Algérie Résistance
Dr. Colin Ross : « Les médecins créent
délibérément
un trouble mental à des fins
militaires »
Mohsen Abdelmoumen
Le Dr.
Colin Ross. DR.
Jeudi 2 mars 2017
English version here:https://mohsenabdelmoumen.wordpress.com/2017/03/02/dr-colin-ross-the-doctors-deliberately-create-a-mental-disorder-for-military-purposes/
Mohsen Abdelmoumen :
Votre livre «The CIA Doctors:
Human Rights Violations by
American Psychiatrists» est traumatisant
et révèle les expériences criminelles de
la CIA sur des sujets humains
américains. Comment des médecins ont-ils
pu participer à ces expériences ?
Dr. Colin Ross : Je
crois que les médecins y ont participé
pour diverses raisons: le patriotisme,
la mentalité de la guerre froide,
l’argent, le prestige parmi les
collègues, le frisson d’être un
«espion», la promotion académique par le
biais de subventions et de documents, le
sadisme, et la curiosité. Tout cela
devait être accompagné de justifications
et de déni.
Le projet MK-ULTRA de la CIA
n’est-il pas une expérience contraire à
votre déontologie, voire même criminelle
? Pourquoi aucun agent de la CIA
n’a-t-il été sanctionné ?
Techniquement, les médecins n’étaient
pas des agents de la CIA – ils étaient
des actifs ou des contractuels. Les
agents sont des employés à temps plein.
Les expériences ont clairement violé le
serment d’Hippocrate – donc elles
devaient être gardées secrètes pour
protéger la CIA et les médecins. Ils
n’ont pas été punis parce que tout a été
classé, puis quand les documents MKULTRA
ont été déclassifiés dans les années 70,
ils ont été protégés par le réseau des
anciens et la corruption de la
psychiatrie organisée.
Vous êtes un psychiatre,
clinicien et chercheur de renommée
mondiale avec un parcours remarquable.
Selon vous, vos confrères qui ont
participé à ces expériences sont-ils
coupables et devraient-ils être jugés ?
Certains des contrats MKULTRA étaient
assez insipides et appuyaient la
recherche universitaire normale. Mais
beaucoup ont clairement violé le serment
d’Hippocrate, montrant une faute
professionnelle et une mauvaise pratique
délibérée qui motivaient un blâme
professionnel et des poursuites pour
faute professionnelle. Peu ou aucun des
contractuels sont encore en vie, c’est
donc maintenant un débat stérile.
L’ancien directeur de la CIA
Richard Helms a fait disparaître de
nombreux documents relatifs au projet
MK-ULTRA. Ceux qui ont été déclassifiés
et auxquels vous avez eu accès ont-ils
été utiles à votre travail de recherche
?
Oui, les 15 000 pages de documents
sur ARTICHOKE, BLUEBIRD, MKULTRA,
MKSEARCH, MKNAOMI et d’autres projets
ont été extrêmement utiles et sont la
base de mon livre.
D’après vous, n’est-ce pas
immoral et criminel de mettre la science
au service de l’appareil militaire et de
la CIA ?
Oui et non. Je ne pense pas que
beaucoup de gens s’opposent à
l’utilisation de la science pour
concevoir de meilleurs tanks, avions,
canons, équipement de protection, etc.
De nombreuses avancées scientifiques
financées par les militaires ont découlé
dans la vie civile pour un grand
bénéfice. Le problème n’est pas avec
l’éthique de modifier l’esprit des gens
pour la guerre – cela se fait dans
l’entraînement de base de l’Armée – le
problème est le conflit avec le serment
d’Hippocrate une fois que les médecins
s’impliquent. Les médecins créent
délibérément un trouble mental à des
fins militaires (trouble d’identité
dissociative) lorsqu’ils créent des
candidats mandchous (ndlr : personnes
ayant subi un lavage de cerveau).
Pensez-vous que les
expériences de la CIA que vous avez
dénoncées se poursuivent encore
aujourd’hui, notamment dans les sites
noirs et les prisons secrètes de la CIA
?
Les photographies tombées dans le
domaine public et les informations sur
les «interrogatoires améliorés» à
Guantanamo Bay et Abu Ghraib fournissent
des preuves concluantes que des
opérations de contrôle mental sont en
cours. Le terme «interrogatoires
améliorés» n’est qu’un euphémisme pour
le lavage de cerveau ou le contrôle
mental.
