Actualité
Pour rendre sa souveraineté au peuple
français,
la France doit sortir de l’euro, de l’UE
et de l’OTAN
par la voie progressiste et
révolutionnaire !
PRCF
Vendredi 29 mats 2019
Par
Georges Gastaud, philosophe,
auteur de Marxisme et universalisme
(Delga), Annie Lacroix-Riz,
professeur émérite d’histoire
contemporaine à l’Université Paris VII
Denis Diderot, Fadi Kassem, professeur
agrégé d’histoire, militants du Pôle
de Renaissance Communiste en France –
Traité germano-français
d’Aix-la-Chapelle, Lettre d’E.
Macron aux citoyens d’Europe, réponse
cinglante de la future chancelière
allemande à Macron… ou comment
l’impérialisme allemand humilie
ouvertement son petit collaborateur
élyséen.
Pour rendre sa
souveraineté au peuple français,
construire des relations fraternelles
entre peuples allemand et français et
rouvrir la route du progrès social, de
la démocratie et de la paix en Europe, la
France doit sortir de l’euro, de l’UE
et de l’OTAN par la voie progressiste et
révolutionnaire !
Sitôt promu lauréat
du Prix Charlemagneà
Aix-la-Chapelle, le chef de l’Etat
français a signé, sans le moindre débat
public préparatoire, un nouveau Traité
franco-allemand qui vise moins, selon
ses propres termes, à renforcer l’amitié
entre les deux peuples qu’à précipiter
l’intégration franco-allemande. Cet
effarant « traité » transformant la
France en zone « frontalière » de l’Allemagne,
dont la germaniste Yvonne Bollmann vient
de décrire les minutieux préparatifs
allemands, unilatéraux, depuis 2016 (1),
crée notamment une Chambre
franco-allemande des députésqui est
notamment chargée de « faire converger »
les deux pays sur tous les terrains,
économique, culturel et institutionnel.
Dans les conditions du criant
déséquilibre actuel entre Allemagne et
France, ce traité signifie surtout l’accélération
brutale de l’alignement français sur
l’« ordo-libéralisme » à l’honneur
outre-Rhin.Sous couvert
d’intégration européenne et de
rapprochement franco-allemand, la
signature du traité annonce un puissant
coup d’accélérateur aux
contre-réformes qu’avait déjà préparé la
phrase effarante prononcée par E. Macron
au Conseil européen de Bruxelles (23
mars 2018) « Les réformes
entreprises en France sont ce que nombre
de nos partenaires, et en particulier
l’Allemagne, attendaient depuis de
nombreuses années, et à juste titre ».
Cela se traduit ainsi…
– sur
le terrain social : par la
privatisation d’EDF, de la SNCF, des
aéroports, casse des retraites par
répartition, des statuts publics et du
Code du travail issus la
Résistance ;
– sur
le plan institutionnel : par la
désarticulation de la République une,
laïque et indivisible, et aussi par la
résorption des 36 000 communes de France
au profit des « métropoles » et de la
régionalisation à l’allemande ;
– sur
le plan militaire : par la
construction d’une armée dite européenne
alors que le budget militaire allemand
augmente à toute vitesse…
– sur
le plan culturel :par l’accélération
de la casse de l’histoire, révisée sur
le modèle idyllique du « Manuel
d’histoire commun franco-allemand »,
caricature de propagande. Ce n’est
toutefois pas l’allemand qui est promu
par les deux oligarchies complices de
Berlin et de Paris, et encore moins le
français si malmené sur notre sol, mais
le tout-globishdu Traité
transatlantique que relance actuellement
le gouvernement Merkel (2).
