Algérie Résistance
Prof. Patrick Bond :
« Les idées économiques obsolètes et la
corruption personnelle sont étroitement
liées en Afrique »
Mohsen Abdelmoumen
Professeur
Patrick Bond. DR.
Dimanche 11 juin 2017
English version
here Mohsen
Abdelmoumen : Le G20 auquel vous
allez assister aura lieu prochainement à
Hambourg, en Allemagne. À votre avis,
quels seront les enjeux stratégiques de
ce sommet ?
Prof. Patrick Bond :
Il y a trois domaines de danger extrême
auxquels nous devrions attendre que le
G20 s’attaque, s’ils sont bien l’élite
mondiale des gestionnaires du bien-être
humain qu’ils prétendent être : la
géopolitique, l’économie et
l’environnement. Ils ne résoudront pas
les crises couvant dans ces domaines,
bien sûr, parce qu’ils restent constipés
en tant que groupe de leaders ne
disposant pas des outils et de
l’idéologie nécessaires pour résoudre
les crises les plus intenses du monde.
Sur le plan politique, les conflits
armés les plus compliqués ont lieu en
Syrie et au Moyen-Orient, avec des
tensions américano-iraniennes
renouvelées et l’arrivée d’une guerre
accrue en Afghanistan ; en Ukraine et en
Pologne où l’OTAN est allé trop loin ;
au Cachemire entre l’Inde et le
Pakistan ; et dans la péninsule coréenne
et en Mer de Chine du Sud, tous deux
impliquant le Pentagone déchaîné. Le G20
contient la plupart des principaux États
nécessaires pour résoudre ces conflits
dont ils sont acteurs, mais il est
évident que le leader le plus
imprévisible et le plus dangereux,
Donald Trump, n’a pas la capacité
d’attention pour faire autre chose que
promouvoir un banal intérêt personnel
pour l’armée et les entreprises
américaines.
Les guerres majeures et les conflits
civils extrêmes au cours des deux
dernières années ont eu lieu en Syrie,
en Afghanistan, en Turquie, au Pakistan,
au Mexique et en Afrique du nord et
centrale. Il existe une corrélation
étroite entre de tels conflits et de
faibles niveaux de « bien-être »,
identifiés dans le répertoire annuel du
bonheur mondial.
Emplacements des conflits en
cours dans le monde entier et indice du
bonheur, 2015
Source:
Rapport du bonheur mondial 2016 Pendant ce temps, deux processus
assez imprévisibles sont en jeu, centrés
sur les relations russes et chinoises
avec Washington. Tout d’abord, en
Russie, Vladimir Poutine a été accusé
par Hillary Clinton et la CIA d’avoir
aidé Trump à gagner les élections de
novembre 2016, avec le piratage et la
fuite des emails internes de Clinton et
de ceux de ses alliés. Cela n’a pas été
prouvé, bien que les principaux médias
américains en soient arrivés à des
conclusions prématurées dans une
explosion de Moscophobie sans précédent
depuis au moins trois décennies. Quant
aux révélations de WikiLeaks, Julian
Assange a nié avoir eu un accès direct à
des courriels fuités provenant de
quelque source russe que ce soit. Mais
en raison de la haine de Poutine pour le
Département d’État US suite au putsch de
5 milliards de dollars de ce dernier en
Ukraine au début de l’année 2014 qui a
mené à l’invasion de la Crimée, Il a
manifestement favorisé l’élection de
Trump et il avait la capacité
d’espionnage pour faire une
intervention. Le secrétaire d’État de
Trump est le magnat pétrolier pro-russe,
le directeur général d’Exxon Mobil, Rex
Tillerson. Mais le contrecoup intense de
l’establishment de Washington semble
avoir modifié de façon décisive les
relations de pouvoir de la nouvelle
administration, laissant les antirusses
à la direction du Conseil national
de Sécurité. Mais les zigzags, la
confirmation du pouvoir de l’État
profond sur Trump et les dangers de sa
survie en tant que président, sont
révélateurs et vertigineux.
Il en va de même pour la Chine, où
les relations avec Washington se sont
aggravées dans les mois précédents et
les semaines qui ont suivi les élections
de novembre dernier, mais avec un
semblant de rapprochement. La Mer de
Chine méridionale, un site de conflit
depuis 2011, a donné « le pivot vers
l’Asie » à Obama, impliquant le
transfert de près des deux tiers des
forces navales américaines vers le
Pacifique d’ici 2020 et plus de 400
bases militaires américaines entourant
la Chine. À court terme, le conflit avec
la Corée du Nord peut assombrir la
préoccupation de Trump selon laquelle la
concurrence commerciale – en particulier
les exportations chinoises
subventionnées et la dévaluation des
devises, ainsi que le piratage
informatique commercial chinois présumé
– est à l’origine de la
désindustrialisation américaine. Il a
reculé sur toutes ces accusations une
fois que Xi a visité Trump et lui a
clairement expliqué la susceptibilité
coréenne, et par hasard une fois
qu’Ivanka Trump a simultanément obtenu
des autorisations de marque déposée
longtemps retardées. Peut-être que le
Global Times, un porte-parole
de l’État chinois, l’a mieux dit en
décembre dernier, décrivant Trump comme
n’ayant « aucune connaissance de ce dont
il parle. Il a surestimé la capacité
américaine de dominer le monde et ne
comprend pas la limitation des pouvoirs
américains dans l’ère actuelle ».
La (mauvaise) gestion de la
crise économique
En conséquence, si le gouvernement
Tory remporte la réélection en
Grande-Bretagne, l’alignement dominant
du G20 semble être la combinaison de
politiques socioculturelles
d’extrême-droite et d’intérêts
méga-corporatifs. Il est apparu
clairement dans la hausse de Wall Street
immédiatement après l’élection de Trump
que les investisseurs s’attendent à ce
que les stocks de l’industrie militaire,
financière et des combustibles fossiles
prospèrent beaucoup plus que tout autre,
alors que l’indice Dow Jones atteint un
nouveau record. Trump promet d’abaisser
les impôts des sociétés de 35 à 15% et
d’injecter rapidement un milliard de
dollars de ce qui pourrait être nommé
des dépenses d’infrastructure
« Keynésiennes sales » – des aéroports,
des routes et des ponts à forte teneur
en carbone – ce qui annoncerait un
nouveau boom de la dette de l’État
américain. Parallèlement à la hausse des
taux d’intérêt de la Réserve fédérale en
décembre 2016 et à la hausse de 12% des
prix à Wall Street de novembre 2016 à
avril 2017, cela entraînera en retour
une plus grande partie du capital
liquide mondial dans l’économie
américaine, semblable aux fonds de
roulement de 2008-2009 et après 2013 qui
ont affaibli toutes les monnaies des
marchés émergents en dehors du yuan
chinois.
Étant donné que cette volatilité
économique reste une menace majeure à
travers le monde, nous pouvons nous
attendre à un développement inégal
encore plus extrême, à une inégalité de
revenus sans précédent, à une
financiarisation excessive et à une
surproduction. La « stagnation
sectorielle » qui en résulte est « le
défi économique déterminant pour la
politique macroéconomique au cours de la
prochaine décennie », selon l’ancien
secrétaire du Trésor américain Lawrence
Summers. Bien qu’il soit lui-même
discrédité – en tant que principal
responsable de la déréglementation
financière la plus dangereuse (la
division entre banque d’investissement
et banque commerciale à la fin
1999-2000) – Summers diagnostique
maintenant une grave déficience dans la
gestion économique mondiale, y compris
le G20.
En dépit de ces dangers, les
gestionnaires économiques globaux du G20
semblent incapables de prendre des
mesures décisives. Différentes
tentatives pour restaurer la confiance
des entreprises dans la plupart des
régions du monde semblent être en panne.
