MADANIYA
La criminalité transnationale :
Nébuleuse de la Mafia
et Hit parade des paradis fiscaux 2/2
René Naba
Mercredi 12 octobre 2016
Le hit parade des
paradis fiscaux
En 2016, dans la foulée du scandale
des «Panama papers», le classement des
paradis fiscaux s’établissait comme suit
:
- 1er-Iles Caïmans avec des dépôts
de l’ordre de 1.310 milliards de
dollars.
- 2e-Hong Kong, 1020 milliards de
dépôts, majoritairement des capitaux
chinois.
- 11eme rang Panama avec des
dépôts de l’ordre de 50 milliards de
dollars
Cinq paradis fiscaux sont situés sur
le continent européen : Pays Bas (3eme
position) pour des dépôts de 946
milliards de dollars, Luxembourg (6eme
position) avec 435 milliards de dollars,
suivi de l’Irlande,- siège off shore des
multinationales américaines
Google-Amazon pour l’optimisation
fiscale de leurs revenus-, avec des
dépôts de 300 milliards de dollars. En
fin de liste, les îles britanniques de
Jersey (127 milliards de dollars) et
Guernesey (98 milliards).
Sur le
plan français, trois banques sont
montrées du doigt: le Crédit Agricole,
la Société Générale et BNP. Par le biais
de ses rachats et de ses propres
filiales, le Crédit agricole a
administré pas moins de 1.129 structures
offshore –un stock similaire à celui de
la Société générale (1.005 sociétés). La
BNP semble moins gourmande (468
sociétés), mais a utilisé des
concurrents de Mossack Fonseca pour
domicilier d’autres structures, sur
lesquelles les «Panama papers» restent
muets. A chaque fois, les banques n’ont
pas hésité à proposer les services les
plus opaques (actions au porteur,
prête-noms, fondations) pour aider leurs
clients à dissimuler leur identité.
30 pays contaminés
par les narco-dollars
Une
trentaine de pays paraissent contaminés
par les narco-dollars, dont treize en
Amérique latine (Argentine, Brésil,
Bolivie, Colombie, Équateur, Guatemala,
Haïti, Mexique, Panama, Paraguay, Pérou,
Salvador, Venezuela), quatre en Asie
(Birmanie, Pakistan, Thaïlande,
Cambodge), huit dans l’ancien bloc
soviétique (Pologne, Bulgarie, Russie et
les républiques musulmanes d’Asie
Centrale), trois au Moyen-Orient
(Turquie, Syrie, Liban) et deux en
Afrique (Nigeria et Guinée).
Les pays occidentaux sont également
contaminés par l’argent sale, avec en
tête naturellement, les États-Unis,
quadrillés depuis l’époque de la
prohibition, dans les années 20, par de
grandes familles mafieuses. En Italie,
berceau de la mafia, où une vaste
opération de lutte contre la corruption
baptisée «Mains propres» a été
déclenchée, faisant vaciller les
fondements de la république, la
commission parlementaire anti-mafia a
estimé que les narco-dollars
représentaient 15 pour cent des sommes
placées en Bourse en Italie, alors qu’en
Allemagne, la «pizza connection» aurait
permis de blanchir entre deux et cinq
milliards de dollars.
En
France, un retentissant rapport du
Centre d’Analyse et de prévision du
ministère des Affaires étrangères met en
cause pétroliers et militaires français
dans le trafic. «L’Afrique francophone
subsaharienne reste un point d’entrée
dans le système financier international.
Les compagnies pétrolières participent à
l’opacité du négoce de l’or et sont
parties prenantes au projet de zone
franche de São-Tomé dont tout indique
qu’elle sera un maillon important dans
la criminalisation des échanges
commerciaux et financiers. Les forces
armées sont compromises dans la
consommation ou le trafic de stupéfiants
(Tchad, Djibouti) et dans la fraude du
diamant (République Centre africaine)»,
est-il notamment écrit dans ce rapport
en date du 29 juin 1995 et dont des
extraits ont été publiés dans
l’hebdomadaire satirique « Le Canard
Enchaîné».
Sur les
57 paradis fiscaux ou pays à NEO
aberrants recensés à travers le monde,
38 enclaves présentent cette singulière
caractéristique de ne pas disposer, ou
de ne pas rendre disponible, de données
chiffrées sur leurs dépôts bancaires
étrangers. Parmi ces enclaves, citons
Aruba, ancienne dépendance néerlandaise
des Caraïbes jusqu’en 1996 et l’île
malaisienne de Labuan dans le Pacifique
qui abrite tout de même 21 banques et
onze «trust companies».
