importantes questions
sur la nature de la relation », indique
le rapport, citant les relations
étroites du gendre de Donald Trump,
Jared Kushner avec la famille royale
saoudienne, ainsi que la réponse de
Trump à l’assassinat du journaliste
saoudien Jamal Khashoggi.
Le rapport
parlementaire américain met l’accent en
outre sur la nécessité pour l’Arabie
saoudite se se conformer à la convention
123 américaine concernant la non
prolifération nucléaire. Mais Derek
Harvey a passé outre aux objections de
la commission parlementaire et a
transmis de la technologie nucléaire à
l’Arabie saoudite. A ce jour, un seul
centre de ce type est en phase
d’exécution en Arabie saoudite.
Donald Trump s’est
retiré en 2017 de l’accord sur le
nucléaire avec l’Iran, qui empêchait le
rival régional de l’Arabie saoudite de
mettre au point une arme nucléaire,
affirmant qu’il allait à l’encontre des
intérêts des États-Unis.
Depuis lors,
l’Agence internationale de l’énergie
atomique, qui surveille les programmes
nucléaires de l’Iran, a régulièrement
signalé que la République Islamique ne
travaillait pas sur une arme nucléaire.
Mais Trump et les hauts responsables de
son gouvernement rejetteront
régulièrement les rapports des services
de renseignement américains selon
lesquels l’Iran ne travaille pas sur une
arme nucléaire.
En réponse à
l’assassinat de Jamal Kashoogi,Trump
s’est montré disposé à accepter la
version donnée par l’Arabie saoudite,
malgré une évaluation de « grande
confiance » de la CIA selon laquelle le
prince héritier Mohammed ben Salman a
commandité l’assassinat.
L’empressement de
Donald Trump à parvenir à un accord avec
Riyad, son dangereux mépris envers des
décennies de prudence en matière de
nucléaire pourrait avoir des
conséquences désastreuses.
Un marché
nucléaire de 14 milliards de dollars.
Fin janvier 2019,
l’Arabie saoudite se félicitait
publiquement d’avoir reçu des offres de
cinq pays pour la construction de
réacteurs nucléaires dans la région
riveraine du Golfe d’une valeur de 14
milliards de dollars.
Effet d’annonce
orchestré par la garde rapprochée du
prince héritier saoudien, en pleine
quarantaine diplomatique internationale
et soucieux de valoriser son action
auprès de son opinion intérieure, les
digitalistes des réseaux sociaux
saoudiens célébraient alors, au
diapason, l’émergence d’une «Grande
Arabie saoudite», «Puissance nucléaire».
Le 5 novembre 2018,
soit un mois après l’assassinat de Jamal
Khashoggi, MBS inaugurait 7 projets
qualifiés par les médias saoudiens de
«stratégiques», notamment la pose de la
première pierre du «Centre de Recherches
Nucléaires Saoudien». Une opération de
relations publiques destinée à restaurer
son image ternie auprès de l’opinion
interne saoudienne.
Le précédent
d’Abou Dhabi
Les centres de
recherches sont nombreux à travers le
monde, notamment au sein des
universités. Leur création ne nécessite
pas l’accord préalable des grandes
puissances nucléaires. Six pays arabes
disposent de neuf centres de recherches
de l’énergie atomique. Neuf sur un total
de 168 à travers le Monde.
Les Émirats arabes
Unis ont ainsi ratifié, en 2009, la
convention 123 américaine concernant la
non prolifération nucléaire et ont été
autorisés à édifier un centre dans la
périphérie d’Abou Dhabi. Ce centre sera
opérationnel en 2019, mais son
fonctionnement sera soumis à un contrôle
rigoureux: l’Uranium sera fourni par les
Américains qui en superviseront l’usage.
Les Saoudiens
rejettent depuis 2011 cette tutelle et
insistent pour être exonérés de la
clause de non prolifération se ménageant
ainsi la possibilité de faire évoluer la
recherche nucléaire saoudienne vers une
application militaire.
Israël et les
États-Unis hostiles à l’accession des
pays arabes à la technologie nucléaire
En Mars 2018, Mike
Pompeo, secrétaire d’état, avait essuyé
de vives critiques de la part du
sénateur républicain Rand Paul, lors de
son audition devant la commission des
Affaires étrangères du sénat américain,
à l’occasion du débat sur la décision de
Donald Trump de se retirer
unilatéralement de l’accord
international sur le nucléaire iranien.
