Actualité
Pascal Boniface porte plainte contre la
« Brigade juive »
Nadir Dendoune
Pascal
Boniface, directeur de l’Institut de
relations internationales et
stratégiques (l’IRIS),
spécialiste de la question
israélo-palestinienne. MANUEL COHEN /
AFP
Mercredi 19 février 2020
Pascal Boniface est soulagé. Sa plainte
contre la « Brigade juive » pour
dégradations, initialement refusée,
vient d’être acceptée. « C’est le
commissariat du 11è qui m’a appelé pour
nous annoncer la bonne nouvelle »,
témoigne le géopolitologue français,
spécialiste de la question
israélo-palestinienne et qui est
régulièrement la cible d’attaques
émanant des mouvements pro-israéliens. «
C’est une victoire pour la liberté
d’expression et contre les violences
exercées pour la limiter », s’est ainsi
félicité Pascal Boniface.
Le 22 janvier
dernier, l’Institut de relations
internationales et stratégiques (l’IRIS)
dont Pascal Boniface est le directeur
reçoit dans ses locaux parisiens Charles
Enderlin, l’ancien correspondant de
France 2 en Israël, pour une conférence
autour de son dernier livre « Les Juifs
de France entre République et sionisme»,
paru le 16 janvier au éditions du Seuil.
Salle comble, près de 500 personnes sont
présentes.
« Des personnes ont
balancé des boules puantes à l’intérieur
de la salle. L’odeur était tellement
insoutenable », explique Pascal
Boniface. « Certains avaient du mal à
reprendre leur souffle », précise encore
le politologue.
La « Brigade juive
» revendiquera cette action en publiant
sur sa page Facebook un peu plus tard
dans la soirée une vidéo, avec ce
commentaire : « Aujourd'hui, nous
sommes passés dire bonjour à Charles
Enderlin pour lui faire savoir que ses
idées sentent mauvais et qu'on a pas
oublié l'affaire Al-Dura et Daniel Pearl
».
Depuis près de
vingt ans, depuis « l’affaire Al-Dura »,
Charles Enderlin est la bête noire des
soutiens inconditionnels de l’Etat
d’Israël. Le journaliste, aujourd’hui à
la retraite, est harcelé et reçoit
régulièrement des menaces de mort.
Les mouvements
pro-israéliens accusent à tort Charles
Enderlin d’avoir bidonné un reportage
datant du 30 septembre 2000 montrant la
mort d'un jeune Palestinien de douze
ans, Mohamed Al-Dura, dans les bras de
son père. Selon eux, le journaliste
aurait agi ainsi afin de discréditer
l’armée israélienne.
Une partie de ses
détracteurs, des complotistes,
l’accusent même d’avoir couvert une mise
en scène, et affirment que l’enfant
serait vivant, sans toutefois en
apporter la moindre preuve factuelle.
Dans le monde
arabe, la nouvelle de la mort de Mohamed
Al-Dura suscite à l’époque une émotion
considérable. Mohamed Al-Dura devient le
symbole de la violence israélienne
contre les Palestiniens. Sa photo fera
le tour du monde. Elle figure même sur
la vidéo de l’exécution du journaliste
américain Daniel Pearl par des
terroristes au Pakistan en février 2002.
Après une procédure
judiciaire longue de 13 ans, la justice
française donnera raison définitivement
à Charles Enderlin. Cela n’empêchera pas
les menaces à l’encontre du journaliste
de perdurer.
« L’objectif de
ces extrémistes est de dissuader les
gens d’organiser des débats de ce genre
», dénonce Pascal Boniface. «Je
remarque au passage que des gens
d’habitude très sensible à cette
question de liberté d’expression,
réagissant ordinairement au quart de
tour ne se sont pas manifestés cette
fois-ci », raille le directeur de
l’IRIS, pas découragé pour autant.
« On continuera
à organiser des débats. Ce n’est pas
normal que dans notre pays, des groupes
extrémistes peuvent agir en toute
impunité. On aimerait que la justice
fasse son travail. La liberté
d’expression est réservée à tout le
monde », conclut Pascal Boniface.
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