En
Europe, la principauté du Liechtenstein,
havre de 40.000 compagnies offshore, ne
détient pas non plus de données en
matière de dépôts bancaires étrangers.
Elle fait, à ce titre, l’objet d’une
attention qualifiée de «priorité élevée»
de la part du Bureau des narcotiques du
département d’état américain.
Chypre,
de son côté, est devenue depuis
l’effondrement de l’ancien bloc
soviétique un havre du capital russe
sans doute en raison des affinités
socioculturelles entre ces deux pays
orthodoxes.
Dans un
dossier spécial consacré aux «Mafias du
Monde», l’hebdomadaire français
l’Express indique que la Banque Centrale
de Nicosie avait autorisé, en 1992, la
création de 2.892 sociétés offshore,
dont 53,5 pour cent appartenant à des
hommes d’affaires d’Europe de l’Est,
quintuplant en un an le nombre de ces
sociétés à régime fiscal particulier.
Près de dix mille russes considèrent
déjà la partie grecque de l’île comme
leur seconde patrie, aménageant dans la
ville portuaire de Limassol des
restaurants russes, assurant même
l’édition de deux journaux de langue
russe.
Un des
derniers nés des paradis fiscaux qui se
veut d’ailleurs le plus performant sont
les Seychelles. Le gouvernement de cette
île de l’océan indien a adopté, en
novembre 1995, un «Seychelles economic
development act» qui accorde l’immunité
aux investisseurs étrangers contre toute
poursuite criminelle et une protection
totale contre toute mesure de saisie de
leurs biens, à moins que les actes de
violence ou le trafic de drogue aient
été commis sur le territoire des
Seychelles. Le montant initial de
l’investissement permettant de profiter
d’une telle protection a été fixé à dix
millions de dollars.
Nauru:
Cet état de Micronésie (pacifique) de 21
km2 pour dix mille habitants, est la
plus petite république du monde. 400
banques et sociétés offshore sont
enregistrés auprès d’une seule boite NAC
(Nauru Agency Corporation) par où selon
la banque centrale de Russie, ont
transite en 1999 plus de 8O milliards de
dollars.
La nébuleuse de la
MAFIA
«Mafieux
de tous les pays, unissez-vous», tel
pourrait être le mot d’ordre des
organisations criminelles
transnationales (OCT) depuis la chute du
communisme en 1990 et la mondialisation
de l’économie du marché. ce qui a
entraîné par contrecoup un essor de la
coopération inter-mafieuses des deux
côtés du rideau de fer et un branle-bas
de combat au sein des grands services
occidentaux FBI, Scotland Yard et le BKA
(police criminelle fédérale allemande,
dont le siège est à Wiesbaden) destiné à
combattre ce nouvel «international du
crime».
Le
premier sommet inter-mafia Est-Ouest
s’est tenu d’ailleurs un an à peine
après l’effondrement du bloc soviétique,
en mars 1991 à Varsovie, entre
représentants de Cosa Nostra (mafia
italo-américaine) et les chefs des
groupes criminels de l’ancienne Union
soviétique. Le second en 1992 à Prague.
Entreprise d’envergure planétaire
disposant de moyens supérieurs à bien
des états du tiers-monde, les mafias
sont des sociétés criminelles à
recrutement initiatique conçues pour
être pratiquement indestructibles. Elles
brassent des dizaines de milliards de
dollars par an et menacent gravement les
flux financiers légitimes. Raymond
Kendall, secrétaire général d’Interpol,
a admis en avril 1994 que sur le fichier
de 250.000 grands malfaiteurs gérés par
Interpol, 200.000 étaient liés au
narco-trafic.
Huit
grandes confédérations mafieuses ou
organisations criminelles
transnationales (OCT) étalent leur
tentacule sur l’ensemble de la planète
ne négligeant aucun secteur d’activité.
Depuis
le début de la décennie 1990, la mafia
internationale soucieuse de diversifier
ses activités a massivement investi en
Europe de l’EST, rachetant palaces et
entreprises privatisées. En
contrepartie, la mafia russe s’est
lancée à la conquête de l’Ouest, dans
une sorte de division internationale du
travail criminel. Jetant une tête de
pont vers le Japon via l’île de Hokkaido
et vers les enclaves de Hong kong et de
Macao, solidement implantée en
Allemagne, notamment à Hambourg et à
Francfort, elle talonne sérieusement
désormais la mafia italo-américaine de
Brooklyn (USA).