Rand Paul à Mike
Pompeo: «Comment l’administration Trump
compte-t-elle concilier des attitudes
aussi contradictoires en exigeant une
stricte application des conditions de
non prolifération de la part de l’Iran
et son laxisme à l’égard d’autres pays
du Moyen orient ?»
Réponse Mike
Pompeo: «Nous avons demandé aux
Saoudiens exactement les mêmes choses
que nous avons demandé aux Iraniens. Les
Saoudiens nous ont assuré qu’ils
cherchaient à développer un programme
nucléaire à usage pacifique. Nous leur
avons demandé d’observer des critères
conformes à la règle d’or instaurée par
la convention 123 américaine concernant
la non prolifération».
Les propos de Mike
Pompeo donnent à penser que les États
Unis, et derrière eux Israël, ont mis
leur veto aux Saoudiens. Israël et les
États Unis sont, en effet, soucieux
qu’aucun pays arabe, quelque soit son
degré de partenariat avec les États
Unis, ne dispose de la capacité
d’enrichissement de l’uranium.
Toujours à cette
même date de Mars 2018, en prélude à son
voyage aux États Unis, dans une
opération de relations publiques
destinée à lui gagner les faveurs de
l’opinion occidentale, MBS avait assuré
à la chaine CBS que l’Arabie saoudite ne
cherchait pas à se doter de la bombe
atomique. « »L’Arabie saoudite ne
souhaite pas acquérir de bombe atomique,
mais il est évident que si l’Iran
développait une bombe atomique, nous
ferions de même, et dans les meilleurs
délais », avait déclaré le prince
héritier saoudien en 2018, rejetant la
responsabilité de l’escalade sur l’Iran.
Le lobby pro
nucléaire saoudien aux Etats Unis: les
Mic Mac de Pillsbury Winthrop Shaw
Pittman et de Jeremy Meyerfield and co.
Les propos du
prince héritier saoudien ont coïncide
avec la décision de Riyad de s’offrir
les services de trois importants groupes
de pression américains en vue du
lobbying en faveur du nucléaire
saoudien.
A-
Pillsbury-Whinthrop-Shaw-Pittam
Sous Abdallah, la
«Cité Atomique Roi Abdallah», pour
surmonter la vive opposition du congrès
américain au programme nucléaire
saoudien avait conclu, en juillet 2011,
avec Pillsbury-Winthrop-Shaw-Pittman, un
contrat en vue de conseiller le
gouvernement saoudien dans ses démarches
visant à obtenir le feu vert de
Washington au lancement du programme
nucléaire saoudien.
Le coût de la
prestation s’établissait comme suit:
-
Grands conseillers (senior): 875
dollars par heure de travail.
-
Moyens conseillers (junior): 775
dollars
sur une base de 10
heures de travail par jour avec un
minimum garanti de 2.250 dollar par
jour, soit trois heures de travail par
jour en moyenne.
L’accord a été
conclu pour une durée de trois ans.
Mais, curieusement, la firme ne s’est
livrée à aucune activité de lobbying
dans ce domaine en faveur de la «Cité
atomique Roi Abdallah».
Autre grosse
surprise qui accentue le mystère,
Pillsbury and co, dans une démarche non
moins curieuse, a avisé le ministère
américain de la justice que son contrat
avec les Saoudiens avait pris fin, le 23
Janvier 2015, le jour de l’intronisation
du Roi Salmane. S’est posé alors la
question de l’identité des bénéficiaires
de ce contrat de lobbying et son usage.
Nouveau
rebondissement: A la veille de la visite
de MBS aux Etats Unis, au printemps
2018, le ministère saoudien de
l’industrie et des minerais, prenant la
relève de «La Cité Atomique Roi
Abdallah» concluait un contrat avec 3
groupes de pression pour aider Riyad à
arracher l’agrément de Washington à un
programme nucléaire à mettre en oeuvre à
la «Cité Atomique». Riyad a sans doute
jugé plus discret de mettre en avant le
ministère de l’industrie et des
mineraios et non la «Cité Atomique Roi
Abdallah» dont l’un des termes sent le
souffre.