«Military Mind Control:
A Story of Trauma and Recovery» est
un livre choc. Pourquoi les militaires
et les agences de renseignement ont-ils
cet intérêt pour la psychiatrie ?
Pour autant que je puisse le voir, il
y a deux objectifs fondamentaux : créer
des espions qui sont résistants à
l’interrogatoire s’ils sont capturés
parce que leurs informations de mission
sont cachées derrière des barrières
d’amnésie créées artificiellement ; et à
des fins de contre-espionnage pour
détecter les candidats manchous dirigés
par des agences de renseignement
opposées.
Les États-Unis peuvent-ils
donner des leçons de droits de l’homme
et de démocratie à la planète entière
alors que des citoyens américains ont
servi de cobayes pour des expériences
effroyables ?
C’est certainement un exemple
d’hypocrisie et de déni.
La CIA n’est-elle pas
incontrôlable et ne constitue-t-elle pas
un État dans l’État ?
Il n’y a aucun moyen pour un civil de
déterminer si la CIA est oui ou non hors
de contrôle, ou pour savoir exactement
ce qu’elle fait, parce que toutes les
informations pertinentes sont classées.
Les agences de renseignement sont
structurées pour être « hors de contrôle«
en un sens à cause du cloisonnement pour
des raisons de sécurité.
Je m’intéresse beaucoup à vos
travaux et j’ai remarqué que vous étiez
sceptique voire critique envers vos
confrères psychiatres, comme dans votre
livre «The Great Psychiatry Scam».
Pouvez-vous nous en expliquer les causes
?
Je suis sceptique et critique envers
les psychiatres pour plusieurs raisons :
déni de l’expérimentation contraire à
l’éthique du passé, priorité exagérée de
l’efficacité des médicaments
psychiatriques tout en minimisant les
effets secondaires, être achetés par les
compagnies pharmaceutiques sans même
s’en rendre compte, soutien du modèle
génétique de la maladie de cerveau d’une
manière qui est réellement démentie par
les preuves dans la littérature
psychiatrique, minimisation de
l’importance du traumatisme
psychologique dans les troubles mentaux,
se laisser contrôler par les soins gérés
aux États-Unis.
Si vos livres sont d’une
importance capitale pour la science, vos
documentaires sont aussi percutants.
Pouvez-vous nous parler de leur impact ?
«Multiple Personality: Reality and
Illusion» a inspiré Hollywood.
Ce documentaire est-il
particulier dans votre parcours ?
Les vidéos éducatives et les
documentaires que j’ai produits font
partie de mes efforts pour éclairer les
professionnels de la santé mentale et le
grand public sur les troubles mentaux et
les traumatismes. Je ne connais aucun
exemple précis d’avoir «inspiré»
Hollywood autrement qu’en étant
interviewé pour une série de
documentaires, la plupart d’entre eux
traitant du contrôle de l’esprit ou des
personnalités multiples.
Vous avez développé le
Dissociative Disorders Interview
Schedule (DDIS), un outil pour
diagnostiquer les troubles dissociatifs.
Que pouvez-vous nous dire à propos de
cette réalisation académique ?
Le DDIS est inclus dans le Manuel de
l’Association Psychiatrique Américaine
des Mesures Psychiatriques comme une
interview structurée valide et fiable.
Il a été traduit dans un certain nombre
de langues différentes et utilisé dans
des dizaines d’études publiées. Le DDIS
a contribué à la validation scientifique
et à la compréhension des troubles
dissociatifs.
Vos recherches sur les
troubles de dissociation avancent-elles
?
Oui. J’ai des projets de recherche en
cours, des articles dans la presse et
des articles à l’étude pour des revues.
Votre livre «Portrait of
Norman Wells» m’a fait penser à Jack
London et ses aventures dans le
Klondike. Est-ce votre vie dans
l’arctique canadien qui vous a placé sur
ce parcours impressionnant consacré à la
recherche scientifique et à la quête de
savoir ?
Je pense que mon expérience dans
l’Arctique canadien a contribué à ce que
j’aie un large éventail d’intérêts et
que je sois un être humain plus
équilibré. Mes domaines d’intérêt que
j’ai publiés comprennent la psychiatrie,
les champs d’énergie humaine, le cancer
et la littérature créative, y compris la
poésie.