Sur les
200.000 immigrés russes arrivés aux
États-Unis depuis les années 70, plus de
cinquante mille se sont établis à
Brooklyn. Parmi eux, selon les calculs
du FBI, près de 2.000 travaillent de
façon régulière pour les 29 gangs
opérant dans le quartier. Depuis 1995,
le FBI enquête d’ailleurs sur 35
«affaires» concernant les russes sur le
territoire américain.
1)-Les
États-Unis: Émanation de la Cosa Nostra
italienne, 25 familles mafieuses se
partagent le territoire américain avec
de solides point d’ancrage à Chicago, La
Nouvelle Angleterre, La Floride et les
villes de jeux Las Vegas et Atlantic
City. Cinq familles se partagent New
York depuis 1931, la plus puissante
étant la famille Genovese, suivie par
Gambino, Colombo, Lucchese et Bonano. La
mafia italo-américaine des États-Unis
s’est spécialisée dans le trafic des
stupéfiants, le racket des branches
industrielles, tel le traitement des
ordures de New York, les jeux illégaux,
le piratage d’appels d’offres, les prêts
à des taux d’usure etc…
2)-Russie: Une centaine de formations
permanentes, regroupant près de 200.000
combattants, repartis en 150 régiments
encadrés par sept cent chefs et cadres,
disposent de connexions internationales
sérieuses, notamment en Allemagne et
dans les pays de l’ancien bloc
soviétique. Le groupe du Caucase
-arméniens, Azéris, Daguestanis,
Géorgiens et Tchétchènes- est
généralement considéré comme l’un des
plus efficace notamment dans le marché
noir, le pillage des entrepôts d’état,
le trafic d’armes (Caucase,
ex-Yougoslavie, Algérie ) et le trafic
des Stupéfiants.
3)-Le
Japon: 60.000 Yakuzas, membres d’une
organisation mafieuse sont initiés au
sein de 3.500 clans eux-mêmes rassemblés
au sein de grandes confédérations
criminelles.
Les
trois plus importantes sont Yamaguchi
Gumi, Inagawa Kai et Sumiyoshi Kai qui
regroupent les deux tiers des clans.
Solidement implantée en Corée du Sud en
Australie et aux Etats-Unis, notamment à
Hawaï sur la Côte-Ouest des États-Unis,
la mafia japonaise opère dans le domaine
du trafic des amphétamines, le racket
des entreprises, le piratage des marchés
publics, la contrebande d’armes et les
jeux illégaux.
4)- Le
Mexique: Six grands cartels (Culiacan,
Guadalajara, Juarez, Matamoros, Sonora
et Tijuana) déclarent une centaine de
bandes criminelles qui exploitent les
3.200 ms de frontière avec l’Amérique.
Bien installes dans l’appareil
politico-administratif mexicain, les
cartels mexicains sont spécialises dans
la traite massive d’immigrants chinois
clandestins en liaison avec les triades,
ainsi que dans le trafic vers les
États-Unis de stupéfiants produits
localement (Marijuana) ou importés de
Colombie (Cocaïne).
5)- La
Colombie: Deux grands cartels (Medelin
et Cali, articulés selon une
organisation pyramidale comprenant un
millier de cadres dirigeants et soutenus
par 25.000 groupes criminels de base,
contrôlent 75 pour cent de la production
mondiale de la Cocaïne, avec des
ramifications dans chaque branche de la
production et à chaque étape de sa
commercialisation: groupe spécialisé
dans l’agriculture, la chimie, le
transport intercontinental, la vente en
gros, le cartel assurant au sommet, la
coordination, la transmission des
informations et la protection générale
de l’ensemble.
6)-
L’Italie: La mafia italienne compte
quatre grandes confédérations mafieuses,
disposant globalement de près de cent
mille 110.000 adhérents, assurant une
présence dans 42 pays. La répartition
des zones d’implantation s’établit comme
suit: La Cosa Nostra, en Sicile, dispose
de 40.000 à 50.000 personnes regroupées
autour de 130 familles recrutées selon
des critères biologiques, la Camorra,
dans la région de Naples, compte 110
familles et près de dix mille adhérents,
Ndragheta (Calabre) 150 familles, 5500
cadres et soldats, enfin Sacra Corona
Unita (pouilles), 32 familles, 2.500
membres.
