Monde
Golfe: La révolte oubliée du Bahreïn
René Naba
Photo:
D.R.
Vendredi 14 février 2014
Dawwar al Lou’lou’a
(Rond-point de la Perle), équivalent
bahreïni de la Place Tahrir au Caire, a
été le haut lieu de la contestation à
Manama contre le pouvoir de la dynastie
Al Khalifa. Le célèbre monument qui
symbolise la traditionnelle culture de
la perle du Bahreïn a été rasé par
l’armée en mars 2011.
I – Une conjonction
maléfique
Paris – Pas de
chance, triplement malchanceux ce pays,
Bahreïn, archipel d’entre deux mers,
coincé entre les chefs de file des deux
branches rivales de l’Islam, l’Arabie
saoudite sunnite et l’Iran chiite, voué
à constituer une des premières cibles
iraniennes en cas d’attaque israélienne
ou américaine.
Pas de chance, non
plus, que la révolte des Bahreïnis soit
survenue un mois jour pour jour après le
dégagement de Ben Ali, et, pire, à la
date commémorative du 3eme anniversaire
de l’assassinat du premier ministre
milliardaire saoudo libanais, Rafic
Hariri, le 15 février 2005, l’homme lige
des Saoudiens au Liban, propulsé au rang
de «martyr absolu» du camp occidental au
Moyen orient.
Conjonction
maléfique dans l’ordre symbolique
atlantiste qui sera fatale au renouveau
bahreïni, dont la révolte libératoire,
le 14 février 2011, est passée par
pertes et profits de la lutte
d’influence transrégionale, virulente
depuis la chute des deux pivots majeurs
du flanc sud de la diplomatie
atlantiste, Le tunisien Zine El Abidine
Ben Ali, le 15 janvier 2011, et
l’égyptien Hosni Moubarak, le 25
janvier.
Aux premières
flammes de la révolte, le branle-bas de
combat a été sonné. La chaine
transfrontière «Al Jazira», prescripteur
majeur de l’information de l’hémisphère
sud, s’est aussitôt muée en lanceur
d’alerte des menées atlantistes contre
le Monde arabe, sabordant en un mois son
crédit considérable accumulé en quinze
ans, alors que, parallèlement, l’Arabie
saoudite établissait, elle, un cordon
sanitaire autour de la totalité des
monarchies arabes, par adjonction du
Maroc et de la Jordanie, les deux relais
souterrains de la diplomatie israélienne
dans le Monde arabe, à la confédération
des six pétromonarchies.
Pour prévenir
l’effet de contagion, notamment au sein
de la composante chiite de sa
population, -le quart des Saoudiens, qui
plus est implantée dans les zones
pétrolifères-, le Roi Abdallah
gratifiera ses sujets de 400 milliards
de dollars en soutien à leur niveau de
vie.
Dans la foulée, le
Royaume dépêchera un bataillon de mille
soldats pour restaurer l’ordre à
Bahreïn, sous le regard des grandes
démocraties occidentales complaisantes à
l’égard d’un pays qui détient le record
mondial des décapitations par an. Elle
contribuera puissamment à l’éviction de
l’égyptien Mohamad Morsi, premier
président islamiste démocratiquement élu
dans le plus grand pays arabe, mettant
en échec l’expérience néo islamiste dans
le Monde arabe en ce que le principe
même de l’élection mettait en péril la
transmission héréditaire du pouvoir en
application de la succession dynastique,
fondement du pouvoir wahhabite.
Mieux, elle
entravera toute solution politique au
conflit bahreïni et fera obstacle à la
formation d’un gouvernement au Liban qui
ne répondrait pas à ses conditions dans
un double objectif :
-Entraver la
conclusion d’un accord international
pour la mise en exploitation des
gisements pétroliers des côtes
libanaises qui ferait du Liban un état
pétrolier non dépendant des subsides
pétro monarchiques.
-Mener une guerre
de dérivation au Liban et de l’Irak (la
bataille d’Al Anbar, janvier 2014, dans
le périmètre de Falloujah Ramādī) pour
soulager la pression sur les djihadistes
de Syrie et compenser leurs revers sur
le champ de bataille.
