Liban
Présidentielles-Liban: Le
confessionnalisme, le cadeau empoisonné
de la France à ses «enfants chéris
libanais»
René Naba
Photo:
D.R.
Vendredi 2 mai 2014
I – Le Président
libanais un faussaire
Le commandant en
chef d’une armée d’un pays en guerre se
doit de se porter à l’avant-garde de la
ligne de front et non de prendre la
poudre d’escampette, particulièrement
lorsque le commandement suprême est
exercé au double titre de Président de
la République et chef suprême d’une
armée d’un pays du champ de bataille,
certes le plus petit pays arabe, au
palmarès toutefois glorieux, qui
revendique fièrement l’honneur de
constituer l’ultime pays du champ de la
confrontation, en guerre ouverte avec
Israël.
Un honneur insigne
qui commande une posture digne. Un pays
artisan de glorieux faits d’armes face à
l’ennemi officiel du Monde arabe ne
saurait tolérer des généraux de
pacotille. Une posture de franc-tireur
et non de tir au flanc. De voltigeur de
pointe sur les lignes de feu et non de
planqué, à l’instar de son alter ego
sunnite l’ancien premier ministre Saad
Hariri, exfiltré à des milliers de kms
du front chez ses parrains saoudiens,
grand absent de cet événement, comme
d’ailleurs de toutes les échéances
majeures qu’a connues son pays depuis
trois ans.
Et pourtant,
incroyable mais vrai. Le président
libanais Michel Sleimane s’est révélé
être un faussaire, passible de
poursuites judiciaires en France pour
avoir falsifié un passeport français.
Pitoyable spectacle.
Bénéficiant d’une
promotion à la suite de l’assassinat de
son supérieur hiérarchique, le Général
François Hajj, qui lui a grandement
ouvert les voies du pouvoir, Michel
Sleimane avait été saisi, du temps de
son commandement de l’armée libanaise,
par une soudaine tentation de Venise,
pitoyable remake de la fuite de Varenne.
Toute honte bue, il
avait présenté des documents falsifiés à
l’ambassade de France à Beyrouth, pour
obtenir un passeport français à lui et à
sa famille, de même qu’à deux de ses
plus collaborateurs au sein de l’armée,
son directeur de cabinet, le général
Toufic Jizzini et Reda Moussawi.
Le journal libanais
«Al Akhbar» qui a publié cette
information mercredi 9 avril en
manchettes, en première page, indique se
fonder sur des câbles Wikileaks rendant
compte des propos de l’ambassadeur
français à l’époque Bernard Emié à son
collègue américain. Et sur des échanges
entre les autorités françaises et la
direction générale de la sureté
nationale libanaise. «La juridiction de
Pontoise est saisie. Je ne suis pas sûr
que s’il se présentait en France, il ne
serait pas interpellé», indique M. Emié,
selon ce câble.
http://www.al-akhbar.com/node/204314
L’affaire a fait
grand bruit aujourd’hui à Beyrouth, où
le journal a publié en annexe les
requêtes françaises. L’incident qui
s’est passé en 2005, a été étouffé au
prétexte que le futur président libanais
n’avait pas fait usage du document
français. Aucune indication n’a été
fournie sur les raisons qui ont poussé
le commandant de l’armée de l’époque à
recourir à ce procédé, ni sur les motifs
qui l’ont conduit à chercher à obtenir
un passeport français. L’officier en
charge du département de la sécurité à
l’époque était le général Jamil Sayyed,
qui sera inculpé l’année suivante ainsi
que trois autres officiers supérieurs
libanais dans la cadre de l’enquête sur
l’assassinat de l’ancien premier
ministre Hariri et incarcéré pendant
trois ans avant d’être relâchés faute de
preuves.
Le Point et Le
Figaro avaient brièvement mentionné cet
incident, sans donner suite à cette
affaire.
http://wikileaks.org/cable/2007/08/07BEIRUT1175.html
http://www.lefigaro.fr/international/2007/12/01/01003-20071201ARTFIG0011…
http://www.lepoint.fr/actualites/2007-11-08/le-faux-passeport-francais-d…
II-La tentative de
blanchissement politique de Samir Geagea,
une souillure morale de ses parrains
Michel Sleimane
présente un bilan sans relief. Il
apparait, rétrospectivement, comme le
plus falot des présidents libanais
depuis l’indépendance du Liban en 1943,
il y a 71 ans. Le président sortant,
dont le sexennat s’achève le 25 mai
2014, n’aurait jamais accédé à la
magistrature suprême, sans le
confessionnalisme, le système politique
qui régit la vie libanaise sur la base
de la répartition des postes d’autorité
selon des critères d’appartenance
communautaire.