7)- La
Turquie: Une dizaine de grands clans
turco-kurdes (Ayanoglou, Baybasin,
Cakili, Heybeti, Karaduman, Ulucan)
dirigés par des parrains puissants et
bénéficiant de solides appuis
politiques, se livrent à un intense
trafic d’héroïne entre l’Asie centrale
et l’Europe. Se présentant comme des
armateurs, en héritage de l’activité de
contrebande florissante sous l’Empire
Ottoman, la mafia turque est bien
implantée en Europe (Allemagne, Espagne,
Pays-Bas et Suisse). Son activité de
prédilection est la contrebande de
matériel électronique et vidéo, la
contrefaçon de documents officiels,
piratage de marchés publics, la
prostitution et le racket.
8)- Les
Chinois et leurs fameuses six grandes
triades constituent sans nul doute la
première organisation criminelle du
monde avec plus de cent mille initiés.
Trois triades sont basées à Hong Kong
(Sun Yee On, 14 K, Fédération WO), deux
à Taïwan (Bambou Uni, Bande des 4 mers)
et une en Chine (grand cercle). Fondé en
1919 à Canton, SUN YEE ON est le premier
gang du monde. Il compte 60.000 membres.
Fondé en 1947 également à Canton pour
soutenir le Kuomintang replié en 1949 à
HongKong face à l’avance communiste, 14
K compte 24.000 membres.
Fondé en
1908, Fédération WO compte 29.000
membres divisés en 10 clans et règne sur
l’Ouest de HongKong. Bambou Uni à Taïwan
compte 20.000 membres, répartis en 13
clans. Il a été fondé en 1956 par un
groupe de criminels expulsés de Hong
Kong, alors que la Bande des 4 Mers ne
regroupe que 5.000 membres. Grand cercle
a été fondé en Chine par d’anciens
gardes-rouges. Ses effectifs ne sont pas
connus tout comme la date de sa
fondation.
Trafic de stupéfiants et d’armes, trafic
d’émigrants clandestins chinois, de
véhicules volés, piratage audio et
vidéo, jeux illicites, racket, usure,
prostitution, pornographie constituent
la gamme de leurs activités qui
s’étendent à l’ensemble de la zone
Asie-Pacifique en plus de l’Australie,
avec de solides réseaux en Amérique du
Nord et des infiltrations en Europe.
Le Hit Parade des
Paradis Fiscaux
En 2016, dans la foulée du scandale
des «Panama papers», le classement des
paradis fiscaux s’établissait comme
suit:
- 1er-Iles Caïmans avec des dépôts
de l’ordre de 1.310 milliards de
dollars.
- 2e-Hong Kong, 1020 milliards dé
dépôts, majoritairement des capitaux
chinois.
- 11eme rang Panama avec des
dépôts de l’ordre de 50 milliards de
dollars
Cinq paradis fiscaux sont situés sur le
continent européen : Pays Bas
(3eme position) pour des dépôts de 946
milliards de dollars, Luxembourg (6eme
position) avec 435 milliards de dollars,
suivi de l’Irlande,- siège off shore des
multinationales américaines
Google-Amazon pour l’optimisation
fiscale de leurs revenus-, avec des
dépôts de 300 milliards de dollars. En
fin de liste, les îles britanniques de
Jersey (127 milliards de dollars) et
Guernesey (98 milliards).
Sur le
plan français, trois banques sont
montrées du doigt: le Crédit Agricole
avec 1.120 structures off-shore, la
Société Générale (1.005 sociétés off
shore) et BNP 468 sociétés).
Par le
biais de ses rachats et de ses propres
filiales, le Crédit agricole a
administré pas moins de 1.129 structures
offshore –un stock similaire à celui de
la Société générale (1.005 sociétés). La
BNP semble moins gourmande (468
sociétés), mais a utilisé des
concurrents de Mossack Fonseca pour
domicilier d’autres structures, sur
lesquelles les «Panama papers» restent
muets. A chaque fois, les banques n’ont
pas hésité à proposer les services les
plus opaques (actions au porteur,
prête-noms, fondations) pour aider leurs
clients à dissimuler leur identité.