Le chômage dans le
Monde arabe atteint le taux record de 25
pour cent de la population. De quoi
alimenter le flot du mercenariat
djihadiste avec les importants stocks de
pétrodollars. Depuis les revers
djihadistes en Syrie, la banlieue sud de
Beyrouth, fief de Hezbollah, a fait
l’objet de deux attentats meurtriers
pour les civils libanais, en juillet
2013, particulièrement l’attentat à la
voiture piégée de Bir Hassan, ainsi que
dans la ville chiite de Baalbek,
enclenchant un nouveau cycle de violence
au Liban dans les villes sunnites à
Tripoli (Nord Liban) et à Beyrouth, où
un ancien ministre du gouvernement Saad
Hariri, Mohamad Chatah, a été tué le 27
décembre 2013.
Deux autres
attentats particulièrement douloureux,
en termes d’images pour l’Iran et le
Hezbollah, ont été revendiqués par la
brigade «Abdallah Al Azzam». L’attentat
contre l’ambassade iranienne à Beyrouth
qui a fait 29 morts le 19 novembre 2013,
et l’assassinat du chef de la force
balistique de la formation
politico-militaire chiite, Hassan Lakiss.
Fondé en 2003 par un saoudien, Salah Al
Qarawi, ce groupement tire son nom
«Abdallah Azzam», d’un activiste
islamiste palestinien né à Djénine
(Cisjordanie), en 1941, diplômé d’Al
Azhar, qui passe pour avoir été un des
inspirateurs d’Oussama Ben Laden,
fondateur d’Al Qaida, lors de la guerre
anti soviétique d’Afghanistan
(1980-1989). A la suite de
l’interception de son fondateur au
Waziristân, le mouvement a aménagé sa
base opérationnelle dans le camp des
réfugiés palestiniens d’Ein el Héloué
(banlieue de Saida) au sud Liban. Le
chef du mouvement, un saoudien Majed Al
Majed, recherché par les Américains, les
saoudiens et les Iraniens, a été arrêté
par l’armée libanaise, fin 2013. Selon
des informations de la presse libanaise,
Majed, décédé le 4 Janvier 2014,
souffrait d’insuffisances rénales. Il
avait été intercepté, le 24 décembre
2013, alors qu’il était convoyé vers un
hôpital de Beyrouth pour une dialyse.
Son repérage a eu lieu sur indications
des services américains, dans une
démarche qui apparait comme un «geste de
bonne volonté» des Américains à l’égard
de l’Iran.
Son porte-parole,
Cheikh Serrajeddine Zoureikat avait
auparavant revendiqué l’attentat anti
iranien au nom de la «brigade Abdallah
Azzam, bataillon de Hussein Ben Ali»,
par référence au rituel chiite qui
considère Hussein Ben Ali, petit-fils du
prophète, dont elle impute la
responsabilité de son assassinat aux
sunnites.
http://www.al-akhbar.com/node/197681
Cf «L’Arabie
saoudite, un Royaume des ténèbres» Par
René Naba éditions Golias 2013
http://www.renenaba.com/l-islam-otage-du-wahhabisme
Ainsi que «Le Grand
jeu de Ryad pour étouffer les printemps
arabes»
http://www.lemonde.fr/libye/article/2014/01/13/le-grand-jeu-de-riyad-pour-etouffer-les-printemps-arabes_4346993_1496980.html
Pour le lecteur
arabophone, voir à ce propos: Blocage
d’une solution sous pression saoudienne
http://www.al-akhbar.com/node/193066
http://www.arabi-press.com/?page=article&id=80502
Et ceci:
Chiites-Arabie saoudite Prémisses d’un
soulèvement chiite en Arabie saoudite
http://alquds.co.uk/index.asp?fname=data\2011\10\10-04\04qpt999.htm&arc=data\2011\10\10-04\04qpt999.ht
La révolte
populaire arabe ainsi refoulée des rives
inflammables du Golfe pétro monarchique
vers les rives contestataires de la
Méditerranée, Nicolas Sarkozy et Bernard
Henri Lévy, deux soutiens infaillibles
de l‘apartheid israélien en Palestine,
prendront le relai pour décréter la
démocratie dans des pays pétroliers
alliés de la Russie et de la Chine -la
Libye et la Syrie- en vue d’aménager une
plateforme opérationnelle israélienne
sur le pourtour du Nil par
l’établissement d’une jonction entre le
sud soudan, indépendant un mois plus
tôt, et la Libye post Kadhafi. Sous
l’égide de l’Otan et le concours actif
des islamophilistes français.
II -L’argumentaire
pétro monarchique
Pour les autocrates
du Golfe, l’Islam remplit une fonction
d’obéissance collective au «Prince»,
qu’il soit juste ou injuste en ce qu’il
assure une mission de cohésion sociale.