Tout cela a été
facilité et sournoisement précédé par la
récente fusion des deux départements
alsaciens, en violation du référendum portant
sur cette question, pour former une
« collectivité unique » qui s’est
immédiatement proclamée tournée vers
l’Axe rhénan. En remerciement de quoi la
dauphine désignée de Mme Merkel et
future chancelière, Annegret Kramp-Karrenbauer,
dite
AKK, vient d’exiger le transfert
définitif du Parlement de Strasbourg à
Bruxelles…
Le retour de
l’« Ordre nouveau » allemand
En réalité, sous le
masque défraîchi du « couple
franco-allemand », dont le centre de
gravité s’est définitivement décalé vers
Berlin depuis l’annexion-Anschluss de la
RDA(3), le démantèlement de l’URSS, la
partition « démocratique » de la
Tchécoslovaquie et le partage
impérialiste violent de
l’ex-Yougoslavie, le « partenariat »
franco-allemand dissimule de moins en
moins le phagocytage rapide de la France
par son puissant voisin. Une servitude
volontaire qu’ont formidablement
renforcée la liquidation du camp
socialiste européen, l’accélération de
la « construction » euro-atlantique
supranationale et la mise en place de
l’euro, notoire prolongement, prévu
depuis les années 1940, du deutsche
Mark, et centré sur les besoins de
la grande industrie allemande. Qui peut
nier désormais que chaque étape de
ladite « construction » européenne a été
marquée depuis l’ère Schuman-Monnet de
la Communauté européenne du charbon
et de l’acierpar un affaissement,
voire par un écroulement du produire
en France industriel et agricole, par
la privatisation massive du secteur et
des services publics à la française, par
l’austérité sans fin imposée aux
travailleurs de France, d’Allemagne et
du reste de l’Europe, par l’humiliante
oppression subie par les pays de l’Est
et du Sud européens, tuteurés par la
Troïka ou par ses succédanés.
Sans parler de
l’accélération permanente de la course
aux armements dans le cadre d’une future
confrontation militaire avec le peuple
russe qui, même placée sous la tutelle
provocante de l’impérialisme étatsunien,
prend de plus en plus des allures de
revanche sur Stalingrad. On est loin de
l’hommage rendu par le Général De
Gaulle, en visite à Moscou en juin 1966,
à « cette grande Russie, que j’avais
vue pendant le drame de la guerre,
tendue dans l’effort guerrier qui devait
assurer sa victoire [contre le Reich
nazi], et pour une très large part,
celle de la France et de nos Alliés».
Il l’avait dit clairement à Paris le 2
décembre 1944 : « Les Français savent
ce qu’a fait pour eux la Russie
soviétique et ils savent que c’est elle
qui a joué le rôle principal dans leur
libération». Juste avant
d’aller conclure à Moscou « la belle
et bonne alliance »
franco-soviétique visant à empêcher dans
l’avenir l’Allemagne de menacer à
nouveau la paix de l’Europe et du monde.
La décomposition
germano-atlantique de l’impérialisme
français éclate à l’inverse dans la Lettre
ouverte que M. Macron, qui
se voit peut-être déjà en premier
président de l’Empire européen (alias
« Europe fédérale »),a adressée aux
citoyens européens en court-circuitant
le peuple et les députés français. A
peine cette lettre condescendante et
arrogante –conformément au discours
jupitérien qui ridiculise notre pays à
l’extérieur – était-elle parue qu’AKK a
diffusé sa propre réponse traduite en
plusieurs langues européennes :
évidemment, elle renchérit sur la
nécessité de l’intégration européenne,
attendu que la construction de cet Empire(le
mot est désormais froidement assumé par
Bruno Le Maire(4)) serait hautement
profitable à la « République de Berlin »
qui la domine politiquement et
économiquement de la tête et des
épaules. Et cela est déjà en soi une
fort mauvaise nouvelle pour tous ceux
qui constatent que le retour en force
du capitalisme allemand sur la scène
géopolitique s’accompagne, dans toute
l’Europe :
1°)d’unebanalisation-réhabilitation
des extrêmes droites et des néonazis (à
Kiev, dans les Etatsbaltes, à Budapest,
sans oublier Vienne et le Bundestag où
siègent désormais quatre-vingt-dix
députés racistes),
2°)d’une criminalisation
galopante des partis communistes comme
en Ukraine et en Pologne,
3°) d’une répression
accrue du mouvement ouvrier et
démocratique : symbole de la fausse
gauche, Alexis Tsipras a soutenu le
projet de l’UE d’interdire pratiquement
la grève en Grèce ; en France la
répression des Gilets jaunes bat de
sanglants records).