Les
zones franches et paradis fiscaux
constituent de puissants lieux de
trafic, de transformation et de
redistribution des richesses. Reposant
essentiellement sur la «dérogation», un
affranchissement des contraintes en vue
d’impulser l’économie mondiale, ils
constituent par excellence l’Anti-monde,
c’est à dire des espaces sinon hors la
loi, du moins hors la loi commune,
l’envers du système mais partie
intégrante du système mondial.
Ces places financières offshore
proposent une faible fiscalité, un
secret bancaire absolu, la préservation
de l’anonymat des propriétaires des
sociétés, une coopération fiscale et
judiciaire réduite, voire quasi
inexistante avec d’autres pays.
Près de cinq mille milliards de dollars,
soit la moitié des actifs financiers
transfrontaliers, seraient basés dans
ces centres offshore, qui constituent de
véritables «trous noirs» de la finance
internationale et dont le rôle a été
important dans l’accélération de la
crise asiatique, en 1997, et un an plus
tard dans la transmission de la crise
russe à l’Amérique latine. Dans le souci
d’améliorer la «traçabilité» des flux
financiers et d’éviter la contagion des
crises le «Forum de stabilité
financière», émanation du G-7 regroupant
les pays les plus industrialisés en 1999
et domiciliée auprès de la Banque des
Règlements Internationaux, à Bâle, a été
chargée de faire la police des paradis.
La
répartition des paradis fiscaux ne doit
rien au hasard. La plupart sont situés
sur une grande ceinture qui entoure le
Monde, allant de l’Amérique centrale et
les Caraïbes en passant par la
Méditerranée, le Moyen-Orient, l’Asie du
sud et du Sud-est, c’est à dire les
voies maritimes majeures des trafics et
des stratégies mondiales, au point de
jonction des océans et des continents.
Les
autres grands ensembles sont situés à
proximité des «centres» qui commandent
et se disputent ces voies de passage,
par exemple, Tanger pour la zone
Europe-Méditerranée et le détroit de
Gibraltar, Guernesey et l’île de Man
pour la Manche et l’Océan atlantique.
L’existence de paradis fiscaux est d’une
certaine façon une incitation à
l’incivisme, dans la mesure où l’idée
même qui a présidé à leur création est
le souci de soustraire les détenteurs de
capitaux aux contraintes, aux contrôles
et aux prélèvements du pays d’origine.
L’un des côtés les plus spectaculaires
des paradis fiscaux est sans doute
l’enregistrement offshore des navires
(pavillon de complaisance) ou des
entreprises.
Le Liberia dispose ainsi de la première
flotte du monde et la région pacifique-
caraïbes offre le spectacle d’un immense
parking pour près 90.000 sociétés
offshore. Mais la palme toute catégorie
revient à Hong kong, l’ancienne enclave
britannique, le nouveau poumon
économique de la Chine.
Les ILES
CAIMANS, territoire sous dépendance
britannique des Caraïbes, arrivent en
1ère avec des dépôts de l’ordre de 1.310
milliards de dollars pour 544 banques,
70 fonds financiers et 30.000 compagnies
offshore.
HONG
KONG, restituée depuis juillet 1997 à la
Chine, se place en deuxième position
pour l’importance des dépôts bancaires
étrangers, majoritairement chinois
(1.020 milliards de dollars) collectés
par 500 banques étrangères.
3eme
position les Pays Bas qui supplante
ainsi le Luxembourg pour des dépôts de
946 milliards de dollars,
Le Luxembourg est relégué à la 6eme
position avec 435 milliards de dollars,
pour 221 banques et 1.800 fonds
financiers. Il est suivi de l’Irlande
(7eme position), siège off shore des
multinationales américaines
Google-Amazon pour l’optimisation
fiscale de leurs revenus-, avec des
dépôts de 300 milliards de dollars.
La
SUISSE est sur la défensive depuis
l’affaire de l’or nazi et des fonds
juifs en déshérence, a fait preuve de
souplesse en signant, en 1997, un traité
d’entraide judiciaire avec les
États-Unis. Elle s’est dotée en outre en
1998 d’une loi sur le blanchiment qui
fait obligation aux banques suisses de
signaler toute action suspecte et d’une
convention de diligence qui commande aux
banques de vérifier l’identité de leurs
clients. Selon une étude de l’université
de Bâle, les banques suisses gèrent
environ 35 pour cent des avoirs privés
mondiaux, la place financière génère
plus de cent mille emplois et assure
près de 11% du produit intérieur brut de
la confédération. (Le Monde 23 août
2000).
