Opinion
Pourquoi je ne suis pas « solidaire »
de Kamel Daoud ?
M. Yefsah
Mardi 23 décembre 2014
« Non, le chroniqueur n'est pas "solidaire" de
la Palestine » (Quotidien d'Oran du
12 juillet 2014). C'est la première
phrase de la chronique de Kamel Daoud en
plein massacre de la population de Gaza
par l'armée israélienne. Ici, non plus,
le « chroniqueur » n'est pas
« solidaire » de Kamel Daoud. Ce dernier
a épilogué sur la solidarité au moment
même où les enfants de Gaza se faisaient
déchiqueter par des bombes dans des
écoles-refuges, les habitations
détruites, des familles déchirées et des
vies arrachées avec barbarie. Sa révolte
était focalisée sur les musulmans et pas
sur ceux qui collaient le sang des
Palestiniens. Daoud ergotait sur le
Hamas et toute honte bue sur
« l'humanité » d’Israël qui présentait
ses condoléances aux familles victimes
de ses bombes. Quel cynisme ! Il ose
d'ailleurs insinuer que les solidaires
avec la Palestine étaient « amateurs des
lapidations », oubliant l'indignation
qui s'était exprimée partout dans le
monde.
Le « chroniqueur » ici ne peut pas non
plus parapher son nom sur une pétition
signée par un Bernard-Henri Lévy,
personnage sulfureux, soutien
inconditionnel d'Israël, promoteur des
guerres impérialistes et qui ne peut
rien envier au salafiste Abdelfattah
Zeraoui Hamadache. Pour être plus
précis, ce dernier a appelé l'Etat
algérien à appliquer la charia, du moins
son interprétation, sur Daoud en le
condamnant à mort. Il est plus dans une
revendication politique que dans une
« fatwa », contrairement à ce qui se
raconte et chose qu'il confirme lui-même
ultérieurement. Le sot Hamadache est
dans son rôle. Mais l'indignation semble
plutôt surprenante de la part de ceux
qui dînent ou serrent la main des
anciens terroristes et qui viennent
faire la morale aux Algériens de la
solidarité « obligatoire » à manifester
à Daoud.
Ce dernier glose aujourd'hui sur le sens
de la haine, quand ses chroniques sont
une dynamite d'animosité, d'aversion et
d'hostilité envers les Arabes qu'il
infantilise, des musulmans qu'il
fanatise, des Chinois qu'il moque, des
classes populaires qu'il exècre, de
l'Algérie qu'il triture... Daoud confond
la critique – droit que personne ne doit
lui enlever – et l'insulte. Il a
d'ailleurs une chronique journalière où
il peut exprimer ce qu'il veut. Mais il
a attendu d'être en France pour tenir un
discours conventionnel et des poncifs
sur l'islam, alors que les musulmans
sont en premier victimes de
l'intégrisme.
Cette même haine constitue le fût de son
récit, Meursault, contre-enquête,
où il a imaginé le personnage de
l'Arabe, du roman L’Étranger d'Albert
Camus, vengé par son frère, poussé par
une mère malveillante, pathétique,
castratrice. Symboliquement, c'est
l'Algérie qui cherche à se venger de la
France, plus d'un demi-siècle après son
indépendance ! On comprend facilement
l'accueil réservé à ce récit mineur.
Hamadache et Daoud ont un point en
commun : des haines et des frustrations,
la matrice idéologique de la droite
fascisante, mais chacun à sa sémantique.
Ils sont des professionnels de la
lapidation avec des mots.
M. Yefsah
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