Tout aussi
curieusement, Pillsbury and co a été
sollicité à nouveau dans cette
transaction. L’accord conclu par mel le
18 février 2018 a été confirmé par une
convention officielle, le 22 janvier
2019, à l’occasion de 4eme anniversaire
de l’intronisation du Roi Salmane, 3
mois après l’équarrissage de Jamal
Khashoggi.
Pillsbury est ainsi
devenu agent officiel du ministère
saoudien de l’industrie et son
démarcheur officiel auprès de
l’administration américaine.
B- Jeremy
Meyerfield:
Signataire pour le
compte du consortium Pillsbury de
l’accord de lobbying pro saoudien,
Jeremy Meyerfield est un homme
d’influence et de réseaux, aux multiples
facettes.
Délégué de la
commission américaine pour la
réglementation de l’énergie atomique
(1997-2008), ancien conseiller juridique
du Sénat américain, Jeremy Meyerfield
est l’homme qui a supervisé l’opération
fusion acquisition entre Westinghouse,
General Electric et Brookfield Business,
assurant au nouveau groupe la gestion de
450 réacteurs nucléaires à travers le
monde. Il bénéficiait, de surcroît, du
soutien de Donald Trump pour la
fourniture à l’Arabie saoudite de
réacteurs nucléaires.
Tâche sombre sur
son tableau toutefois, Jeremy Meyerfield
avait été accusé, deux mois avant sa
retraite, d’avoir abusé de sa fonction
en octroyant des facilités à trois
entreprises, en contrepartie d’un emploi
auprès de ces sociétés: Shaw Group,
Westinghouse, General Electric.
Pillsbury deviendra
par la suite le pivot d’une structure de
Shaw Group, qui prendra le nom de
Pillsbury-Winthrop-Shaw-Pittman LLP
Le consortium
conclura un accord avec le prince
héritier saoudien Mohamad Ben Salmane
via David Colingten, ancien secrétaire
de l’ARAMCO, le géant pétrolier
saoudien, poste qu’il occupa de 2010 à
2018, avant de prendre sa retraite et
d’ouvrir un cabinet d’avocat au Texas.
Il percevra une prestation de 450.000
dollars pour prix de son intervention,
dont l’objectif final est la l’adhésion
saoudienne à la convention 123
américaine, ultime étape avant libre
disposition d’un réacteur nucléaire çà
usage commercial. Le contrat sera signé
par le ministère saoudien de l’énergie
et la cité atomique Roi Abdallah.
Tour cet édifice
onéreux et structuré de même que le
processus mis en œuvre pour accéder à la
possibilité de lancer un programme
nucléaire ambitieux fiable s’est
effondré avec l’assassinat de Jamal
Khashoggi. Toutefois, le sénateur Tim
Kaine, (démocrate-Minnesosta), membre de
la commission sénatoriale des Affaires
étrangères, a accusé l’administration
Trump d’avoir autorisé des transferts de
technologie nucléaire au Royaume
saoudien à deux reprises depuis
l’élimination du journaliste saoudien:
la première fois en octobre 2017, seize
jours après l’équarrissage de
l’opposant, et la deuxième fois, le 20
Février 2019.
Sur ce lien , pour le lectorat
arabophone la déclaration du sénateur
Tim Kaine
Pour aller plus
loin sur le lobby pro saoudien aux
Etats-Unis, cf :
Le nucléaire
saoudien entre les phases de lucidité du
Roi Fahd et les velléités de son frère,
le prince Sultan.
Le Roi Fahd, qui
régna 23 ans sur l’Arabie saoudite de
1982 à 2005, a exercé avant son
accession au trône des responsabilités
gouvernementales à des postes sensibles
depuis 1962, date à laquelle il avait
été nommé au poste clé pour la sécurité
du Royaume de ministre de l’intérieur et
vice premier ministre. En tandem avec
son frère, le Prince Sultan, ministre de
la défense, ils ont pris la décision
d’engager l’Arabie saoudite sur la voie
du nucléaire.
Mais le programme
saoudien balancera entre les phases de
lucidité de Fahd et les velléités de
Sultan, sans le moindre progrès en 30
ans de balancement, mais générateurs
néanmoins de considérables
rétrocommissions pour les divers
intervenants.