Macron, nouvel
avatar de la grande bourgeoisie
collaboratrice
La servilité de
Macron à l’égard de Merkel, comme à
l’égard de son autre grand suzerain
méprisant, Donald Trump, a, selon la
tradition, été fort mal récompensée par
le maître allemand. Comme ce fut déjà le
cas dans l’entre-deux-guerres puis en
1940, où l’oligarchie française,
préférant Hitler à la République et au
Front populaire, avait fait clairement
le choix de la défaite– de même
qu’Adolphe Thiers avait préféré la
défaite et les négociations avec
Bismarck à la résistance nationale
populaire incarnée par les Communards en
1870-1871) ‑‑, chaque courbette
supplémentaire de la grande bourgeoisie
hexagonale déclenche une cascade de
nouvelles humiliations. Ainsi, la
lettre aux Européens d’AKK ne se
contente-t-elle pas d’opposer une sèche
fin de non-recevoir au locataire de
l’Elysée sur la plupart de ses
revendications européennes : pas de
mutualisation des « dettes
souveraines », pas de politique de
relance européenne, pas de partage réel
de la gouvernance dela zone euromark,
pas d’amendement des traités, pas
d’européanisation de la protection
sociale et du salaire minimal… La
probable future chancelière renchérit :
elle exige de transformer le siège
français au conseil de sécurité de l’ONU
en siège pour l’UE ; elle réclame en
prime un « porte-avion européen »,
excellente couverture pour les
retrouvailles officielles de
l’impérialisme allemand avec l’affichage
d’une posture militaire géopolitiquement
offensive. Bref, c’est toujours la même
alternative piégée : quand
l’impérialisme allemand ne peut avancer
trop ouvertement sous son nom, il joue
au « meilleur élève européen » (selon
l’excellente formule de l’historien
Pierre Guillen) et réclame « plus
d’Europe ». Quand il peut, de plus en
plus ouvertement et fréquemment, se
passer de l’avis des vingt-cinq autres
pays en général, et de celui de son
vassal français en particulier, il
affiche cyniquement sa volonté d’avancer
seul et célèbre les vertus de
l’Etat-nation : « Le fonctionnement
des institutions européennes ne peut
revendiquer aucune supériorité morale
par rapport à la coopération entre les
gouvernements nationaux. Refonder
l’Europe ne se fera pas sans les
Etats-nations », affirme AKK. Berlin
ne vilipende ainsi que le
« nationalisme » des autres Etats, quand
il s’agit de briser leurs résistances à
l’hégémonisme allemand….
Malgré toutes les
humiliations subies et aussitôt
ravalées, les gouvernements
maastrichtiens qui se succèdent en
France ne cessent de ramper(etcomment
n’en irait-il pas de même avec le RN au
pouvoir, ce parti créé par des
admirateurs proclamés de Vichy !).
Craignant leur propre peuple jugé
incurablement frondeur, ils n’ont cessé
historiquement de se soumettre au grand
protecteur germanique depuis que
les Emigrés de Coblence ont compté sur
« l’Europe » aristocratique pour
anéantir la Révolution française et
rétablir leurs privilèges. A partir des
années 1970, avec une énergie renforcée
par la haine des grévistes de mai-juin
1968, la grande bourgeoisie représentée
par Giscard, puis par Mitterrand, a
froidement sacrifié sa grande industrie
(mines, sidérurgie, métallurgie…).
C’était un des moyens de se débarrasser
de la remuante classe ouvrière française
qui avait fait 1936, fourni avec les FTP
la majorité des effectifs de la
Résistance intérieure, décisive dans la
libération du pays, et animé tous les
combats populaires depuis lors, Mai 1968
compris. Bien évidemment, le
soulèvement calomnié et durement réprimé
des Gilets jaunes ne peut qu’encourager
les oligarques « français » à rallier à
100% le Modell Deutschland qu’ils
admirent tant. Quel « modèle » en
effet que l’« Agenda » Schröder-Hartz
avalisé depuis les années 2000 par les
syndicats de collaboration de classes et
par la social-démocratie : cet « enfer
du miracle allemand »(5)a enterré,
dans des conditions de violence
anti-salariés inédite depuis les années
1933-1945, les acquis ouvriers des
années où la RFA capitaliste était tenue
en respect par la concurrence sociale de
la RDA socialiste.
Pour une France
franchement insoumise : FREXIT
PROGRESSISTE !