Les institutions multilatérales manquent
de légitimité et de pouvoir. En outre,
diverses sortes de luttes de classe se
répandent à travers le monde, révélant
des systèmes redistributifs très
faibles. Les réfugiés des régions les
plus pauvres et des zones de guerre se
déplacent à un rythme sans précédent
vers les frontières occidentales. En
conséquence, les mouvements
néo-fascistes ont gagné en force aux
États-Unis, au Royaume-Uni, en France,
aux Pays-Bas, en Allemagne et en Grèce.
Cette stagnation est évidente dans ce
qui est de plus en plus appelé « démondialisation »
qui s’applique non seulement aux
attaques xénophobes sur les migrants et
les réfugiés, mais à la baisse des
interactions économiques
internationales. Un signe en est la
convergence entre la baisse des
bénéfices des entreprises dans les
économies du G7 et des BRICS
(Brésil-Russie-Inde-Chine-Afrique du
Sud) et, par conséquent, une baisse de
l’importance de l’investissement
étranger direct (IDE) dans l’économie
mondiale. L’année de pointe pour l’IDE
(Investissement Direct à l’Étranger) a
été de 2008 avec 1,9 milliards de
dollars, soit près de 3,5 % du PIB
mondial. Mais alors que la crise
catalysée par les États-Unis s’est
répandue dans le monde entier, l’IDE est
tombé à 1,2 milliard de dollars et
seulement 1,7 % du PIB en 2015.
Les actifs financiers transfrontaliers
sont passés d’un pic de 55 % du PIB
mondial en 2008 à seulement 35 % en2015.
Diverses mesures de commerce confirment
également une baisse depuis 2014.
Diminution des taux de
bénéfice des entreprises (BRICS en tête
et G7) et de l’investissement étranger
direct
Sources:
Banque Mondiale et UNCTAD
Diminution des actifs financiers
transfrontaliers en % du PIB mondial et
des valeurs du commerce mondial
Sources:
IMF, BIS, Haver Analytics En juillet dernier, les ministres du
commerce du G20 ont diagnostiqué la
cause du malaise économique lors de leur
réunion de Shanghai mais ne pouvaient
tout simplement pas le résoudre : « Nous
reconnaissons que les problèmes
structurels, y compris l’excès de
capacité dans certaines industries,
exacerbés par une faible reprise
économique mondiale et une baisse de la
demande du marché, ont eu un impact
négatif sur le commerce et les
travailleurs. Nous reconnaissons que
l’excès de capacité dans l’acier et dans
d’autres industries est une question
mondiale qui nécessite des réponses
collectives ».
Avec une capacité excédentaire aussi
élevée à l’échelle mondiale, les mesures
prises par la Chine pour réduire la
production d’acier et de charbon ont été
marginales et à peine améliorées, comme
en témoigne la poursuite des prix bas,
des exportations envahissantes et la
menace extrêmement grave pour l’ensemble
des industries sidérurgiques nationales.
Il en résulte que le protectionnisme et
les droits de douane augmentent à
beaucoup de frontières.
À l’échelle mondiale, cette tendance
à la surproduction capitaliste peut être
retardée par une stimulation financière
artificielle, mais comme nous l’avons vu
depuis 2008, cette stratégie ajoute de
nouvelles contradictions. La politique
monétaire déréglée du G20 a encouragé de
nouvelles bulles financières, sans
générer de véritables sources de
richesse. Les 15 billions de dollars en
« Quantitative Easing » (QE,
assouplissement quantitatif en
français), argent papier imprimé et
envoyé aux plus grandes banques du monde
depuis 2008 ont finalement suinté vers
le haut au top du 1% des sociétés les
plus riches, c’est-à-dire vers les
entreprises où la spéculation a remplacé
la production. Les bénéfices n’ont pas
été réinvestis, mais ont plutôt regroupé
des rachats d’actions, ce qui profite
principalement au top management.
Grâce à l’économie occidentale
déclinante qui résulte de
l’établissement répété du QE à
Washington, Londres, Bruxelles et Tokyo,
la crise financière se répète à nouveau.
Peut-être que ce sera la Deutsche Bank
ou les banques italiennes qui joueront
le même rôle que Bear Stearns et Lehman
Brothers en 2008, ou peut-être que ce
sera un virus malveillant spectaculaire
ou une autre crise financière
inattendue. Quoi qu’il en soit, la
stratégie du G20 d’hier et d’aujourd’hui
n’est que le pansement financier d’un
cancer capitaliste profondément
enraciné.
Chaos environnemental
Enfin, en ce qui concerne
l’environnement, le G20 – en particulier
les États-Unis, la Chine, l’Inde, le
Brésil et l’Afrique du Sud – n’a
pratiquement rien fait dans les
négociations critiques sur le climat de
2009 (Copenhague) à 2015 (Paris). Leurs
principales réalisations, que nous
connaissons parce que Wikileaks a
documenté des e-mails et des câbles du
Département d’État impliquant le
personnel de Hillary Clinton, ont été de
proscrire le concept de la « dette
climatique » que les économies du G20
doivent au reste du monde, et de mettre
fin à l’insistance du Protocole de Kyoto
sur la responsabilité légalement
contraignante pour la réduction des
émissions.
Par conséquent, le plus grand
scientifique du climat, James Hansen, a
qualifié correctement de « connerie »
l’accord climatique de Paris, car la
trajectoire actuelle du réchauffement
prévoit une hausse de 4 degrés au-dessus
de la normale pour 2100, avec l’Afrique
intérieure se réchauffant de 6 à 7
degrés. Non seulement les humains sont
menacés, mais aussi toutes les espèces
vivantes – la biodiversité elle-même –
qui dépendent de l’eau et d’un
écosystème stable. La négation
climatique de Trump est juste la goutte
d’eau qui va faire déborder le vase
écologique. Et les régions du monde qui
ont le moins contribué à provoquer la
crise – les petites îles, l’Afrique
continentale, l’Himalaya et les Andes –
seront celles qui en souffriront en
premier et le plus.
Régions souffrant de la plus
grande vulnérabilité au changement
climatique
Source:
University of Texas Strauss Center
Pays les plus responsables du
changement climatique: émissions de gaz
à effet de serre par habitant, 2000
Pouvez-vous nous expliquer
ce qu’est le « Compact avec l’Afrique »,
initié par le G20 ? N’est-ce pas une
forme de néocolonialisme pour saigner
l’Afrique encore plus rapidement ?
Oui, c’est un retour à une nouvelle
ruée vers l’Afrique, cette fois pour le
bénéfice des entreprises occidentales et
des BRICS. La première codification de
ce processus a eu lieu à Berlin,
lorsque, en 1885, la carte de l’Afrique
a été dessinée par les cinq grandes
puissances coloniales (Grande-Bretagne,
France, Portugal, Belgique et
Allemagne), sans la présence
d’Africains. Aucune réparation n’a été
payée pour le pillage qui a suivi, non
seulement jusqu’à l’indépendance des
années 1950-1990, mais aussi à l’ère
néocoloniale.
Pourquoi voyons-nous un Compact
G20-Afrique et d’autres gadgets tels
qu’un « Plan Marshall » aujourd’hui ?
L’une des raisons est que l’architecte
du Compact, le ministre allemand des
Finances Wolfgang Schäuble, croit
probablement qu’il doit aider Angela
Merkel avec ce dispositif rhétorique
afin de justifier aux électeurs lors des
prochaines élections, comment le million
de réfugiés africains qui sont entrés en
Allemagne au cours des douzaines
dernières années peut être tenu à
distance dans l’avenir.
Et Schäuble a besoin d’un allié
africain: le ministre sud-africain des
Finances, Malusi Gigaba.