Viennent
ensuite SINGAPOUR (Asie), avec 119
succursales de banques internationales
et 76 banques d’investissement, les
BAHAMAS, 6me position, avec 172
milliards de dollars, 404 banques dont
180 succursales et 16.200 compagnies
offshore.
Les
lauréats du hit parade (Caïmans, Hong
Kong, Luxembourg, Suisse, Singapour)
font tous l’objet de la part de la
justice américaine d’une «priorité
élevée» pour l’attention qu’elle porte à
la surveillance de leurs activités, de
même que Les Bahamas.
La région des Caraïbes est un havre pour
capitaux errants, lesquels, par
l’entremise des micro- états se glisse
telle une prolifération cancéreuse dans
les interstices des grandes puissances.
Trois
des micro-possessions anglaises du
Pacifique abritent à elles seules 59.200
compagnies offshore, 16 banques et 182
sociétés d’assurances captives: Anguilla
(4.200 compagnies offshore), Barbade (16
banques et 182 assurances captives), les
îles vierges britanniques (55.000
compagnies offshore).
Quant à la plus petite république du
monde, Nauru (état de Micronésie, dans
le pacifique, de 21 km2 pour dix mille
habitants), 400 banques et sociétés
offshore sont enregistrés auprès d’une
seule boîte NAC (Nauru Agency
Corporation) par où, selon la banque
centrale de Russie, ont transité en 1999
plus de 8O milliards de dollars, le plus
fort rendement mondial au mètre carré.
Curieusement elles présentent cette
double particularité de figurer à la
rubrique des Etats-DND, c’est à dire des
états ne disposant pas des indications
-ou ne souhaitant pas en fournir- sur le
montant des dépôts bancaires d’origine
étrangère, et de bénéficier dans le même
temps d’une «faible» priorité de la part
de l’administration américaine.
La
mansuétude américaine pourrait
s’expliquer par le fait que ces îles des
Caraïbes sont sous la dépendance de
leurs alliés anglais. Le même régime
s’applique aux possessions insulaires
anglaises de la zone Europe-Atlantique,
où l’on relève une situation similaire:
Guernesey (75 banques offshore et 248
fonds financiers), Bermudes (400 fonds
financiers et 1.300 assurances captives)
et Jersey (150 trusts et 292 fonds
financiers) figurent à la rubrique DND
(données non disponibles) et à la
rubrique «faible» en matière de priorité
américaine.
A
l’opposé, le Panama qui détient le
record mondial absolu des compagnies
offshore (300.000 domiciliés sur son
sol, en plus de 106 banques), fait, lui,
l’objet d’une attention «prioritaire» de
l’administration américaine, sans doute
en raison de la présence du Canal de
Panama et de sa proximité avec le
territoire américain.
En ce début de siècle qui marque le
début d’un nouveau cycle historique, la
planète ne parait pas aussi paradisiaque
que la prolifération des paradis fiscaux
ne veut le suggérer et le nouvel ordre
mondial fait plutôt désordre sur le plan
international.
Selon
l’ONG britannique OXFAM, les 50
multinationales les plus prospères aux
États-Unis ont placé au moins 1. 400
milliards de dollars dans divers paradis
fiscaux. Le gratin du Monde des affaires
américain Apple, Alphabet (nouveau nom
de Google), Walmart, General Electric
ont établi 1.600 filiales dans des
paradis fiscaux.
Apple
ressort comme le champion incontesté du
recours aux paradis fiscaux… en toute
légalité. Le roi des smartphones a mis
180 milliards de dollars de côté dans
des territoires fiscalement
accommodants.
Le
conglomérat énergétique General Electric
arrive deuxième position avec 119
milliards de dollars repartis entre 117
filiales implantées dans des paradis
fiscaux. Le géant de l’informatique
Microsoft décroche la médaille de bronze
grâce aux 108 milliards de dollars qu’il
fait fructifier dans ces pays
1.400
Milliards de dollars ………. A superposer
aux 25 mille milliards de dollars de
pertes de capitalisation boursière de la
crise bancaire de 2008. De quoi régler
la quasi totalité des problèmes les plus
urgents du Monde, éradiquer pandémies et
épidémie, analphabétisme, sous
alimentation, exclusion sociale, et
réduire quelque peu la tension aux
quatre coins de la planète. En un mot
aménager un coin de paradis sur terre.
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