Cette même logique
communautaire habilite d’ailleurs Samir
Geagea à postuler à la magistrature
suprême du seul fait de son appartenance
à la communauté maronite, sans aucun
autre titre de gloire que celui de
figurer au rang des plus grands
criminels de la guerre du Liban, sans
aucun état de service autre que celui
d’avoir été le fossoyeur du camp
chrétien et le meurtrier du premier
ministre sunnite Rachid Karamé. A se
revendiquer, sans vergogne, comme le
sauveur du pays. Mais la tentative de
son blanchissement politique opérée via
cette candidature s’est retournée contre
lui par le rappel de ses forfaits et
méfaits, souillure morale indélébile;
indice indiscutable de la
défragmentation mentale de la classe
politique libanaise et de leurs parrains
pétro-monarchiques et occidentaux.
Au premier tour du
scrutin, le 23 avril, Samir Geagea, 36
ans après sa forfaiture, a recueilli 48
voix contre une voix à son rival
phalangiste Amine Gemayel, alors que le
candidat de la coalition rivale, Michel
Aoun, leur faisait échec par une
abstention massive au scrutin.
Dans cette
perspective, la campagne présidentielle
mettant aux prises les anciens chefs de
guerre miliciens maronites -Samir Geagea
et Amine Gemayel-, apparait comme un
mauvais remake d’un mauvais film; une
pitoyable séquence d’une interminable
danse de scalp, entre les anciens frères
ennemis de la guerre civile libanaise,
dans un espace drastiquement réduit du
fait du déclassement des prérogatives
constitutionnelles des Maronites,
résultant tant de leur nanisme politique
que de leur alignement inconditionnel à
l’Occident, artisan de leur malheur, par
leur instrumentalisation.
Pâle copie de la
guerre des Horace et des Curiace de
l’époque antique, la rivalité attisée
par le souffleur des ténèbres Samir
Geagea, s’est reproduite au niveau des
héritiers du clan Gemayel, Sami et
Nadim, des cousins germains revendiquant
l’un comme l’autre dans leur querelle de
légitimité, chacun un martyr dans son
propre camp, Sami son frère Pierre,
député, Nadim, son père Bachir,
président éphémère du Liban. A ce titre,
les guerres inter-maronites sont aussi
légendaires que les guerres fratricides
inter-wahhabites entre l’Arabie saoudite
et le Qatar, toutes deux passées à la
postérité comme d’illustrations
pathologiques de l’insignifiance du
leadership chrétien libanais et de
l’inconsistance du leadership
pétro-monarchique.
III – Le
confessionnalisme, la nécrose du système
politique libanais
Cadeau empoisonné
de la France, le confessionnalisme
constitue une négation de la démocratie
en ce que la citoyenneté libanaise est
conditionnée et handicapée par la
naissance.
Aux Etats-Unis, il
est possible de débarquer esclave, de le
demeurer pendant deux siècles pour finir
par devenir Président des Etats-Unis. Au
Liban pas. Mur de verre invisible et
infranchissable. Sur un point nommé,
dans des domaines précis, la naissance
confère un primat à une communauté au
détriment des autres communautés par le
Fait du Prince, l’arbitraire du pouvoir
colonial. Elle prédétermine les membres
d’une communauté à des fonctions
indépendamment de leur compétence. Elle
conforte une communauté dans un
sentiment de supériorité ou de
frustration.
Les exemples sont
nombreux des dérives du
confessionnalisme. Le leadership
maronite a ainsi assumé, par une sorte
de Hold up, la direction des combats du
camp chrétien lors de la guerre civile
libanaise (1975-1990), à l’exclusion des
autres composantes de la chrétienté
libanaise, quand bien même elles en
subissaient les conséquences.
Le primat conféré
par la France à la communauté maronite
dans l’exercice des responsabilités
suprêmes au Liban aurait dû se vivre
comme une délégation de pouvoir au
bénéfice de l’ensemble des communautés
chrétiennes du Monde arabe
majoritairement musulman et non comme la
marque d’une supériorité immanente d’une
communauté spécifique au détriment des
autres, en ce que les Maronites
constituaient la plus importante
minorité des minorités chrétiennes du
Liban et non la communauté chrétienne
majoritaire d’un Monde arabe.