Malheureusement, l’Afrique du Sud n’est
que la troisième plus grande économie
africaine et la sixième société la plus
populeuse – mais prétend représenter
l’entièreté du continent, en même temps
que des organismes continentaux comme
l’Union africaine et son Nouveau
Partenariat pour le Développement de
l’Afrique qui sont autorisés à se
joindre en tant qu’observateurs. En
mars, le Compact a été dévoilé lors de
la réunion des ministres des Finances du
G20 à Baden-Baden. La Côte d’Ivoire, le
Maroc, le Rwanda, le Sénégal et la
Tunisie ont présenté des preuves qu’ils
sont en train de jouer selon les règles
de Schäuble au détriment de leurs
sociétés, tout comme l’a fait la Grèce.
En revanche, il existe un groupe de
critiques « G20 » issu de la société
civile dont la critique du Compact est
puissante : « des coûts plus élevés pour
les citoyens, le pire service, le
secret, la perte d’influence
démocratique et les risques financiers
pour le public… et les multinationales
impliquées exigent que leurs bénéfices
soient rapatriés en monnaie forte – bien
que le contrat de services
caractéristiques implique des dépenses
et des revenus en monnaie locale – et
qui augmente souvent les niveaux de la
dette extérieure africaine, qui a à
nouveau atteint des sommets sans
précédent dans de nombreux pays ».
Les trois plus grandes économies en
Afrique ont commencé à subir de
sérieuses crises de la dette en 2016, y
compris l’Afrique du Sud qui a obtenu
une évaluation au rabais de deux grandes
agences de notation en avril, le Nigeria
est entré dans une profonde récession et
l’Égypte a eu besoin d’un sauvetage
d’urgence du FMI de 12 milliards de
dollars. Depuis 2005-2007, la dette
extérieure de l’Afrique subsaharienne
est passée de 240 à 200 milliards de
dollars grâce à l’allégement de la dette
du G7 et de Bretton Woods.
Mais en grande partie en raison des
nouveaux prêts chinois, la dette
souveraine du sous-continent s’est
élevée à 350 milliards de dollars en
2014. Les économies souffrant avec les
plus hauts déficits courants de 2015
(c’est-à-dire combinant les sorties des
bénéfices légaux, les paiements
d’intérêts et les déficits commerciaux)
ont inclus plusieurs qui ont déjà été
célébrés lors de l’ère de « l’Afrique en
pleine ascension » : Ouganda, Malawi,
Tanzanie, Angola, Sénégal, Guinée
Équatoriale, Burkina Faso, Zambie, Mali,
Lesotho, Érythrée, Madagascar et
Guinée-Bissau.
La dette d’Afrique
subsaharienne, les importations, les
exportations et le déficit courant
Source:
FMI Pire encore, tandis que l’Afrique a
bénéficié des hausses mondiales du prix
des produits de base de 380 % par
rapport à 2002-11, celles-ci ont été
suivies de crashs de plus de 50 % en
2014-15, à des niveaux non rentables. En
conséquence, il existe une demande
renouvelée des entreprises exploitant
les industries extractives pour les
subventions de l’État, y compris de la
part de pays africains appauvris. Le
nouveau défi pour le G20 – Africa
Compact représenté par Schäuble est que
ses sociétés dépendent de volumes de
production plus élevés – pour compenser
les rendements inférieurs résultant des
prix les plus bas d’une douzaine
d’années – afin d’abaisser le coût moyen
d’extraction pour les minéraux et le
pétrole. Il requiert à son tour plus de
subventions de l’infrastructure requise
pour obtenir la production de mines et
de puits de pétrole dans de vastes
étendues de terres non-sollicitées, sur
les routes, les chemins de fer, les
ponts ou les pipelines, vers de nouveaux
ports plus proches des marchés.
Indice mondial des prix de
tous les produits (2002=100)
Source :
FMI La plupart des entreprises qui sont
réticentes à prendre des risques en
Afrique proviennent de Chine. Certaines
sont vastes, certaines sont relativement
inconnues. Leurs investissements en
capital 2015-16 sont bien inférieurs à
ceux des années précédentes, lorsque les
sociétés d’Afrique de l’Ouest et
d’Afrique du Sud menaient tant bien que
mal le continent. Le plus grand
investissement récent de ce type n’est
pas dans l’exploitation minière, mais
dans le développement des terres près du
Caire, par un promoteur chinois.
Investissements de sociétés
multinationales en Afrique, 2015-16
Source :
Banque Africaine de Développement Pourtant, en partie à cause du
mercantilisme extrême et des flux
financiers illicites que ces sociétés
ont l’habitude de tirer de l’Afrique,
les États qu’ils pillent ne disposent
pas de suffisamment de fonds pour
construire l’infrastructure de soutien
du mégaprojet. L’investissement envisagé
dans des stratégies telles que le
programme 2010 de la Banque Africaine de
Développement pour le développement de
l’infrastructure en Afrique (PIDA) ou le
plan directeur régional de la Communauté
de développement de l’Afrique australe
2012 n’a jamais été réalisé.
Par exemple, le projet le plus
ambitieux des projets PIDA a été le
projet hydro-électrique Inga en
République démocratique du Congo qui, à
100 milliards de dollars, pourrait être
le projet de développement le plus
coûteux de l’histoire. S’il est mené à
bien, il produira 43 200 Mégawatts
d’électricité, soit plus du double du
deuxième plus grand, le barrage des
Trois Gorges en Chine. Mais avec
l’effondrement des prix des
marchandises, même la Chine a tenté à la
mi-2014 – à la veille du sommet d’Obama
avec les dirigeants africains à
Washington – d’obtenir un soutien de
cofinancement du gouvernement américain.
L’administration Obama a régulièrement
repoussé de telles approches, essayant
même de saboter bêtement l’adhésion dans
la Banque Asiatique d’Investissement
pour l’Infrastructure afin de garder
Pékin à l’écart. La Banque mondiale a
retiré son engagement de financement
Inga en raison du non-respect par les
gestionnaires des accords
socio-économiques et environnementaux.
Ainsi, Inga peut toujours rester un
rêve pour les sociétés minières
occidentales qui ont été ses partisans
les plus enthousiastes, car elles
veulent le pouvoir de creuser et de
fondre plus de minéraux en Afrique
centrale. Mais la plus grande du monde,
BHP Billiton d’Australie, prévoyait
autrefois une fonderie d’aluminium
massive sur les rives du Congo, puis
après la crise de 2008, la surproduction
mondiale l’a obligé à renoncer. Le
commanditaire majeur suivant, la
compagnie paraétatique d’électricité
Sud-africaine Eskom, est également
réticent parce qu’il se trouve
maintenant avec un énorme surplus
d’électricité en raison du déclin de
l’extraction minière et de la fonderie
locale.
D’autres grands projets
d’infrastructure en Afrique ont été
annulés ou ne fonctionnent pas. Les
projets chinois en particulier ont été
critiqués, comme la centrale électrique
au charbon ratée du Botswana et
l’expansion catastrophique de
l’hydroélectricité de la Zambie qui a
souffert à ce que l’on prétend de la
qualité inférieure des équipements
chinois qui ont réduit excessivement le
niveau d’eau du barrage de Kariba. Le
port chinois de 12 milliards de dollars
à Bagamoyo, en Tanzanie – supposément
une partie du réseau One Belt One Road
(ndlr : Route de la Soie) – vient d’être
annulé. D’autres fiascos notoires de
mégaprojets, selon le Wall Street
Journal en 2014, comprennent le China
Railways au Nigeria (7,5 milliards de
dollars) et en Libye (4,2 milliards de
dollars), le Chinese petroleum en Angola
(3,4 milliards de dollars) et au Nigeria
(1,4 milliard de dollars) et les Chinese
metal Investors en RDC et au Ghana (3
milliards de dollars chacun).