L’argument majeur de propagande a
reposé, en effet, sur la sacralité du
mandat du souverain, «élu» par Dieu et
gratifié de ses bienfaits, le pétrole,
s’appuyant en outre sur une culture
politique religieuse de soumission
critique au Gouverneur, par logique de
stabilité de Dar Al islam (La maison de
l’islam), face à Dar Al Kofr (le
territoire des impies) ou Dar Al Harb
(Le territoire de la guerre). Le Grand
Mufti d’Arabie saoudite, Cheikh Abdel
Aziz al-Cheikh, prenant argument de la
«légitimité religieuse» de son Roi, a
été le premier, en février 2011, à
condamner les soulèvements dans les pays
arabes, dénonçant le «chaos» programmé
par les ennemis de l’Islam en vue de
diviser la Oumma.
L’Islam fait office
de repoussoir au modèle démocratique et
de pourvoyeur de rente sécuritaire,
d’autant plus aisément que les
incessantes ingérences occidentales dans
la sphère arabo musulmane, depuis la
promesse Balfour (1917) portant création
d’un «foyer juif en Palestine» ont
discrédité l’idée même de démocratie au
point d’être perçue dans les cercles néo
islamistes comme un piège tendu par
l’occident afin de miner les sociétés
musulmanes de l’intérieur.
III- La
solidarité monarchique: Un réflexe de
survie
Face à l’effet
dominos du printemps arabe, les
dictatures monarchiques arabes ont
développé un discours de propagande basé
sur le concept de la spécificité locale.
L’Arabie saoudite, gardienne des lieux
Saints, n’est pas l’Egypte. Le Roi du
Maroc, commandeur des croyants, n’est
pas la Tunisie de «l’époux de la
coiffeuse».
Le Roi de Jordanie,
chef de la dynastie hachémite,
descendant de la famille du prophète,
n’est pas un vulgum alaouite du clan
Assad de Syrie, quand bien même deux
monarques hachémites ont été assassinés
Abdallah de Jordanie, en 1948, et Faysal
d’Irak, en 1958; que Hassan II du Maroc
a fait l’objet de deux coups d’état,
dans la décennie 1970, notamment à
Skhirat de la part de son propre
ministre de l’intérieur le général
Mohamad Oufkir, et que même le Grand
Faysal d’Arabie, sans doute le plus
pieux de la dynastie, a été assassiné
par son propre neveu. Cette spécificité
monarchique s’est couplée avec une
variante dictature kamikaze, au Bahreïn
et au Yémen, se posant en dépassement du
dilemme: Moi ou le chaos.
Comme pour
démontrer la supériorité monarchique sur
les contingences républicaines, les huit
monarchies arabes se sont déployées sous
forme d’un camp retranché. Disposant
d’une majorité de blocage au sein de la
Ligue arabe, par l’agrégation des
deux anciens confettis de l’empire
colonial français, -Djibouti et les
Comores-, le Conseil de coopération du
Golfe, syndicat monarchique par
excellence sous haute surveillance
militaire américaine, est passé outre à
l’unique instance de décision panarabe,
pour se muer en association mutualiste
d’entraide de son voisinage immédiat:
Bahreïn, et d’une manière connexe, le
Yémen.
Glacis stratégiques
de l’Arabie saoudite, ces deux pays ont
bénéficié d’un régime de faveur avec le
soutien occidental, avec, l’un comme
l’autre, l’intervention directe de
l’armée saoudienne, première opération
militaire saoudienne hors du territoire
national depuis la fondation du Royaume
en 1929. Sous de prétextes fallacieux:
pour dégager du «péril chiite» le
Bahreïn qui abrite le Quartier Général
de Vème flotte américaine pour le Golfe
et l’Océan Indien. Pour mater le fief
constitué au Yémen par «Al Qaida pour la
Péninsule Arabique», l’ancien pupille
tant des Américains que des Saoudiens.
Le Roi de Bahreïn
et le président yéménite misant sur leur
positionnement stratégique ont joué aux
«dictateurs kamikaze», se posant en
dépassement du dilemme: «Moi ou le
chaos», exacerbant l’opposition, et,
plutôt, que de négocier une sortie
honorable ont plongé le pays dans le
chaos de la guerre civile. Hosni
Moubarak (Egypte) et Zine El Abidine Ben
Ali (Tunisie), ultimes barrages contre
l’Islamisme, ont usé de cet argument
avec le soutien intéressé des
Occidentaux. Les autocrates du Bahreïn
et du Yémen ont repris le procédé à leur
compte, avec plus de succès. Trois ans
après le début des troubles à Bahreïn,
le combat de la majorité chiite contre
la dynastie sunnite est zappé des écrans
de l’actualité, tandis que l’ancien
président yéménite a été dégagé du
pouvoir avec le bénéficie de l’impunité
et d’immunités.