Amateur de la dive
bouteille, pensionnaire assidu des
salles de jeux des casinos d’Europe,
Fahd renoncera toutefois aux plaisirs
champêtres et rupestres pour se draper
dans la dignité de gardien austère des
lieux saints de l’islam. 5eme monarque,
Fahd sera victime d’une attaque
cérébrale en 1995. Il sera affligé une
dizaine d’années d’hémiplégie, impotent
à une période charnière de l’histoire du
Golfe (1995-2005) marquée par la rupture
avec Oussama Ben Laden, chef d’Al Qaida
et la 2eme guerre du Golfe contre
l’Irak.
Sur la dynastie
wahhabite, cf ce lien
Ci joint le
Témoignage de Mohamad Al Massari, tel
qu’il a été rapporté par le journal
libanais «Al Akbar», auteur de la
révélation sur dossier nucléaire
saoudien:
Titulaire d’un
doctorat en physique nucléaire diplômé
d’uune iniversité de la République
Fédérale d’Allemagne, Mohamad Al Massari
est un opposant historique à la dynastie
wahhabite. Il a obtenu l’asile politique
au Royaume-Uni en 1994. Il dirige le
«Comité pour la défense des droits
légitimes» du peuple saoudien,
conseiller de la «Commission islamique
des droits de l’homme».
«En 1987, j’ai été
sollicité pour travailler au sein d’un
comité chargé d’élaborer un programme
nucléaire secret. Ce comité devait jeter
les bases visant à doter le royaume
saoudien de la capacité nucléaire, en
s’appuyant principalement sur
l’expertise saoudienne en la matière.
«Ce projet a été
lancé à l’initiative d’un savant arabe
résidant Londres, dont Massari ne rèvele
pas l’identité, qui s’est adressé au
prince Sultan en ces termes: «l’Arabie
saoudite doit se lancer dans la mise au
point d’un programme nucléaire afin de
doter le royaume d’une force de
dissuassion tant vis à vis de l’Iran que
d’Israël et d’affirmer sa prééminence».
«A l’instigation du
Prince Sultan, le comité secret a été
constitué. Présidé par Rached Al
Roubeidah, (Chimie), il était constitué
de quatre autres savants spécialisés,
l’un en géologie, l’autre en génie
électrique, le 3eme en énergie, en plus
de Massari (physique nucléaire).
«En fait l’objet
secret du comité était de mettre au
point un programme visant à doter
l’Arabie saoudite de l’arme atomique. Le
prince Sultan, ministre de la défense, a
présidé les deux premières séances de
travail du comité, lequel recommanda
l’embauche de savants de pays arabes et
musulmans, en leur octroyant la
nationalité saoudienne.
Une demande en
ce sens a été adressée au Pakistan.
«Lors de la 2me et
ultime réunion, le prince Sultan était
accompagné de deux officiers supérieurs
saoudiens, qui avaient été missionnés
pour servir d’officiers de liaison entre
le prince et le comité. Cette décision a
déplu aux scientifiques hostiles à
l’idée qu’un programme scientifique, qui
plus est nucléaire, soit placé sous le
contrôle d’officiers dépourvus de
compétence en la matière.
«Contournant la
tutelle, le président du comité adressa
directement une lettre au Prince Sultan
pour faire valoir ses observations et
réclar une 3eme réunion sous son égide.
Ce message est demeuré sans réponse.
«Au terme d’une
attente de trois mois, le président du
comité renouvelle sa tentative. En vain.
Le président du comité jugea alors que
les Saoudiens n’étaient pas sérieux dans
leur volonté de se lancer dans un
programme nuclaire fiable.
Mohamad Al Massari
pense que «le Roi Fahd n’était pas dans
un état normal, car s’il avait été dans
une phase de lucidité, il n’aurait
jamais osé prendre cette décision,
sachant pertinement qu’il se serait
heurté à un veto abolu américain».
Fin du
témoignage de Mohamad Al Massari
Le prince Sultan
en visite dans un centre nucléaire au
Pakistan
En 1999, Sultan se
rend au Pakistan, qui avait procédé un
an plus tôt à des expériences
nucléaires. Le prince saoudien a visité
le centre nucléaire de Kahuna, à
proximité d’Islamabad, s’informant
notamment sur le processus
d’enrichissement de l’uranium, suscitant
en retour de vives protestations de la
part de Washington.
Depuis lors
l’Arabie saoudite a multiplié les
allusions sur sa possibilité d’acquérir
une arme atomique auprès du Pakistan et
de se lancer dans un programme nucléaire
en vue d’améliorer la capacité de la
bombe, en collaboration avec le
Pakistan.