Le renouvellement du Forum sur la
coopération sino-africaine en décembre
2015 n’a rien fait pour atténuer les
critiques du type d’investissement et de
crédits chinois et leur pertinence dans
un environnement de super-cycle
post-marchandise. Il est également bien
documenté, bien sûr, que
l’infrastructure est faible en partie en
raison de la corruption des principales
entreprises de construction opérant en
Afrique, souvent financées par les
banques et les organismes multilatéraux
de l’Occident et des BRICS, y compris la
Banque mondiale, dont les normes de
corruption restent plus basses que
jamais.
Mais un problème plus général pour
les sociétés occidentales et des BRICS
est que leurs « flux financiers
illégaux » en provenance d’Afrique font
l’objet d’un examen minutieux. Les
récents « Panama papers » et les fuites
HSBC ont révélé une grande opération,
tout comme les études de sociétés
individuelles. La Commission économique
des Nations Unies pour l’Afrique en 2013
a révélé comment un montant de 319
milliards de dollars a été transféré
illicitement d’Afrique au cours du
super-cycle des produits de base (de
2001 à 2010), avec le plus de vol dans
les métaux, 84 milliards de dollars ; le
pétrole, 79 milliards de dollars ; le
gaz naturel, 34 milliards de dollars ;
les minéraux, 33 milliards de dollars ;
les produits pétroliers et houillers, 20
milliards de dollars ; les cultures, 17
milliards de dollars ; les produits
alimentaires, 17 milliards de dollars ;
les machines, 17 milliards de dollars ;
les vêtements, 14 milliards de dollars ;
et le fer et l’acier, 13 milliards de
dollars.
Au cours de cette période,
l’investissement direct étranger de
l’Afrique a chuté de son apport annuel
de pointe de 66 milliards de dollars en
2008 à un niveau de 50 milliards de
dollars en 2015. Pourtant, chaque année,
en plus des sorties financières
illicites, des flux licites ont été
enregistrés sous forme de rapatriement
de bénéfices et de dividendes et des
remboursements de dettes qui ont créé
des déficits de balance des paiements
extrêmes dans de nombreux pays
africains. Ces sorties de bénéfices et
de dividendes sont la principale raison
pour laquelle le déficit courant dans
les pays les plus pauvres d’Afrique ont
grimpé depuis 2007.
Déficit courant des pays
africains, asiatiques et insulaires les
moins développés
Source :
FMI Le Compact avec l’Afrique peut-il
inciter les investissements
d’entreprises multinationales simplement
avec les offres de subvention de l’État?
Je pense que cela n’inversera pas les
conditions de crise inhérentes au
capitalisme mondial, selon lesquelles
l’Afrique est pillée au rythme le plus
rapide. Les conditions pour tirer profit
de l’extraction sont plus difficiles
chaque année, avec plus de résistance et
de hausse des conflits dans les
principaux sites d’exploration minière
et de forage pétrolier.
Ressources et conflits de
l’Afrique
Sources:
Le Monde Diplomatique, localisation des
conflits armés et données des évènements Les élites politiques
africaines sont souvent obsolètes et
corrompues, et obéissent à la feuille de
route néolibérale dessinée par Wolfgang
Schäuble et Christine Lagarde. Ne
doivent-ils pas être changés ?
Oui, partout! Lagarde a laissé un
goût de cela il y a cinq ans. Le dernier
jour de décembre 2011, elle avait
demandé au ministre nigérian des
Finances d’éliminer la subvention
interne au pétrole qui gardait le
carburant relativement peu coûteux pour
la consommation de masse, dans un pays
doté de vastes ressources pétrolières.
Lorsque le prix a ensuite doublé, les
gens pauvres et de la classe ouvrière
ont entrepris une énorme protestation et
ont failli renverser le régime de
Jonathan Goodluck en quelques semaines.
L’année précédente, deux amis très
proches du FMI ont été expulsés du
pouvoir en Tunisie et en Égypte après
avoir imposé des programmes néolibéraux.
Au milieu de 2010, le FMI a dit au
dictateur tunisien Ben Ali de réduire
les taxes sur les sociétés et
d’augmenter la TVA sur la société, et
quelques mois plus tard, le soulèvement
nord-africain a commencé. Au Caire,
Lagarde devait ordonner à son
représentant de commencer temporairement
à utiliser deux mots étrangers, « la
justice sociale », dans les rapports du
FMI afin d’apaiser la population en
colère, comme la dette extérieure de 32
milliards de dollars retirée de manière
malhonnête par Moubarak est venue à
échéance pour le remboursement quelques
semaines après son retrait.
Donc, oui, les idées économiques
obsolètes et la corruption personnelle
sont étroitement liées en Afrique, mais
surtout dans l’establishment financier
du G20. Lagarde elle-même a été
rattrapée l’année dernière après sa
condamnation pour négligence dans un
paiement de 403 millions d’euros à un
grand contributeur du Parti
conservateur, le propriétaire d’Adidas
Bernard Tapie, alors qu’elle était
ministre française des Finances.
Pourtant, elle continue dans son travail
actuel, obtenant même la confiance des
directeurs du FMI le jour de sa
condamnation de Paris. Il y avait aussi
l’extrême corruption sexuelle de son
prédécesseur, Dominique Strauss-Kahn, et
de ses assauts sur d’innombrables femmes
réticentes, ou les crimes financiers
flagrants commis par un autre ancien
directeur général du FMI, Rodrigo de
Rato, qui a récemment été reconnu
coupable dans les tribunaux de Madrid.
Schäuble a également été expulsé en tant
que leader du Parti conservateur
allemand en 2000 pour avoir accepté et
ensuite nié publiquement un pot de vin
du célèbre négociant en armes Karlheinz
Schreiber.
Il y a une résistance très inégale à
ces horribles dirigeants occidentaux,
malheureusement. Trump est évidemment le
plus corrompu de tous. Les remarques
condescendantes typiques du G20
concernant la gouvernance africaine
n’auraient aucune sympathie ici. Au lieu
de cela, nous pourrions envisager des
moyens plus optimistes pour décrire un
« changement de régime » – on n’a pas
imaginé au Département d’État des
États-Unis de réimposer le
néolibéralisme avec plus de crédibilité,
mais plutôt de le conduire de manière
organique par des militants africains.
Mais je conserve un grand optimisme,
surtout en raison de la colère qui
s’élève dans les communautés et les
lieux de travail du continent. Les
rapports réguliers de la compétitivité
mondiale du Forum économique mondial
sondent les responsables d’entreprise
pour évaluer la « coopération dans les
relations travail-employeur » dans
chaque pays sur une échelle allant de
« généralement conflictuel » (1) à
« généralement coopératif » (7). Les
pays africains sont de loin les plus
militants sur les 138 sites recensés
chaque année, avec 28 prolétariats
africains s’inscrivant au-dessus de la
ligne médiane de la militance mondiale
et seulement 4 en dessous. Chaque année,
depuis 2012, les travailleurs
sud-africains (qui ont atteint le score
de 2,5 l’année dernière) ont remporté la
« médaille d’or » dans cette lutte de
classe mondiale, si l’on en croit ce
recensement. Les autres pays africains
avec des forces de travail très
militantes sont le Tchad (3.5), la
Tunisie (3.6), le Libéria (3.7), le
Mozambique (3.7), le Maroc (3.7), le
Lesotho (3.7), l’Éthiopie (3.8), la
Tanzanie (3.8), l’Algérie (3.8), le
Burundi (3.8) et le Zimbabwe (4.0).
Cette douzaine était dans les 30
premiers pays en termes de militance du
travail.