Pour n’avoir pas
observé cette règle non écrite de la
prudence politique, elle en paiera le
prix par le déclassement de ses
prérogatives constitutionnelles,
entraînant dans sa relégation les autres
composantes chrétiennes innocentes de
cet emballement. Victimes innocentes
souvent, bourreaux parfois plus que de
besoin, les camps palestiniens de la
quarantaine (est de Beyrouth), en 1976,
et de Sabra Chatila (sud de Beyrouth),
en 1982, passeront dans l’histoire comme
de sanglantes illustrations
pathologiques de la déraison humaine, au
passif du leadership maronite,
particulièrement les milices chrétiennes
des Forces Libanaises.
Leur alliance avec
Israël, l’ennemi officiel du Monde
arabe, constituera l’un des points noirs
de l’histoire de la chrétienté arabe, et
les chefs de cette équipée suicidaire,
Bachir Gemayel, président éphémère du
Liban, et ses successeurs, Elie Hobeika
et Samir Geagea, comme les plus
sinistres personnages de l’histoire du
Liban en termes de bilan pour la
chrétienté, en ce qu’ils ont substitué
la lutte pour la réalisation des droits
nationaux des Palestiniens, par la
recherche de l’éradication d’un peuple
déjà spolié de sa patrie, les
Palestiniens, en compensation des
turpitudes occidentales à l’égard des
Juifs européens. Les miliciens chrétiens
ont intériorisé, ce faisant, la
perversité de la logique occidentale
dans un tragique dévoiement de la
pensée, ne s’imaginant pas un seul
instant que «le peuple de trop au Moyen
orient», selon l’expression du chef
phalangiste Bachir Gémayel, pourrait
être un jour «le peuple chrétien arabe».
Traumatisé par
l’auto décapitation de ses chefs
charismatiques, le leadership chrétien,
principalement maronite, a longtemps
balancé entre patriarcat et matriarcat,
entre la référence constante au chef
spirituel de la communauté maronite de
l’époque, le Patriarche Sfeir, et le
tempo politique imposé par les veuves
des présidents assassinés du Liban,
Bachir Gemayel et René Mouawad, soutenu
à distance par Mme Samir Geagea,
l’épouse du dirigeant des Forces
Libanaises (milices chrétiennes)
incarcéré au Liban.
Signe certain d’un
désarroi, l’absence de renouvellement du
personnel politique s’est traduite par
le retour du religieux en tant que
substitue au politique et de la
féodalité clanique, en guise de
leadership. Le retour d’exil du
président Amine Gemayel et du général
Michel Aoun, chef de la principale
formation chrétienne, ainsi que la
libération de la prison de chef milicien
Samir Geagea, à la suite de l’assassinat
de Rafic Hariri, en juin 2005, a renvoyé
le pouvoir matriarcal à ses pénates au
profit des anciens chefs de guerre.
Les Maronites, la
plus importante minorité chrétienne du
Liban et non de l’Orient, par un abus de
position dominante conféré par la France
en sa qualité de puissance mandataire
sur le Liban et la Syrie, ont procédé à
une sorte de captation d’héritage se
présentant comme les dépositaires des
intérêts supérieurs de la chrétienté
d’Orient, réduisant la chrétienté aux
seuls intérêts de l’Eglise maronite,
confondant en somme maronitisme et
chrétienté, se vivant en maître
incontesté du Liban alors que leur
mandat sur l’unique foyer chrétien du
monde arabe aurait dû s’exercer par
délégation des autres communautés
chrétiennes arabes.
L’extravagante
position de Camille Chamoun, président
du Liban (1952-1958), se refusant seul
contre l’ensemble arabe, à rompre ses
relations diplomatiques avec la France,
dans la foulée de l’expédition de Suez,
alors que l’Egypte faisait l’objet d’une
agression concertée entre la France,
Israël et la Grande Bretagne (1956) et
que l’Algérie ployait sous le joug des
ratonnades coloniales, constituait déjà
un indice prémonitoire de la
psychorigidité maronite, de la cécité
politique de ses dirigeants et de la
serviabilité extrême dont témoignent des
membres de cette communauté à l’égard
des puissances occidentales
particulièrement de la France et des
Etats-Unis, se plaçant paradoxalement en
situation de «dhimitude» par rapport à
leurs protecteurs occidentaux, une
servitude qu’il dénonçait du temps de
l’époque ottomane. Le discours
souverainiste des Libanais masque mal
une logique de vassalité à l’ordre
atlantiste.
