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Ukraine: le temps de l’argent facile
touche à sa fin
Mikhail Gamandiy-Egorov
© Sputnik.
Alexander Demyanchuk
Jeudi 29 mars 2018
Source:
Sputnik Après des années à
bénéficier des revenus stables et
importants de la rente gazière russe,
l’Ukraine doit se préparer à un réveil
douloureux. Cette manne devrait en effet
se tarir ou du moins considérablement
diminuer. L’Occident, qui a encouragé le
divorce entre Kiev et Moscou, devra en
assumer les conséquences.
Les années passent,
la rhétorique russophobe atteint
désormais son summum au niveau des
élites de Washington, mais aussi de tous
leurs affidés —la fameuse
affaire Skripal n'en est qu'un
épisode supplémentaire. Les satellites
étasuniens ont beau reprendre en chœur
les chants antirusses, il suffit que
leur portefeuille soit menacé pour
qu'une vive inquiétude s'installe…
C'est notamment le
cas du pouvoir de Kiev, issu d'un coup
d'État armé soutenu par l'Occident.
L'année 2019 approche et avec elle la
perspective de la fin du transit gazier
russe via le territoire ukrainien, qui
ne sera utilisé dans le meilleur des cas
qu'en qualité de hub supplémentaire avec
des volumes nettement moins importants
que ce n'était le cas jusqu'ici. Et même
ces volumes réduits d'au moins quatre
fois ne seront aucunement garantis.
Et malgré toutes
les belles promesses faites à l'Ukraine
par Washington et Bruxelles sur leur
avenir commun «radieux», ces derniers ne
souhaitent vraisemblablement guère en
prendre la responsabilité économique.
Alors que la diminution significative
des relations à tous les niveaux entre
Kiev et Moscou a considérablement
désavantagé en termes économiques la
première, mais pas la deuxième, le fait
de devoir sur le court terme perdre près
de 3 milliards de dollars annuels
supplémentaires ou l'équivalent de 3% du
PIB ukrainien (selon l'aveu de
l'ambassadrice étasunienne en poste à
Kiev) n'arrange en rien les choses.
En passant, le
montant de ces recettes annuelles que
l'Ukraine reçoit grâce au transit du gaz
russe est plus ou moins équivalent au
budget annuel ukrainien de l'éducation
et dépasse de 1,5 fois les dépenses
destinées à la santé, au sport et à la
protection de l'environnement. Ajoutez à
cela les millions de crédits qui pèsent
sur le budget ukrainien et que Kiev ne
peut simplement pas rembourser, et vous
comprendrez les peu radieuses
perspectives du régime de Kiev.
Au sud, les travaux
du gazoduc Turkish Stream reliant la
Russie à la Turquie —le deuxième
principal marché gazier pour Gazprom-
via la mer Noire, avancent rapidement.
La première conduite est destinée à
acheminer le gaz russe sur le marché
turc, la deuxième fournira en gaz
plusieurs pays de l'UE en passant par la
Turquie —permettant par la même occasion
à cette dernière de devenir un important
hub gazier. En mars 2018, 53% des deux
conduites de la section offshore du
gazoduc avaient déjà été installées et
tant Moscou qu'Ankara souhaitent que le
Turkish Stream soit opérationnel aussi
vite que possible. Techniquement, il
n'existe aucune raison pour que le
projet soit retardé, surtout connaissant
le degré d'indépendance du gouvernement
turc, malgré l'appartenance du pays à
l'Otan.
Pour sa part, le
projet Nord Stream 2, qui a pour
objectif de doubler d'ici fin 2019 les
capacités de son «grand frère» Nord
Stream 1, qui passe sur le fond de la
mer Baltique, avance bien. Berlin vient
de donner son feu vert pour la
construction du pipeline sur les 31 km
appartenant à la zone économique
allemande. Et malgré une pression
étasunienne sans précédent en vue de
faire retarder ce projet à tout prix,
avec le soutien de ses «meilleurs»
satellites européens —en l'espèce, la
Pologne et des pays baltes- le fait est
que le pragmatisme économique allemand
semble de plus en plus prendre le
dessus. Évidemment, c'est tout sauf
l'amour pour la Russie qui motive
Berlin, mais bel et bien l'absence
d'alternative digne de ce nom en termes
du rapport prix/logistique/sécurité de
l'approvisionnement gazier. Sachant que
l'Allemagne est elle-même un très grand
consommateur de gaz, et malgré tout
«l'amour» que Berlin dit porter à Kiev,
notamment en termes de «solidarité»
antirusse, il est évident que sa
priorité est d'assurer ses habitants en
chauffage à un tarif raisonnable plutôt
que de penser aux gains, ou plutôt aux
pertes économiques ukrainiennes. C'est
connu, les Allemands savent très bien
compter.
Bien sûr,
Washington comme Bruxelles auraient
souhaité maintenir aussi longtemps que
possible cette relation de
gagnant/perdant: faire miroiter le rêve
occidental à Kiev tout en poursuivant
leurs avancées géopolitiques et en
maintenant l'Ukraine ne serait-ce qu'un
minimum à flot avec l'argent de la
«méchante» Russie.
Eh bien non. Soyez
responsables de vos promesses, messieurs
et mesdames de l'establishment
occidental. Si, comme vous le prétendez,
le «meilleur» avenir se trouve à
l'Ouest, prouvez-le par les faits, et
surtout par des opportunités économiques
réelles pour les pauvres Ukrainiens. On
connaît cependant déjà le résultat: la
Géorgie et la Moldavie, qui ont
également misé sur l'intégration
atlantiste n'ont pas mis longtemps pour
finalement vouloir raviver au maximum
leurs relations économico-commerciales
avec la Russie.
Pour finir, une
simple question logique: comment se
fait-il que le pays qui à la chute de
l'URSS était la république ex-soviétique
la plus développée économiquement —oui,
oui, il s'agit bel et bien de l'Ukraine-
ait pu si rapidement se retrouver dans
un tel marasme économique? Et le comble,
c'est que c'est depuis l'intégration
«historique», annoncée en grande pompe,
avec l'Occident et le divorce avec la
Russie, que la situation économique et
sociale est la plus terrible, mettant
l'Ukraine au niveau de certains des pays
les plus pauvres du monde. À méditer.
Peu étonnant d'ailleurs que le
rêve à l'occidentale impressionne de
moins en moins de peuples du monde, y
compris leur jeunesse. Le temps des
illusions appartient au passé. Pour le
reste, il est aujourd'hui évident qu'il
faut toujours réfléchir deux à trois
fois avant de cracher dans sa soupe.
Quant aux technocrates occidentaux, vos
ambitions géopolitiques, vous les
paierez de votre propre poche.
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Tous droits réservés.
Publié le 29 mars 2017 avec l'aimable autorisation de l'auteur.
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