Plus que jamais,
cela signifie une marche accélérée à
la liquidation de la Franceen tant
qu’Etat souverain et indépendant, doté
d’une industrie, d’une agriculture
exportatrice (la lettre d’AKK est
menaçante à l’égard de l’ainsi-dite Politique
agricole commune), d’une structure
administrative héritée de 1789, d’une
langue internationalement partagée, sans
parler des grands acquis laïques de 1905
et des conquêtes ouvrières du Front
populaire et de la Résistance.
Qu’importe aux oligarques
« français » cette mort programmée de la
France! Qu’importe aussi à la fausse
gauche, à l’extrême gauche bobo et aux
états-majors syndicaux euro-formatés qui
refusent d’affronter l’UE et qui
répandent le mensonge éculé de l’« Europe
sociale, démocratique et pacifique ».
Une UE sous condominium de Bruxelles, de
Berlin, de Washington et de l’OTAN, qui
ne promet plus que des contre-réformes,
qui promeut le « dialogue
institutionnel avec les Eglises »,
qui coopère sans pudeur avec des
gouvernements nationaux fascisants et
qui prépare la guerre antirusse dans le
cadre d’une armée européenne arrimée à
l’OTAN…
Raison de plus pour
les militants franchement communistes et
franchement progressistes de France,
mais aussi pour tous les véritables
patriotes antifascistes, de dénoncer
sans complexe l’écrasante et arrogante
Europe allemande, comme le firent
successivement Jacques Duclos et Georges
Marchais. Raison de plus pour tendre une
main fraternelle aux communistes et aux
progressistes allemands, pour défendre
l’enseignement de l’allemand et des
autres langues dans notre pays, pour
promouvoir l’Europe des luttes. Et
surtout, pour réclamer sans
circonlocution que la France sorte de
l’euro, cette austérité continentale
faite monnaie, de l’UE, cette prison des
peuples, de l’OTAN, cette machine à
attirer la guerre sur le sol européen,
dans la perspective de sortir du
capitalisme et de construire le
socialisme dans notre pays. Haut et
fort, il nous faut aujourd’hui associer
de nouveau le drapeau tricolore au
drapeau rouge, la Marseillaiseà
l’Internationaleet reprendre le
mot d’ordre central du programme Les
jours heureuxbâti par le CNR, qui y
appelait à « mettre le monde du
travail au centre de la vie nationale »
en faisant de la classe ouvrière et de
ses luttes la championne de
l’indépendance française. A l’heure
où l’oligarchie strangule notre pays,
c’est la meilleure stratégie possible
pour isoler le grand capital, forger le
rassemblement populaire majoritaire et
construire les conditions de masse de la
révolution socialiste !
(1)Y. Bollmann
vient d’en décrire les minutieux
préparatifs allemands, unilatéraux,
depuis 2016, dans une « tribune libre »,
« Traité d’Aix-la-Chapelle: de quel
droit ? »,12 mars 2019) et son lien (https://www.xn--lecanardrpublicain-jwb.net/spip.php?auteur22).
(2) Au point de
déclencher la colère de l’ambassadeur de
France auprès de l’UE, Philippe Déglise-Costa,
en avril 2018 :https://www.nouvelobs.com/politique/20180426.OBS5780/agace-par-le-tout-anglais-l-ambassadeur-francais-quitte-une-reunion-de-l-ue.html
(3) L’ouvrage de
Vladimiro Giacché, Le Second
Anschluss. L’annexion de la RDA
(L’unification de l’Allemagne et
l’avenir de l’Europe), Paris, Delga,
2015, mérite d’être connu des Français.
(4) Le 9 novembre
2018, le ministre de l’Economie a publié
sur Tweeter : « L’Europe doit
s’affirmer comme un empire paisible dans
les 25 années qui viennent. »,
position réaffirmée dans la presse
allemande. Voir les liens suivants : https://twitter.com/BrunoLeMaire/status/1060812167182761984et
https://www.handelsblatt.com/politik/international/europapolitik-frankreichs-finanzminister-macht-druck-auf-berlin-europa-muss-ein-empire-werden/23600498.html?ticket=ST-393268-SEgfVK9zivFfJhsWJNpI-ap2
(5) Olivier Cyran, Le
Monde diplomatique, 1er septembre
2017, et bibliographiehttps://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9formes_Hartz
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