L’inculpation début
juillet 2010 de plusieurs officiers
supérieurs chrétiens de même que des
cadres supérieurs exerçant des
responsabilités sensibles à un poste
stratégique de leur entreprise de
communications pour «intelligence avec
l’ennemi», au même titre que la
formation d’une armée de supplétif sous
commandement chrétien au service des
israéliens durant la guerre civile
libanaise (1975-1990), ont alimenté la
suspicion sur la loyauté des chrétiens
arabes à leur environnement avec ses
conséquences corrosives sur le sort des
chrétiens dans le monde arabe.
La déposition de
Jeremy Feltman, N° 2 du département
d’Etat, devant le sénat américain, le 22
juin 2010, révélant le montant des
subsides versées par l’administration
américaine depuis 2006 à des
personnalités libanaises, de l’ordre 500
millions de dollars, soit 150 millions
de dollars par an, dans l’unique but de
contrer le Hezbollah libanais, ont fait
converger les regards vers Samir Geagea
tant cet homme, faute d’héritiers, reste
à l’affût d’un rôle générateur de
prébendes et de dividendes aussi bien
politiques que financiers.
Unique dirigeant
libanais condamné pour assassinat,
amnistié et non blanchi, Samir Geagea
s’est ainsi substitué au chef druze
Walid Joumblatt, de nouveau domestiqué
par les Syriens, dans une posture de
nuisance assumée pour le compte du camp
occidental. L’homme lige des saoudiens,
auparavant des Israéliens, n’a de cesse
de plaider pour la neutralisation de
l’armement du Hezbollah, à un moment
particulièrement critique de la
conjoncture régionale, alors qu’un
contentieux sur la répartition des zones
de prospection off-shore au large des
côtes libanaises et israéliennes se
développe entre les deux pays. Il
plaidera, de même, avec la même
constance, la neutralisation du réseau
de transmission de la milice chiite, en
pleine tempête judiciaire consécutive au
démantèlement du réseau pro israélien.
La mise à l’index
de l’unique président chrétien du Monde
arabe, par les puissances occidentales,
dans la foulée de l’assassinat du
premier ministre libano saoudien, le
milliardaire Rafic Hariri, a achevé de
convaincre les principaux chefs
chrétiens, particulièrement la
hiérarchie militaire de l’urgente
nécessité de briser l’emprise de l’ordre
milicien sur la vie publique, et, à
reconsidérer leur alliance exclusive
avec l’Occident dont ils en ont
lourdement pâti sans contrepartie.
Le Liban constitue
une singularité dans le Monde arabe.
Présidé par un chrétien, il est
néanmoins membre de l‘organisation de la
conférence islamique (OCI) qui regroupe
cinquante-cinq pays musulmans. Aucun
pays arabe ni musulman, quelle que soit
son contentieux avec le Liban ou avec
son président, quelle que soit son degré
d’allégeance à l’Occident, n’a suivi les
consignes de boycott décrété par les
pays occidentaux, un indice du décalage
dans la perception des choses entre
arabes et occidentaux.
Sinistrée par le
clanisme et le confessionnalisme,
paralysée par ses divisions durant la
guerre, tenue en suspicion par une large
fraction de la population pour son rôle
occulte avant-guerre, l’armée libanaise,
celle-là même que ses partisans
considéraient comme «la grande muette»
et ses détracteurs comme «la grande
absente», s’est retrouvée en un temps
record à pied d’œuvre sous son
commandement. Un exploit qui constitue
un motif de fierté pour le général Emile
Lahoud, la source de son prestige, le
fondement de son pouvoir. Mais pour son
successeur, Michel Sleimane, point de
bilan.
Protectrice des
chrétiens d’Orient, la France a
institutionnalisé et instrumentalisé le
communautarisme tant au Liban que dans
l’ensemble des pays sous son mandat, au
mépris du principe de la laïcité et de
la séparation de l’Eglise et de l’Etat,
pourtant un des principes fondateurs de
la République française, au nom de la
préservation de prétendus intérêts
supérieurs du pays.
La mise à l’index
du président Lahoud n’est pas un cas
isolé. Il en a été auparavant de même du
génocide impuni des Arméniens par les
Turcs qui verra la France gratifier de
son forfait la Turquie, en détachant le
District d’Alexandrette de la Syrie pour
l’offrir à celui qui était son ennemi de
la première guerre mondiale de surcroît
auteur du premier génocide du XX e
siècle, une opération qui s’est révélée
une aberration de l’esprit
vraisemblablement unique dans l’histoire
du monde, pathétique illustration d’une
confusion mentale au nom de la
préservation de prétendus intérêts
supérieurs de la nation au détriment de
la victime. Comprenne qui pourra.