Le militantisme du travail
des classes ouvrières nationales, mesuré
par la réputation parmi les entreprises
Source:
Forum économique mondial Rapport de
compétitivité mondiale 2016-17
Les manifestations africaines
augmentent de manière spectaculaire à
partir de 2011, menées par le travail
Source:
Sussex University Armed Conflict
Location and Event Data (ACLED) Project
Raisons des protestations
africaines
Source:
African Development Bank Les communautés urbaines du
continent augmentent également leurs
taux de protestation. L’indice de
localisation des conflits armée et les
données sur les évènements, financé par
l’Université du Sussex, et le rapport
des Perspectives économiques africaines
de la Banque africaine de développement
ont tous deux documenté une augmentation
spectaculaire depuis 2010. Ces dernières
études, s’appuyant sur des rapports de
presse, ont découvert que, pendant que
le changement de gouvernement était la
principale cause de protestation pour la
période 2011-2013, depuis 2014, la
combinaison de demandes de salaires plus
élevés et de meilleures conditions de
travail, plus de meilleurs services
publics, est plus fréquente.
Et dans cet esprit, rappelez-vous ce
dont Frantz Fanon lui-même s’est plaint
dans son livre « Vers la Révolution
africaine »: » Pour ma part, plus
j’entre profondément dans les cultures
et les milieux politiques, plus je suis
sûr que le grand danger qui menace
l’Afrique est l’absence d’idéologie ».
Peu de temps après, le leader
révolutionnaire Amilcar Cabral
convenait : « La déficience idéologique
dans les mouvements de libération
nationale, sans compter le manque total
d’idéologie – reflétant une ignorance de
la réalité historique que ces mouvements
prétendent transformer – engendre l’une
des plus grandes faiblesses de notre
lutte contre l’impérialisme, sinon la
plus grande faiblesse de toutes. »
Si nous prenons ces avertissements au
sérieux, ce n’est pas seulement
l’élimination des régimes corrompus et
antipatriotiques qui est nécessaire,
bien que ce soit une condition
préalable. Ce qu’il est maintenant
urgent de discuter dans de nombreux
contextes arrivant à maturité pour la
révolution, c’est le remplacement des
relations compradores africaines vénales
avec le néocolonialisme par un programme
d’autonomisation politique populaire.
Sinon, sans changement structurel basé
sur la clarté idéologique, les mêmes
conditions engendreront les mêmes
compradors africains corrompus. Les
forces de la résistance peuvent
augmenter rapidement – le travail, la
communauté, l’environnement, les femmes,
les jeunes, les étudiants et d’autres
groupes en colère contre l’absurdité de
« la croissance de l’Afrique » – mais
ils doivent d’urgence discuter de la
manière d’implémenter un ensemble de
politiques qui divergent du Consensus de
Washington, avant la démocratisation.
Le récit du Département d’État et de
l’institution Bretton Woods – si réussi
en réduisant les discours politiques
africains depuis la première vague de
démocratisation du début des années 1990
– est simple : la réalisation d’une
société libre signifie imposer une
économie de « libre marché »
(pro-entreprises). En opposition, un
argument économique égalitaire sera de
plus en plus facile à faire maintenant
que le capitalisme mondial et la
dynamique de démondialisation forcent
l’Afrique vers le rééquilibrage. Cela
obligera finalement à discuter de
politiques économiques beaucoup plus
courageuses, notamment:
- À court terme, à mesure que les
crises de remboursement de la
monnaie et de la dette frappent,
rétablir les contrôles des changes
assurera le contrôle des flux
financiers, rapidement suivi d’une
baisse des taux d’intérêt pour
stimuler la croissance, avec un
audit de la « Dette odieuse » avant
tout remboursement supplémentaire de
monnaie rare, en même temps qu’une
bien meilleure gestion des
importations – pour servir les
intérêts nationaux et non les
intérêt d’une élite de
consommateurs :
- dans les plus brefs délais,
l’adoption d’une politique
industrielle écologiquement sensible
visant à la substitution des
importations (localisation locale),
à un rééquilibrage sectoriel, à la
satisfaction des besoins sociaux et
à une véritable durabilité ;
- une fois que les finances seront
sécurisées, il sera possible
d’augmenter considérablement les
dépenses sociales de l’État, payées
par des taxes supérieures des
entreprises, le subventionnement
croisé et les emprunts intérieurs
(et l’assouplissement quantitatif
aussi, si nécessaire, tant qu’il ne
devient pas hyper inflationniste) ;
- les stratégies de développement
économique à moyen et à long terme
vont réorienter l’infrastructure
pour répondre aux besoins
fondamentaux non satisfaits et
élargir, maintenir et améliorer le
réseau énergétique, plus d’eau et
d’assainissement, de transports en
commun, de cliniques, d’écoles, des
installations récréatives et l’accès
universel à Internet ; et
- dans des endroits comme
l’Afrique du Sud et le Nigéria qui
ont une dépendance excessive à
l’extraction et à la combustion des
combustibles fossiles, il sera
essentiel d’adopter ce qu’on a
appelé les stratégies de « Un
Million d’Emplois pour le Climat »
pour générer de l’emploi pour une
« transition juste » véritablement
verte.
Ce sont les types d’approches qui
exigent ce que le plus grand économiste
politique du continent, Samir Amin,
qualifie de « delinking » (ndlr :
dissociation). Il souligne que ce n’est
pas une formule pour l’autarcie, et il
n’y aurait certainement aucun avantage
d’un isolement de type nord-coréen. Mais
cela impliquerait une approche
judicieuse pour maintenir les
politiciens et les sociétés du G20 aussi
loin que possible.
Même John Maynard Keynes était
d’accord avec cette stratégie. Il a
écrit en 1933 : « Je sympathise avec
ceux qui minimisent, plutôt qu’avec ceux
qui maximisent l’enchevêtrement
économique entre les nations. Les idées,
le savoir, la science, l’hospitalité,
les voyages – ce sont les choses qui
devraient par leur nature être
internationales. Mais il faut produire
les marchandises à la maison chaque fois
que c’est raisonnablement et
pratiquement possible, et surtout, que
le financement soit principalement
national ».
Keynes a vu les mérites de la
démondialisation du capital,
parallèlement à la mondialisation des
personnes. De même, tous les critiques
du G20, au lieu d’approuver un Compact
avec l’Afrique, qui rendra tout bien
pire.
Les richesses du continent
africain, au lieu d’être un atout en
particulier pour le développement des
pays, ne sont-ils pas plutôt une
malédiction? Par
exemple, mon pays d’origine, l’Algérie,
qui n’a pas pu sortir des recettes
pétrolières, qui dépend totalement des
importations, et qui n’a pas construit
une économie variée.
Oui, le dilemme de la malédiction des
ressources est tout à fait évident si
l’on ajoute une caractéristique
corrective au produit intérieur brut
(PIB) très défectueux, mesure appelée
« comptabilité du capital naturel ». Le
PIB ne compte que l’extraction de
ressources non renouvelables comme le
pétrole en tant que « crédit » positif
dans les comptes, négligeant de
reconnaître qu’il s’agit d’une richesse
épuisée du pays et devrait être aussi
considérée comme un « débit ».
Lorsque nous faisons cela, nous
apprenons que non seulement les revenus
du pétrole ont été gaspillés, mais que
la richesse historique des Algériens –
et aussi de tant d’autres Africains –
sous la forme d’actifs environnementaux
a également été épuisée, et ne sera
jamais récupérée. Les dinosaures qui
nous ont donné des combustibles fossiles
ne reviendront pas. Le patrimoine est
parti pour toujours.
L’argument économique qui en résulte
est que, en calculant l’appauvrissement
des ressources naturelles associé à
l’extraction, et en comparaison avec le
réinvestissement effectué par les
entreprises qui font l’extraction,
l’impact global est nettement négatif
pour la quasi-totalité de l’Afrique.