Les missiles
chinois à la parade militaire de Hafr Al
Baten
Invoquant la menace
iranienne, lors de la phase des
négociations de l’accord international
sur le nucléaire iranien (5+1), l’Arabie
saoudite a organisé en avril 2014 une
grande parade militaire à la base de
Hafr Al Baten, au nord est du Royaume,
cloturant de manoeuvres militaires de
grande envergure baptisées «Le Sabre
d’Abdallah».
Lors de ce défilé,
deux véhicules transportant des missiles
de fabrication chinoise ont été montrés
au public.
De type CSS-2, ces
missiles avaient été achetés par
l’Arabie saoudite en 1987, à l’époque de
la constitution du comité scientifique
secret saoudien. Mais leur participation
à ce défilé révélait publiquement la
possession par l’Arabie saoudite de
vecteurs ayant la capacité de se doter
de charges nucléaires.
Le défilé s’est
déroulé en présence du chef d’état major
de l’armée pakistanaise, le général
Rahul Charaf, présent à la tribune
d’honneur. Les observateurs en ont
déduit que l’Arabie saoudite a voulu
adresser un claire message sur sa
détermination à se doter de l’arme
atomique, en coopération avec le
Pakistan, si les négociations sur le
nucléaire iranien aboutissaient.
L’université de
Princeton: L’Arabie saoudite n’a pas
besoin de l’énergie atomique.
En mai 2014, soit
un mois après la parade militaire de
Hafr Al Baten, l’Université de Princeton
un rapport établi par son laboratoire de
prospectives nucléaires dans le cadre de
son programme de recherche sur la
sécurité mondiale, mettant en doute
l’économie de l’électricté produite par
l’Arabie saoudite.
Co signé par deux
scientifiques, Ali Ahmad et M.F Ramaya,
le rapport estimait que les
«perspectives prometteuses offertes par
l’énergie solaire en Arabie saoudite,
tant du fait de la superficie du royaume
que de son positionnement géographique,
de même que les réserves de gaz naturel
que recèle le sous sol du royaume
(encore que 15 pour cent des reserves
ont été à ce jour exploités),
aboutissent à la conclusion ne saurait
constituer une option sérieuse sur le
plan économique pour l’Arabie».
«En optant pour la
technologie nucléaire, l’Arabie saoudite
ne vise pas un objectif économique. Son
choix répond à d’autres considérations
et vise un objectif politique et
sécuritaire d’une grande compléxité»,
conclut le rapport.
Argument imparable,
d’une grande limpidité.
Epilogue: L’Iran
un préxtexte
L’Iran a servi de
prétexte à toutes les turpitudes
saoudiennes. Pendant un demi siècle, la
dynastie wahhabite a financé à coups de
milliards de dollars le terrorisme
islamique, la subversion
transcontinentale, du Nicaragua, à
l’Afghanistan à l’Afrique, la
destruction de nombreux pays arabes,
notamment les régimes à structure
républicaine (Irak, Syrie, Yémen).
Troisième pays au
monde par l’importance de ses achats
d’armement, le royaume n’est pas parvenu
à vaincre son voisin yéménite, le pays
le plus pauvre du Monde arabe, malgré
une coalition pétromonarchique de sept
pays, le soutien illimité et multiforme
des pays occidentaux et des compagnies
militaires privées, les mercenaires des
temps modernes.
Au terme de six ans
de guerre sans répit, la guerre du Yémen
a produit son effet contraire,
l’accroissement de l’influence régionale
de l’Iran et la fragilisation
concomittante du Royaume saoudien,
désormais objet de la risée du monde, en
proie au chantage permanent de son allié
américain. Du fait de l’incompétence de
la dynastie wahhabite, de son
inconsistance et de son impuissance.
On ne saurait mieux
dire.
En tournée
électorale pour un 2me mandat, en 2019,
il récidivera, «Sans nous ils ne
tiendraient pas dix minutes face à
l’Iran», décrochant au passage un
nouveau contrat de 14 milliards de
dollars d’armement de l’Arabie saoudite
et des Emirats Arabes Unis
Cauda: le 4eme
volet de ce dossier aura pour thème:
L’Otan, la Russie et les avatars du
nucléaire arabe
La partie 1/4
La partie 2/4
Le sommaire de René Naba
Le
dossier Monde
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