Vous avez été président de
la Société
internationale pour l’étude des
Traumatismes et de la Dissociation. Quel
bilan faites-vous de votre passage dans
cette organisation ?
J’ai reçu un certain nombre de prix
de l’ISSTD (International Society
for the Study of Trauma and Dissociation)
et je suis généralement considéré comme
un chef de file dans le domaine. Je suis
présent à la conférence annuelle de
l’ISSTD chaque année depuis sa création
en 1984.
Vous êtes président du Colin
Ross Institute à Dallas. Pouvez-vous
nous parler des missions de cet institut
?
La mission est de fournir le
traitement, la consultation, l’éducation
et la formation sur le trauma
psychologique et ses conséquences.
Interview réalisée par Mohsen
Abdelmoumen
Qui est le Docteur Colin Ross
?
Le Dr. Ross est un psychiatre,
clinicien, chercheur, auteur et
conférencier de renommée internationale
dans le domaine de la dissociation et
des troubles liés aux traumatismes. Il
est le fondateur et président de
l’Institut Colin A. Ross pour le
traumatisme psychologique.
Le Dr. Ross a obtenu sa maîtrise en
médecine de l’Université d’Alberta en
1981 et a complété sa formation en
psychiatrie à l’Université de Manitoba
en 1985. Il dirige un programme
hospitalier de traumatisme à Dallas, au
Texas, depuis 1991.
Le Dr. Ross a écrit plusieurs
ouvrages dont :
The Trauma Model: A Solution To the
Problem of Comorbidity in Psychiatry,
première publication en 2000 avec une
seconde édition en 2007;
Dissociative Identity Disorder
(2è édition en 1996, première édition
intitulée Multiple Personality
Disorder, 1989);
Satanic Ritual Abuse – Principles of
Treatment (1995);
Bluebird: Deliberate Creation of
Multiple Personality by Psychiatrist
(2000);
Schizophrenia: Innovations in Diagnosis
and Treatment (2004);
The C.I.A. Doctors: Human Rights
Violations by American Psychiatrists
(2006);
Moon Shadows: Stories of Trauma &
Recovery (2007);
The Trauma Model – A solution to the
Problem of Comorbidity In Psychiatry
(2007);
The Great Psychiatry Scam: One Shrink’s
Personal Journey (2008);
Trauma Model Therapy: A Treatment
Approach for Trauma, Dissociation and
Complex Comorbidity (2009),
Military Mind Control: A Story of Trauma
and Recovery(2009);
Human Energy Fields: A New Science of
Medicine (2011);
The Rape of Eve (2014), etc.
En outre, le Dr. Ross a rédigé plus
de 170 articles professionnels, a publié
dans de nombreuses revues
professionnelles et des organismes
subventionnés et a été président de la
Société internationale pour l’Étude des
Traumatismes et de la Dissociation. Il
est apparu dans un certain nombre de
documentaires télévisés et a publié des
essais, des aphorismes, de la poésie,
des histoires courtes et des scénarios.
Le Dr. Ross est réputé pour
communiquer des informations complexes à
divers publics professionnels sur une
variété de sujets, tels que : la
psychologie de la dissociation, le
traitement du trouble dissociatif de
l’identité, psychothérapie des cas
complexes de traumatisme comorbide ; une
science des champs d’énergie humaine ;
un modèle structurel dissociatif de la
Psyché ; la CIA et la recherche sur le
contrôle mental militaire ; le problème
de l’attachement à l’auteur d’abus sur
les enfants ; les effets à long terme de
la violence faite aux enfants ; un
modèle de traumatisme du trouble
borderline de la personnalité ; ce que
vous devez savoir sur les médicaments
psychiatriques ; un sous-type
dissociatif de la schizophrénie ;
traumatismes de l’enfance et toxicomanie
; traumatisme et dépression ;
traumatismes de l’enfance et troubles de
l’alimentation ; la vitamine D et les
hormones dans la santé et la maladie.
Le site de l’Institut Colin Ross
Published in English in American
Herald Tribune March 01, 2017:http://ahtribune.com/human-rights/1528-colin-ross.html
In Oximity:https://www.oximity.com/article/Dr.-Colin-Ross-Les-m%C3%A9decins-cr-1
Reçu de l'auteur pour
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