Donc, bien que la Banque mondiale soit
traditionnellement alignée en faveur de
l’extraction, y compris les combustibles
fossiles, plusieurs membres du personnel
de la Banque dans le bureau intitulé
Comptabilité des Richesses et Évaluation
des Services de l’Écosystème calculent
chaque année les « économies nettes
ajustées » et les implications devraient
contourner cet engagement à l’extractivisme.
Par exemple, le livre de données
Little Green 2014 de la Banque reconnaît
que « 88 % des pays d’Afrique
subsaharienne se sont avérés épuiser
leurs richesses en 2010 », avec une
baisse de 12 % du patrimoine net
africain par habitant cette année
attribué à l’extraction de minéraux, de
l’énergie et de produits forestiers
(capital naturel). Avec ce degré de
pillage manifeste, même pour une agence
vouée à la poursuite du pillage, il est
attendu depuis longtemps que les
militants anti-extraction ajoutent une
logique économique à leurs critiques
micro-écologiques, spirituelles,
politiques et sociales.
La Banque mondiale « analyse
le changement de richesse par
habitant », Afrique subsaharienne, 2010
À son tour, ce type d’évaluation de
la malédiction des ressources dont
l’Afrique souffre peut aider à l’un des
processus de dé-damnation que nous avons
désespérément besoin d’intensifier : la
défense de la dette écologique. Il y a
un urgent besoin de punir les pollueurs
en prenant en considération le passif
monétaire formel – ou une certaine
approximation, puisque la nature n’a pas
de prix – de sorte que les réparations à
l’environnement et aux peuples affectés
soient suffisamment financées et, de ce
fait, une incitation sera générée pour
ne pas polluer à l’avenir. C’est la
raison centrale de faire au moins un cas
monétaire approximatif pour les
paiements de la dette écologique au sein
des tribunaux.
Par exemple, sur la réclamation
nigériane de 11,5 milliards de dollars
contre Shell pour un déversement de
pétrole en 2011, plus de la moitié est
censée dédommager les pêcheurs. La dette
envers les mineurs atteints de silicose
victimes des compagnies
anglo-américaines et autres mines d’or a
commencé sa phase de payement. Les
entreprises sud-africaines Gencor et
Cape PLC ont dû payer 65 millions de
dollars il y a dix ans pour régler les
procès d’amiante après avoir perdu leur
dernier recours à la Chambre des Lords
du Royaume-Uni. Des arguments similaires
devraient être faits contre les
multinationales les plus responsables de
ce que l’ONU appelle les pertes et les
dommages causés par les changements
climatiques. Idéalement, au fil du
temps, cette stratégie se développerait
comme « amende et interdiction », de
sorte que toute société faisant une
erreur flagrante soit condamnée à une
amende pour les dégâts infligés et
ensuite nationalisée et envoyée balader.
Pour être sûr, il y a un danger si la
politique « amende et interdiction »
n’est pas la politique locale de l’État,
alors la comptabilité du capital naturel
conduira plutôt à une « taxe » sur la
pollution, avec les dégâts persistant,
parallèlement aux paiements continus.
Cela résulterait logiquement de la
création d’un marché officiel des droits
de pollution, comme le Système d’échange
de quotas d’émission de l’UE. Les
militants environnementaux sérieux qui
ont commencé avec le Groupe de Durban
pour la Justice climatique en 2004 ont
fermement rejeté ces stratégies pour
« privatiser l’air ». La distinction
devrait donc être claire entre évaluer
la nature à des fins de payement d’une
dette écologique (amende et
interdiction) d’une part, et d’autre
part, tarifer la nature pour le marché
(taxe). Comme Vandana Shiva l’a dit dans
un discours sud-africain de 2014: « Nous
devrions utiliser le capital naturel
comme une lumière rouge à la
destruction, pas comme un feu vert ».
La stratégie de la « lumière rouge »
est un exemple de rapprochement
potentiel entre deux stratégies
d’encadrement différentes, mettant
l’accent sur l’analyse technique dans la
tradition de la modernisation écologique
tout en étant utile aux militants
anti-extraction qui veulent un argument
économique contre l’épuisement des
combustibles fossiles, mais qui permet
des revendications du Sud global, telles
que les victimes du climat au Nigeria,
en Afrique du Sud, en Algérie et dans
d’autres sites à combustibles fossiles.
Le point de vue simple, qui a été
exploré dans le delta du Niger et dans
le parc national Yasuni en Équateur
parmi les sites de lutte de pointe de la
planète, est que le pétrole doit être
laissé sous terre, mais la dette
écologique que les gens du Nord doivent
au Sud mondial devrait être payée,
de manière à renforcer les sociétés
locales, et non les élites compradores.
Le meilleur modèle de payement
Nord-Sud que je connais est celui qui a
eu lieu il y a quelques années à
Otjivero, en Namibie, dans une zone de
désertification à environ une heure à
l’est de la capitale Windhoek. Cette
région a souffert des déplacements
génocidaires allemands du peuple Herero
il y a plus d’un siècle. En partie comme
acompte préliminaire sur le paiement de
la dette sociale due, comme les
Allemands le font à Israël pour
l’Holocauste, certains luthériens et
leurs alliés ont organisé un petit
paiement mensuel à chaque résident
d’Otjivero.
Cet exemple d’essai » revenu de base
d’indemnisation » a été complimenté
unanimement bien que les gouvernements y
soient opposés au motif qu’il pourrait
susciter des attentes pour plus de
citoyens. Mais c’est exactement le
cas. Nous devons identifier des
stratégies telles que la comptabilité du
capital naturel et le paiement de la
dette écologique (en particulier la
dette climatique) qui redistribuent
radicalement du riche au pauvre. Avec
l’Afrique du Sud, la Namibie est le
deuxième pays le plus inégal du monde.
Mais ces idées ont un impact
microscopique jusqu’à présent, voire des
échecs absolus dans la mise en œuvre,
comme dans le cas Yasuni. Sur ce point,
l’opposition obstinée de l’ancien
ministre allemand du Développement, Dirk
Niebel, a conduit le président
équatorien Rafael Correa à abandonner la
protection et à autoriser le forage
pétrolier chinois. Donc, bien que
logiques en tant que chantiers de
plaidoyer, ils peuvent tarder à prendre
racine, et jusqu’à présent, ils ont de
minuscules circonscriptions. Pourtant,
il existe une urgence indéniable à la
fois pour arrêter l’extraction du
pétrole pour sauvegarder le climat, et
redistribuer la richesse mondiale de
manière à ce que les plus défavorisés
soient payés directement, et non par des
mécanismes d’aide corrompus.
Les militants des pays du G20 à forte
pollution qui cherchent des moyens
stratégiques, en plus de bloquer les
sites d’extraction du charbon tels que
Ende Gelände en Allemagne, pourraient
écouter des groupes périphériques
visionnaires comme les éco-féministes
d’Accion Ecologica basées à Quito ou les
Womin Women in Mining basées à
Johannesburg, pour des conseils dans ce
sens. Un film de l’ONG GermanWatch
intitulé « The Bill » – disponible sur
YouTube – aide les militants anti-G20 à
faire valoir que nous devons devenir
plus créatifs à propos de ces énormes
dettes que nous devons. (Et je parle en
tant que citoyen du nord résidant à
Johannesburg qui a une vaste empreinte
carbone et un désir d’aider à payer les
mouvements de militants – tels que
Yasuni et la campagne anti-charbon
Fuleni en Afrique du Sud – pour leur
travail inspirant à laisser les
combustibles fossiles sous terre.
Pour l’Afrique et pour l’ensemble de
l’humanité, le changement climatique est
le domaine d’action le plus important
pour lequel nous devons tous augmenter
la sensibilisation et l’activisme. C’est
une crise qui associe le milieu de
travail, le système énergétique, les
transports, l’agriculture,
l’urbanisation, notre vie de
consommateurs, d’élimination et de
financement, afin que toutes sortes
d’activités puissent être considérées
comme de l’activisme climatique. Avec un
mouvement mondial qui reconnaît ces
opportunités, le G20 pourrait devenir un
chantier qui aborde une crise mondiale
avec une véritable solution.