Le différentiel de
traitement trouve son explication dans
la disparité entre la zone d’abondance
du Golfe pétrolier et la zone de pénurie
des riverains de la Méditerranée,
révélatrice d’une grande vulnérabilité
de la configuration géopolitique arabe.
Alors que les pays méditerranéens
connaissent des problèmes de
surpopulation, notamment l’Egypte, et de
pénurie financière et alimentaire, les
pétromonarchies, par leur appel massif à
la main d’œuvre étrangère principalement
asiatique, présentent cette singularité
démographique de compter une population
immigrée sur majoritaire dans la
totalité des six pays membres du Conseil
de coopération du Golfe (Arabie
Saoudite, Bahreïn, Emirats arabes Unis,
Koweït, Qatar, Sultanat d’Oman), dont la
vocation première est de constituer une
gigantesque base flottante américaine,
la plus importante concentration
militaire américaine hors Otan, en même
qu’une station-service off-shore
discount.
IV – Le contentieux
entre l’Iran et les pétromonarchies
L’émir Hamad Ben
Issa Al Khalifa a justifié le recours
aux forces saoudiennes dans une
déclaration à l’hebdomadaire allemand
Der Spiegel, précisant qu’il a demandé
l’aide des forces armées du Conseil de
Coopération du Golfe (regroupant
l’Arabie saoudite, le Bahreïn, les
Emirats Arabes Unis, le Koweït, Oman et
le Qatar) pour protéger »les
installations stratégiques au cas où
l’Iran se montrait plus agressive ».
Les pétromonarchies
ont accusé l’Erythrée de servir de
plateforme iranienne pour des actions de
soutien aux Houtistes du Yémen en guerre
contre le pouvoir centrale et le parquet
de Bahreïn a même accusé l’Iran le 2
janvier 2013 de former des saboteurs
pour se livrer à des attentats contre le
Royaume.
http://www.arabi-press.com/article.php?id=845159*
Pour sa part,
Mohamad Hassanein Haykal a soutenu qu’un
arrangement était intervenu entre l’Iran
et les pétromonarchies visant à confier
le pouvoir à Bahreïn à la minorité
sunnite représentée par la dynastie Al
Khalifa en contrepartie de la
reconnaissance de la souveraineté
iranienne sur les trois ilots du golfe
persique, Abou Moussa, la grande et la
petite Tomb.
L’accord avait été
cautionné par le Roi Faysal d’Arabie
saoudite à la veille de l’accession à
l’indépendance des principautés en 1970,
dans la foulée du retrait britannique de
l’Est de Suez, précise l’ancien
confident du président égyptien Gamal
Abdel Nasser, dans une interview à la
chaine égyptienne CBC, le 12 janvier
2014.
A l’appui de sa
thèse, Haykal relève que les Emirats
Arabes Unis n’ont jamais cherché à
récupérer ces trois ilots, trois jalons
du dispositif du contrôle de la
navigation vers le détroit d’Ormuz, du
temps où le Chah d’Iran assumait pour le
compte de la stratégie atlantiste le
rôle de «gendarme du golfe».
Le ministre
bahreïni des affaires étrangères,
Khalifa ben Hamad Al Khalifa, s’est
borné à une réplique timide sur son
compte tweeter assurant que Haykal «fait
parler les morts», par allusion au roi
Faysal, le Chah d’Iran et le président
Nasser et que son témoignage ne saurait
donc être crédible.
A propos du
contentieux Iran Bahreïn pour le
lecteur arabophone
http://www.arabi-press.com/article.php?id=845613
Le péril chiite
apparait rétrospectivement comme le
meilleur anti dote aux revendications
populaires, le meilleur dérivatif aux
luttes démocratiques. Comme trente
ans auparavant, la lutte contre
l’athéisme soviétique, le meilleur alibi
au détournement du combat pour la
libération de la Palestine. Bahreïn se
compose de 70% de musulmans chiites,
alors que le pouvoir est accaparé par
une vieille dynastie sunnite tyrannique
corrompue et soumise à l’imperium
israélo américain. La dynastie Al
Khalifa gouverne, en effet, le Bahreïn
depuis 1797, signant leur premier traité
avec les Britanniques (soucieux de
« sécuriser » la route de leurs colonies
des Indes), en 1820.
