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Le Gros Edgar et le quartier La Vega :
deux temps et toujours...

Neirlay Andrade


Le "Gros Edgar", militant du quartier populaire La Vega, Caracas.

Dimanche 22 décembre 2013

La Vega, août 1974

Le Gros Edgar cessa de manger. Des curés aussi; d’autres compagnons suivirent la ligne. Non, ce n’était pas le jeûne fixé par le calendrier catholique. Ils s’étaient lancés dans une grève de la faim parce qu’ils occupaient un terrain et revendiquaient le droit au logement pour les sinistrés du quartier La Vega.

Le problème était celui que les pauvres ont toujours subi : l’exclusion” dit le Gros Edgar sans sursaut dans sa voix lente et basse. La réponse aussi fut “celle de toujours” : les matraques de la police politique (Disip). Mais les coups reçus eurent une répercussion : des gens déboulèrent de l’autre bout du pays (de Barquisimeto, État de Lara); d’autres affluèrent de diverses zones de Caracas, les voisins de La Vega se rebellèrent. Le président social-démocrate Carlos Andrés Pérez fut contraint de… promettre des maisons.

Le Gros Edgar se remit à manger. Les curés et les compagnons aussi. L’argent arriva, l’entreprise privée arriva, l’ingénieur arriva, l’architecte arriva. Les immeubles étaient là : une première tour… une deuxième tour… puis l’argent s’épuisa (?!) et la désillusion arriva : les appartements furent vendus et les sinistrés retournèrent à leur vie de zinc, de ravins, et de glissements de terrain. 

La Vega, 11 février 2010 (douze ans après l’élection de Chavez)

Le jour tombe. Le Gros Edgar prend l’autobus avec Mariela Machado. Il l’a vue grandir; elle jouait de la guitare chez lui quand elle était petite; il est fier d’elle et… des autres, car ils ne sont pas seuls : 80 familles voyagent non pas dans un autobus mais dans quatre. Ils font irruption sur le terrain vague qui servait de stationnement-atelier-de-carrosserie-pompe privée de gasoil-bla-bla-bla… 

Les tours avaient déteint sous les innombrables pluies; comme deux blessures ouvertes dans la mémoire du Gros Edgar. Une fois de plus, le terrain, une fois de plus, les mêmes de toujours. 

Deux ans d’assemblées avaient servi de prélude de cette occupation. Mariela réussit à briser la peur de ses compagnons. Ils se renforcèrent en adhérant au Movimiento de Pobladores (mouvement d’habitants). A partir de l’occupation, ils ont mis un an pour convaincre de la justesse de leur lutte les chauffeurs qui y parquaient leurs véhicules. 

Campement de pionniers Kaika Shi

Niveler le terrain à coups de pioches et de pelles, dresser les poutrelles, les plier, remuer le ciment frais, tamiser le sable, porter du ciment, les mains calleuses. Études de sol et traçage de plans. Six groupes de 14 à 15 familles. Gardes de 24 heures. Journées de travail de 16 heures 

Le financement est arrivé : 14 milliards de bolivars pour construire 80 maisons. Cette fois, l’argent ne s’est pas épuisé : 92 appartements, plus une petite structure de trois étages qui à court terme servira de centre de formation intégrale pour les habitants. 

Le petit-fils du Gros Edgar s’appelle Kaika Shi, ce qui veut dire “soleil et lune” dans une langue indigène dont il ne se souvient pas aujourd’hui. En hommage à la lutte pour les siens, l’urbanisme et le campement de pioniers portent ce nom.

La Vega, toujours…

Pour le Gros Edgar le plus difficile a été de comprendre que “les succès ne se recueillent pas tout de suite”.  En août 2014 on fêtera les 40 ans de cette histoire : “aujourd’hui, au bout de 39 années, nous voyons les fruits. Beaucoup des participants proviennent de la même école que moi : La Vega; ce fut mon école politique. Je ne suis pas sociologue, je ne suis pas économiste : je suis un citoyen qui lutte”.

Le vieux fait brièvement le tour de l’origine de ceux qui construisent aujourd’hui leurs logements de leurs propres mains. Ce sont ceux qui dans les années 90 militaient dans l’Assemblée des Quartiers de Caracas; ce sont les enfants de ceux qui se sont battu dans les années 70 pour installer le service de l’eau dans le secteur; les héritiers de ceux qui ont collecté petit à petit des fonds pour soutenir la guérilla José Leonardo Chirinos dans les années soixante.

Ce sont les invisibles qui n’ont un corps que lorsqu’ils sont assassinés et qui finissent dans les journaux à sensation. “La presse parle de La Vega tous les week-ends pour le bilan des morts; mais jamais de la violence structurelle du système capitaliste, encore moins des organisations populaires qui bataillent contre l’exclusion”. 

S’il a ressenti la peur dans une de ses actions comme la lointaine grève de la faim de sa jeunesse ou l’occupation du terrain en 2010 ? Peu importe. Edgar avait et garde une certitude : “Nous sommes innocents; nous avons une idéologie politique et nous croyons dans un projet historique : une société d’hommes et de femmes égaux”.

Aucune de ces occupations n’a été menée pour obtener un toit individuel. Pourquoi, dans ce cas, risquer sa peau ? “Il s’agit de lutte de classes” explique-t-il, brossant rapidement le sens de l’Histoire : "Bolívar mène une lutte d’indépendance contre sa classe d’origine. Il comprend la profondeur de la lutte et l’oligarchie elle-même le condamne. Bolívar meurt loin de sa terre, dans la pauvreté, et il meurt dans ces conditions parce que tous ceux qui se battent aux côtés du peuple, la classe dominante le leur fait payer”.

L’afro-descendante Mariela Machado complète la dissertation du gros : “la lutte est pour la vie, il n’y en a pas d’autre”. Elle remercie l’État pour le transfert des ressources mais ajoute aussitôt : “l’assistentialisme ne génère rien; pas même la conscience. Pour fortifier la lutte des classes le peuple doit être l’acteur central de la solution du problème".

Auteur : Neirlay Andrade

Photos : Sabrina Porras (Venezuela) / Prensa de Frente (Argentine)

Source : http://comunaadentro.blogspot.com/2013/12/la-vega-dos-tiempos-y-siempre.html

Traduction de l’espagnol : Thierry Deronne

 

 

   

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Source : Venezuela infos
http://venezuelainfos.wordpress.com/...

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