En effet, si le G20 mérite jamais
d’avoir un leadership mondial, ce serait
en raison de l’ambition de répéter ce
qui a été accompli par la gouvernance
mondiale en 1987, une année au cours de
laquelle les Nations Unies ont publié un
rapport véritablement progressif sur le
développement durable, rédigé par la
Commission norvégienne de Gro Harlem
Brundtland, ancien Premier ministre
norvégien. À cette époque, il y avait
une nouvelle crise mondiale majeure : le
trou qui s’agrandissait dans la couche
d’ozone qui protège les humains contre
les rayons ultraviolets. La principale
cause était l’émission de CFC
appauvrissant la couche d’ozone par les
aérosols et la réfrigération.
Étant donné que l’urgence de la
situation exigeait une réponse mondiale,
le Protocole de Montréal de 1987 était
même soutenu par l’administration
américaine Reagan : les États nationaux
étaient engagés à s’assurer que leurs
sociétés (par exemple Dow Chemicals et
General Electric) cessent de produire et
d’émettre des CFC dans un délai de neuf
ans. L’interdiction a fonctionné et le
problème diminue.
Mais cette réussite de la gouvernance
mondiale s’est produite avant l’ère de
la capture néolibérale de l’État.
Aujourd’hui, plaider en faveur d’une
interdiction du type Protocole de
Montréal sur les émissions de gaz à
effet de serre – avec réduction
obligatoire des émissions, la
responsabilité et le contrôle d’État de
la pollution des entreprises – est
pratiquement impensable, nonobstant la
catastrophe éco-sociale imminente.
Ce dont nous avons besoin pour
modifier les relations de pouvoir et
revenir le plus tôt possible à une
stratégie de gouvernance mondiale, c’est
l’amplification de ce que Naomi Klein
appelle « blockadia ».En outre, le
mouvement « divest-invest » contre les
entreprises de combustibles fossiles est
en train d’avoir un impact majeur sur
les sentiments des actionnaires, car les
activistes insistent sur le fait que les
entreprises dévalorisent leurs réserves
de « carbone non combustible ».
L’exemple classique de ce genre de
combat est le mouvement sud-africain
anti-apartheid, qui appelait au boycott,
au désinvestissement et aux sanctions
pour compléter l’activisme direct. La
pression a atteint le point d’ébullition
lorsque, en 1985, les protestations d’en
bas se sont développées alors que la
solidarité internationale s’attaquait
aux entreprises soutenant le régime de
Pretoria. La crise financière qui en a
résulté n’a été résolue que lorsque les
sociétés (détenues par des anglophones
blancs) ont rompu leurs relations avec
le régime blanc (afrikaner) et ont
soutenu tardivement la démocratie.
Votre carrière est très
riche, à la fois sur le plan politique
et professionnel. Vous avez notamment
accompagné le processus politique de la
fin de l’apartheid en Afrique du Sud, en
rédigeant plusieurs documents politiques
pour le gouvernement du président Nelson
Mandela, y compris son premier Livre
blanc sur la reconstruction et le
développement. Pensez-vous que l’Afrique
du Sud est un modèle de succès pour
d’autres pays africains ?
Nous sommes malheureusement un
anti-modèle, car l’Afrique du Sud est
encore peut-être la partie la plus
maudite du continent par ses ressources,
bien que les États saturés de pétrole
ouest-africains et nord-africains soient
certainement proches. L’Afrique du Sud
enregistre régulièrement les taux
d’inégalités les plus graves sur Terre,
et cela provient en partie des
transactions faites par des élites
locales avec des sociétés étrangères.
J’ai vu beaucoup de ces accords se
dérouler tout en rédigeant deux
documents stratégiques majeurs pour
Mandela et d’autres politiques pour les
ministres lorsque j’ai travaillé dans le
premier gouvernement démocratique.
J’espère toujours qu’ils puissent tous
être examinés et, dans certains cas,
même inversés, y compris les décisions
prises dans les années 90 pour :
- rembourser 25 milliards de
dollars de la dette extérieure
héritée de l’ère de l’apartheid
(octobre 1993)
- donner à la Banque de réserve
d’Afrique du Sud « l’indépendance »
dans la Constitution provisoire de
1993 du pays et la Constitution
finale de 1996 (novembre 1993)
- emprunter 850 millions de
dollars du Fonds monétaire
international (FMI) avec des
conditions difficiles (décembre
1993)
- renommer le ministre des
Finances de l’apartheid Derek Keys
et le gouverneur de la Banque de
réserve d’Afrique du Sud, Chris
Stals, sur l’insistance du directeur
général du FMI Michel Camdessus (mai
1994)
- se joindre à l’Organisation
mondiale du commerce en termes
défavorables en tant qu’économie
« de transition » (et non de
« développement ») (août 1994)
- baisser les impôts des
entreprises principales de 48 à 29 %
et maintenir d’innombrables
privilèges dont bénéficient les
personnes et les sociétés blanches
(1994-1999)
- privatiser des parties de l’État
et démutualiser les entreprises de
méga-assurance (1995-99)
- assouplir les principaux
contrôles de change et augmenter les
taux d’intérêt (mars 1995)
- adopter la politique
macroéconomique néolibérale de
Croissance, Emploi et Redistribution
(« Gear » : Growth, Employment and
Redistribution) (juin 1996)
- approuver que les plus grandes
entreprises de l’Afrique du Sud
déplacent leur siège financier et
leurs principales cotations
boursières à Londres (1999)
Depuis 1994, en grande partie en
raison de ces transactions, le chômage a
progressé de 16 à 27 %, la pauvreté est
passée de 45 à 63 % et l’inégalité est
passée d’un coefficient de Gini de 0,59
à 0,69. Mandela est maintenant
régulièrement décrit par la génération
militante plus jeune – ainsi que par son
ex-femme Winnie – en tant que « vendu »
économique.
C’est au Forum économique mondial de
Davos en 1992 que Mandela a accepté
d’abandonner la Charte de la Liberté de
1955 de son propre parti, en particulier
ses dispositions pour la
nationalisation, la richesse minérale,
les banques et le capital monopoliste.
Ainsi, lors du sommet WEF-Afrique 2017
tenu à Durban en mai, des manifestations
ont été organisées par des militants de
base, et un contre-sommet « People’s
Economic Forum » a offert des
alternatives.
Puisque Schäuble s’appuiera sur le
ministre très controversé des Finances
de l’Afrique du Sud, Malusi Gigaba, pour
faire son offre en vendant le Compact
avec l’Afrique au reste du continent,
nous pouvons nous attendre à un débat
beaucoup plus dynamique en Afrique du
Sud concernant le G20, en particulier le
besoin qu’a l’impérialisme de la
collaboration sous-impérialiste. Pour
cette analyse, un réseau
« BRICS-d’en-bas » est occupé à
développer une théorie du
sous-impérialisme – en s’appuyant sur le
brésilien Ruy Mauro Marini et David
Harvey de l’Université de New York
-ainsi que des sites militants où des
projets sub-impériaux sont menés par des
militants de communautés, du travail,
féministes et de l’environnement.
En Afrique du Sud, cela sera facilité
par le renouveau de la gauche dans les
syndicats (la Fédération des syndicats
d’Afrique du Sud – FOSATU – a été lancée
en avril), dans la politique électorale
(les Economic Freedom Fighters [Les
Combattants de la Liberté Économique]
ont atteint 8 % du vote en 2016 aux
élections municipales et ont partagé le
pouvoir dans deux des quatre plus
grandes villes) et dans divers
mouvements sociaux, y compris la
campagne étudiante #FeesMustFall (qui a
remporté des victoires majeures en 2015,
y compris une augmentation de frais de 0
% et « l’insourcing » de travailleurs
universitaires peu rémunérés). Il y
avait l’espoir qu’un réseau « Front
uni » qui a émergé en 2014 pourrait
aligner toutes ces forces progressives.