Jamais indépendant
sinon que d’une manière formelle,
Bahreïn est passé sans coup férir du
protectorat britannique à la tutelle
américaine avec l’installation du QG de
la Vème flotte américaine à Manama.
Sur la
problématique chiite, CF :
Pour une lecture
non biaisée de l’histoire, notons pour
mémoire que le Bahreïn, qui abrite le QG
de la Vème flotte américaine (Océan
indien-Golfe arabo persique) a été
désigné président du « groupe des amis
du peuple syrien », et le Qatar,
QG du Centcom américain, président du
«groupe des amis du peuple
libyen». Le placement d’autocrates
fantoches à la tête du combat pour la
démocratisation des pays arabes a été
perçu comme un indice manifeste du
profond mépris des puissances
occidentales aux aspirations
démocratiques du Monde arabe, une
insulte suprême des occidentaux à
l’égard des Arabes.
Tous les régimes
arabes sont autoritaires, népotiques,
bureaucratiques, incompétents et
corrompus. Tous sans exception. Trois
ans après le soulèvement du « printemps
arabe », la question se pose de la
focalisation de la révolution,
exclusivement, sur les régimes à
structures républicaines de la rive
arabe de la Méditerranée.
Particulièrement La Syrie.
La révolution
est-elle soluble dans le pétrole? Le
pétrole monarchique constitue-t-il un
puissant dissolvant? Ou un puissant
soporifique à toute velléité
réformatrice? De quelles vertus cachées
est-il porteur?
En septembre 2013,
la justice de Bahreïn a condamné à des
peines allant jusqu’à 15 ans de prison
50 militants chiites, accusés de diriger
la contestation contre la monarchie
sunnite dans le royaume, en collusion
avec un pays étranger qui serait l’Iran.
La sentence visant des activistes du
«Mouvement du 14 février» n’a suscité la
moindre réprobation des pays
occidentaux, ni interrompu la livraison
du matériel de répression de la France à
la police de Bahreïn.
A coups de
pétrodollars, le printemps de Bahreïn a
ainsi muté progressivement en enfer
syro-libanais, n’épargnant aucune ville,
aucune cible. Pour la plus grande
tranquillité des pétromonarchies et la
plus grande satisfaction d’Israël et des
puissances occidentales, fort heureux de
l’affaiblissement du Monde arabe et de
son maintien en état de sujétion. Du
fait de guerres d’outre temps. Sans trop
de dégagement théorique, s’il n’y eut
«Pas de printemps pour la Syrie» (1),
c’est tout bonnement parce qu’il n’y eut
«Pas de Printemps pour Bahreïn» et ceci
pourrait expliquer cela. Ouvrage
collectif sous la direction de l’islamophiliste
François Burgat, le livre a été frappé
de caducité à sa parution en ce qu’il
n’avait pas anticipé la guerre inter-djihadiste
de Syrie qui a considérablement
fragilisé la posture diplomatique
française. Une claire démonstration de
l’incapacité des intellectuels français
en déconfiture de déterminer les saisons
arabes.
Le mouvement Shabab
(jeunesse) du 14 Février 2011 et le
parti d’opposition Al Wifaq l’entente)
constituent les deux principales
formations de l’opposition. Huit
dirigeants politiques ont été arrêtés
lors de leur participation à une
manifestation antigouvernementale à
Budaiya à l’ouest de la capitale Manama,
en février 2011. Les principales
revendications portent sur la réécriture
de la constitution et l’égalité réclamée
par les Chiites. La loi martiale et
l’état d’urgence ont été décrétés le 15
mars 2011. Un membre de la famille
royale a même été accusé nommément de
torture. La princesse Cheikha Noora Bint
Ibrahim Al-Khalifa, cousine supposée de
la reine Sabika Bint Ibrahim al-Khalifa,
épouse du roi Hamad et mère du prince
héritier Salman, a été accusée d’avoir
œuvré sous couverture de la brigade des
stupéfiants du pays.
Référence
1-«Pas de printemps
pour la Syrie» -Editions La Découverte –
Novembre 2013, ouvrage collectif sous la
direction de François Burgat et de Bruno
Paoli. Et la déconstruction de la
démarche des islamophilistes français:
http://www.renenaba.com/les-islamophilistes-tontons-flingueurs-de-la-bureaucratie-francaise/
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