IV- La
«déconcertante alliance» du Hezbollah et
du général Michel Aoun
La «déconcertante
alliance» du Hezbollah libanais et du
général Michel Aoun, pour reprendre
l’expression des analystes occidentaux,
apparaît dans cette perspective comme la
résultante et la réplique de la
«déconcertante attitude» des Occidentaux
à l’égard des aspirations du Monde
arabe, particulièrement en ce qui
concerne la Palestine. Sur le plan
interne libanais, elle constitue
l’alliance de revers à la «déconcertante
alliance» entre les sunnites libanais et
les anciens chefs maronites des milices
chrétiennes, dont l’office de requiem
célébré à la mémoire de Rafic Hariri à
l’Eglise maronite de Paris, dans la
semaine qui a suivi l’assassinat du
milliardaire libano saoudien, a scellé
dans l’ordre symbolique le double
ralliement du clan Hariri au «maronitisme
politique» et de la frange pro
américaine des Maronites à l’Islam
Wahhabite, signant par la même le
dégagement des sunnites du combat
nationaliste, au profit des chiites, set
la relégation des maronites au rôle
d’appoint de la stratégie saoudienne.
La «déconcertante
alliance» Aoun Hezbollah est en fait
l’alliance de deux personnalités
d’extraction modeste, issues de la
banlieue populeuse de Beyrouth,
respectivement Haret Hreik pour le
chrétien et Bourj Brajneh pour le
chiite, deux dirigeants d’envergure
nationale.
Une alliance, en
tout état de cause, infiniment moins
extravagante que l’invraisemblable
alliance sulfureuse entre le défenseur
du «Foyer chrétien» au Liban, Samir
Geagea, à l’aventurisme toujours si mal
inspiré, et, les Salafistes wahhabites,
les propagateurs zélés du projet de
création d’«Emirats islamiques» au Liban
et en Syrie, en contradiction avec les
intérêts généraux à long terme de la
chrétienté.
L’alliance
Hezbollah Michel Aoun a brisé
stratégiquement le clivage confessionnel
islamo chrétien de l’équation libanaise,
de la même manière que l’alliance
Syrie-Iran a brisé le clivage ethnique
arabo persique de la rivalité régionale
entre les deux chefs de file de l’Islam,
l’Arabie saoudite sunnite et l’Iran
chiite.
Un constat sans
équivoque, tiré des enseignements de
l’histoire récente, d’une analyse
concrète d’une situation concrète: Tous
les grands exodes des chrétiens d’Orient
auront été consécutifs à des opérations
occidentales. Il en été de la création
d’Israël qui a produit un fort exode des
chrétiens palestiniens (vers la
Californie et l’Amérique latine), comme
de la guerre civile interlibanaise
(guerre dérivative à l’échec américain
au Vietnam) qui a provoqué un fort exode
des chrétiens libanais vers le Canada,
l’Australie, la France et les deux
Amériques, comme de l’invasion
américaine de l’Irak qui a provoqué un
fort exode des chrétiens irakiens
(assyro chaldéens). Comme il en a été
auparavant du génocide arménien qui a
produit un fort courant d’émigration des
arméniens chrétiens vers la France, les
Etats Unis et le Liban, alors que la
Turquie non seulement gratifiée par la
France du district d’Alexandrette, était
hissée au rang de partenaire majeur de
l’Occident au sein de l’Otan face au
monde arabe et à l’Union soviétique à
l’époque de la guerre froide
soviéto-américaine (1945-1989).
Au vu de ce bilan,
la conclusion s’impose sans appel à
savoir que les chrétiens arabes auront
toujours été les grands sacrifiés au
bénéfice de la stratégie israélo
américaine et qu’il importe que leur
sort soit désormais scellé dans son
ancrage, avec son environnement arabe,
tant il est vrai que les chrétiens
arabes n’ont pas vocation à devenir une
diaspora complémentaire des diasporas
dans les pays occidentaux, à titre de
vestige d’une civilisation perdue.
Mauvais remake d’un
vieux film de quarante ans, la campagne
présidentielle libanaise dans sa version
2014 a constitué la parfaite
illustration de la nécrose du système
politique libanais du fait du
confessionnalisme, cadeau empoisonné de
la France, leur «tendre mère» à ses
«enfants chéris» libanais.
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