Malheureusement, il a trop compté sur le
parrainage de l’immense syndicat des
métallurgistes fort de 330 000 membres,
dont la direction puissante et
consciente des classes a mené sa sortie
de l’ANC aligné sur la fédération
syndicale COSATU en 2013-15. Mais avec
des batailles internes dans les
syndicats occupant le leadership, ils
n’ont pas atteint la liaison promise
entre un prolétariat relativement bien
payé et le sous-prolétariat qui a
tellement besoin de soutien matériel et
de cohérence idéologique. Cette relation
devrait probablement se produire de bas
en haut, ville après ville, car les
masses sans emploi dans les bidonvilles
trouvent l’unité avec les travailleurs
vivant dans les communes, peut-être dans
des campagnes socio-économiques.
Cependant, la dernière année a été
témoin de la distraction de ces forces
de gauche, alors qu’une extraordinaire
bataille d’élite se répand pour le
contrôle de l’État. D’une part, il
existe une clique engagée dans des
opportunités d’accumulation corrompues
découlant de l’alliance du président
Jacob Zuma avec les frères indiens
Gupta, et d’autre part, une clique
néolibérale qui, jusqu’en avril, était
principalement située au ministère des
Finances et qui tire désormais sa
puissance du pouvoir résiduel des
grandes maisons médiatiques, des
capitalistes financiers hautement
unifiés, diverses institutions libérales
comprenant les universités, et le parti
d’opposition de centre-droit (Alliance
démocratique).
La plupart des militants
progressistes – à l’exception de
quelques ONG du centre gauche – ne se
sentent pas à l’aise avec ces deux
cliques, mais néanmoins des
manifestations substantielles ont eu
lieu dans les grandes villes demandant à
Zuma de démissionner, et même les
syndicats précédemment alignés avec Zuma
et le Parti Communiste d’Afrique du Sud
demandent maintenant qu’il quitte le
pouvoir. Cependant, s’il le fait,
l’héritier le plus probable de la
présidence est le député de Zuma, Cyril
Ramaphosa, qui n’est pas seulement
déplaisant en tant que leader pour
beaucoup de mouvements sociaux et
syndicaux en raison de son rôle
collaboratif dans le massacre de
Marikana, mais qui est considéré comme
le candidat de ce qu’on appelle « White
Monopoly Capital » (Capital
monopolistique blanc).
Si, en conséquence, Ramaphosa ne
parvient pas à garantir le soutien du
parti, il est probable que l’ex-femme de
Zuma Nkosazana Dlamini-Zuma – qui
jusqu’à cette année a assuré un mandat
en tant que chef de l’Union africaine –
se chargera du parti en décembre et si
Zuma lui-même reste au pouvoir jusqu’à
son terme complet, elle hériterait de la
présidence nationale à la mi-2019.
L’ironie est que, en raison de la
personnalisation de ces batailles
distrayantes, il y a une rhétorique sur
la « transformation économique
radicale » du camp de Zuma, mais Gigaba
maintient les mêmes politiques
néolibérales que son prédécesseur parce
que les équilibres de puissance
sous-jacents n’ont pas été modifiées du
tout. Et en maintenant les politiques de
semi-austérité que les néolibéraux
demandent, l’économie de l’Afrique du
Sud demeurera stagnante et la population
sera de plus en plus en colère, alors
que les slogans aux sons gauchistes de
Zuma ne rempliront pas leurs ventres. Et
l’incapacité structurelle du capitalisme
à répondre aux besoins les plus
fondamentaux est la raison pour laquelle
le renouveau de la gauche est nécessaire
ici et vraiment partout.
Interview réalisé par Mohsen
Abdelmoumen
Qui est le Professeur Patrick
Bond ?
Professeur d’économie politique,
Patrick Bond combine l’économie
politique et l’écologie politique dans
ses recherches et son travail appliqué.
Il est professeur d’économie politique à
la Wits School of Governance et
professeur honoraire à la School of
Built Environment and Development
Studies de l’Université de KwaZulu-Natal
où de 2014 à 2016, il a dirigé le Centre
pour la Société Civile. Il a été
assistant à la John Hopkins University
Bloomberg School of Public Health et a
aussi enseigné à l’Université de York et
à l’Université de Berkeley en
Californie. Au cours des années 1990, il
a servi dans l’ONG Planact de
Johannesburg et à l’Institut national de
politique économique. Depuis la venue de
Nelson Mandela au pouvoir en 1994
jusqu’à 2000, Patrick Bond a rédigé plus
d’une douzaine de documents de politique
gouvernementale pour le gouvernement
sud-africain, y compris le Livre Blanc
sur la Reconstruction et le
Développement. Il a obtenu son doctorat
en géographie économique sous la
supervision de David Harvey à Johns
Hopkins. Il est né en 1961 à Belfast, en
Irlande du Nord, et a grandi dans les
États américains de l’Alabama et du
Maryland, et depuis 1989 est résident de
l’Afrique du Sud.
Patrick Bond a écrit de nombreux
livres, dont :
Commanding Heights & Community Control:
New Economics for a New South Africa
(Ravan 1991);
Uneven Zimbabwe: A Study of Finance,
Development, and Underdevelopment
(Africa Research and Publications,
1997);
Cities of Gold, Townships of Coal:
Essays on South Africa’s New Urban
Crisis (Africa Research and
Publications, 2000);
Elite Transition: From Apartheid to
Neoliberalism in South Africa (Pluto
Press, 2000);
Unsustainable South Africa: Environment,
Development, and Social Protest
(University of Natal Press, 2002);
Fanon’s Warning: A Civil Society Reader
on New Partnership for Africa’s
Development (Africa World Press,
2003);
Talk Left, Walk Right: South Africa’s
Frustrated Global Reforms (University
of Kwazulu Natal Press, 2004);
Against Global Apartheid: South Africa
Meets the World Bank, IMF and
International Finance (University
of Cape Town Press, 2004);
Trouble in the Air: Global Warming and
the Privatised Atmosphere with
Rehana Dada (Centre for Civil Society,
University of KwaZulu-Natal and
Amsterdam: Transnational Institute TNI,
2005);
Looting Africa: The Economics of
Exploitation (Zed Books, 2006);
The accumulation of capital in Southern
Africa : Rosa Luxemburg’s contemporary
relevance with H. Chitonge and
A. Hopfmann (Rosa Luxemburg Foundation,
2007);
Beyond Enclavity in African Economies:
The Enduring Work of Guy Mhone
(Open Society Initiative of Southern
Africa, University of Nairobi Institute
of Development Studies, Centre for Civil
Society, 2007);
Climate Change, Carbon Trading and Civil
Society: Negative Returns on South
African Investments with R.
Dada and G. Erion (University of
Kwazulu-Natal Press, 2008);
Zuma’s Own Goal: Losing South Africa’s
« War on Poverty » with Brij
Maharaj, Ashwin Desai (Africa Research
and Publications, 2011);
Durban’s Climate Gamble: Trading Carbon,
Betting the Earth (Unisa Press,
2011);
Politics of Climate Justice: Paralysis
Above, Movement Below (University
of KwaZulu-Natal Press, 2012);
South Africa – The Present as History:
From Mrs Ples to Mandela and Marikana
with John S. Saul (James Currey,
2014);
BRICS: An Anti-Capitalist Critique
(Haymarket Books, 2015); etc.
Published in American Herald
Tribune, June 10, 2017: http://ahtribune.com/world/africa/1706-patrick-bond.html
Reçu de l'auteur pour
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